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19 juillet 2024 5 19 /07 /juillet /2024 15:40

 

Le retour en grâce de Von Der Leyen malgré son grotesque passif vient de montrer une nouvelle fois l'impossibilité de changement à la tête de l'UE. Cette structure bureaucratique organisée autour de concepts économiques erronés hérités du néolibéralisme anglo-saxon et de l'ordolibéralisme allemand n'arrive pas à produire autre chose qu'une dérive de plus en plus totalitaire et éloignée des préoccupations des citoyens du continent. Jamais la construction européenne n'avait à ce point mérité son titre de totalitarisme européen. Et il ne faut pas s'étonner de l'éloignement progressif de l'UE avec les principes démocratiques, car elle est née justement pour permettre aux dirigeants des états membres d'échapper aux principes démocratiques. C'est particulièrement vrai en France où les pilules néolibérales n'ont jamais permis de remporter une élection. Grâce à l'UE, nos élites ont trouvé la contrainte parfaite pour imposer ces politiques à la population française. La comédie jouée par certains politiciens français qui joue les révolutionnaires à Paris et avalise toutes les directions prises par l'UE de l'autre n'est qu'une énième preuve de cette triste réalité. Les élites françaises ont trahi, cela depuis longtemps, et les accolades chaleureuses de Manon Aubry à Von Der Leyen, ne sont qu'un triste étalage de cette réalité. Il ne faut plus guère s'en étonner.

 

Si le projet européen, qu'on pourrait vraiment décrire comme fasciste désormais, semble gagner en ampleur écrasant de plus en plus fortement les peuples et les derniers pays libres du continent. Il faut quand même souligner à nouveau sa grande fragilité. En effet même s'il s'oriente de plus en plus vers une fédéralisation en poussant à retirer aux états membres leurs derniers atours de souveraineté, n'oublions pas qu'un système économique et politique, même tyrannique, a besoin d'un certain succès économique pour être stable. J'ai même envie de dire que plus un système est tyrannique et plus il a besoin d'une assise économique forte pour asseoir son autorité. Je sais qu'il y a aujourd'hui le grand fantasme du contrôle absolu des citoyens grâce à l'électronique moderne et à l’ingénierie de surveillance moderne. Mais le simple événement des gilets jaunes a montré que toute la surveillance moderne s'écrase rapidement quand la population se met vraiment en colère. Ce qui maintient réellement le pouvoir européen c'est avant tout la mentalité des populations européennes qui se laissent petit à petit enfermer dans cette prison. Mais elles pourraient bien se réveiller quand les frigos seront vides, ce qui pourrait arriver assez vite en réalité.

 

La fin de la globalisation

 

C'est que l'UE est une structure pensée et fondée dans la réalité idéologique et géopolitique des années 70-80 même si sa carte maîtresse fut le traité de Maastricht en 1992 . L'UE n'étant pas une nation, mais un système bureaucratique fondé et organisé autour de règles intangibles, elle est incapable de faire de la politique, c'est-à-dire de s'adapter au monde qui l'entoure en fonction des changements. Coincée dans son idéologie mélangeant autoritarisme bureaucratique et libéralisme macroéconomique, elle a pu faire illusion quand les USA ont imposé la globalisation dans les années 70 jusqu'aux années 2010. Mais cette situation a clairement pris fin. Le reste du monde a commencé à remettre en cause les principes du libre-échange , le changement d'orientation des USA est d'ailleurs arrivé assez tardivement par rapport à d'autres pays comme le Brésil l'Inde et bien sûr la Chine qui n'est pour le libre-échange que lorsque cela arrange son commerce. De l'extérieur, l'Europe ressemble de plus en plus à une zone sans dynamique qui n'attend que de se faire dévorer par l'extérieur et ce ne sont pas les atermoiements d'Emmanuel Macron sur la « souveraineté » européenne qui y changeront quelque chose.

 

 

Les chiffres sont assez éloquents, même le Japon, en déclin démographique rapide, a fait mieux que la zone euro en 2023 par exemple. Et chaque crise extérieure l'UE est la zone qui redémarre le moins vite sans jamais rattraper les années perdues. C'est systématique. Et les prévisions pour cette année et l'année prochaine montrent un décrochage de l'UE non seulement vis-à-vis des USA, mais de toute la planète. Ce qui est le plus inquiétant est probablement le fait que le reste de la planète se lance plus ou moins ouvertement dans des guerres commerciales plus ou moins affiché. Les USA, nous l'avons vu dans un texte précédent, ne cherchent pas tant que ça à réindustrialiser sur leur sol même si c'est l'objectif affiché par les dirigeants américains. Ils essaient surtout de casser la dynamique chinoise avec plus ou moins de succès. D'une part, ils mettent des droits de douane sur les produits exportés de Chine, mais cela ne concerne pas les produits chinois importés d'ailleurs comme le Mexique voisin. L'UE a fait la même chose et les constructeurs chinois ont vite réagi en installant leur production dans des pays comme la Turquie. Dans un cas comme dans l'autre, cette guerre commerciale ne vise pas à réindustrialiser l'UE ou les USA, mais à nuire simplement aux Chinois. Mais il est vrai par contre que les USA ont massivement subventionné leur industrie. Le léger redressement de la balance commerciale malgré la croissance économique des USA pourrait signifier un début de réindustrialisation même s'il est beaucoup trop tôt pour le dire. Les chiffres macroéconomiques américains étant en réalité à prendre avec des pincettes.

 

Quoiqu'il en soit les USA ont largement abandonné les idées de laissez-faire ce qui n'est pas du tout le cas de l'UE. Et pour cause les USA sont une nation, avec une politique, pas l'UE qui n'est qu'une bureaucratie qui applique des traités. Donc si effectivement l'accroissement du poids de l'UE sur nos vies et l'affaiblissement des nations peut légitimement faire très peur, il faut aussi bien voir que cette structure est par nature autodestructrice . Les chiffres de l'économie européenne sont très mauvais, et il n'y a pas à espérer d’embellie à l'avenir bien au contraire, l'effondrement démographique n'étant pas vraiment propice à une forte croissance. L'obsession pour les équilibres budgétaires pourrait même plonger l'UE dans une très grave crise lorsqu'elle s'attaquera à la France comme c'est très vraisemblablement ce qui va advenir dans les deux années qui viennent. La condamnation pour déficit excessif est désormais actée et le nouveau gouvernement français qui sera nécessairement très faible à la vue des conditions n'aura pas la force ni même l'envie de résister aux demandes européennes. Lorsque l'UE réclamera 100 milliards d'euros de réduction budgétaire, il n'y a pas vraiment de doute sur la réaction du futur gouvernement même s'il est de « gauche » ou prétendu comme tel.

