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10 février 2011 4 10 /02 /février /2011 22:00

  31619-canne-vieux-vieilles.jpgJ'ai souvent parlé ici du risque inhérent à un déclin démographique de longue duré d'un point de vue économique, surtout si ce déclin est très prononcé. Une natalité inférieure à 1.8 enfants par femme entraînant une baisse de la population active trop rapide pour maintenir une activité économique intérieure suffisante. Mais ces difficultés sont vrai dans le cadre d'une économie relativement fermée, produisant ce qu'elle consomme. En effet dans cette configuration la baisse tendancielle de la population produit un pessimisme dans l'investissement, les entreprises anticipant la baisse de la demande. Comme l'avait souligné Keynes à son époque, la question démographique est au coeur de la dynamique de long terme d'une société. Elle entraîne des prévisions futurs et des comportements de masse qu'il est bien difficile d'inverser une fois qu'un chemin difficile  est emprunté. De la même manière qu'une expansion trop rapide la population est nuisible pour la hausse du niveau de vie de la population, une baisse trop forte entraînera aussi des effets dramatiques. Sauf évidemment si le pays dans lequel se passe cette baisse exporte ses problèmes de demande intérieure. En réalité il se peut que dans le contexte actuel de la mondialisation, les pays en déclin démographique aient un avantage économique de long terme pour plusieurs raisons que je vais  tenter d'expliciter.

 

Démographie et croissance économique

 

L'expansion démographique représente une bonne part de la croissance économique d'un pays mais le lien n'est pas automatique. Une expansion trop forte comme l'a été celle de l'Afrique au 20ème siècle peut conduire à des pénuries et à un manque d'investissement de capital par tête, situation qui ne permet pas de faire les investissements nécessaires à la hausse du niveau de vie de la population. L'un des grands problèmes de l'Afrique étant une croissance trop rapide de la population, même si la natalité commence enfin à baisser, il faudra encore quelques décennies avant que le rythme démographique soit compatible avec un réel développement.  L'historien et économiste Paul Bairoch avait estimé en se basant sur l'expérience historique, que la croissance démographique naturelle d'un pays ne devait pas excéder 1% par an pour pouvoir soutenir une expansion économique de type industriel. Si l'expansion démographique d'un pays peut soutenir la croissance du PIB c'est donc avec une limite au-delà de laquelle elle nuit plus qu'autre chose. En effet  une croissance démographique trop importante signifie une pyramide des âges avec une base extrêmement large, c'est à dire une proportion de jeunes à charge très importante en regard du nombre d'actif. Il est évident que passé un certain seuil, l'on se retrouve avec trop d'élèves dans les classes et pas assez d'investissement pour   fournir du travail à cette futur main d'oeuvre plus tard, alors même que leur niveau scolaire sera insuffisant pour obtenir des gains de productivité. Bref, si chaque habitant supplémentaire représente deux bras de plus pour produire et donc avoir de la croissance de la production, c'est aussi une bouche supplémentaire à nourrir qui ne produit rien pendant au moins les 20 premières années de sa vie.  A cela s'ajoute la question écologique des limites physiques de notre monde, avoir plus d'agriculteurs ne sert à rien si vous n'avez pas de terres supplémentaire à cultiver ou une hausse des rendements agricoles. Avoir plus d'ouvriers ne sert à rien si vous ne pouvez pas augmenter la production par manque de matières premières ou d'énergie.

 

    A ces limites on pourrait également dire que vouloir de la croissance pour avoir de la croissance n'a rigoureusement aucun sens. En effet si le seul moteur de la croissance économique est le fruit de l'augmentation de la population cela signifie que le niveau de vie stagne, le PIB est plus gros mais le PIB par tête est le même. On consomme juste plus d'énergie et de matières premières c'est tout. La seule croissance qui soit réellement un plus est celle qui est le fruit de la hausse de la productivité du travail, celle-là seulement produit une hausse du niveau de vie réel. Maintenant il est vrai aussi que nos nations sont en compétition et qu'une population plus importante ainsi qu'un PIB plus lourd peut être motivé par des simples questions de rapports de force  géostratégiques. Autre point, il faut également que cette hausse de la population soit accompagnée d'une augmentation de l'investissement concomitant pour produire les emplois nécessaires à l'absorption de la population . C'est d'ailleurs la même chose pour la hausse de la productivité, celle-ci ne  produit de la croissance que si la demande est augmentée soit pas la hausse des salaires soit par l'endettement public ou privé. Sans cela la hausse de la population ou la hausse de la productivité ne produisent que du chômage. La hausse de la population entraîne la hausse des besoins dans tout les domaines elle facilite la croissance de la demande mais il faut bien voir que la hausse de la demande n'est une chance que si celle-ci peut-être augmenter, si cela a été possible jusqu'à présent il n'en sera peut-être pas de même à l'avenir.

 

  A l'inverse la baisse de la population entraîne un changement dans la mécanique économique globale d'un pays. Dans un régime démographique négatif, la demande à tendance à s'étioler. La seule source de croissance étant maintenant les gains de productivité et la hausse des salaires qui doit l'accompagner si tout va bien, la croissance dans ce contexte devient beaucoup plus faible surtout si la décroissance démographique est trés rapide. Il faut cependant plusieurs décennies entre le passage de la natalité sous le seuil de reproduction, et la visibilité macro-économique de ce changement de régime démographique. Cette baisse à pour principal inconvénient la contraction de la demande sur le marché intérieur, les investissements suivent généralement cette baisse en l'anticipant. Contrairement à une idée reçues cette baisse de la population active ne réduit pas forcement le chômage, tout dépend en fait de l'adéquation entre l'offre et la demande, comme d'habitude. Un pays peut très bien avoir du chômage même en étant en déclin démographique, il suffit pour cela que les entreprises se mettent à surestimer les effets de la baisse de la demande en réduisant trop leurs investissements pour provoquer du chômage. Les marchés libres sont de toute façon toujours dans l'erreur seul une politique macro-économique des états permettent d'en réduire les déséquilibres. 

 

L'exemple démographique allemand 

 

A l'heure actuelle il y a deux grand pays dans le monde qui connaissent un déclin démographique rapide l'Allemagne et le Japon. L'Allemagne est l'exemple le plus important pour nous puisque nous avons le malheur de partager la même monnaie alors que nos démographies divergent sur le long terme. Et les effets de cette divergence vont comme nous allons le voir produire des effets extrêmement  important sur nos rapports commerciaux. Parlons tout d'abord de la démographie allemande,  le graphique suivant montre l'évolution sur le long terme de la population de ce pays. Il faut espérer cependant que les estimations futurs ne se réaliseront pas et que les autorité allemandes réussiront un jour ou l'autre à redresser la natalité car si l'on prolonge longtemps une telle démographie on finit par arriver à zéro.

 note cerfa 1

 En 2050 il ne devrait plus y avoir que 50 millions d'allemands si l'on ne compte pas bien sûr avec l'immigration ou une possible relance de la natalité. Quoiqu'il en soit la population dans ce pays a déjà commencé à décroître et le premier effet a été de faire de l'Allemagne un pays à faible croissance économique. A cela s'ajoute bien évidement les effets des politiques néolibérales  qui ont fait dans ce pays les mêmes dégâts qu'ailleurs dans les pays développés. Mais l'Allemagne apparaît bien comme l'un des pays européens avec la plus faible croissance ces dernières décennies, c'est la même chose pour le Japon qui n'arrive pas à sortir véritablement de la déflation. Pour compenser leur décroissance démographique ces deux pays auraient du augmenter les salaires, notamment les chez plus bas revenues pour maximiser leur propension à consommer. Face à un déclin démographique, il faut en effet impérativement augmenter le plus possible les revenues des moins riches pour augmenter la demande au maximum, il aurait donc fallu que l'Allemagne et le Japon réduisent leurs inégalités pour compenser la baisse de la population par un surcroît de consommation. Ils ont malheureusement fait l'inverse sous l'influence du modèle anglo-saxon et des chimères néolibérale. Et ont décider de nourri leur croissance par les exportations ceux qui provoque des crises dans d'autres pays et ne manquera pas de finir par provoquer des conflits avec les pays déficitaires. 

 

  L'un des effets les plus spectaculaire de la baisse de la démographie sur l'économie de ces pays est l'évolution caractéristique de leur marché immobilier. Alors que ces deux pays ont eu les mêmes politiques macro-économique de libéralisation financières et de dérégulation, ils n'ont pas connu de bulle spéculative dans l'immobilier.

 

 priximmocomp.jpg

 

Ce n'est pas parce que leur économie fut plus raisonnable ou plus sage, les mêmes idées parcours les deux rives du Rhin. Les capitaux allemands qui ont explosé comme ailleurs, sous l'effet de la hausse des inégalités et des importations en provenance des pays à bas salaires, n'ont tout simplement pas trouver de raisons de s'investir dans la pierre dans un pays où la demande de logement est obligée de décliner avec la population. La spéculation ne peut exister que s'il y a tout de même une maigre raison de spéculer à la hausse, en Allemagne l'immobilier n'est pas vraiment un secteur d'avenir. IL faudra réduire énormément le parc immobilier avant de produire une hausse des prix surtout en Allemagne de l'Est. Le Japon a eu la même évolution avec une économie structurellement différente, si ces deux pays converge c'est à cause d'un phénomène similaire, celui de la démographie en déclin.

 

 

Les effets sur le commerce extérieur

 

      Maintenant que l'on a vue quelques effets sur la croissance économique et sur l'immobilier de la baisse démographique, venons en au coeur de ce texte, les effets sur le commerce extérieur de la baisse de la population. Si la baisse conduit à une moindre croissance intérieure, elle a par contre quelques avantages dans le cadre d'une économie mondialisée. En premier lieu la baisse de la population permet un plus fort investissement dans l'éducation des jeunes, il y a  moins d'enfants mais ils sont mieux éduqués grâce à un investissement par tête plus élevé. C'est un avantage indéniable qui était d'ailleurs déjà celui des pays occidentaux par rapport au reste de la planète, l'éducation étant au coeur du développement humain. Cet avantage permet aux pays à démographie déclinante d'avoir des gains de productivité plus élevé grâce à un niveau d'investissement plus fort pour chaque individu. Cela se traduit commercialement par une monté en gamme dans le niveau technique de la production du pays, ce n'est pas un hasard si l'Allemagne ou le Japon ont, pour l'instant, mieux résisté à la montée en puissance de la Chine. Leur démographie leur permet plus facilement de réaliser le fantasme de la société du savoir, même si cette dernière est une chimère à long terme. La Chine va rapidement rattraper techniquement les pays les plus avancés même avec leur avantage démographique momentané.

 

  Le deuxième effet positif d'un point de vue commercial, c'est la baisse progressive des besoins et donc des importations que ce soit en matière premières ou en énergie.  Au moment où le prix des matières premières flambent avoir une démographie chancelante peut-être un avantage, la baisse de la demande compensant, en quelque sorte, la hausse des prix cela permet de ne pas avoir une dégradation de la balance des paiements. Ensuite la baisse de la population permet de faire baisser le niveau nécessaire d'investissement dans les infrastructures. Les moyens ainsi économisés peuvent servir à d'autre objectifs comme la recherche scientifique, technique et l'investissement dans l'amélioration productive. Enfin la baisse de la population et la dépression qu'elle crée sur le marché immobilier va avoir un effet positif sur la compétitivité externe du pays. En effet comme on l'a vue sur le graphique représentant le lien entre le revenu et l'immobilier il faut de moins en moins d'argent pour obtenir une même surface immobilière en Allemagne ou au Japon. Cela signifie que même si les salaires stagnent, le pouvoir d'achat lui va continuer à augmenter grâce à la baisse des prix dans l'immobilier. Un pays comme l'Allemagne peut donc tout à fait avoir une politique de baisse salariale, ou de stagnation sans que la population en ressente les effets négatifs sur son niveau de vie. Dans le cadre de la zone euro où les autres pays ne peuvent dévaluer, c'est un avantage considérable sur le plan de la compétitivité commerciale. L'Allemagne peut baisser les salaires sans trop craindre de  faire baisser le pouvoir d'achat local. Enfin cette baisse de l'immobilier évite aux capitaux d'aller s'investir dans la pierre qui finalement ne rapporte pas grand chose, il est peut-être là le secret de l'investissement industriel allemand. Les allemands investissent dans l'industrie parce qu'il n'y a pas d'autres débouché rentable pour le capital dans le pays. En France par contre investir dans l'immobilier était nettement plus rentable ces dix dernières années cela a du avoir un effet sur la compétitivité industrielle du pays.

