Ainsi donc la France est la première nation du monde en terme de concentration de riches par habitant, si l'on se fit à la dernière étude du Crédit Suisse. Personnellement cette affirmation ma fait bien rire, surtout lorsque l'on voit que la fabuleuse richesse du pays s'est surtout accrue entre 2002 et 2009. A croire que le Crédit Suisse embauche des cancres comme comptables. En effet cette période est caractérisée par une bulle immobilière incroyable nourrit par une inflation monétaire issue de la BCE . On rappellera ainsi que depuis la mise en place de l'Euro on a assisté à une hausse de la masse monétaire moyenne de 8% par an! C'est à dire largement plus que la hausse du PIB. Mais cette hausse de la masse monétaire, non liée à la croissance réelle, au lieu de produire une inflation des prix à la consommation, a produit une hausse des prix de l'immobilier.C'est l'effet mondialisation qui par l'accroissement de la concurrence salariale à l'échelle mondiale à rendue impossible toute hausse des salaires et des prix à la production chez nous. Ce faisant la hausse de la masse monétaire s'est transférée dans le secteur de l'immobilier. Les organismes de crédit ne sont pas non plus innocent dans le phénomène, sans oublier la politique des taux unifiés à l'échelle de l'eurozone. Ce qui faisait dire il n'y a pas longtemps à Emmanuel Todd que la hausse de l'immobilier est une nouvelle forme d'inflation.
Mais comptabiliser cette hausse des prix et faire une addition de la valeur du patrimoine pour calculer la richesse d'un pays est stupide. Car cette richesse liée à la valeur d'un bâtiment n'est réelle que le jour où l'on vend. C'est seulement lorsqu'il y a échange qu'il y a création de valeur. Lorsque l'on sait que sur la même période les salaires on fait du surplace quand les prix de l'immobilier ont plus que doublé entre 2002 et 2009, on comprend bien que les acheteurs ne seront pas forcement au rendez-vous. En fait tant que personne ne vend les prix peuvent grimper à l'infinie, c'est lorsqu'un imbécile à l'idée saugrenue de croire que son bâtiment à réellement la valeur de l'étiquette, alors que le chômage bat des records, que l'industrie s'en va à l'étranger, que les choses se gâtent pour le faux marché. Car s'il y a bien un marché qui montre son inefficacité c'est bien celui de l'immobilier. Je me rappelle en pleine bulle, vers 2006, que, me baladant dans ma bonne ville de Montpellier avec un bon amis j'avais déclaré à ce dernier " C'est dingue les prix des villas sont les mêmes que lorsque j'étais gosse dans les années 80-90, sauf que à l'époque ils étaient exprimés en franc". Moyennant quoi nous étions surpris par l'explosion du nombre d'agences immobilières en tout genre. Les banques et les agences immobilières remplaçant les bons vieux commerces et les cafés dans tout le centre ville. Ma pauvre ville a bien été défiguré depuis le début des années 2000.
Quoiqu'il en soit cette richesse est complètement fictive, l'immobilier ne créé rien en lui même. Faut-il vraiment ne rien comprendre au monde réel pour croire un instant que la France s'est enrichie à un tel point depuis 2000. L'autre facteur qui rend absurde le calcul du Crédit Suisse c'est la monnaie. Évidemment un pays dont la monnaie s'apprécie obtient un niveau de vie comparativement plus élevé que celui d'un pays dont la monnaie se dévalue. Sauf que tout ceci n'est qu'illusion comptable, c'est bien pour çà que les économistes se cassent la tête pour trouver des instruments qui évacuent les variations monétaires incessantes produites par les taux de changes flottants. En effet quand une monnaie varie, elle change les rapports commerciaux vis à vis de l'étranger, mais pas à l'intérieur des frontières du pays qui dévalue. Que l'euro se dévalue de 50% et votre saucisson auvergnat ou votre pizza acheté au coin de la rue aura toujours le même prix. Par contre il y a des chances que vous payiez plus cher les produits importés. A l'inverse que la monnaie voit sa valeur augmenter et le prix des importations diminueront . Mais pour ce qui est de l'immobilier, secteur qui nous intéresse ici, cela ne change rien dans l'absolue, un habitant de Tokyo n'en a rien à faire du prix du logement à Paris et vis versa. Donc dire que la richesse d'un pays augmente parce que la valeur du patrimoine immobilier augmente, essentiellement à cause de la hausse de l'euro, c'est complètement idiot puisque les seuls acheteurs de logements français sont essentiellement les français eux mêmes. A la rigueur si nous vendions la France aux chinois avec tout les bâtiments alors oui l'appréciation monétaire nous enrichirait, mais où irions nous vivre?
