Avez vous déjà remarqué le nombre d'antennes satellites présentent sur les immeubles modernes? Ne vous êtes vous jamais posés la question de savoir si avoir une antenne par appartement n'était pas finalement idiot? En effet une seule antenne et des répétiteurs suffiraient à alimenter tout les appartements de l'immeuble moyennant l'usage d'un répétiteur de signal. Je dis cela parce que j'ai toujours trouvé incroyablement moche ces antennes, toutes tournées dans la même direction. Dans les grands ensembles tel que les HLM cela saute littéralement aux yeux et pour cause il y en a partout, comme sur l'image de l'article, même si celles-ci sont colorées. C'est en un sens représentatif du modèle économique qui s'est imposé ces trente dernières années. Lorsque la France s'est équipée pour recevoir la télévision hertzienne tout le monde aurait trouvé incongrue le fait d'avoir une antenne hertzienne par appartement. Dans la France gaulliste on cherchait l'efficacité collective, si la construction d'une seule antenne pouvait fournir l'accès pour tous de la petite lucarne alors à quoi bon en construire plusieurs. C'est ainsi que les appartements des immeubles recevaient chacun leur prise liée à l'antenne collective de l'immeuble.
Les antennes satellites sont apparues dans une période économiquement à l'opposé de celle des trente glorieuses, les années 90. On ne cherchait déjà plus l'efficacité collective, mais la maximisation de la consommation individuelle quel qu'en soit le prix et le gaspillage collectif. Comment l'économie, la science économique qui prétend faire de la science avec toute la rigueur à laquelle ce principe doit se référer, a-t-elle pu aboutir à une logique où une consommation gaspilleuse soit considérée comme économique plus efficiente car fondé sur le désir individuel. Comment ne pas voir que l'argent qui aurait pu être économisé en achetant des antennes collectives aurait pu servir à autre chose. Nous avons là l'exemple parfait de l'inefficacité des mécanismes économiques purement individualistes. On peut voir la même chose pour des secteurs comme la santé par exemple, on sait que les assurances publiques et collectives comme la Sécu sont largement plus économique que les systèmes privés fondés sur les choix individuels comme aux USA. Et pour cause on fait une économie liée à l'effet classique révélé par Adam Smith lui même, celui de la division du travail. On pourrait également épiloguer sur l'inefficacité totale des systèmes de retraite par capitalisation, dont le fonctionnement est à des années lumière du fonctionnement réel de l'économie et du transfère entre génération. Au moment où nous doutons de notre système collectif regardons, un peu la catastrophe des retraites par capitalisation en Grande-Bretagne ou aux USA. La retraite par répartition collective est infiniment supérieure aux systèmes de ces pays quoiqu'en pense notre président et son frère... Plus le travail est large et partagé, plus il est efficace. On réduit les coûts individuels grâce aux économies d'échelles. Je parle ici bien sûr à l'intérieur d'un cadre nationale, où l'esprit collectif peut exister ainsi que les solidarités qui lui sont attachées, ou plutôt, qui lui étaient attachées vue l'évolution catastrophique des mentalités sur ce plan.
Le seul intérêt que l'on peut avoir dans la privatisation et le fonctionnement des marchés c'est l'innovation, le changement de paradigme produit par la rapidité des transformations de structures et de productions. Après guerre nos anciens ont eu bien du mal à choisir un système d'organisation qui soit à la fois plus efficace et plus juste que l'ancien. Les gaullistes et les communistes membre du CNR ont du fortement se disputer pour voir dans quel orientation le pays pourrait éviter à l'avenir les problèmes inhérents au tout collectif ou au tout marché. Ils ont alors tranché, et défini les monopoles publiques comme étant le fruit de la contrainte technique, on parlait de monopoles publiques naturels. Le reste était laissé au jeu du marché dans un cadre tout de même réguler pour permettre une concurrence saine, c'est à dire dans laquelle on évitait la formation de monopoles ou d'oligopoles privés. L'état servait d'arbitre au marché pour lui permettre d'éviter la loi de la jungle que nous connaissons aujourd'hui.
Individualisme et richesse comptable
Les solutions employés après guerre ont été lentement abandonnés, le départ des anciennes générations et la monté de la génération 68, plus individualiste, a lentement remis en cause l'organisation collective, de plus en plus considérée comme une contrainte pour la liberté individuelle. Le résultat nous l'avons aujourd'hui, la destruction du système sociale, de l'état , la remise en cause de l'impôt et ces antennes horribles présentent partout, qui sont les symptômes de l'époque. Nous pourrions y ajouter l'éclatement familiale, tout le monde veut vivre séparément même les couples aujourd'hui se mettent à vivre séparément c'est dire l'évolution. Au rythme où cela va les gens n'arriverons même plus à vivre avec eux même. Tout ceci est bien sûr bon pour le commerce parce que deux individus vivants séparément consommeront à l'unité plus qu'un couple, rien que le loyer et la nourriture représentent une charge plus légère lorsque l'on partage avec autrui.
Le paradoxe c'est que cette inefficacité réel semble nourrir le PIB et donc accroitre la richesse, du moins d'un point de vue comptable. Bon nombre des effets collatéraux de ces mécanismes de consommation individualistes n'étant pas comptabilisés, le système semble enrichir la population alors qu'en fait il l'appauvrit. A l'image de ces services qui naissent de l'éclatement familiale. Là où le grand père gardait les enfants quand les parents étaient occupés, nous avons une garderie payante ou une nounou pour les plus aisés. La solution du grand père était économique non comptabilisé, alors que la garderie, elle, l'est. Puisque le moderne met son vieux à la maison de retraite et fait garder ses enfants par des inconnus, ce manque d'humanité, de solidarité collective a produit une hausse du PIB prodigieuse. Nous sommes numérairement plus riche de notre appauvrissement sociale. Ce que nous perdons de relations humaines directes, nous le transformons en richesse comptable. La prostitution fait grimper le PIB, pas l'amour. La délinquance enrichit le PIB par ses destructions nécessitant la reconstruction alors que la bienséance le fait stagner. Ainsi l'entre-aide, le don, sont nuls économiquement, l'égoïsme et la solitude sont eux pleinement profitables et font exploser la consommation et la croissance. Je crois qu'une bonne part de l'efficacité économique d'un pays provient de toutes ces relations sociales impossibles à numériser, à comptabiliser. Si nous pouvions les mesurer je suis certains que nous nous retrouverions nettement moins riche qu'il y a trente ans.
Pour sortir de la crise il ne faudra pas seulement changer de politique économique, il faudra sortir de l'économisme. Il faudra réapprendre à penser sans l'économie, du moins sans l'économie telle que nous l'avons pensé jusqu'à présent. Nous devons arrêter de ne mesurer la richesse qu'en terme comptable. Nous devons réapprendre la complexité de la réalité celle-ci ne peut pas être résumé à quelques chiffres ou quelques tableaux. Il nous également nous reposer la question du pourquoi, et plus simplement du comment. Réapprendre également à vivre avec les autres et avec les contraintes que cela suscite. Car la société individualiste qui maximise la consommation est derrière nous, elle n'a pas d'avenir ne serait qu'à cause de l'épuisement des matières premières, la consommation va devoir être limité. Il faudra donc retrouver une certaine efficacité dans cette consommation, efficacité qui passera nécessairement par plus de collectif. En fait nous devons, nous occidentaux, nous reciviliser et réapprendre ce que nos ancêtres trouvaient naturelle, le bien commun et l'action collective.