Le décrochage industriel Européen
Vers un vrai redémarrage industriel aux USA?

 

Évidemment une telle purge au milieu d'une UE qui connaît déjà une contraction de la production manufacturière ne pourra qu'aggraver la crise. Reste à savoir les conséquences politiques. Les Français à qui on vient de voler les élections accepteront-ils de courber l’échine comme les Grecques en leur temps ? Une telle réduction budgétaire nécessitera la destruction et la privatisation de nombreux services publics. Les hôpitaux largement saccagés par des politiques irresponsables depuis 50 ans pourraient bien être privatisés. Une France sans école publique et sans la sécurité sociale sera-t-elle encore bien viable pour la majeure partie de la population ? Sans parler du risque de privatisation du système de retraite. Et même si les Français plient ce qui est possible puisqu'ils ont tout accepté jusqu'à présent sans vraiment réagir sauf quelques petites jacqueries. Que se passerait-il au niveau européen ? La France reste par exemple un marché très important pour les exportations allemandes ou italiennes. Une forte réduction de la consommation dans ce pays se traduira nécessairement par une forte baisse des exportations de ces pays et donc une dépression. Même si la troïka européenne arrive à ses objectifs, il se pourrait bien que ce soit en fait le meilleur moyen pour provoquer une implosion de l'UE.

 

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15 juillet 2024 1 15 /07 /juillet /2024 15:44

 

La Cour des comptes vient de sortir un rapport sur l'état catastrophique des finances publiques français. Quelqu'un d'un peu naïf pourrait se dire qu'il est quand même bien dommage qu'un tel rapport ne fût pas présenté avant les élections européennes puisqu'il s'agit quand même d'un point d'éclairage très important pour les citoyens. Et ces derniers doivent pouvoir voter, normalement, en étant parfaitement informé de la situation réelle du pays et du bilan du gouvernement en place. Or comme par hasard, ce rapport tombe juste après les élections et en particulier juste après des législatives particulièrement problématique. Et bien évidement, le rapport tombe alors que la formation du nouveau gouvernement semble hautement problématique, à l'image des résultats de cette élection qui n'ont donné aucune majorité claire même si la gauche faible semblant d'avoir largement gagné. Probablement, les lecteurs de mon modeste blog ne sont sûrement pas dupes de la manipulation. Elle est tellement grossière que n'importe qui peut s'en rendre compte.

 

Ce rapport tombe pour manipuler le jeu politique et favoriser la formation d'un gouvernement de contrition économique. C'est d'ailleurs ce que les instances néolibérales qui nous gouvernent réellement souhaitent à savoir la BCE et la Commission européenne, sans parler du FMI qui verrait bien une purge économique en France. Le rapport de la Cour des comptes aurait très bien pu sortir il y a six mois ou plus, mais comme dans les affaires judiciaires qui apparaissent au moment des élections, on a là la preuve du manque d'indépendance et de neutralité de nos grandes institutions. Des institutions qui devraient uniquement voguer à leur propre rythme sans vouloir interférer avec les processus électoraux, enfin si nous vivions dans une véritable démocratie où la séparation des pouvoirs n'est pas qu'un slogan publicitaire. Mais si la situation du budget national est effectivement catastrophique après sept ans de macronisme il faut rappeler tout de même que ce n'est pas que le fruit de la gabegie dans les services publics. Loin de là puisque par exemple les subventions aux entreprises ont explosé depuis l'arrivée de Macron au pouvoir comme l'indique le graphique suivant. Si l'on regarde sur l'année 2021-22 on voit aussi le gonflement rapide des intérêts de la dette qui sur cette année ont augmenté de 48%. On se souvient des obligations d'état indexées sur l'inflation qui sont une absurdité économique, et du grand emprunt européen pour lequel la France n'a touché qu'une partie alors qu'elle aura pourtant la charge de rembourser dans son intégralité.

 

 

Comme vous le voyez, le discours sur la dette et l'origine du gonflement de la dette publique sont deux choses distinctes. Le but étant pour les politiques européistes de valoriser le discours antidépense publique en faisant croire que ce sont les dépenses de fonctionnement qui sont à l'origine de l'explosion de la dette alors qu'il n'en est rien. L'objectif étant toujours le même, celui de la démolition des derniers restes de l'état providence. Il ne faut jamais oublier que l'endettement sur les marchés financiers est très récent en réalité. La France jusqu'en 1973 a utilisé le circuit du trésor et empruntait uniquement à la banque de France. C'était infiniment moins coûteux en termes d'intérêt, et beaucoup plus logique. Pourquoi devrions-nous emprunter de l'argent produit ex nihilo à des acteurs privés? Et la masse monétaire doit croître régulièrement au rythme des besoins d'une économie. On sait depuis la crise des années trente que la contrition économique est un véritable danger pour une économie moderne avec des gains de productivité. C'est la meilleure route pour la déflation et la dépression. Seulement lorsque vous accroissez la masse monétaire par l'émission monétaire et l'emprunt à taux zéro à la banque de France cela n'a pas le même effet à long terme que si vous l'accroissez par l'emprunt sur les marchés financiers, ces derniers réclamant des intérêts. Il n'y a pas à chercher beaucoup plus loin l'origine de l'explosion des dettes publiques en occident depuis les années 70.

 

 

J’insiste sur cette question parce que la malhonnêteté des libéraux en particulier est tout à fait invraisemblable. Il n'y a pas eu de forte augmentation des dépenses dans la fonction publique. À la limite peut-on critiquer la fonction publique territoriale, mais ce n'est pas l'état. S'il y a eu de la gabegie c'est surtout sur des dépenses délirantes à des moments clefs. La crise de 2008-2010 par exemple a fait fortement augmenter la dette publique. Et nous avons déversé des milliards sur des banques privées pour éviter l'effondrement du système bancaire. Or il n'y a eu aucune nationalisation ou restructuration à l'époque. On n'a même pas remis en place la séparation des activités bancaires pour protéger l'épargne des Français. À mon sens les libéraux feraient bien mieux de parler de ça. À chaque crise internationale, provoquant des remous économiques, on constate que l'état est fortement mis à contribution, et cela sans qu'il n'y ait jamais de retour positif pour l'état. S'il y a un problème dans la gestion des dépenses publiques, c'est bien là qu'il est. On a un état qui a été privatisé et qui utilise l'argent public pour des intérêts privés. Et les obligations d'état indexé sur l'inflation n'étaient qu'une nouvelle preuve de cette forfaiture.