 

 

En conclusion

 

  On voit bien maintenant que les évolutions démographiques vont avoir des effets différents suivant les conditions économiques du moment. En régime relativement fermé, c'est à dire dans une économie où l'essentiel est produit localement, la baisse de la population rend la gestion de l'économie difficile, on peut même dire qu'elle devient impossible passé un certain rythme de baisse. A l'inverse dans une économie mondialisée en étant en compétition avec des pays émergent dont le niveau de productivité rattrape rapidement le notre, avoir une démographie déclinante est un avantage commercial relatif. Le pays qui connaît une baisse de sa population peut en exporter les effets parce que cette baisse de la population produit de avantages en terme de productivité et de coût de production. L'Allemagne a une stratégie qui est finalement bien adaptée à sa situation démographique, pour continuer à croître elle substitue les exportations à sa demande intérieure en jouant sur les avantages que cette démographie lui donne. Bien évidement cette politique produit des excédents  commerciaux chez elles, et des déficits chez les autres. Il est certains qu'à court terme c'est une bonne stratégie, cependant on peut douter de la durabilité de ce modèle, les autres pays devant un jour ou l'autre réagir ne serait-ce que pour ne pas avoir d'émeute ou de révolution sur les bras. A ce moment là, le jour où la mondialisation se terminera on peut craindre le pire pour l'économie allemande, l'avantage se transformant subitement en contrainte. On peut comprendre tout de même en ayant à l'esprit ces effets de l'évolution démographique, pourquoi les élites allemandes sont tant obsédées par les exportations et le libre-échange. La fermeture commerciale des autres pays de l'UE serait une véritable catastrophe pour l'économie germanique. Ces évolutions nous permettent également d'imaginer le désastre que représentera pour la planète le futur déclin démographique chinois qui viendra vers 2030. Imaginez les effets d'une évolution démographique similaires à celle de l'Allemagne, mais pour un pays de plus d'un milliard d'habitant et qui est déjà l'usine du monde...

 

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8 février 2011 2 08 /02 /février /2011 23:08

   sisyphe.jpg Il est toujours aussi plaisant en France de faire montre de morale dans ses discours, les apparences, les idéaux d'apparat, et la rhétorique des bons sentiments étant les armes favorites de le plupart de penseurs parisiens et médiatiques. Il faut bien avouer que la morale verbale et le manichéisme ont ceci de pratique qu'ils passent bien à la télévision. On peut toujours émouvoir dans les chaumières, au ventre encore bien rempli, avec des discours larmoyants, et raconter que la bonté et les bons sentiments seules peuvent faire de la politique. Assis dans son séjour, derrière un bureau ou un écran, il est toujours relativement simple de refaire le monde sans s'inquiéter réellement des propos que l'on tient et des conséquences des idées que l'on prône. Depuis plusieurs décennies l'occident est ainsi guidé en apparence par les idéaux du bien et des idées simples, les droits de l'homme, la démocratie, le libéralisme économique, le marché "libre", la fin des frontières etc.. Tout un tas d'idées aux hypothèses simplificatrices que tout un chacun peu parfaitement accepter lorsqu'il se limite à des réflexions de court terme ne mettant en jeux aucune complexité liée au monde réel et à ses contradictions. Bien évidement ces idéaux ont souvent caché des intérêts beaucoup moins vendables sur le plan de la morale, des guerres pour la démocratie qui n'étaient qu'un cache sexe misérable pour masquer la lutte pour le pétrole. L'immigration vendu comme aide quasi humanitaire alors qu'il ne s'agissait le plus souvent que de faire baisser les salaires des emplois non encore délocalisés. On pourrait aussi parler de la mondialisation des échanges qui officiellement avait pour but d'accroître la croissance dans nos pays, mais qui a surtout servi à concentrer les revenus vers la rente et le capital par le truchement des délocalisations et du chantage salariale.

 

    Il est donc vrai que ces politiques, d'apparence morale, ont servi en réalité le plus souvent de vils intérêts, il n'en reste pas moins que bien souvent ces politiques  avaient bien les buts qu'elles affichaient.  Je ne crois pas à l'homme mauvais visant à un pouvoir total ou aux conspirations planétaires, la plupart du temps c'est le vieil adage qui s'applique, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Et ce n'est pas fini puisque l'UE l'un des plus beaux exemples de l'irrationalité des hommes lorsque la "morale" et les idéaux leur servent de guide, n'en a pas fini de faire souffrir notre continent, jusqu'à peut-être ramené la guerre. Mais l'on pourrait se demander pourquoi dans un monde censé être rationnel et guidé par la raison des dogmes et des façons de penser que l'on pensé dépassé peuvent encore produire leur méfait au plus haut niveau des états modernes. Comment des croyances peuvent encore exister dans un monde qui est théoriquement débarassé de la pensée magique? Après tout le monde moderne n'est il pas né de la raison des lumières? Mais ce monde moderne est-il bien ce qu'il prétend être? Enfin de compte avons nous réellement dépassé l'esprit magique, ou l'a-t-on seulement caché hors des apparences des croyances anciennes?

 

La fin, les moyens et les croyances

 

    La question ici n'est pas de critiquer le fait qu'il y est des idéaux, c'est très bien d'avoir de nobles objectifs et de vouloir améliorer le sort de l'humanité ou de son prochain, les problèmes commencent lorsque l'on se met à confondre les moyens et les buts.  A cette confusion s'ajoute les limites propres à la nature humaine, celle de notre capacité à appréhender le réel, car nos idées et la façon dont nous comprenons le monde n'est pas la réalité du fonctionnement de ce monde mais une représentation créée par nos propres expériences et notre mémoire. Il faut être relativement modeste lorsque l'on analyse la réalité et parfois être prêt à changer d'avis lorsque les conditions changent, et ce dans le but justement d'atteindre nos objectifs. C'est tout le principe de machiavel il faut se donner les moyens des objectifs que l'on se fixe, il ne suffit pas de faire des principes, de produire des concepts encore faut-il qu'il y est une forme de mécanisme permettant d'atteindre les objectifs visés. Il ne suffit pas de dire je suis contre le chômage ou la misère pour y mettre fin. La raison, l'esprit scientifique, l'observation sont les outils qui vont nous permettre de faire coïncider ces objectifs et ces moyens. Mais la plupart d'entre nous ont du mal parfois à bien séparer l'objet et le moyen, Jacques Ellul pensait à juste titre que la faiblesse de l'homme moderne lui venait de son absence de foi. Ou plutôt que la plupart des hommes n'étant pas prêt à vivre sans religion, ils s'en sont construite de nouvelles pour palier à l'absence de l'ancienne. Ainsi les hommes modernes se mettent-t-ils à transformer en religion les moindre politiques ou moyens pour canaliser leur besoin de croire. L'aliénation face à des idéologies,  à des politiques, proviendrait de cet affaiblissement morale liée à la mort de dieu et à l'absence de mentalité structurante. En chassant les religions classiques et notamment le christianisme,  nous aurions  en faite remis l'idolâtrie au coeur de la cité. Ainsi voit-on des idées et des outils qui ne devraient être que cela, devenir des dogmes inamovibles à l'image du libre-échange ou du productivisme. Le progrès lui même est devenu une religion, il s'est d'ailleurs confondu avec le progrès technique, comme si tout progrès technique conduisait inéluctablement au progrès humain. Là encore on a confondu la fin avec les moyens le progrès technique ou la croissance économique ne sont pas des but en eux même. Je pourrais multiplier les exemples de confusion. 

 

    Ce fait explique les incapacités apparentes des modernes à relativiser ce qui n'est la plupart du temps qu'une affaire de moyens. Par exemple les socialistes sont incapables de remettre en cause leur politique internationaliste en matière économique, alors même que cet option politique produit une contradiction avec leur volonté de produire une société plus juste. N'importe quel individu sensé peut comprendre l'impossibilité qu'il y a à vouloir avoir une société juste et égalitaire tout en ayant des frontières commerciales poreuses. Les importations de marchandises revenant à importerplus ou moins le modèle sociale des pays les produisent surtout lorsqu'ils sont moins égalitaire et les plus pauvres. Le blocage que font les gens de gauche sur la question du libre-échange est bien un blocage du type croyance et non un manque d'intelligence, ou même une affaire d'intérêt, en effet qui peut croire que le PS a un réel intérêt électoral à faire du libre-échange un des ses piliers intellectuels. Le libre-échange et le monde sans frontière étant devenu un but en soi et non un moyen, la gauche a oublié ses objectifs premiers pour devenir une adoratrice du totem mondialisation. A droite on peut aussi trouver ce type de réflexes idiots ainsi l'on vous présentera sans arrêt la concurrence comme un moyen de faire baisser les prix. L'on pourrait pourtant multiplier les exemples contraire de l'électricité aux assurances santé, mais la concurrence est devenue un marqueur identitaire pour la droite, elle l'applique sans discernement parce qu'elle a oublié là aussi que la concurrence n'était qu'un moyen et non un but. Par quelle magie des idées  politiques économiques ou philosophiques deviennent-elles des étendards d'une nouvelle foi ayant oublié le plus souvent l'objet de leur propre existence?

 

Affronter les idéologies modernes, un travail pour Sisyphe ou pour Don Quichotte

 

    Au final c'est bien Machiavel qui avait raison, mais tout les hommes n'ont pas la force de s'appliquer à réellement faire coïncider la fin et les moyens. Le drame moderne est dans la lutte acharner pour faire à nouveau triompher la raison dans un monde plongé dans des idolâtries en mutation permanente. Des solutions ou des idées limitées à quelques problèmes pouvant devenir à leur tour des idéologies inamovibles bien qu'étant fondée sur la raison à la base. A l'image du marxisme dont certains principes furent transformées en dogme à l'inverse des réflexions du fondateur de cette branche de la théorie économique. Il en va de même pour Adam Smith ou Keynes dont les prétendus descendant ont bien souvent perdu de vue l'essentiel des motivations de ces penseurs. La crise actuelle portera fatalement de nouvelles solutions au pouvoir, peut-être même aurons nous l'occasion de voir enfin de nouvelles politiques apparaître en occident. Il est par contre à craindre que ces nouvelles politiques deviendront rapidement des dogmes porteurs à long terme de nouveaux orages.  Ainsi donc les solutions rationnels que nous porterons éventuellement au pouvoir et qui seront adaptés au temps présent deviendront un jour obsolètes et dogmatiques.

 

 

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4 février 2011 5 04 /02 /février /2011 21:56

sarkozy-merkel-3-3c9bf.jpgOui je fais des titres en allemand maintenant parce que visiblement nos élites ont décidé que nous devions nous aligner sur l'Allemagne et ses choix économiques. Pour fêter l'annonce prochaine d'un quatrième Reich il me fallait bien un titre en Allemand. C'est cette dépêche de l'AFP qui vient de confirmer l'orientation de plus en plus dictatoriale et folle de l'union européenne. Quand notre président disait que l'euro était pour lui plus important que n'importe quoi d'autre il ne plaisantait visiblement pas puisqu'il a décider de mettre fin définitivement à toute liberté économique au peuple français qui devra s'aligner sur l'Allemagne quel qu'en soit le coût humain. On pourrait en rire quand on sait les simagrées que nos dirigeants font en faisant semblant de féliciter les peuples arabes de se libérer du joug de leurs oppresseurs. J'ai d'ailleurs beaucoup ri en regardant les réactions de Barosso  nous parlant de liberté d'expression, de démocratie et de droit des peuples au vote, lui qui soutient les révoltes tunisiennes et égyptiennes. En sachant que ce type est un dictateur en puissance ayant rejeté avec dédain les votes français et hollandais en 2005 on se dit que le cynisme n'a vraiment aucune limite.

 

    Quoiqu'il en soit l'idée saugrenue de croire que l'on va sauver l'euro et l'Europe en alignant tout le monde sur l'Allemagne est tellement grotesque que je me demande vraiment si nos dirigeants y croient eux mêmes, il faut croire que oui. Je soutiens d'ailleurs totalement les propos de Nicolas Dupont Aignan qui sur son blog à bien mis en garde contre le torrent de haine que ce type de politique risque de provoquer en Europe. En effet rapidement l'Allemagne sera vue comme le grand méchant absolue (alors que le peuple allemand n'y est pour rien), quant aux allemands qui en prennent plein la figure et qui voient leurs revenus stagner depuis plus de dix ans, ils n'auront pas de mots assez dure pour accuser leurs élites d'irresponsabilité. Eux qui sont vue comme gaspillant les deniers allemands durement acquis à soutenir des pays qu'ils estiment fainéant, car  malheureusement c'est bien souvent ainsi que les libéraux doctrinaires présentent les choses y compris en Allemagne.  On voudrait produire une guerre et des tensions en Europe que l'on ne s'y prendrait pas mieux autrement.  Et c'est d'autant plus grotesque que l'on ne voit pas en quoi la contrition économique du continent pourrait amener à plus de croissance. On assistera simplement à un transfère des excédents d'un coin à l'autre du continent dans une espèce de jeu de ping pong commercial géant. Le champion allemand verra ses excédents fondre quand d'autres verront les leurs augmenter, mais pendant ce temps là le chômage continuera de grimper sur tout le continent la demande continuant à diminuer. Et la Chine continuera de nous tailler des croupières, parce que même en baissant les salaires, en augmentant le temps de travail,  en supprimant les charges sociale et tout notre système d'aide, nous serons toujours beaucoup trop cher. D'autant que les chinois qui ne sont pas les derniers des imbéciles, ne laisseront pas la monnaie européenne baisser, ils l'a soutiendront comme il le font pour le dollars, et il le feront jusqu'à ce qu'ils aient totalement aspiré la richesse réelle du continent, ses savoir-faire industriels et non ses actions ou ses obligations d'état. Une fois le continent épuisé les chinois le laisseront tombé comme une bouteille de soda vide. Le niveau de vie réel apparaîtra alors aux yeux de tous à l'image de ce qui s'est passé en Islande ou naguère en Argentine.