Au fait pour ceux qui douteraient par, pur hasard, de la bulle, regardons le friggit. C'est le rapport entre le coût du logement et les revenus disponibles, voir le graphique ci-dessous, c'est assez parlant il me semble:
Comment éliminer la bulle immobilière?
Terminons avec cette question: Comme mettre fin à la création des bulles immobilières? C'est une question qui devrait aujourd'hui titiller nos élites, mais comme dans le cas de la finance, il faut accepter cet réalité, le marché ne fonctionne pas de manière auto-régulé. En dehors de toute règle d'organisation, de limites qui lui soient extérieures, le marché ne permet pas l'adéquation entre l'offre et la demande. Si le marché suivait la loi de l'offre et de la demande jamais les prix des loyers ne se seraient autant éloigné des moyens des citoyens. Il faut aussi rappelé qu'en aucun cas la démographie ne peut expliquer la situation actuelle. On pourrait expliquer par exemple qu'une explosion démographique ou un changement majeur dans la proportion de la population puisse produire des variations massives du marché du logement. En réalité c'est dans les années 70-80, à l'époque où les babyboomers sont arrivés à l'age adulte qu'une forte augmentation aurait du se produire. Mais il n'y a pas eu de bulle à l'époque les salaires augmenter et les loyers suivait l'inflation, ils perdaient même du terrain si l'on se fit au graphique ci-dessus. En réalité il a fallut attendre les dérégulations dans le domaine du logement et de la fixation des prix pour connaitre les fabuleuse propriété d'autorégulation imaginaire des marchés. Aujourd'hui la population français ralentit énormément et même un afflux énorme d'immigrés ne pourrait permettre le maintient artificiel de la hausse de la demande en logement. Dans un pays qui manque de jeune et qui construit et à d'ailleurs trop construit contrairement à la légende, les prix devraient s'effondrer. Ils n'auraient en tout cas jamais du grimper autant c'est bien le marché en lui même qui ne fonctionne pas.
Quelques mesures simples permettraient pourtant de mettre fin à ces illusions de richesses, qui produisent des salariés SDF et des propriétaires sur-endettés, mais ces solutions sont forcement contraire à l'esprit du laissez-faire. Par exemple la simple indexation des prix du logement sur l'inflation officielle mettraient fin aux déconnexions entre les prix et les moyens des salariés. Ainsi on décrèterait que les loyers et les prix ne pourraient en aucun cas augmenter plus vite que l'inflation mesurée par l'INSEE de l'année précédente . On pourrait également imaginer imposer une limitation du droit de propriété pour empêcher la création de dynasties de propriétaires. Là encore on ne doit posséder un logement que si il nous est essentiel pour vivre, un logement ne doit pas être une source de revenue ou une rente de situation. Comme dans le cas de la spéculation dans les matières premières ou la nourriture, bon nombre d'acteurs dans l'immobilier n'y viennent que par intérêt spéculatif. Ils achètent parce qu'ils pensent que les prix vont augmenter et non parce qu'ils ont besoin d'un logement. Or le principe de base du marché est que l'acheteur ou le vendeur sont avant tout intéressé par la chose qu'ils vendent ou qu'ils achètent et non uniquement par le revenu qu'ils pourraient en tirer. La spéculation est finalement assez contraire à l'esprit du marché tel qu'il avait été imaginé à l'origine, ou tel qu'il apparait dans ses aspects théoriques. Considérer la spéculation comme une mécanisme naturel du marché c'est oublier que la base du marché c'est l'échange en vue d'acquérir non de l'argent, mais des biens ou des marchandises. Le passage du marché d'échange au marché spéculatif c'est la mise en pratique du passage célèbre de Marx de M-A-M vers A-M-A. C'est à dire que l'on passe d'un marché dans lequel l'argent n'est qu'un moyen d'échange visant à obtenir des biens ou un logement, à un marché dans lequel la marchandise n'est qu'un moyen d'échange pour obtenir de l'argent, c'est fondamentalement différent.