 

Le suicide collectif de la course à l'excédent commercial

 

Mais comme je l'ai dit dans mon texte précédent, le véritable problème de l'économie française n'est pas la dette publique. Celle-ci n'est finalement que la conséquence de choix à court terme et d'intérêt privé d'un état qui n'est plus au service de sa population, mais de quelques intérêts particuliers. Le véritable problème de fond c'est la dette extérieure résultant des déficits commerciaux. Un processus produit par la désindustrialisation, le libre-échange, mais aussi par l’agressivité commerciale d'autres nations. Car la globalisation n'a pas du tout évolué selon les théories libérales qui pensaient que tout se passerait bien dans le meilleur des mondes possibles. Dans les années 70 au moment de la grande dérégulation planétaire, les théoriciens de l'époque pensaient que la seule fluctuation des taux ce change permettrait la régulation du commerce international. Les pays excédentaires connaîtraient des hausses de la valeur de leur monnaie, hausse qui réduirait leur compétitivité et donc leurs excédents commerciaux. À l'inverse les pays qui connaîtraient des dévaluations seraient plus compétitifs avec des prix relatifs plus bas. Cette théorie de la régulation par les fluctuations monétaires fut l'une des justifications de l'abandon des nombreuses taxes et quotas qui régulaient les économies du monde jusqu'à cette époque.

 

 

Malheureusement cela ne s'est pas tout à fait passé comme cela. On constate depuis la fin des années 70 une explosion des déséquilibres commerciaux. Déséquilibres qui sont à la source des crises à répétition que nous connaissons un peu partout. On constate que certains pays accumulent des excédents quand d'autres accumulent des déficits, ces derniers ayant plus ou moins rapidement des problèmes sauf pour les USA qui ont la monnaie internationale et qui jusqu'à présent ont réussi à éviter un effondrement monétaire grâce à ce statut particulier. En réalité loin d'avoir apporté une paix internationale, la libération des capitaux et des marchandises a lancé la planète dans une guerre économique totale. Alors que le libéralisme s'était en partie construit contre les politiques de Colbert qui a inventé en quelque sorte le mercantilisme, les libéraux modernes ont encouragé ce comportement agressif pourtant fortement dommageable pour les économies de la planète. Encore aujourd'hui les journaux dits libéraux ne font qu’encenser les excédents commerciaux allemands ne comprenant pas qu'ils nourrissent les crises en Europe et dans le monde.

 

 

Rappelons ici la distinction entre le mercantilisme et le protectionnisme. Le protectionnisme consiste à poser des protections sur le commerce que ce soit des droits de douane des quotas ou des normes diverses. Le protectionnisme peut en effet prendre beaucoup d'aspects. Il peut aussi résulter de la géographie ou d'un comportement collectif naturellement nationaliste comme au Japon par exemple. Les Japonais préféreront toujours acheter japonais qu'étranger là où un Français fera un choix plus individualiste. Pour des gens qui pensent que les peuples sont interchangeables, cette différenciation culturelle semble impossible. Pourtant, elle se mesure bien dans la pratique. Le mercantilisme lui consiste à accumuler des excédents commerciaux. Le protectionnisme peut servir le mercantilisme, mais le libre-échange aussi, tout dépend du contexte économique. J'insiste sur ce fait, car on a une fâcheuse tendance à confondre les deux alors que c'est très différent. Le protectionnisme est un outil alors que le mercantilisme est une stratégie de domination par le commerce. Elle devrait être normalement condamnée par principe, car elle est fondamentalement porteuse de confrontation et de crises. Or que font nos économistes? Ils l'encouragent et ne cessent d’applaudir aux excédents chinois ou allemands. S'il est bien de rappeler que des déficits commerciaux sont dangereux, il faudrait quand même à un moment donné rappeler aussi que ce sont les fruits des excédents d'autres pays. Quand des nations ont des excédents structurels, ils devraient être condamnés par la communauté internationale. Même Adam Smith préconisait des politiques protectionnistes en réponse à de tels comportements commerciaux.

 

La Chine devient un problème pour l'économie mondiale

 

Si la France a effectivement un problème de dette publique, rappelons qu'elle est aussi victime de l'Allemagne et de la Chine qui sont des pays fortement mercantiliste. L'absence de réaction de notre pays face à ces agressions, voilà le vrai problème. C'est d'autant plus grave que nous n'avons même plus le seul outil qui nous restait après la dérégulation des années 70 à savoir la variation de notre taux de change. Rappelons également qu'en lançant une course à l’excédent commercial vous cassez mécaniquement la demande mondiale puisque tout le monde ne peut pas avoir d'excédent commercial en même temps. Si tout le monde réduit sa demande intérieure pour avoir des excédents, vous créez mécaniquement une insuffisance de la demande. C'est particulièrement vrai pour la Chine avec son poids gigantesque qui commence en plus à avoir des problèmes de vieillissement. Le mercantilisme allemand détruit l'Europe, mais le mercantilisme chinois risque de détruire la planète. L'Europe qui connaît actuellement une nouvelle baisse de sa production manufacturière devrait se demander si casser l'économie française est une bonne idée alors que l'on devrait plutôt pousser l’Allemagne à augmenter sa demande intérieure pour réduire à la fois ses excédents et nourrir un retour à la croissance économique. Bien évidemment la première intéressée le refusera, mais il faudrait déjà mettre l'option sur la table pour mettre les Allemands face à leurs contradictions et à leur agressivité économique.

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11 juillet 2024 4 11 /07 /juillet /2024 16:25

 

Alors que les politiciens se disputent maintenant pour savoir qui doit former le gouvernement avec un Emmanuel Macron en extase devant les conséquences de sa dissolution. La situation de la France continue de ses détériorés sur le plan économique. Le pays connaît en ce moment une quantité de faillites équivalent à celui de la crise de 2008-09. L'explosion du prix de l'électricité semble avoir un effet absolument dévastateur sur la production nationale. Il faut dire que dans le système européen avec la monnaie unique chaque pays s'est spécialisé en fonction de ses avantages. J'en vais longuement parler dans ce texte sur la zone euro et ses conséquences. De fait, la France n'avait aucun avantage comparatif réel lorsque l'on a fait l'euro. Nous n'avons pas la meilleure position géographique, nous n'avions pas la base industrielle la plus large et contrairement à l'Allemagne nous n'avions pas de pays pauvres pouvant servir de machine à abaisser les coûts de production sous la main comme les pays de l'Est. La France avait bien un avantage cependant, c'était celui de la production électrique nucléaire qui permettait aux entreprises du pays d'avoir accès à une électricité moins chère que chez nos voisins.