 

Une fois encore la France est au centre du problème, nos dirigeants s'obstinent à ne pas voir qu'ils conduisent l'Europe et l'Allemagne vers un gouffre en encourageant cette dernière dans ses pires travers. En lui sussurant des mots d'amour emprunt de jalousie et de dévotion malsaine, on imagine Sarkozy se disant que finalement il aurait voulu être allemand après avoir été américain parce qu'il aurait pu avoir des excédent commerciaux et que c'est super chouette sur un CV ou pour draguer les top modèles. Emmanuel Todd qualifiait la France de mauvais génie de l'Allemagne, il ne croyait probablement pas si bien dire. En 1998 quand "l'illusion économique est sortie", livre dans lequel il tenait ces propos, nous étions encore une nation avec quelques morceaux de dignités et d'industries, aujourd'hui c'est à peine si l'on peut parler de la France comme d'un pays. Alors la grande question c'est, mais où est-ce que ces fous vont nous mener? Je n'en sait rien à vrai dire, je pense qu'ils n'en savent rien eux non plus, tout ce qui est certain c'est que la situation en Europe va considérablement se dégrader dans les années qui viennent. Alors bien sûr quelques économistes comme Jacques Sapir ont parié sur un effondrement de l'euro assez rapidement, ce qui serait nettement moins dramatique que son maintient avec des politiques de récession généralisées.  Todd lui même disait récemment qu'il y avait 90% de chance pour que l'euro s'effondre dans l'année.  Cependant manifestement cet effondrement ne pourra pas se produire sans de violentes manifestations populaires , manifestations dont on ne voit pas vraiment ce qui pourrait les déclencher à court terme. Car il ne faut vraiment pas compter sur nos dirigeants pour avoir une once de sens pratique vis à vis de l'économie. Les désindustrialisations ne s'arrêteront en France que le jour ou il ne restera plus rien à vandaliser, ils iront au bout de l'enfer et nous avec.

 

 

 

 

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3 février 2011 4 03 /02 /février /2011 22:23

  Detroit.jpgNous étions habitué jusqu'à il y a quelques années à voir le progrès comme étant un mécanisme irréversible, un mouvement historique allant toujours vers une amélioration des conditions de vie de la majorité de la population. Les trente glorieuses avaient donné cette illusion à toute une génération qui n'eut de cesse une fois au pouvoir de démolir, souvent  sans le savoir, les sources mêmes des progrès dont elle avait elle même bénéficier. Car le progrès, contrairement à ce que pense certains hurluberlus, n'était pas le fruit de la providence, du hasard, ou d'un quelconque sens de l'histoire, il était le fruit de politiques menées consciencieusement par la génération qui avait été éduqué dans le sang et les larmes de la seconde guerre mondiale. L'état providence fut le fruit d'un esprit collectif renforcé par des évènements historiques et par les effets d'une compréhension nouvelle de l'économie issue de la crise de 1929 et des multiples déboires qu'elle avait provoqué. Cette immense tabula rasa économique que furent la seconde guerre mondiale  et la crise de 1929 ont été le moment historique qui permis à ces idées nouvelles de monter au pouvoir pour changer drastiquement les façons de faire de l'économie, et la manière dont étaient organisées nos société. Malheureusement cette société des trente glorieuse ne pût maintenir les conditions de son fonctionnement culturel, la paix et la prospérité engendrant de nouvelles générations dont l'esprit n'avait plus rien avoir avec celui de leurs ayeux. Ainsi marche l'histoire, l'éducation des générations faisant les changements historiques, les nouvelles subissant les effets des choix précédents, elles ne peuvent en tout point se comporter de la même manière. 

 

  Mais cette démolition systématique des structures de l'état moderne par la génération du babyboom à cependant mis du temps à être réellement visible car tout un tas de mécanisme ont permis à la société de vivre comme si de rien n'était. Que ce soit aux USA ou en Europe on a arrosé la population de revenus dont la provenance résultaient de moins en moins d'un travail réellement  productif et de plus en plus de la rente financière ou de l'endettement public et privé. La production sous toutes ses formes ayant à petit à petit disparu de nos territoire sans que pour autant nous en soyons réduit à devoir nous passer de l'essentiel. Le niveau de vie pour la caste supérieure a même continué à augmenter alors que pourtant les sites de production fermaient en grande quantité. Les états industriels d'occident avaient de beaux restes et ont longtemps résisté à la folie qui consistait à détruire toute les structures d'organisation du commerce et de régulation. L'appât du gain à court terme, allié à l'idéologie laissez-fairiste à fait le reste, l'occident n'étant plus aujourd'hui qu'un cadavre peuplé d'usine désaffectées et d'un secteur tertiaire hypertrophié caractéristique des pays du tiers-monde. L'essentiel des produits consommés en occident sont aujourd'hui importés même s'il peuvent parfois être fabriqué par des entreprises officiellement occidentales, les usines sont en Asie, quand aux bénéfices ils sont dans les paradis fiscaux la libre circulation des capitaux permettant cette aberration.

 

IndustrieFrancePIB.gifIl suffit de voir l'évolution d'un pays comme la France pour mesurer le drame dont il s'agit. Notre pays  est passé de près de 30% de part pour l'industrie dans la valeur de son PIB à seulement 18% en 2005 (voir le graphique), en 2007 la part de l'emploi industriel en France était de seulement 14%, on était pourtant encore à 25% en 1997 ! Bien évidement ce déclin de l'industrie n'est pas le fruit d'une subite prise de conscience des problèmes écologiques, la consommation n'a pas suivi notre industrie et n'a pas reculé elle a même continuer à croître. Le résultat est un gonflement de notre déficit commercial dont la valeur en proportion du PIB ne doit pas cacher le poids dramatique. En effet par nature les importations en provenance d'Asie ont une valeur extrêmement faible à cause de la sous-évaluation des monnaies locales. Si l'on parle en quantité et en proportion de consommation les chiffres sont nettement plus parlant et en disent long sur la réalité industrielle de nos pays. Il suffit du reste pour tout un chacun d'aller faire ses courses pour voir que bien peu de produits que nous consommons couramment sont encore fabriqués en France. Évidemment ces importations gonflent artificiellement la productivité du travail d'un point de vue comptable, en réalité les emplois industriels étant partis, la productivité n'est plus qu'une vue de l'esprit. Il est bien difficile de comparer la productivité d'un vendeur avec celle d'un ouvrier. 

 

EmploiIndustriEurope.png

 

Mais la France n'est qu'une exemple parmi d'autres, même l'Allemagne dont la valeur des exportations a augmenter cache mal sa désindustrialisation manifeste. Elle aussi a des déficits commerciaux avec l'Asie, le nouveau centre du monde industriel, seulement ces déficits sont caché d'un point de vue comptable grâce à ses excédents avec ses voisins européens et les autres pays occidentaux. Disons que l'Allemagne est un peu le dernier des Mohicans, elle est condamnée comme les autres, mais elle tombera en dernier. Je disais donc que l'occident avait caché sa dévastation industrielle  grâce à ses multiples emprunts et à l'illusion financière, mais nous avons aujourd'hui atteint les limites de ce qu'il était faisable de faire en terme d'endettement extérieur. Les effondrements à la chaîne en Europe ne sont pas encore stoppé car en réalité le coeur du problème n'a pas été résolue, en maintenant le libre-échange la seule solution pour équilibrer les comptes extérieurs est de limiter la demande intérieure. Ainsi l'accroissement du chômage, la baisse des salaires et la démolition de l'état providence sont les seuls mécanismes capable de maintenir l'équilibre commercial dans le cadre libéral. C'est bien évidement la seule solution que les libéraux et les doctrinaires en place proposent, et la recette est d'ailleurs appliquée en France depuis les années 80.

 

    En effet la France a réussi pendant quelques décennies à maintenir son commerce extérieur malgrès sa désindustrialisation manifeste en faisant exploser son chômage. Ce n'est qu'au début des années 2000 que la France a commencé à avoir des déficits extérieurs, l'euro rendant inopérant l'équilibre commercial par la contrition de la demande. En effet à ce petit jeu c'est l'Allemagne qui a gagné en comprimant plus que les autres sa demande intérieure, il faut dire que sa démographie lui permet de maintenir un chômage à bas niveau même avec une stagnation du nombre d'emploi. Cet "avantage" démographique est en réalité au coeur du succès apparent de l'Allemagne, en effet même en détruisant des emplois industriels le recule de la population active permet de montrer des chiffres du chômage avantageux. De la même manière en maintenant simplement la production la baisse de la demande intérieure permet une hausse des excédents commerciaux, c'est en fait la faiblesse et la diminution du nombre d'Allemand qui nourrit mécanique les excédents de ce pays. Cette baisse démographique permet également un plus grand investissement par tête. Si l'Allemagne avait la démographie français, elle aurait un taux de chômage largement plus important que notre pays avec la politique qu'elle a mené. Mais pour en revenir à la France, les effets des trente piteuses comme ont appelé certains la période des années 80 à nos jours, sont aujourd'hui bien difficiles à cacher. Ainsi cet article de Marianne qui est sortie aujourd'hui montre la profonde dégradation de la situation de l'emploi dans notre pays. Bien au-delà du chômage c'est de la question de la rémunération dont il est question, et l''évolution du niveau des revenus des français montre la dégradation considérable des conditions de travail dans notre pays. L'article dit ainsi:

 

"C'est l'un des titres de FO-hebdo cette semaine : un quart des 25 millions de salariés gagnent moins de 9 000 euros annuels. Soit 6,25 millions de personnes gagnant 750 € par mois, 73 % du SMIC. "

 

  Incroyable mais vrai, les journalistes semblent découvrir maintenant la réalité économique d'un pays en voie de paupérisation. Cette réalité n'échappe pourtant pas aux plus jeunes qui malgrés un niveau scolaire largement supérieur à leurs aînés ont bien du mal à trouver des emplois stables quand ils en trouvent ou des revenus correctes. Il y a une marge considérable entre l'image que se font généralement nos élites de la situation économique du pays et sa réalité. Bien évidement l'explosion sociale a été jusqu'ici évité grâce aux multiples redistributions et à l'emprunt publique mais on sait aujourd'hui que la fête est finie, la France devant donner des gages aux marchés financiers. Nos élites préparent déjà la grande purge qui maintient tant bien que mal le pays en vie et le système en place. J'ose à peine imaginer le jour où les retraites seront à 67 ans pour cause d'Europe, ou encore lorsque l'on annoncera la suppression du SMIC et des différentes aides sociales. Car très rapidement la consommation du pays devra s'aligner sur ses capacités de production, c'est à dire plus grand chose en définitive. Et  seule une réindustrialisation nous permettrait de nous en sortir mais cela demande du temps et une politique inenvisageable tant que l'UMPS est au pouvoir. Le régime protectionnisme dévaluation planification n'étant toujours pas à l'ordre du jour chez nos illuminé héritiers de Mai 68. La France comme les autres pays d'occident est un pays en voie de sous-développement, c'est une nouvelle catégorie à ajouter aux multiples termes utilisés par les organisations internationales.

 

Ci-dessous l'évolution du solde commercial français

 

SoldeFiliere.png

 

Les futurs pays sous-développés d'occident

 

    A vrai dire ce phénomène de désindustrialisation massive n'est pas une nouveauté historiquement, cela s'est même déjà produit au début de la révolution industrielle. Evidemment  les protagonistes étaient différents et les rôles souvent inversés en regard de la situation actuelle.  Ainsi le malade de l'Europe aux 19ème siècle c'était l'immense empire Ottoman, celui là même qui avait effrayé les européens jusqu'à les menacer au coeur même de l'Europe au 17ème siècle avec le siège de Vienne. En 1900 tous s'accordaient pourtant à dire que cet empire était mourant, mais sa maladie était en fait assez simple à diagnostiquer, l'empire avait subit de plein fouet les évolutions commerciales liées à la révolution industriel. Car l'empire Ottoman jusqu'à sa mort fut libre-échangiste, c'était même la coqueluche des libéraux qui voyaient en lui l'exemple à suivre en matière commercial. Bien évidement ce n'était pas par conviction libérale que les ottomans pratiquaient le libre-échange, mais bien plus parce que les choses du commerce étaient peu intéressantes pour les dirigeants musulmans. Les musulmans dirigeant de l'empire, considéraient le commerce comme quelque chose de secondaire. Le fait est que la concurrence britannique fut une catastrophe pour la production artisanale ottomane, elle fut réduite à néant en quelques décennies. Ce fut la même chose pour l'Inde qui était à l'époque une colonie britannique. Et en réalité tout les pays sous-développé du 20 ème siècle étaient en fait des nations qui avaient pratiqué ou maintenue le libre-échange au siècle précédent, on peut inclure la Chine dans le lot même si pour cette dernière l'ouverture des frontières fut essentiellement le résultat de pressions militaires occidentales.