 

 

Malheureusement comme vous le savez déjà, les prix de l'électricité française sont maintenant très élevés grâce à vingt de déconstruction de notre système de production électrique, d'EDF et grâce au grotesque marché européen de l'énergie. La France se retrouve donc à poil, si je puis dire, sans plus aucun avantage réel. Le résultat, on le connaît, c'est la hausse vertigineuse de notre déficit commercial qui n'est plus à l'équilibre depuis plus de vingt ans maintenant. En effet, il faut remonter à 2004-2005 pour voir une balance à l'équilibre. Étrangement, la question du déficit commercial et de la désindustrialisation du pays n'a pas du tout été abordée lors des deux élections qui viennent de se tenir. La dette publique on en parle, mais la balance commerciale qui est bien plus importante ce fut le silence radio. La gauche a gagné en ignorant totalement la question parlant de hausse des salaires et de la demande intérieure et ignorant parfaitement la question des grands équilibres. Comme si cela n'avait aucune importance. À droite ce n'est guère mieux le RN n'avait que des propositions relativement superficielles sur la question. Quant au centre, n'en parlons pas puisque Macron et son gouvernement prétendent avoir un bon bilan économique. Il est pourtant assez désastreux. Emmanuel Macron est l'homme qui a fait le plus augmenter la dette du pays sans effets pour la production nationale. Car c'est bien là qu'il faut insister. L'endettement en lui-même n'est pas nécessairement un problème. Si cet endettement permet de développer des capacités de production et d'accroissement des richesses nationales produites.

 

 

Le vrai problème c'est que Macron a endetté le pays sans aucun effet sur la production nationale. Si cet endettement avait servi à augmenter notre production nationale et à réduire nos besoins d'importations, nous ne serions pas dans une situation aussi dramatique. Malheureusement, il n'en est rien et cette question n'a même pas été abordée pendant les débats nationaux. Comme l'a très bien dit Emmanuel Todd, la France tout comme la plupart des pays occidentaux est devenue un pays de consommateurs. Nous ne produisons plus grand-chose et la situation commerciale s'en ressent. Les hommes politiques, surtout de gauche, n'ont, semble-t-il, toujours pas compris le problème. Pourtant on aurait pu espérer qu'après la crise du Covid et la guerre en Ukraine, la question de la production nationale, et de la nécessité de réindustrialiser, devienne la question prioritaire, ce n'est pourtant pas le cas. Car avant de relancer la demande, il faut bien évidemment s'occuper de l'offre. La question ne se poserait évidemment pas si nous étions dans la situation de la Chine ou de l'Allemagne, mais ce n'est pas le cas.

 

Politique de relance et réindustrialisation

 

Alors est-ce que pour autant il faut une politique de contrition économique et de réduction de la dépense publique ? La réponse est évidemment non. Malheureusement, la France va probablement être condamnée pour déficit excessif. Là encore il n'y a eu aucun débat pendant les élections qui se sont déroulées comme si la France était encore un état indépendant avec sa monnaie et le contrôle de ses frontières alors qu'elle n'est qu'une petite région de l'UE comme l'on voulut nos élites de droite comme de gauche. Je crois que ce qui m'agace le plus dans notre situation est l'hypocrisie générale des politiciens qui n'assument jamais vraiment leur choix. L'Europe est une contrainte que tous ceux qui se disputent aujourd'hui les postes au gouvernement ont voulue, pourtant aucun d'entre eux n'en tire de conclusion réaliste quant aux politiques possibles. L'UE obsédée par les déficits publics, inscrits dans le marbre avec la ridicule loi sur les 3% de Maastricht (chiffre complètement arbitraire sorti de nulle part à l'époque), va très certainement contraindre le prochain gouvernement français à une purge à la grecque. En effet, selon les estimations c'est près de 100 milliards d'euros de réduction budgétaire que l'état français devrait faire dans les années qui viennent. Un choc asymétrique qui provoquera inéluctablement une très forte récession et une très forte baisse des rentrées fiscales comme à chaque fois que ce type de « remède » est employé.

 

Mais ces politiques découlent de la structure même de la construction européenne. Il est impossible dans ce cadre de faire réellement autre chose que des politiques de contritions et c'est bien pour cela que notre pays se retrouve dans une telle situation. Seul membre de la zone euro a avoir maintenu une demande soutenue grâce à l'endettement croissant, nous croulons sous les dettes tout en maintenant quelque par la demande à l'intérieur de la zone euro. En effet, les déficits commerciaux français ont été en quelque sorte en partie la bouée de sauvetage du commerce de nos voisins. Et même si la France n'est plus que le second partenaire économique de l'Allemagne c'est indirectement la demande française qui tirait la croissance dans ce pays. L'Italie qui a choisi la voix de la contrition de la demande depuis longtemps n'a par exemple plus du tout de croissance depuis vingt ans. On peut déjà prévoir la panne économique que provoquera la chute de la demande française en Europe, surtout dans une situation déjà assez mauvaise chez nos voisins. Le modèle allemand mercantiliste souffrant fortement de la hausse du prix de l'énergie et de la montée en gamme très rapide de la Chine. Alors est-ce que la politique européenne qui va bientôt nous être imposée aura quand même quelques effets bénéfiques ? Probablement pas même sur le commerce extérieur, il est douteux que ce genre de politique ait un effet positif en l'état.

 

En effet, si l'effondrement de la demande intérieure entraîne forcément une baisse de la consommation et donc des importations cela aura aussi comme effet une très forte baisse des investissements des entreprises. La demande locale pilote quand même en grande partie les investissements des entreprises dans un pays comme la France. Il n'est donc même pas certain que la très forte baisse de la demande intérieure française ne produise un rééquilibrage de la balance commerciale. La Grèce qui a subi ce remède digne de Diafoirus n'a pas retrouvé une balance commerciale positive malgré la violence de la baisse du PIB. Elle replonge même depuis 2022. Le choix de la réduction des dépenses est donc hautement discutable, mais c'est malheureusement bien vers cette direction que nous nous dirigeons. Alors qu'elle serait la solution ? La politique prônée par l'extrême gauche visant à relancer la demande intérieure n'a de sens que si elle est accompagnée d'une politique protectionniste et d'une dévaluation pour maximiser ses effets sur la demande de produits nationaux.