 

Les nations développés du 20 ème siècle furent celles qui se protégèrent de la concurrence britannique du Japon des Meiji à l'Allemagne de Bismarck, en passant par les USA inspiraient par le premier théoricien du protectionnisme Alexander Hamilton.  Seules les nations très attentives à leur industrie et à leur commerce ont connu réellement un progrès par la suite. Mais l'histoire est farceuse et il semble que les champions d'hier aient fini par oublier ce qui avait fait leur fortune, à l'image de la pauvre Grande-Bretagne dont nous avons vue l'état lamentable récemment. Les avantages se sont semble-t-il inversés. Grace à la possibilité de déplacer rapidement les usines, additionné au progrès très rapide des niveaux scolaires les ex-puissance en déclins sont aujourd'hui celles qui sont les plus compétitives sur le plan industriel et commercial. L'occident c'est l'empire Ottoman du 21ème siècle, il en prend en tout cas le chemin, se mettant à considérer le commerce et son équilibre comme quelque chose de secondaire à l'image des USA et de leur déficit jumeaux. L'effondrement des revenus en France ne fait que commencer et c'est par les jeunes générations que la chute se produit, si nous continuons à ne pas voir la vérité en face nous courons à une véritable catastrophe.

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1 février 2011 2 01 /02 /février /2011 21:22

    Je viens de regarder un débat organisé par Jean François Kahn sur la possibilité d'une entente dite républicaine en réponse à l'UMPS et au danger du FN. Pour l'occasion il y avait à la table des négociations plusieurs invités dont deux qui s'étaientt déjà confrontés à la télévision et dont nous avions parlé à l'occasion, Nicolas Dupont Aignan et Jean Luc Bennahmias. Ce dernier a employé l'éternel argument des supranationalistes, nous sommes trop petit pour la mondialisation, il nous faut donc forcement former un groupe plus grand pour assurer notre indépendance. C'est un discours qui revient sans arrêt et il est bien dommage que cet homme politique, qui par ailleurs converge sur un certain nombre de point de vue avec ceux des alternatifs protectionnistes, pense que le clivage se fait sur cette question là.  Je vais donc ici à nouveau réfuter cette argumentation en expliquant le plus clairement possible, pour que nos obsédés de la taille nationale minimale, finissent par comprendre en quoi cet argumentaire est ridicule. En réalité les besoins de coordination international ne nécessite aucunement des mesures de suppression d'autonomie en matière de commerce ou de contrôle des changes, bien au contraire même.

 

La souveraineté nationale

 

    En premier lieu, il faut peut-être dire un mot sur la notion de souveraineté si décriée par les gens de "gauche" ou prétendument de gauche. La souveraineté est pourtant inscrite dans la constitution française, il suffit de lire le début de notre constitution pour voir ce texte plein de vilains mots xénophobes:

 


Titre premier DE LA SOUVERAINETE
ARTICLE 2.


La langue de la République est le français.
L'emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge.
L'hymne national est « La Marseillaise ».
La devise de la République est « Liberté, Égalité, Fraternité ».
Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.

ARTICLE 3.

La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. 

Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.

Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques.


    Je crois que notre constitution est claire sur la question de la souveraineté nationale, il n'y a pas lieu d'en discourir plus avant. Quiconque se prétend démocrate ne peut en aucun cas se dire contre la souveraineté nationale puisque par principe la démocratie ne s'exerce et ne peut exister que dans ce cadre d'indépendance nationale. En effet, faire des votes et élire des représentants qui n'auraient aucun pouvoir, puisque celui-ci seraient inféodés à des forces étrangères or du cadre national, revient à nier la démocratie. Une nation peut être souveraine et non démocratique, mais elle ne peut en aucun cas être démocratique sans être souveraine. Quand un homme de gauche se prétend à la fois démocrate, pour l'autodétermination des peuples et contre la souveraineté nationale et pour l'intervention de structures supra-nationales , il y a comme une contradiction fondamentale.

 

La question de la souveraineté d'ailleurs ne concerne absolument pas les idées générales ou les opinions politiques, la question de la souveraineté est avant tout une question d'usage pratique, car sans souveraineté il ne sert à rien de parler politique puisque de toute manière quoique vous votiez les choix sont pris par d'autres. En cela on peut rassurer la pauvre Pascale Fourrier sur son excellent blog qui s'inquiète du fait qu'apparemment pour certains, on ne peut pas être de gauche et pour la souveraineté populaire. La vrai question que devrait pourtant se poser ces gens c'est, est-ce que l'on peut faire de la politique dans un cadre nationale non souverain? La réponse est non. Donc en fait être contre la souveraineté nationale c'est être contre le débat politique en ce sens être de gauche ou de droite à bien peu d'importance quand on a abandonné tout idée d'agir réellement en confiant tout les pouvoirs à des technocrates non élus, comme on en trouve tant dans les bureaux bruxellois de l'UE.  Quitte à horrifier les gens de "gauche", je vais même leur dire qu'être contre la souveraineté nationale est le plus sûr moyen d'avoir une politique de "droite". Je parle bien sûr ici de la droite affairiste néolibérale, celle que la gauche guimauve englobe dans le terme générique de droite et qui pour elle résume toute la droite, simplisme quand tu nous tiens. Un peu comme si l'on résumait la gauche à Lutte Ouvrière ou à Olivier Besancenot. Si les gens de gauche prenaient le temps de lire les propositions ils seraient probablement surpris d'apprendre qu'ils ont plus d'atomes crochu avec certains hommes dits de droite qu'avec d'autres dits de gauche. J'éviterais ici les exemples on en a tous en surnombre dans la tête. 

 

Indépendance et autosuffisance

 

    Maintenant que nous sommes à peu près d'accord sur la nécessité pour une nation démocratique d'être souveraine, on va pouvoir parler des conditions de cette pleine souveraineté. Et c'est là peut-être que monsieur Bennahmias et tant d'autre se fourvoient en croyant à la nécessité de la création de groupe au-delà de la nation pour maintenir cette souveraineté. Quelque part nos élites, croyant au supra-national, pensent que la France doit céder un peu de sa souveraineté pour en maintenir l'essentielle, c'était en tout cas très explicitement  cet objectif que visaient les dirigeants de gauche qui sont à l'origine de la construction européenne actuelle. On peut penser à Mitterrand ou à Delors qui vendaient l'Europe comme une France en plus grand. On ne saura jamais vraiment s'il s'agissait d'une arnaque de grande ampleur visant à casser la nation française, ou le résultat d'une idéologie absurde, mais le fait est que l'UE actuelle nous a supprimé un grand nombre libertés  politiques, sans que pour autant les gains soient vraiment visibles. La France est dans un état économique catastrophique entre désindustrialisation, chômage de masse et bulle immobilière et les seules remèdes que semble préconiser l'UE sont ceux qui favorisent sans arrêt les mêmes intérêts de rentiers et multinationale. Nous voyons même aujourd'hui l'Allemagne imposer sa politique à l'Europe entière créant ainsi une espèce de quatrième Reich sans qu'un seul char allemands n'ait eu à traverser la frontière, simplement parce que nous avons abdiqué tout les mécanisme permettant la réalisation de politiques concrètes ce que nos voisins d'outre-Rhin n'ont pas eu la stupidité de faire. La France n'a plus aucun moyen physique pour contrôler ses frontières sur quelque plan que se soit, elle ne peut plus dévaluer puisqu'il y a l'euro, elle ne peut pas taxer les importation à cause des traité quand au contrôle des capitaux il est aussi interdit par les traités. Alors on peut toujours faire de grands discours sur le chômage et la désindustrialisation la seule possibilité reste la baisse des salaires ou la hausse du chômage pour équilibrer la balance des paiements. En supprimant le volant le conducteur n'arrive plus à conduire la voiture étonnant non? 

 

    En effet si l'on y réfléchit bien, il était totalement stupide de croire qu'en renonçant nous même aux moyens de notre propre souveraineté petit à petit nous allions gagner de la souveraineté. C'est un peu comme si un pompier se mettait à allumer des feux dans un appartement limitrophe d'un incendie pour éviter que ce dernier ne brûle. C'est pourtant très exactement ce que continue à vendre la gauche majoritaire et monsieur Bennahmias membre du Modem. Quand à la question de la taille d'une nation, elle  n'a tout simplement aucun lien avec son indépendance, l'exemple le plus récent fut l'affaire islandaise dont j'ai longuement parlé dans ce texte. Il s'avère que l'Islande est un minuscule pays de seulement trois cent milles habitants, et qui a pourtant renvoyé les grandes banques Britanniques et Holandaise à la porte. La Corée du Sud pays plus petit que la France et qui est coincé entre un pays fou au nord, l'immense empire chinois encore plus au nord et le géant japonais à l'est, elle  ne se gène pourtant pas pour contrôler l'entrée et la sortie des capitaux et des marchandises, ou pour dévaluer sa monnaie quand c'est nécessaire. De toute façon présenter l'indépendance comme étant une affaire de poids nationale  cela signifierait que si la France est trop petite alors toute les nations en dessous le serait, aussi y compris l'Inde ou le Brésil qui ont des PIB inférieurs et qui pourtant font montre d'une certaine indépendance nationale. Je rappel que la France est la sixième économie mondiale cela veut donc dire qu'il y a bon nombre de pays qui d'après cette définition de l'indépendance serait complètement condamné. On confond un peu trop puissance internationale et indépendance ces deux notions n'ayant aucun liens. D'ailleurs les USA ne sont en aucun cas une puissance indépendante vue les contraintes qui sont les leurs en matière financière et commerciale, à l'heure actuelle l'Islande est bien plus indépendante que les USA.

 

    En réalité l'indépendance nationale est avant tout une affaire de volonté politique, quand une nation n'est pas indépendante elle fait les efforts nécessaires pour obtenir cette indépendance. Bien évidement nous sommes tous plus ou moins liés, puisque nous vivons tous sur cette même planète et qu'il y a bien évidement des interactions entre les peuples, mais l'expérience montre qu'il vaut mieux que les peuples aient une certaine autonomie les uns vis à vis des autres plutôt qu'une interdépendance malsaine. Car ce sont ces interdépendances qui produisent des politiques guerrières et interventionnistes, c'est bien parce que l'occident est trop dépendant du pétrole qu'il se voit obligé de s'intéresser aux affaires du Golfe Persique plus que de raison. Plutôt que d'aggraver les dépendances comme nous l'avons fait ces trente dernières années nous serions au contraire bien inspiré de vouloir les diminuer, non pas en construisant des structure supra-étatique, mais au contraire en faisant en sorte que chaque peuple puisse pourvoir de façon relativement suffisante à ses propres besoins, sans avoir besoin d'autrui plus que nécessaire. Nous sommes dépendant des machines outils allemandes, et bien faisons en sortes de les produire nous même, subventionnons l'industrie des machines outils françaises, achetons les savoir-faire ou taxons les machines importés de façon à intéresser les producteurs allemands de ces machines à produire chez nous les biens d'équipement qu'ils vendent sur notre territoire. Nous avons besoin d'importer du pétrole. Et bien ayons une politique de substitution progressive,et d'investissement dans la recherche de façon à supprimer cette dépendance. Encore une fois l'indépendance d'une nation n'a rien avoir avec sa taille, c'est avant tout une affaire de capacité de production en regard de ses besoins. A partir du moment ou vous êtes capable de produire ce que vous consommez, vous êtes indépendant même si vous n'êtes que la centième nation du monde en terme de PIB ou de population.

 

  L'indépendance nationale n'a donc rien avoir avec la taille ou je ne sais qu'elle autre attribut économique, c'est simplement une affaire de rapport aux autres nations. Quand à la dépendance aux marchés financiers j'en ai déjà parlé il s'agit d'un faux problème puisque l'argent nécessaire aux investissements nationaux rien ne nous oblige à l'emprunter sur ces marchés. Cette façon de faire a été imposé dans les années 70 par les idéologues et les intérêts anglo-saxon. Le besoin du marché financier disparaîtra le jour où nous déciderons d'emprunter uniquement à notre propre banque centrale, pour ce qui est des emprunts à l'étranger à cause des importations il y a de toute façon d'autres manières pour agir. Qui plus est une politique protectionniste nous guérirait rapidement de nos déficits commerciaux, la France n'ayant pas des déficits si considérables que cela. 

 

La coopération internationale

 

      Alors après tous çà vous allez me dire mais, diable alors, c'est chacun pour soit la solution que vous prônez, d'une certaine manière oui. Cependant je ne serais pas contre une coopération internationale visant à mettre en place des règles de bon voisinage, mais là on sort totalement du fantasme post-national. Il s'agit simplement de faire en sorte que chaque peuple se comporte de façon respectueuse de ses voisins et non de faire une espèce de super-nation en les faisant fusionner comme fut ce le but de l'UE.  Je l'avais même proposé dans une union méditerranéenne mais celle-ci se cantonnait à obliger les états à l'équilibre commerciale et à une aide à l'emprunt à bas taux pour les pays les plus faibles, il n'était pas question dans ce cadre là de faire sauter toutes les frontières, car c'est justement cette façon de faire qui a totalement désorganisé la planète. En effet pour organiser, pour réguler, il faut cadrer, il faut encadrer, il faut des règles, des mécanismes permettant d'équilibrer les échanges entre peuples, et il faut garantir l'indépendance de chaque peuple pour que la démocratie puisse s'appliquer. On est bien loin des délires européens, la seule supranationalité qui vaille c'est celle qui est humble, qui s'attache uniquement à quelques formalités et qui laisse tout le reste au pouvoir nationaux. Le bancor de Keynes était à cette image, même chose pour la fameuse charte de la Havane qui a tout dit sur l'organisation internationale telle qu'elle aurait du être. Une bonne organisation internationalede doit pas être comme une négation des souverainetés des peuples, mais au contraire comme le supplétif de ces souverainetés, comme l'élément suprême de défense de ces souverainetés avec comme objectif final un monde d'états nations libres et autonomes. Tous les peuples vivant ainsi chacun pleinement leur indépendance nationale. Le vrai internationalisme c'est celui qui défend l'indépendance des peuples, leur capacités à être maître de leur propre destin et non à être soumis à des intérêts qui leurs échappent.

 

 

 

Voici le débat organisé par JFK sur un regroupement des républicains alternatifs:

 

 

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27 janvier 2011 4 27 /01 /janvier /2011 22:48

      Les chiffres du PIB britannique viennent de tomber et la Grande-Bretagne semble retomber en récession comme en 2009. Cependant il y a une grande différence avec cette période, c'est que cette fois le gouvernement britannique est en grande partie responsable de la situation, il s'est fabriqué une récession tout seul comme un grand. Comme je l'avais annoncé en Octobre dernier dans  ce texte, les dirigeants britanniques n'ont pas su profiter de l'avantage qu'ils avaient d'avoir une monnaie indépendante, contrairement à l'Irlande, la France ou l'Italie. En effet  il ne suffit pas d'avoir une autonomie monétaire encore faut-il savoir s'en servir et mettre les bonnes politiques économiques en place. A l'inverse de l'Islande dont nous avons récemment discuté la Grande-Bretagne a décidé de sauver ses banques et sa City au lieu de la puissance parasitaire britannique. Les décisions apparemment absurdes prises par le gouvernement de David Cameron s'explique bien évidement par le poids démentiel de la finance dans l'économie anglaise. En effet pour la finance les dévaluations sont un poison qui dévalue leurs avoir en £, une monnaie qui prend de la valeur c'est au contraire un bon moyen de valoriser son capital par rapport à des achats potentiels à l'étranger. A cela s'ajoute le poids des services et de l'immobilier dans l'économie britannique ce qui tend à rendre les politiques en faveur de la production nationale peu vendable aux élites locales.  Cependant le gouvernement anglais n'a pas eu le choix et la livre sterling s'est dévalué en 2008 de plus de 25% face au dollars.

 

PIBUK2010.gifComme vous pouvez le voir sur le graphique alors qu'il semblait que la croissance de la GB redémarrait en 2010, il y a eu un brusque refroidissement au quatrième trimestre . Ce dernier est probablement du à plusieurs facteurs, mais cela ne fait que préfigurer à mon humble avis ce qui se passera bientôt chez l'autre grand pays du néolibéralisme triomphant les USA. Car la-bas aussi on a pratiqué une vaste relance de l'économie, associé à un sauvetage des banques par l'endettement public, et aujourd'hui à la suite de cet enchaînement, l'on pratique une politique d'austérité pour boucher les trous laissés par le sauvetage bancaire. La Grande-Bretagne a fait exactement la même politique que les USA, elle a même dévalué sa monnaie. Malheureusement la dévaluation n'a semble-t-il pas encore permis un retour à l'équilibre de la balance des paiements même s'il y a eu une nette amélioration dans un premier temps.

 

BlancePaiementUK2010

 

 

     En effet la balance des paiements se dégrade à nouveau au quatrième trimestre alors que la valeur de la Livre Sterling reste faible face à l'euro, mais également face au dollars. Cette aggravation du déficit de la balance des paiements au moment même où l'état britannique fait des coupes sombres dans les dépenses publiques, est un mauvais signe. Cela en dit beaucoup sur la situation de l'économie Européenne en général car la Grande-Bretagne espérait probablement tirer sa croissance de ses exportations. Manque de chance cette politique n'est valable que si tout les pays ne la pratiquent pas en même temps. Or au petit jeu de la contraction de la demande intérieure et des excédents commerciaux ce sont les Allemands les plus forts. Même en dévaluant et en contractant sa demande intérieure la pauvre Grande-Bretange n'arrive pas à dégager ne serait-ce qu'une balance des paiements  à l'équilibre. Trente ans de thatchérisme  maladif ont apparemment fait des dégâts plus importants encore qu'on aurait pu l'imaginer sur le tissu industriel britannique. La dévaluation aura des effets à plus ou moins long terme l'industrie mettant du temps à relocaliser les activités, on l'oublie trop souvent les système de production mettent beaucoup de temps à changer alors que les variations monétaires sont rapides. Pour qu'une dévaluation permette une vrai relance de la production il faut que cette dévaluation se maintienne longtemps surtout dans le cas d'un pays fortement désindustrialisé comme la GB.

 

inflationUK2010.gifEt comme une mauvaise nouvelle n'arrive pas seule voilà l'inflation qui revient également, une inflation à des niveaux relativement important puisque elle atteint 3.7% en moyenne annuelle en décembre (courbe bleue claire). Comme dans le cas de l'Islande la dévaluation entraîne une hausse du prix des importations qui se répercute au finale sur l'inflation moyenne. Bien évidement à terme les produits locaux doivent théoriquement valoir moins cher et donc se substituer aux importations, mais encore faut-il qu'il y est des produits locaux et que l'industrie du pays soit encore capable de fabriquer ces produits. Cependant si l'inflation reste au niveau actuelle ce n'est pas un drame . D'autant que même si le PIB recule au quatrième trimestre la production manufacturière continue à augmenter de son coté.

 

IndiceProductionUK

  Et ce même si elle est encore loin d'avoir retrouvé son niveau d'avant crise. On notera au passage les piètres performances de l'économie britannique depuis dix ans puisque même avant crise l'indice de production manufacturier était encore au niveau de 2000. Preuve supplémentaire du caractère fantasmagorique de la croissance du modèle britannique des années 2000 qui n'était réellement qu'une bulle. En terme de production de bien réel la Grande-Bretagne a fait du surplace durant huit ans avant de s'effondrer en 2008.

 

 

 

 

 

 

 

 

La situation actuelle de la Grande-Bretagne est donc difficile, d'autant plus que cette dernière va devenir dépendante de ses importations de pétrole alors que jusqu'à présent les réserves de la mer du nord permettaient une certaine autonomie énergétique. Cependant la politique de contraction de des dépenses publiques de l'état sont pourtant une très mauvaise idée, d'abord parce qu'elle sont injustes sur le plan logique. Faire rembourser par le contribuable les errements de la grande finance est d'une ignominie sans nom, surtout si ces économies consistent à réduire encore plus le niveau scolaire britannique en triplant les frais de scolarité des universités. Cela hypothèque d'ailleurs à long terme la compétitivité scientifique et industriel du pays en éjectant tout une partie de la population de l'accès à l'instruction de haut niveau, dans un pays où l'on fait d'ailleurs moins d'études qu'ailleurs en Europe. Mais c'est surtout parce que ces économies arrivent à un bien mauvais moment, la demande extérieure ne prendra pas le relais comme le montre la dégradation de la balance des paiements britannique. En réalité la planète entière et particulièrement l'Europe, sous l'influence néfaste de l'Allemagne, sont entrée dans une course à la déflation compétitive, les uns en dévaluant leur monnaie les autres en contractant leur demande intérieure. Croire que la GB pourra tirer sa croissance par l'exportation dans un tel contexte relève de la foi plus que de la raison. Au contraire cette politique va casser la petite reprise de la production manufacturière qui n'aura pas suffisamment de débouchés pour se maintenir et qui va rapidement devoir faire face au multiples serrage de boulon effectué un peu partout sur la planète et en Europe.

 

  A cela s'ajoute les effets de l'endettement de plus en plus énorme de l'état britannique mais également des ménages britanniques qui sont plus endettés encore que leurs homologues US. La Grande-Bretagne va devoir rapidement trouver des solutions hétérodoxes à ses problèmes car elle n'aura pas d'autres possibilités. Elle devrait renoncer par exemple à ses coupes budgétaires et au contraire entamer une nouvelle relance couplée à une nouvelle dévaluation pour en atténuer les effets en matière d'importations. La dévaluation est la seule solution acceptable car il y a malheureusement peu de chance que le gouvernement de sa très gracieuse majesté ne se mette à faire du protectionnisme commercial. Dans le cadre mental britannique la dévaluation est la seul protection admissible, c'est déjà mieux qu'en France cependant, où même cela est impossible.   En continuant dans sa voie de contrition le gouvernement britannique risque de se retrouver non seulement avec un déficit encore plus grand mais en plus avec une crise sociale des plus grave. L'anglais ne fait pas souvent grève mais il peut devenir brutal si on le pousse trop dans ses limites, les étudiants anglais l'ont bien montré dernièrement.  Il serait peut-être temps que les anglais relise leur économiste historique à savoir Keynes il trouverait dans ses textes de quoi leur éviter les inévitables  déconvenues des politique de contrition en période de récession mondiale.

 

 

 

 

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19 janvier 2011 3 19 /01 /janvier /2011 19:39

      On en parle plus beaucoup de l'économie islandaise dans les médias français, on préfère nous donner les exemples des purges économiques pratiquées en Irlande ou en Grande-Bretagne. Purges faites au nom de la sauvegarde de l'avenir car c'est bien connu la dette publique c'est le mal et c'est un poison pour nos enfants. Evidement on oublie parfois que ces dettes et leur amplification récente sont surtout le fruit de la crise bancaire de 2008, les états s'étant portés garants et acquéreurs de ces dettes monstrueuses. On peut aujourd'hui parler sans exagérer de socialisation des pertes puisque ce sont bien les contribuables qui payent les erreurs des banques privées, c'est même doublement eux qui payent puisque la crise bancaire à aussi produit un brutal effondrement de l'activité économique qu'il a bien fallu compenser par l'endettement public. Mais nos amis islandais n'ont pas suivi le même chemin que les autres pays d'Europe, contrairement à nous les islandais se sont demandés si finalement il était bien normal que le contribuable paye pour l'irresponsabilité bancaire. Et leur réponse fut clairement NON. Les islandais n'ont pas nationalisé les dettes, ils ont out simplement laisser les banques privées à leurs problèmes.

 

charts-showDans le même temps le pays a subit une crise comme dans les autres pays ou la bulle avait fortement gonflé. Cependant l'Islande qui n'est pas membre de la zone euro,  contrairement à la pauvre Irlande, a pu dévaluer sa monnaie et ainsi donner un coup de pouce à son économie. Les chiffres parlent d'eux mêmes, la croissance est déjà repartie sur des niveaux élevés et le déficit commercial a été remplacé par un excédent. Le choc fut évidement rude. Terrible même  puisque c'est la forte baisse de la couronne islandaise, dans des proportions trés importantes comme le montre la courbe orange du graphique ci-dessous, qui a dans un premier temps contracté la demande puis relancé les exportations ans un deuxième temps. Entre 2007 et 2008 la couronne islandaise avait ainsi perdu plus de la moitié de sa valeur face à l'euro. Le taux est tout de même remonté par la suite .

 

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bourse

     Ci-contre, l'évolution du taux de la couronne islandaise face à l'euro depuis 2008, il faut aujourd'hui environ 150 couronnes islandaises pour un euro alors qu'il en fallait 100 avant crise. On voit le pic lié à la période d'inquiétude concernant le remboursement des dettes du pays et des attaques spéculatives contre la couronne islandaise.