 

 

Il est intéressant ici de comparer la situation de la Grèce, notre destin, avec celui de l'Islande. En effet, l'Islande tout comme la Grèce a subi un très gros choc économique entre 2008 et 2010 provoqué indirectement par la crise de subprime. Mais l'Islande qui n'était pas dans l'euro et l'UE a pu faire une politique indépendante. Contrairement à la Grèce, l'Islande n'a pas gardé une monnaie surévaluée, sa monnaie s'est fortement dépréciée, augmentant l'inflation certes, mais n’abîmant pas la balance commerciale du pays. La principale différence de résultat entre ces deux orientations macroéconomique fut que l'Islande connut une forte inflation de 2008 à 2010 alors que la Grèce tomba en déflation. Le résultat à long terme se passe de commentaire avec la comparaison de l'évolution des niveaux de vie entre 2010 et aujourd’hui. L'Islande a un niveau de vie désormais largement plus élevé que celui de la Grèce, l'écart s'est fortement accru sur la durée. Il s'agit là d'une preuve irréfutable de la supériorité des solutions basées sur l'inflation-dévaluation plutôt que de la déflation-contrition à l'européenne.

 

 

 

Pour sauver la France, réduire les déficits commerciaux tout en maintenant un peu de demande intérieure, la solution la plus rationnelle est donc plutôt celle qui consiste à dévaluer. Cela permettrait de réduire la demande de produits étrangers tout en rendant nos productions plus compétitives. On peut même imaginer des hausses de salaire en dévaluant, c'était d'ailleurs généralement ce que faisait la France autrefois. Quand la situation sociale devenait impossible, on lâchait du lest sur les salaires le dimanche et on dévaluait le Lundi ce qui réduisait les conséquences sur le plan du commerce extérieur. Dans un pays où il n'y a pas d’institution syndicale forte ou le citoyen est directement en prise avec l'état la seule façon de fonctionner n'est pas de négocier, mais d'employer ce type de méthode. Essayer de faire comme l'Allemagne sans avoir sa structure politique et sa culture familiale c'est du suicide qui pousse à la paralysie et à guerre sociale. Malheureusement ces politiques nécessiteraient une sortie de l'UE et de l'euro au préalable. Et c'est bien pour ça qu'on en parle si peu.

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4 juillet 2024 4 04 /07 /juillet /2024 15:24

 

Nous sommes donc en route pour la dernière phase électorale et il semblerait que la stratégie des castors de gauches ait encore fonctionné puisque la possibilité d'une majorité claire du RN s'éloigne de plus en plus. La multiplication des désistements en faveur du centre ou de la gauche semble favoriser en théorie le recul du RN. Je dis bien en théorie parce qu'il n'est pas certain que la population adhère complètement à ce petit jeu. Il pourrait même y avoir une forte hausse de l'abstention pour ce second tour, la population étant probablement lasse de ces stratégies grotesques de front républicain. Demander à un électeur d'LFI de voter pour un représentant de Macron après tout ce que LFI a sorti sur macronisme, tout ça pour lutter contre un fascisme largement imaginaire, c'est quand même beaucoup demander. Mais à ce stade on peut se demander plusieurs choses: est-ce que la stratégie de Macron était de rendre le pays ingouvernable ? Est-ce qu'il n'avait aucune stratégie, et qu'il n'a agi que sous une impulsion infantile en réaction à la défaite aux Européennes ? Ou bien a-t-il fait tout ça en comptant arnaquer la gauche et retrouver au final une certaine majorité en jouant encore à sur la stupidité des castors en lutte contre le fascisme imaginaire ?

 

 

L'hypothèse la plus faible à mon avis c'est celle qui consiste à penser que Macron n'avait aucune stratégie derrière cette dissolution. C'est effectivement un personnage impulsif, souvent grotesque et orgueilleux, certainement sans aucune appétence pour l'intérêt national français et encore moins pour les gens ordinaires. Il ne s'en ait d'ailleurs jamais vraiment caché. On se souvient tous de ces propos incroyablement réactionnaires sur les gens qui sont et ceux qui ne sont pas. Cependant, ce détachement complet vis-à-vis de l'intérêt national ne signifie pas pour autant qu'il est stupide. Sur le plan collectif, il l'est bien évidemment, mais pour défendre ses intérêts à lui et ses idées bien arrêtées, il fait preuve d'une grande ténacité. C'est d'autant plus vrai qu'il a visiblement un ego assez surdimensionné et que l'erreur de sa part est simplement inimaginable. Enfin de son point de vue. Il semble d'ailleurs que cette dissolution était prévue de longue date. On vient même d'apprendre qu'il l'avait dit à son père deux mois avant. On pourrait dire qu'il s'agit ici d'une stratégie qui pourrait être mise en place pour couvrir la réalité, mais je ne le crois pas. Bon, ici il n'y a pas de preuve concrète, ce n'est qu'un avis personnel. Mais je pense quand même que tout ceci n'est pas le fruit d'une réaction épidermique au lendemain des Européennes quoiqu'on pense du bonhomme.

 

L'autre hypothèse bien plus probable à mes yeux c'est qu'il a voulu rebattre les cartes pour lutter contre sa perte de pouvoir et préparer la prochaine élection présidentielle pour son camp. S'il parvenait à mettre en place des « réformes » grâce aux nombreux 49.3, la situation n'était pas vraiment des plus reluisante, et il risquait à tout moment une motion de censure, ce qui aurait produit cette dissolution. Là il a choisi le moment de la dissolution, le pire moment possible possible d'ailleurs, empêchant tout débat de fond en lançant le vote quelques semaines seulement après les Européennes. Il a donc choisi l'agenda qui était à son avantage, du moins le supposait-il. Il est certain qu'il n'imaginait pas que son parti allait l'emporter. C'était une évidence statistique. On peut d'ailleurs se demander s'il n'a pas tout fait pour perdre préalablement avec une qualité de campagne aux Européennes des plus médiocre. On ne peut pas dire que Valérie Hayer ait fait sensation. Donc vous allez me dire que c'est stupide, il a dissous pour avoir moins de pouvoir qu'avant en faisant exprès de perdre ? C'est qu'en mettant un de ces adversaires au pouvoir pendant trois ans dans une situation économique très dégradée avec un pays surendetté il compte sûrement faire rebondir le camp européiste ainsi pour les présidentielles.