 

 

 

 

    Le graphique ci-dessous montre que la baisse de la monnaie a bien eu un effet à terme sur les exportations, et depuis début 2009 le pays est en excédent commercial. Cet excédent  facilitera les achats à  l'extérieur car l'Islande ayant démocratiquement renoncé à rembourser ses dettes externes privées, elle aura du mal à de nouveau emprunter sur les marchés à des taux raisonnables. Le seul moyen pour elle d'acheter à l'étranger est donc maintenant de couvrir ses besoins de devises étrangères par des exportations concomitantes. Il lui faut impérativement équilibrer sa balance des paiements or elle y arrive maintenant très bien puisqu'elle a même des excédents.  On voit ici que le malheur à court terme c'est transformé en un mécanisme bénéfique en forçant le pays à une réindustrialisation nécessaire. Quand je prône des contraintes pour obliger les pays à équilibrer leur balance des paiements c'est justement pour éviter d'en arriver à de telles extrémités lorsque les déséquilibres sont tels qu'il faut dévaluer de 50% la monnaie du pays. Si l'Islande avait fait attention à sa balance commerciale plus tôt elle n'en serait pas arrivé à çà.

 

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  Le graphique suivant montre la composition de la dette extérieur du pays, en gris ce sont les dettes qui sont celles des banques étrangères anglaises et hollandaises pour la plupart. C'est cette dette qui ne sera pas remboursée, on comprend pourquoi en voyant la proportion qu'elles représentent dans la dette extérieure du pays. Entre se suicider et jeter les banquiers par la fenêtre les islandais ont choisi avec sagesse la deuxième solution.

 

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    La croissance économique du pays semble maintenant en voie de rétablissement, bien sûr cela dépend aussi de la dynamique mondiale, les pays voisins d'Europe étant dans une situation périlleuse le pays et sa croissance pourrait en pâtir. Cependant la récession est aujourd'hui du  passé, la dévaluation a rétabli la compétitivité du pays.  La production locale s'est substituée aux importations réduisant la dépendance de cet état aux importations. Le choc fut violent mais salutaire, car là où les Irlandais ne voit plus aucune perspective mais évite momentanément l'inflation et la dévaluation, les islandais eux ont vue une crise passagère et retrouve maintenant une économie en meilleur forme. Et cette fois la croissance islandaise ne s'accompagne pas d'une inflation de bulle immobilière avec déficit commercial, il s'agit d'une croissance plus saine et plus auto-centrée.

 

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    Le graphique suivant montre bien les effets d'une dévaluation brutale de grande ampleur, les importations ont vue leur coût exploser à cause de la perte de valeur de la monnaie locale. Ce faisant le prix des produits importés ont explosé provoquant une inflation très forte dans  un premier temps. Cependant par la suite on voit bien que l'inflation décroît, les produit locaux se substituant petit à petit aux importations, cela prend du temps évidement ce qui explique la violence des taux d'inflations. Cela montre que réguler les échanges commerciaux uniquement avec des taux de change est d'une violence extrême. Des taxes et des quotas étant plus stable ils permettraient une planification à long terme des productions et de l'équilibre de la balance commerciale en évitant les variations brutales qui sont nuisibles pour la production industrielle. Sinon avec cette dévaluation les gens ont fini par changer leur mode de consommation et il l'ont réorienté vers les produits du pays. Cela  a relancé la production d'emploi dans  l'industrie locale et la croissance réelle a fini par repartir, et c'est  une vrai croissance, celle fondée sur les revenues de la population et non sur l'endettement privé. Le taux d'inflation islandais après avoir connu deux années très fortes est revenu à la normale aux alentour de 2.5%. Ce taux d'inflation très fort momentanément a traduit un transfère des revenues vers des couches sociales différentes de celle de l'organisation économique antérieur à la crise. D'une économie d'importation, de service et de bulle immobilière, l'économie islandaise est redevenue une économie de production, de pêche et d'industrie. Et l'inflation a traduit dans les statistiques ce brutal changement dans la répartition des revenues. Bien loin d'être une catastrophe c'est au contraire un indice de l'évolution d'un pays, l'inflation fut finalement  la punition infligée aux rentiers locaux pour leur trop grande gourmandise.

 

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L'Islande est un exemple de ce qui finira tôt ou tard par arriver en France et dans les autres pays de l'union européenne, car oui il faudra nous aussi nous réindustrialiser. Alors nous pourrions le faire de façon intelligente en minimisant les dégâts et la brutalité du passage. En faisant des politiques de protection douanière progressive, en revenant au franc et à un euro devenant une monnaie commune. Malheureusement l'irresponsabilité de nos dirigeants ne pourra que produire des catastrophes à l'image de ce qui s'est passé en Islande, c'est à dire des évolutions extrêmement brutales sur le plan économique qui auraient put être évité avec seulement un peu de bon sens. Mais que nos dirigeant ne se fassent pas d'illusion, il faudra bien en passer par la case réindustrialisation. Et cela produira forcement l'élimination d'une grande partie de l'économie de rente qui s'est mis en place dans notre pays depuis trente ans.  Nous ne pourrons pas indéfiniment importer gratuitement des produits chinois avec un taux de change ne reflétant pas l'évolution de notre balance commerciale. Plus tôt nous résoudrons cette problématique moins grande sera la claque inflationniste.

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14 janvier 2011 5 14 /01 /janvier /2011 21:28

  chaotique.jpgNous modernes avons coutûme de penser que nous pouvons ou pourrons à chaque instant maîtriser la totalité de la réalité qui nous entoure. Et si tel n'est pas le cas, de tout au moins prévenir et prévoir des réactions face à ce futur que nous décrive nos modèles et nos prévisions. Nous sommes persuadés intrinsèquement que par le seul jugement de la raison nous arriverons toujours à nos fins, et à prévoir le futur. La raison déterministe qui pense que le monde est une réalité déterminé dont il ne tient qu'à nous de découvrir les lois, a aujourd'hui totalement envahi l'esprit de nos concitoyens. Nous mêmes lorsque nous réfléchissons à des solutions économiques ou politiques nous pensons souvent le monde avec des grilles de lectures appartenant à ce type de vision. Pour chaque problème nous cloisonnons nos raisonnement par la célèbre méthode Descartes qui consiste à diviser les problèmes en petites partis isolées, afin de rendre intelligible  le problème trop complexe à comprendre dans son ensemble. Notre réalité moderne est née de cette façon de regarder le monde en terme de loi déterministe représentant la nature des choses, la réalité se résumant à une accumulation de petites poupées Russes ou de pièces de Lego s'imbriquant les unes dans les autres. Le moderne pense qu'en connaissant chaque pièce du puzzle dont il a lui même établit la taille, il arrivera en assemblant ces pièces à comprendre la totalité des choses.  Le progrès est née de l'idée qu'à la fin notre connaissance sera telle que nous finirons petit à petit par comprendre tout la réalité du monde. Descartes voyait lui même les lois de la nature comme la vrai parole de Dieu qu'il ne tenait qu'à nous d'essayer de comprendre. Par la méthode cartésienne nous pensions enfin détenir la maîtrise totale des choses. Las la réalité est tout autre, surtout dans les phénomènes largement complexe et faisant interagir de multiples dimensions et variables. 

 

    Car cette façon de voir, si elle est aujourd'hui encore au pouvoir chez nos politiques et chez bon nombres de nos économistes, elle a pourtant été abandonné en grande partie dans les sciences. Nous savons aujourd'hui depuis l'invention de la physique quantique que les modèles que nous utilisons n'ont rien de généralisable, qu'ils ne représentent qu'une réalité dans un espace extrêmement restreint d'expérimentation.  De la biologie à la météorologie en passant par l'astronomie ou la médecine toutes ces sciences ont pris la mesure de notre petitesse et des limites intrinsèques à la raison humaine. La logique, la raison n'explique pas le monde, elle donne un sens de la réalité parlant à l'esprit humain, elle explique une causalité dans un espace restreint d'existence et rien en dehors de ce petit cadre. La logique est avant tout le fruit de notre cerveau lui même enfant de l'évolution et de la nature, Jean Louis Krivine le mathématicien avait même avancé que la logique et les équations étaient le fruit de l'évolution biologique auquel le cerveau humain a accès consciemment. Krivine dit que les mathématiciens font souvent appel à l'intuition, les mathématiques ne seraient pas une invention humaine mais le résultat d'algorithmes fabriqués par mère nature au cours des siècles d'évolution. Et ces  algorithmes, ces programmes  seraient implantés dans nos esprits comme il le sont chez les animaux. Un algorithme de plus court chemin par exemple, un vulgaire cafard le connaît puisqu'il évite les objets bien mieux que le meilleur des robots fabriqué par l'homme, la différence entre le cafard et l'homme c'est que l'homme est capable d'accéder consciemment à cet algorithme, reste bien sûr à définir ce qu'est la conscience. Le mathématicien ne fait en fait que relire et mettre en forme ces algorithmes créer par l'expérimentation darwinienne de ces 3 milliards d'années qui nous sépare des premiers organismes vivants. De cet état de fait nous devons conclure que ce que nous appelons la raisons peut parfaitement se tromper, d'une part parce qu'elle est souvent sans connaissances suffisantes pour valider parfaitement ses raisonnements. Ensuite parce que même en ayant toutes les connaissances nécessaires elle se fracasserait sur le fait que la réalité n'est pas le modèle que nous en faisons même en complexifiant celui-ci à l'infini.  Les modèles mathématiques et logiques ne sont que la représentation de la réalité que nous nous faisons eu égard aux maigres expériences que nous avons, mais le fonctionnement réel des choses nous échappe probablement.

 

    Ainsi par exemple une politique pourrait avoir des effets contradictoires suivant les périodes d'analyse que nous utilisons. Des événements et des choix à priori mauvais durant telle période pouvant apparaître au final comme positive sur une période plus longue, mais dans bien des cas le jugement de ces évènements et de ces choix n'apparaissent bon ou mauvais qu'à posteriori. A l'image de l'évolution Darwinienne on peut expliquer en aval les disparitions et les évolutions des espèces, mais nous sommes incapables de prévoir les bifurcations futures. Dans bon nombre de cas la raison échoue à donner des solutions, et la crise actuelle nous met dans une situation où au final la raison pure ne nous est pas forcement d'un grand secours. Elle nous empêche même d'agir nous poussant à toujours complexifier nos raisonnement pour éviter les éventuels problèmes que notre logique prétentieusement prédictive nous dicte.  Nous vivons avec un futur qui est en réalité radicalement incertain comme disait Keynes à son époque et cela le cerveau humain ne semble pas l'accepter, il lui faut des substituts. Hier il lui fallait des oracles, des devins,  aujourd'hui des prévisions économétriques .

 

Quand la raison nous bloque

 

     Ainsi si nous analysons la crise de l'euro, pour revenir aux sujets économiques qui font la nourriture quotidienne de ce blog, on peut rapidement se bloquer sur la question de savoir s'il faut ou non sortir de l'euro. On peut en réalité trouver autant d'avantages que d'inconvénients à cette sortie et trouver des raisons théoriques au besoin de la monnaie unique.  De la même manière l'on peut éventuellement trouver des arguments sur l'intérêt à très long terme de laisser en place le libre-échange. C'est d'ailleurs souvent sous ce cadre de très long terme que les économistes libéraux raisonnent, ce qui déjà faisait frémir Keynes car c'est bien ce cadre qu'il a le plus démolie avec ses théories. On a souvent accusé Keynes de courtermisme, c'est à dire d'avoir une politique économique qui ne s'intéresse qu'au présent et pas à ses effets sur le long terme. En ce sens on peut affirmer que l'économie keynésienne est une économie de l'action immédiate qui ne se soucis pas du futur. Mais cet attrait pour le présent n'était pas le fruit de l'hédonisme assumé de Keynes, ni d'une quelconque maladie mentale, en réalité elle découlait de l'acceptation de l'incertitude radicale qui existe lorsque l'on veut prévoir le futur. Keynes était à l'origine un mathématicien, il aimait beaucoup les statistiques et les probabilités, et il a échoué à résoudre la question de l'incertitude radicale. Celle-ci est présente sur les marchés économiques par exemple, comme elle l'est dans l'évolution des espèces. Dans ces deux cas il est impossible en tenant compte des connaissances présentes de prévoir les évolutions futures, et ce même en ayant hypothétiquement une connaissance totale de la réalité actuelle.Les évolutions de ces systèmes sont par nature chaotique. Dans le cas du marché financier, Keynes avait parfaitement compris le mécanisme d'auto-réalisation et d'anticipation des acteurs qui rend le fonctionnement des marchés totalement chaotique. Chaque acteur n'est pas rationnel contrairement au thèses libérales, et il est d'ailleurs dangereux sur un marché d'être rationnel, il faut au contraire suivre le sens du vent, anticiper les actions des autres acteurs du marché plutôt que de faire des prévisions fondées sur des calculs relativement rationnels. Ce n'est pas un hasard si Keynes n'aimait pas les marchés, il les connaissait trop bien.

 

  Face à cette incertitude radicale concernant le futur que ce soit les évolutions technologiques, culturelles, politiques ou autre, Keynes  dit qu'il vaut mieux passer son temps à résoudre les problèmes du présent plutôt que d'essayer d'anticiper les effets de nos actions sur le monde futur dont nous ne savons rien.  A l'inverse des libéraux qui veulent croire au déterminisme de leurs modèles et de leurs prévisions, Keynes accepte l'incertitude et en conclu la meilleurs position à adopter. Et quand il disait "quand les fait changes je change mon point de vue", il ne faisait qu'accepter cette dure réalité de faiblesse prédictive. C'est toute la philosophie des politiques keynésiennes, la lutte pour le plein emploi maintenant, plutôt que des inquiétudes sur l'inflation future. Et comme il le disait,  on ne voit pas vraiment en quoi enrichir le présent pourrait appauvrir le futur. Bien sûr à cela on dira qu'il y a les limites écologiques mais là encore nous pourrions agir dans le présent en évitant l'usage de matières premières qui s'épuisent, et il est difficile de savoir si finalement les humains et leur ingéniosité ne vaincra pas cette malédiction énergétique.  A trop vouloir agir sur le présent en s'inquiétant des effets futurs nous ne faisons finalement plus rien, et nous produisons à la fin un futur dont nous ne voulions pas. On lutte contre des déficits et l'on accouche de déficits encore plus grands. Les libéraux sont en réalité de grands prétentieux lorsqu'ils disent que le marché finira toujours par s'auto-réguler, à long terme mais à long terme nous serons tous mort. Si nous laissons la France en l'état actuelle, continuant le libre-échange, peut-être que dans un siècle les choses iront mieux, quand la planète entière aura alors un niveau de vie comparable au notre et que la démographie mondiale aura rendu rare le salarié à l'échelle planétaire, mais que de vies brisées entre temps, que de projets abandonnées stupidement. D'ailleurs la France existera-t-elle encore dans un siècle, on peut en douter si ses habitants cessent de procréer pour cause de misère et de chômage. Et ces français du futur, ne dépendent-il pas au final de la façon dont nous traitons les français d'aujourd'hui? Vaste question, là encore prétendre qu'à long terme les choses s'arrangeront pour justifier l'inaction dans le présent est  bien là  une vile perfidie, bien plus qu'un raisonnement sain et rationnel.

 

Réapprendre à agir sans certitude

 

    Nous devons réapprendre à affronter nos doutes, et accepter à nouveau de nous tromper. Il ne s'agit pas bien sûr d'agir sans réfléchir, mais nous ne devons pas non plus nous bloquer parce que nous ne connaissons pas l'entièreté des évolutions futures. Il nous faut réapprendre à faire acte de foi, à défendre nos convictions même si nous doutons parfois de celles-ci.    Sur les questions complexes face auxquelles nous n'avons pas les moyens de répondre  de façon totalement scientifique et bien nous devons affirmer des principes comme guide. En quelque sortes il ne faut pas que l'excès de rationalisme nous empêche d'essayer d'améliorer la situation présente. Il faut parfois faire semblant de savoir pour pouvoir agir dans le sens de notre intuition et de nos codes moraux. Qu'importe si l'on ne peut tout démontrer des empires se sont construit sur des malentendus et des erreurs à l'image de l'empire libérale qui règne aujourd'hui sans partage.

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9 janvier 2011 7 09 /01 /janvier /2011 12:56

 inflation-du-mark.jpg Doit-on craindre une forte inflation des marchandises sous l'effet conjugué du protectionnisme et de la relocalisation des productions qu'il produira?Le protectionnisme risque-t-il de faire exploser l'inflation en France? C'est une question qui n'est pas du tout anodine ni dénuée de sens tant il est vrai que nous nous sommes habitués à avoir des taux d'inflation relativement bas depuis une vingtaine d'années, du moins officiellement. La réalité de l'inflation est en effet à discuter les dirigeants de nos pays ayant la fâcheuse tendance à fausser les chiffres lorsqu'ils leur déplaisent. Aux USA par exemple, si l'on se fit aux indicateurs d'inflation qui étaient pratiqués avant la réforme Clinton, on s'aperçoit que l'inflation avec ces instruments de mesure aurait été deux fois plus rapide que l'inflation officielle. On pourrait voir également l'explosion du prix du logement en France comme une nouvelle forme d'inflation, une inflation caractéristique d'une société qui est passée d'une nation où le pouvoir était dans la production, à une nation où le pouvoir économique est maintenant dans la rente.  Le libre-échange ayant transformé les effets de la hausse excessive de la masse monétaire en la dirigeant vers les valeurs spéculatives comme l'immobilier.

 

  Donc la basse inflation que nous connaissons est en réalité toute relative, et il faut être extrêmement prudent lorsque l'on dit que l'inflation actuellement en France est basse car cela cache souvent d'autres problèmes et rapports de forces.  Ensuite je rappellerais rapidement que ce qui compte dans l'absolu ce n'est pas l'inflation mais la hausse du pouvoir d'achat. Si votre salaire stagne mais que l'inflation des prix augmente de seulement 1% vous perdez du pouvoir d'achat. A l'inverse si l'inflation est de 5% mais que votre salaire augmente de 6% vous gagnez là 1% de pouvoir d'achat alors que l'inflation était nettement plus forte. Il ne faut pas trop écouter les paranos de l'inflation qui ont tendance à oublier cette simple arithmétique. L'inflation c'est surtout un poison pour la rente financière et foncière, et encore même là tout dépend des taux ou de la vitesse de l'augmentation des prix du foncier. Ce qui compte c'est les gains relatifs de chaque partie de la société et l'on peut sans trop se mouiller qu'en matière de part de revenue le travail a été le grand perdant de la mondialisation heureuse bien que beaucoup d'intellectuels aient vendu celle-ci au nom de l'intérêt des travailleurs-consommateurs.  L'inflation c'est un peu un faux problème cela cache l'évolution de la répartition des richesses certains gagnent d'autres perdent. Dans le cadre de la mondialisation les producteurs locaux ont perdu les importateurs et les super-marché ont gagné. Certaines professions non soumises à la concurrence étrangère ont eu les maigres avantages de la mondialisation sans les inconvénients, d'autres ont tout perdu. Mais globalement la société française y a beaucoup perdu et la mondialisation étant ce qu'elle est c'est à dire chaotique et provocatrice de crises, elle ne pourra pas perdurer, reste à savoir qu'elle seront les effets d'une relocalisation sur l'économie de notre pays.

 

        Ensuite on peut se poser une question sur l'inflation que nous connaissons depuis vingt ans. L'essentiel des produits que nous consommons aujourd'hui en France et particulièrement les produits de base, comme l'habillement par exemple, sont importés de pays à bas salaire. Cependant le rapport entre l'évolution des prix et l'évolution des coûts de production ont-ils pour autant évolué de façon similaire? Est-ce que la chaussure ,jadis fabriquée en France, que vous achetez aujourd'hui est beaucoup moins cher alors qu'elle est faite maintenant en Chine? La réponse nous la connaissons c'est non, on peut même affirmer que le prix des chaussures n'a eu de cesse de grimper ces dernières décennies. Et pourtant l'on sait que le coût de production lui a baissé en parallèle. Il en va de même pour des produits comme le lait le coût d'achat au producteur baisse mais pas les prix de vente.  Diable comment se fait-il que les prix de production baissent et que le consommateur n'en voit pourtant pas le début d'un bout de gain dans son portefeuille, qui lui est pourtant bien rétrécit par le chômage et la précarité que le libre-échange a provoqué. Dans aucun pays occidental on a eu de déflation des prix, par contre du chômage et des délocalisations çà on en a à la pelle. En fait la seule chose que les salariés ont gagné dans la mondialisation c'est du temps, oui du temps pour pointer à l'ANPE ou pour faire des mots croisés. L'essentiel des gains liés à la mondialisation n'est pas allé dans la poche des consommateurs, ni même dans celle des producteurs de biens, mais en réalité dans tout les intermédiaires. Importateur, financier, paradis fiscaux, actionnaires, rentiers de tout forme, voilà les vrais bénéficiaires de la mondialisation heureuse et de la baisse des coûts du travail à l'échelle mondiale. Il faut cesser avec cette argument qui veut que l'inflation soit un drame et que la baisse des prix de production sont formidables, il n'en est rien.

 

    Puisque l'on constate ce paradoxe l'on peut alors se demander si véritablement ceux qui prévoient une forte inflation en cas de fermeture commerciale du pays ont raison. Ou plus exactement est-ce que finalement cette inflation bien utilisée n'est pas le meilleur moyen de changer la répartition de la richesse à l'intérieur de la structure sociale en transférant des revenus des rentiers et des parasites intermédiaires,  vers les producteurs de richesses réelles et les salariés. Comme le disait keynes, l'inflation  c'est un peu le remède de mère nature contre les aberrations des inégalités excessivess et la mauvaise répartition des richesses d'un pays, et plus on empêche l'inflation d'apparaître et de faire justice, avec des astuces comme la monnaie forte, et plus celle-ci se venge le jour où elle revient.

 

La relocalisation, l'inflation et la répartition des richesses

 

    Il est évident que la réindustrialisation provoquera des changements notables dans la répartition des richesses. Les métiers et leurs grilles de salaires actuelles seront complètement revues, on comprendra alors que les métiers d'avenir ne sont nécessairement ceux qui sont les plus vantés par les médias. Dans une France qui se réindustrialise on aura plus besoin d'ouvriers que de  maîtres d'hotel ou de coach. Dans les couches aisées de la population on redécouvrira que finalement mieux vaut l'école Normale et polytechnique que HEC, science PO, ou l'ENA.  On rentrera dans un univers où il faut produire des choses et non des symboles. Et le premier effet majeur des relocalisations et du protectionnisme sera de rétablir le rapport de force entre les salariés et les patrons de façon plus équitable. On pourrait même revenir à des salaires indexés sur l'inflation comme c'était le cas autrefois afin de définitivement d'éviter la situation actuelle où les salaires deviennent insuffisant pour vivre correctement.

 

    Cette effet de hausse des salaires pourraient avoir un effet sur les prix des marchandises vendues, c'est vrai mais seulement si les hausses sont répercutées sur les ventes ce qui n'est pas automatique. Car comme nous l'avons vue précédemment si les prix ont continué à augmenter malgré la baisse des prix de production, c'est parce que tout un tas d'intermédiaires se sont nourri en lieu et place des producteurs. Dans le cadre où les rapports de force changent grâce au protectionnisme, ils ne changeront pas seulement pour les salariés, mais aussi pour les entreprises. En effet les entreprises productrices, les agriculteurs et autre producteurs de biens et de service nationaux se retrouveront avantager par rapport aux distributeurs, quand aux importateurs la plupart d'entre eux fermeront boutique. Il faudra donc accompagner ce changement de rapport de force d'une augmentation de la concurrence entre les distributeurs pour que ces derniers minimisent la répercussion de la hausse des prix en rognant sur leurs profits plutôt que sur les portefeuilles des consommateurs. Pour limiter la hausse des prix il faudra peut-être aussi agir sur la finance qui ponctionne des revenues délirant sur les entreprises. On parle souvent du coût que représente les salariés c'est un peu vite oublier que les actionnaires eux aussi ont un coût et qu'il est extrêmement élevé, d'autant que ces derniers ne servent rigoureusement à rien à une entreprises. Les salariés qui voient leurs salaires augmenter, l'entreprise peut en tirer des bénéfice en terme de productivité,mais  la hausse des rendements des actions on ne voit guère quel avantage en tire l'entreprise.  Accuser la hausse des salaires d'être source d'inflation c'est oublier un peu vite les autres sources de hausse des prix.

 

    Les entreprises productrices ne pourront plus nourrir le système financier comme elles le font à l'heure actuelle en jouant sur la masse salariale du tiers-monde et sur les paradis fiscaux. Il faudra donc mettre en place un nouveau système de financement des entreprises de façon à ce qu'elles puissent rogner sur leur profits au détriment des actionnaires et des rentiers. Bien évidement les économies ne doivent pas se faire sur l'investissement productif. Afin de limiter la hausse des prix nous pourrions aussi revenir à des limitations ou à des prix fixés par l'état tout simplement. Le marché ayant souvent montré son irrationalité il ne faut pas se gêner pour gelé des prix dans certains secteurs si la raison et les conditions pratiques et l'intérêt général le réclame, nos amis chinois ne se gênent pas pour le faire chez eux. Si un secteur connaît une inflation étrange qui n'a rien avoir avec des évolutions et des contraintes physiques réelles alors l'état doit prendre ses responsabilités en limitant la hausse. Il n'y a pas que les taux d'intérêts, le libre-échange, et le contrôle de la masse monétaire pour limiter les hausses de prix.  A terme de toute façon le retour des producteurs dans le contrôle de l'économie sera grandement bénéfique y compris pour la maîtrise des prix. En effet l'argent sera plus utile chez les créateur-producteur que chez les vendeurs-actionnaires, car les producteurs pourront toujours améliorer la productivité physique alors que la hausse des revenus des actionnaires et des intermédiaires ne faisait que ponctionner de la richesse provenant d'autres classes sociales.