 

C'est assez simple en fait. À partir du moment où vous savez que rien n'est possible au sein de l'UE, j'entends par là, rien d'important. Il est en effet impossible de réindustrialiser, impossible de faire du protectionnisme, et bien sûr impossible de dévaluer comme nous ne maîtrisons même plus notre monnaie. À partir de là n'importe quelle formation politique qui arrive au « pouvoir » se retrouve de fait coincée par les règles européennes. Dès lors, elle ne peut tenir ses promesses électorales et se retrouve vite en porte à faux avec son électorat. Il n'y a pas à chercher beaucoup plus loin l'origine de la chute systématique des pouvoirs en place de droite ou de gauche. Ils sont simplement décrédibilisés par l'exercice du pouvoir, puisqu'en réalité le pouvoir ils l'ont cédé collectivement à des puissances tutélaires que sont l'UE et la BCE. Macron s’appuie simplement sur cette mécanique pour préparer le retour de son camp pour les prochaines présidentielles. Son camp ce n'est pas nécessairement lui-même ou Renaissance, mais simplement le camp de l'extrême centre, celui qui nous dirige d'une main de fer depuis Giscard. Le camp de la construction européenne et celui de la déconstruction nationale. L'idée derrière la dissolution fut donc simplement de décrédibiliser les fausses oppositions de gauches ou de droite en les mettant dans une situation où elles seront au pouvoir sans l'avoir complètement puisque par exemple elles ne pourraient pas faire de référendum puisque seul le président le peut. Il me semble que cette hypothèse est la plus vraisemblable des trois.

 

La dernière hypothèse, la plus inquiétante, est une évolution de la seconde. Cette fois c'est un pari sur le blocage du pays. Aucun groupe n'ayant une majorité réelle, le pays se retrouverait donc un peu bloqué. C'est d'ailleurs ce qui semble devoir advenir si l'on peut se fier aux évaluations actuelles. Cela ne veut pas dire qu'aucun gouvernement ne peut se former, mais que celui-ci ne pourra vraiment pas faire grand-chose sans risquer là encore des motions de censure. Dans ce cas là il n'est pas certain que le groupe au pouvoir se retrouve décrédibiliser puisqu’effectivement il n'aura pas vraiment le pouvoir. Cependant, la situation du pays est telle que cela pourrait être une opportunité pour les instances internationales d'intervenir en France. La France est dans une situation économique très compliquée et ce fait est le fruit des politiques de Macron très clairement. Là encore, on pourrait y voir de la maladresse et de l'incompétence. Mais on peut aussi imaginer qu'il s'agissait en fait d'une action volontaire pour mettre le pays dans une situation où il tomberait en cessation de paiement. La récente dégradation de la note de la dette publique française montre que les marchés financiers commencent à douter de celle-ci. D'ailleurs, le ministre allemand des Finances a bien indiqué récemment qu'il ne souhaitait pas que la BCE soutienne la France si les taux d'emprunt explosent. Cela veut bien dire ce que cela veut dire. Connaissant le poids de l'Allemagne dans la direction des affaires européennes, cela signifie qu'il considère que la France doit être traitée comme la Grèce en 2008-2010.

 

Si nous étions légèrement complotistes, nous pourrions dès lors comprendre tout le sens de la présidence d'Emmanuel Macron. Il n'était pas là pour redresser directement le pays, mais pour au contraire le couler. Sachant qu'il ne pouvait pas réellement appliquer les recettes néolibérales qui sont par exemple en train de démolir l'Argentine, il a cherché à mettre le pays dans des conditions qui mettrait le pays sous tutelle étrangère. Et là effectivement si le pays ne peut plus emprunter sur les marchés financiers tout en ne maîtrisant même pas sa monnaie l'état serait pieds et mains liées. Cela ressemble à du machiavélisme sans le sens de l’intérêt de la nation, mais cela fait sens. C'est d'autant plus plaisant comme explication qu'Emmanuel Macron vient du monde bancaire et de la finance. Alors il s'agit là bien sûr d'une reconstitution a posteriori. Il s'agit d'un piège intellectuel fréquent qui peut faire tomber justement dans le complotisme. Mais ce n'est pas à ignorer totalement surtout si l'on se souvient des dépenses délirantes que notre président théoriquement libéral depuis qu'il est au pouvoir.

 

L'hypothèse d'une France sous tutelle du FMI et de l'UE

 

Alors est-ce que la mise sous tutelle est possible ? Et bien malheureusement c'est possible et cela risquerait de très mal se passer. Ces tutelles sont en réalité des événements qui permettent à des acteurs privés de piller les nations. Sous la prétention de mettre de la bonne gestion dans les pays concernés, on voit généralement de grands groupes piller les structures des nations concernées par ces tutelles. Le FMI n'a jamais sauvé aucun pays et les politiques qu'ils préconisent enfoncent généralement les pays dans des crises encore plus graves. La Grèce est aujourd’hui un pays meurtri, fortement affaibli par les recettes du FMI. Mais par contre beaucoup de gens se sont enrichis grâce à ça. Si la France se retrouve sous tutelle du FMI, les grands groupes privés, surtout américains, se feront une joie de détruire nos systèmes sociaux et de récupérer tout ce qui est potentiellement rentable. Les retraites françaises ou le système de santé une fois privatisés produiront des rentes importantes pour Blackrock et compagnie.

 

La France ainsi gérée rentrerait dans le rang et fournirait un système extrêmement inégalitaire comme les aiment nos bourgeois des centres-ville, même ceux qui votent à « gauche ». Alors vous allez me dire, mais les Français se révolteront. Et bien les Grecques se sont révoltées, énormément d'ailleurs. Mais le système politique qui favorise le centre a tout bloqué. Et finalement les rentiers locaux ont réussi à imposer les cures néolibérales grâce à la sacro-sainte nécessité de rester dans l'UE et l'euro. Je ne vois pas très bien pourquoi cela se passerait différemment en France. Car pour éviter une telle situation, il faudrait réellement faire appel à un surmoi patriotique. On voit bien que la majorité de la population n'a plus cet attachement à la nation, y compris au RN. C'est un patriotisme très superficiel. Or il faut un vrai attachement à l'intérêt national pour affronter ces pillards financiers. Il faut être capable de nationaliser les banques, de contrôler les frontières, des capitaux, et de refaire une monnaie nationale en envoyant se faire foutre la BCE, le FMI et la Commission européenne. Cela n'a rien d'impossible, mais il faut de gens avec une vraie colonne vertébrale intellectuelle et patriotique pour ça. Et je n'en vois guère chez nos politiciens actuels.

 

Après ce scénario n'est pas certain non plus. On pourrait tout aussi bien se retrouver avec une politique Macron bis menée par un gouvernement mélangeant le centre et la gauche pseudorévolutionnaire. Cependant, tout ceci ne fera que reculer le temps de la clarification nécessaire. La France arrive à un temps où des choix cruciaux doivent être faits. Vouloir rester dans l'UE et l'euro tout en maintenant notre système social et économique va devenir impossible. On ne peut plus camoufler les contradictions économiques avec l'endettement. Soit on reste dans l'UE et alors il faut accepter le néolibéralisme et détruire notre système social. Cela peut être fait par l'extrême centre ou une tutelle de l'UE ou du FMI. Soit la France garde son système et rompt avec l'UE et l'euro moyennant quelques années difficiles quand même parce qu'il faudra de toute manière rééquilibrer la balance des paiements. Depuis les années 70, le centre mou a décidé de ne pas décider en faisant l'Europe tout en évitant de trop en appliquer les conséquences directement. L'euro nous a ainsi totalement désindustrialisé et pendant ces vingt dernières années nous avons accumulé d'énormes dettes publiques et extérieures. On ne peut plus continuer comme ça. C'est ce choix-là qui devrait être au centre des débats électoraux, mais le système médiatique fait tout pour l'éviter. Les prochaines années vont pourtant devoir trancher sur cette question centrale la soumission définitive ou la souveraineté nationale.

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20 juin 2024 4 20 /06 /juin /2024 16:04

 

C'est une thématique que nous avons souvent abordée, mais comme nous nous dirigeons vers des législatives très précoces, il me semblait important de rappeler toute la contradiction qu'il y a à prétendre résoudre les problèmes de la France tout en restant dans la construction européenne. Je sais que vous allez me dire que les Français ont bien voté contre la souveraineté nationale puisque les partis souverainistes ont fait un score ridicule aux Européennes. Et je l'admets bien volontiers. Mais ce n'est pas pour autant que la réalité va changer. Les Français vont vite s’apercevoir que les prétendus partis extrémistes se coucheront très vite une fois au pouvoir, justement à cause de leur absence de réflexion et de politique visant à retrouver notre souveraineté. C'est que les faits sont têtus et la réalité âpre et difficile. Il est beau de rêver avec des programmes révolutionnaires vendant des hausses de salaire d'un côté ou la fin de l'immigration et le retour de l'état de l'autre, mais sans s'attaquer aux causes profondes de notre situation tout ceci ne servira à rien.

 

Un coup d’œil rapide sur les programmes des deux grandes listes favorites pour cette élection surprise montre l’absence de conscience de la réalité du monde dans lequel nous vivons. Il faut bien le dire, c'est particulièrement vrai à gauche, le RN commençant d'ores et déjà à annoncer ses renoncements ultérieurs sans trop le dire. Il est certain que les dirigeants du RN ont plus conscience des contraintes qui seront les leurs en ne voulant pas sortir de l'UE que le Front de Gauche. C'est en tout cas ce que les programmes affichés semblent indiquer . Après il est évident que ma confiance dans les programmes affichée est très faible. On connaît les politiciens français et leur capacité à ne jamais faire ce qu'ils prétendent réaliser. S'il y a un aspect dont je ne vais pas trop parler ici qui me ferait plus voter RN, c'est sur le nucléaire. Certes, la gauche semble pour l'instant discrète sur cette question affichant le fait qu'elle ne touchera pas au parc nucléaire actuel. Sauf que dans le même temps le Front de gauche a ressorti de la naphtaline Dominique Voynet à qui nous devons l'abandon de Superphoenix, et une grande partie du recul français sur le nucléaire de ces vingt dernières années. Admettez quand même que le doute s'insinue sur cette question pourtant cruciale de la production d'électricité. Ajoutons à cela que EELV, un parti que je juge extrêmement dangereux pour le pays, est dans le groupe du Front de Gauche justement. Mais parlons un peu des programmes puisque le but est quand même de mettre en avant leur caractère contradictoire avec le fait de rester dans la construction européenne.

 

Le programme du Front de Gauche

 

Vous pouvez trouver le programme du Front de Gauche à cette adresse. C'est sur le site de LFI, mais je suppose que c'est le vrai programme. Étant donné la vitesse de l'arrivée des législatives, ils n'ont certainement pas eu le temps, et les moyens, de faire un site Front de Gauche, je présume. Je vais me concentrer rapidement sur les questions économiques. Au contraire de beaucoup de commentateurs je ne suis pas certain que les questions géopolitiques par exemple aient un gros poids sur une telle élection, même s'il est vrai qu'avec les délires guerriers de Macron sur l'Ukraine la question pourrait se poser. En lisant ce programme, la première chose qui me vient à l'esprit est de savoir si leur programme n'a pas été écrit sous l'effet de substances illégales. Entendons nous bien, je suis keynésien, pas libéral ou communiste. Et je suis le premier à dire que les salaires en France sont trop faibles et qu'il faudrait revaloriser tout ça. Même chose pour les services publics. Je suis le premier à vouloir les défendre. Mais on ne dit pas n'importe quoi et on ne fait pas ça n'importe comment. Et le comment c'est justement le mot qui manque lorsque l'on regarde le programme du Front de Gauche.

 

Comment financer de telles mesures dans un pays qui croule déjà sous les dettes et dont le déficit public bat des records ? L'une des mesures consiste par exemple à fortement augmenter le SMIC. Et je voyais, monsieur Bompard, qui nous expliquait de façon presque keynésienne que l'augmentation des revenus des plus pauvres allait relancer l'économie par la consommation. Et il est vrai qu'appauvrir la population n'a jamais été très bon pour l'économie. C'est ce que disait déjà Keynes en fustigeant les politiques de l'offre chère aux libéraux et qui ont coulé de nombreux pays. Rappelons-nous de la pauvre Grèce il y a à peine plus de dix ans , le pays ne s'est toujours pas remis de la crise alors que l'Islande par exemple qui a dévalué et laissez filer l'inflation se porte aujourd'hui comme un charme. Cependant ce que Bombard semble ignorer, probablement volontairement, ce sont les effets sur les importations et le commerce. Le modèle keynésien n'est pas un modèle pensé pour une économie ouverte et qui a laissé tomber ses industries pour devenir une société du tertiaire vivant d'importation. Pour qu'une politique keynésienne soit valable, il y a des conditions d'application. Il faut par exemple que le pays contrôle son commerce extérieur par des droits de douane et des dévaluations. Sans quoi les relances se transforment en relance des pays qui exportent chez vous. Vous créez des emplois dans les services, certes. Mais tout ceci se fait avec des déficits commerciaux croissants qui mettent en péril votre économie à terme. D'ailleurs au risque de choquer les gauchistes c'est très exactement ce qu'a fait Macron depuis 7 ans.