 

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3 janvier 2011 1 03 /01 /janvier /2011 18:01

map monde 

On voit souvent comme argumentation contre le protectionnisme le fait qu'il puisse rapidement entraîner une diminution de la concurrence et provoquer des monopoles ou des cartels nationaux. Il faut montrer que cet argument ne s'appuie en réalité sur rien, et que c'est en fait une affirmation péremptoire sans aucune validité factuelle en réalité. On pourrait même montrer que le protectionnisme, bien loin de réduire la concurrence peut l'amplifier voire même la faire renaître, tant il est vrai qu'à l'heure actuelle nous assistons à une énorme concentration d'entreprises et d'activités à l'échelle mondiale. Seulement la concurrence, suivant qu'elle soit dans un cadre protectionniste et réguler entre pays, ou dans une situation de libre-échange totale, va changer de nature.  En effet la mondialisation n'a pas accru la concurrence entre entreprises comme on aime à le dire si souvent dans les salons imbibés d'idées libérales mal comprises, au contraire cette dernière n'a eu de cesse de diminuer. C'est essentiellement une concurrence entre bassin d'emploi et système sociaux que la mondialisation a produite. C'est d'ailleurs bien souvent des entreprises françaises ou américaines qui creusent les déficits commerciaux de leurs propres pays par les délocalisations qu'elles se sont employées méthodiquement à produire ces trente dernières années. C'est donc bien une concurrence entre systèmes sociaux économiques qui s'est mis en place et non la fameuse concurrence qui est sensée permettre l'amélioration du système de production.

 

Le protectionnisme rend la concurrence bénéfique

 

Le but de la concurrence comme nous l'avons vue récemment a en partie comme objectif l'amélioration constante du système productif par un mécanisme d'élimination darwinienne des entreprises. Je ne reviendrais pas sur cette question, puisque je l'avais déjà fait dans le lien que je viens de donner.  Cependant il faut souligner que la question de la concurrence est bien celle  des acteurs qui subissent cette concurrence, car il y a concurrence et concurrence. Faire en sorte d'améliorer ses produits, d'améliorer sa productivité ce n'est pas la même chose que de diminuer ses coûts en expatriant sa production. Il y a une différence de nature entre la diminution des coûts par l'amoindrissement des conditions sociales, et l'amoindrissement des coûts par l'amélioration technique et l'investissement productif. Malheureusement nous usons du même mot de concurrence pour définir des mécanismes qui sont totalement différents dans leurs conséquences, car l'un améliore la qualité de vie globale d'un pays, son niveau de productivité réel, et l'autre au contraire la dégrade et concentre de plus en plus la richesse entre quelques mains. Ce qui  produit des crises de surproduction par la faiblesse de la demande et l'endettement qui découle des faibles salaires distribués.

 

      On pourrait ici parler de concurrence à dynamique positive et de concurrence à dynamique négative pour les différencier, et le libre-échange est une contrainte organisationnelle qui produit mécaniquement une dynamique négative, car portant la concurrence uniquement sur le terrain du coût du travail. Alors vous me direz pourquoi le libre-échange est-il à ce point néfaste pour la bonne concurrence? Et bien pour la simple raison qu'il est toujours moins coûteux de développer ses profits en réduisant le coût de sa masse salariale à court terme qu'en développant les machines-outils ou en améliorant la productivité physique du travail. C'est surtout vrai de nos jours. Les gains de productivité sont plus lents qu'après guerre, à cause de la moindre innovation technique d'une part, et pour diverses raisons que je n'aborderais pas ici, et qu'en plus toute une partie de l'ex-tiers-monde produit maintenant une grande quantité de salariés qualifiés à très faible revenue. Dans ce contexte l'entreprise qui fait de la productivité à l'ancienne, c'est-à-dire en formant ses salariés au mieux et en améliorant son système de production ne peut rien contre l'entreprise qui délocalise en Asie, et qui, même si elle est physiquement moins productive, le sera beaucoup plus grâce au gap salarial. Différence salariale qui s'ajoute d'ailleurs souvent au jeu des dumpings monétaires liés à la sous-évaluation pratiqué par certains pays.

 

      En bref dans une situation de libre-échange intégral qui consiste à instaurer des règles du jeu égales dans un monde fortement inégal, la concurrence se transforme en plébiscite pour l'esclavage et l'amoindrissement des conditions salariales. À ce problème s'ajoute une dénégation totale du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, ce qui constitue une grave atteinte à la démocratie. En effet, accepter la concurrence à dynamique négative, revient à accepter que les conditions de travail d'un pays ne soient plus le choix collectif des peuples, mais uniquement celui du moins-disant planétaire. La concurrence à dynamique négative est un mécanisme algorithmique de type recherche du minimum salarial, car en régime de libre-échange les nations sont  contraintes de l'aligner sur le niveau de revenu le plus bas pour maintenir leur balance des paiements à l'équilibre . Bien sûr, cela provoque la contraction de la demande à l'échelle planétaire, et le chômage un peu partout.  C'est donc une contrainte profondément anti-démocratique puisqu'elle suppose que ce n'est pas à la collectivité de fixer un certain niveau social acceptable, mais au marché international. En toute logique les libre-échangistes devraient prôner la suppression pure et simple de la démocratie puisqu'il vide ce concept de toute possibilité d'intervenir réellement dans la société et qu'ils considèrent que tout doit être le fruit de la libre concurrence. On voit bien ici la fameuse contradiction que j'avais naguère noté entre le libéralisme politique qui régule la question sociale par le débat politique et démocratique, et le libéralisme économique qui ne voit que le marché comme régulateur des rapports de force au sein des sociétés. Ce second libéralisme porte en fait très mal son nom, tant il est contraire à l'esprit de liberté justement. Ce libéralisme se résume à donner beaucoup de liberté pour quelques-uns et aucune pour tous les autres.

 

    À l'inverse le protectionnisme permet de ramener la concurrence vers une dynamique positive où celle-ci ne se fait plus sur les salaires, mais uniquement sur la production et la capacité des entreprises à faire des gains de productivité physique. Le protectionnisme, en renchérissant le coût du travail, obligera nos entreprises à orienter plutôt leurs investissements dans la technique et l'amélioration productive. Il n'est pas impossible au final que les gains de productivités réelles soient plus fort  dans un cadre protectionniste que dans un cadre de libre-échange. Il faut se rappeler par exemple que pendant toute la période d'âge d'or des USA, de la fin de la guerre de Sécession en 1865 à 1945, les USA ont été le pays d'occident le plus protectionniste avec des droits de douane moyens de 50%. Ce pays avait aussi pour caractéristique un coût de la main-d'oeuvre largement supérieur à celui du vieux continent de la même époque. Or les gains de productivité y étaient largement supérieurs. Les états du nord, ceux chez qui la main d'oeuvre était la mieux traitée étaient aussi ceux où l'industrie a décollé en premier, loin des états esclavagistes du sud. Il y a donc une certaine corrélation entre productivité du travail et gain de productivité si l'on se fit à l'histoire. Et de toute façon une hausse de la productivité doit toujours se traduire par un élargissement du marché sous peine de chômage de masse. Ensuite le protectionnisme a cette vertu de rendre des frontières économiques aux nations, et donc de leur rendre leur capacité à produire la répartition des richesses qu'elles souhaitent. Il ramène donc le politique dans l'économie et la démocratie en même temps. Grâce au protectionnisme la logique de recherche du minimum salariale perd son sens et chaque peuple pourra à nouveau s'organiser comme il le souhaite et non comme le souhaitent les marchés internationaux des marchandises. L'on comprend ainsi la peur qui habite les élites françaises du mot protectionnisme, car dans un pays aussi attaché à l'égalité leurs gros revenus risqueraient de fondre à grande vitesse en cas de retour de la démocratie dans les affaires commerciales. Le protectionnisme c'est la disparition du chantage aux délocalisations pour justifier des inégalités de plus en plus délirantes.

 

Autre avantage du protectionnisme, il permettrait d'augmenter le nombre d'entreprises  à l'échelle planétaire en cassant les monopoles internationaux qui se sont construits au cours de ces vingt dernières années de mondialisation délirante. Chaque pays cherchant un plus grand degré d'autonomie économique sera obligé de créer des concurrents locaux face à ces géants planétaires. Politique d'indépendance économique d'où pourrait naître une régénération de la concurrence. Dans certains secteurs comme l'informatique, la domination d'entreprise comme Microsoft ou Google est une véritable calamité. Et la fin de leurs monopoles devrait être une priorité pour les nations du monde entier, en ce sens les Chinois nous montrent la voie à suivre. En effet est-il normal que des entreprises américaines puissent écrire les normes dans le secteur de la programmation comme Microsoft le fait avec son Windows? Ou encore imposer ce que vous pouvez ou non lire sur internet grâce au filtre Google qui est loin d'être neutre? En effet quand vous utilisez Google ce dernier vous donne des liens en fonction de ses propres choix. Il n'est pas forcement neutre. Google étant une entreprise privée ce pouvoir exorbitant doit lui être retiré, je pense qu'un moteur de recherche est par nature un bien public qu'il serait bon que les états et les citoyens se mêlent de ce genre de chose. Donc dans ce secteur comme dans beaucoup d'autres, le protectionnisme et des politiques nationales seront à même de redonner un sens au mot concurrence en multipliant les acteurs à l'échelle planétaire. On voit donc bien que protectionnisme et concurrence ne sont vraiment pas antinomiques ils sont au contraire de vrais amis.

 

Le protectionnisme et les transferts technologiques 

 

    Dans un texte récent apparu sur le Scriptoblog, on pouvait lire un résumé et une critique sur le dernier livre de l'économiste et ami d'Emanuel Todd, Hakim El Karoui. Un livre dont l' ambition se résume à son titre "Réinventer l'Occident". Si ce livre et cet auteur vous intéresse vous pouvez lire également l'interview que mon collègue blogueur Malakine avait fait d'Hakim El Karoui en novembre dernier. Cependant  ce n'est pas de la critique du livre ou du livre lui-même que je veux parler ici, mais d'un argument anti-protectionniste que l'auteur de cette fiche de lecture emploie dans sa critique du livre et  à mon avis à tort. J'en parle parce que c'est également un argument critique qui revient souvent. L'auteur dit dans son texte que le problème avec le protectionnisme c'est qu'il va produire un retard technologique dans les sociétés occidentales. Sociétés qui petit à petit perdent leur avance technique par l'effet cumulé d'un déclin culturel qui conduit les jeunes d'occident à faire des études non scientifiques, et par l'énorme potentiel humain sur lesquelles la Chine et l'Asie  pourront compter à l'avenir. Il n'est pas question ici de contredire l'idée d'un déclin en matière d'innovation en occident pour l'avenir. Je l'avais déjà écrit par ailleurs, l'avenir de la science est en Asie quand on sait que la petite Corée du Sud produit plus d'ingénieurs chaque année que les USA, on imagine l'avenir de la Chine puis de l'Inde. Nous serons dans tout les cas  des nations de second rang au plan scientifique, mais cela ne veut pas dire pour autant que nous sommes condamnés au déclin absolu et que le protectionnisme nous transformerait en une nouvelle URSS. C'est à mon avis une grave erreur intellectuelle que de penser que le protectionnisme empêchera l'importation des techniques et des savoir-faire étrangers. Et c'est même très exactement le contraire qui se produira comme à chaque fois que le protectionnisme a été utilisé dans l'histoire. Le critique du Scriptoblog  confond ici le commerce avec la libre circulation des idées et des connaissances, de plus ce n'est pas parce qu'un pays ferme ses frontières commerciales qu'il va se fermer aux investissements étrangers au contraire même. 

 

    Ainsi rien n'empêchera un pays en avance de venir nourrir le marché français de ses innovations asiatiques en investissant dans notre pays pour y faire des affaires. Le protectionnisme poussera au contraire ces nouvelles puissances industrielles à investir chez nous pour y vendre ce qu'elles savent faire. À l'inverse le libre-échange, s'il est maintenu,  nous poussera à un déclin et un retard abyssal. En effet, à quoi bon produire en France ses innovations asiatiques futures, si l'on peut directement les exporter de Chine? Donc au contraire, le protectionnisme couplé à une liberté d'échange technique et d'investissement poussera au transfert technique et évitera à nos pays de couler comme ils le font actuellement. C'est le libre-échange qui nous conduira au déclin absolu. Le protectionnisme lui nous permettra de nous limiter à un  déclin relatif. Un déclin uniquement dû à notre moindre poids démographique. Bien sûr cela n'empêchera pas qu'une bonne politique scientifique et industrielle est nécessaire, mais le protectionnisme n'est pas un frein au progrès technique, c'est en fait l'inverse. Des pays comme l'Allemagne qui était très en retard sur la Grande-Bretagne l'ont rattrapé justement grâce au protectionnisme, et ce fut la même chose pour le Japon ou la Chine actuelle qui fait du protectionnisme tous azimuts en favorisant les transferts techniques vers ses propres entreprises. On ne voit pas pourquoi il en irait différemment pour l'occident demain.

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