 

 

Alors évidemment il n'a pas endetté le pays pour verser des salaires aux pauvres, il a endetté le pays pour baisser les impôts des riches et subventionner les entreprises. On ne souligne d'ailleurs pas assez l'explosion des subventions pour les entreprises depuis 10 ans. C'est pourtant l'une des causes principales des déficits publics. L'état compense les effets de l'euro et l'impossibilité de dévaluer par des subventions, ce qui coût très cher, et n'est pas très efficace sur le plan macroéconomique. Sans parler des effets de corruption que cela peut engendrer. Mais le principe des politiques de Macron était le même. C'était du pseudokeynésianisme. C'est un peu comme la bière sans alcool, ça sent Keynes, cela ressemble à du Keynes, mais cela n'en est pas du tout. Les plans d'investissement et de dépense du Front de Gauche créeront probablement quelques emplois de service en France, mais ils creuseront encore plus les déficits commerciaux, déjà passablement élevés, faut-il le rappeler ? On est ici face à une ignorance crasse des réalités économiques. Et c'est d'autant plus grave que la gauche a déjà fait plusieurs fois ce genre d'erreurs en particulier avec le programme commun de 1981. À l'époque elle aurait pu redresser la situation en mettant en place des politiques protectionnistes et en dévaluant. Mais à l'époque la gauche et en particulier François Mitterrand ont préféré choisir l'Europe. Nous nous retrouvons un peu dans la même situation ici en plus grave parce que la France de 1981 était encore un pays très industrialisé avec de vraies capacités de production. La France de 2024 ne produit même plus de Javel puisque la dernière usine Lacroix vient de fermer.

 

Évidemment tout ce que je viens de dire n'est vrai que si le Front populaire applique son programme or nous savons déjà que l'UE prépare des sanctions contre la France pour déficit excessif. Mais rassurons-nous, la gauche a tout prévu, en effet en deux phrases elle expédie la question centrale de l'UE :

« Mettre à l’ordre du jour des changements en Europe

• Refuser les contraintes austéritaires du pacte budgétaire

• Proposer une réforme de la Politique agricole commune (PAC) »

 

Je veux bien, mais là encore la question du comment se pose. Qui aujourd’hui détient la monnaie française et la produit ? C'est la banque centrale européenne. Vous croyez sérieusement qu'une « région » de l'état pseudofédéral européen peut se rebiffer contre sa banque centrale ? La BCE peut assécher très rapidement l'économie française en devise et c'est particulièrement facile puisque la France est un pays fortement déficitaire sur sa balance des paiements. Et ne parlons pas de la situation sur les obligations françaises et les taux qui flamberaient. Avec ces deux phrases, la gauche ne fait qu'éluder une question européenne qu'elle sait centrale, mais qu'elle sait aussi fortement clivante au sein de son très artificiel Front de gauche. Comme on ne veut pas soulever cette question, on la met sous le tapis avec deux phrases grotesques. Je passe rapidement sur l'idée de contrôle des prix, c'est tout simplement artificiel tel que c'est présenté. Encore une fois le problème de la France c'est qu'elle est insérée dans un système d'économie globalisée. Vous ne pouvez pas d'un côté ouvrir toutes les frontières, laissez le pays se désindustrialiser et de l'autre vouloir tout contrôler y compris les prix. Cela n'a aucun sens si ce n'est fabriquer des pénuries comme dans le cas des médicaments.

 

La réindustrialisation est abordée rapidement à la fin des propositions, ce qui à mon sens est problématique puisque la réindustrialisation devrait être la priorité des priorités. D'ailleurs, des propositions sur l'Europe arrivent aussi à la fin. Drôle de sens des priorités chez le Front de Gauche. Et là encore on navigue en essayant de trouver un chemin entre le communisme, le keynésianisme et le libéralisme en probant des mesurettes et des formules creuses. Ménager la carpe et le lapin c'est vraiment ce qui ressort du programme des extrêmes si je puis dire. Ne voulant pas rompre avec l'UE et l'euro, la gauche est donc obligée de faire du Biden et de promettre des subventions aux industrielles en guise de politique protectionniste. Cependant, il faut préciser que même ça, c'est interdit par les traités, la concurrence ne saurait être distordue par des mesures particulières chez certains états. Il n'y a que l'UE qui peut faire des politiques de subvention ce que le Front de Gauche ne s'avise pas de dire dans son programme. Là encore, la question européenne est éludée pour camoufler à la contradiction politique entre l'extrême gauche et le centre gauche. Je rappellerai enfin que les subventions sont un protectionnisme extrêmement coûteux et peu efficace. Mais les USA ne connaissent pas un ras de marée industrielle avec les subventions de Biden contrairement à ce que racontent trop souvent les grands médias. Par contre, la dette, elle, enfle très vite tout comme les déficits commerciaux. Et la France n'a pas le dollar ou la taille des USA.

 

 

Le programme de la gauche peut se résumer en un plan qui ne s'inscrit dans aucune cohérence globale. C'est vraiment un patchwork visant à plaire à différents courants sans articulation fondamentale . Plus grave il n'y a pas de prise de conscience des contraintes qui sont sur notre pays et c'est là une faute grave qui est une pratique malheureusement trop courante à gauche. Encore une fois, je ne suis pas pour l'austérité ou une politique de contrition économique, cela ne mène à rien. Mais cela ne veut pas dire que demain on peut raser gratis si je puis dire. Un programme doit prendre en compte les contraintes en particulier européennes. Mais la façon de faire de la gauche consiste à dire que nous n'obéirons pas. Sauf que la France a signé des traités et qu'elle s'est volontairement soumise à une banque centrale dirigée par des étrangers. Faire comme si de rien n'était, et comme si nous étions encore souverains, relève de l'escroquerie. Soit vous faites un vrai programme de rupture qui s'inscrit dans un objectif de rupture avec la construction européenne et à un retour au franc et à la banque de France, soit vous faites un programme qui prend en compte les contraintes européennes et effectivement dans ce cas il faut se plier à la « discipline » de l'ordolibéralisme allemand. Le problème c'est que la gauche veut faire les deux en même temps, ce n'est simplement pas possible. Si le Front de Gauche arrive au pouvoir, on aura donc très certainement une rupture rapide avec les promesses. Je ne crois guère à la rupture avec l'UE dans ce cas puisqu'une bonne partie de leur électorat potentiel viendra du centre gauche.

 

Comme j'ai été un peu long, j'analyserai le programme du RN dans mon prochain texte.

 

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17 juin 2024 1 17 /06 /juin /2024 15:11

 

Alors que la campagne électorale précipitée bat son plein et que les démagogues de la politique s'en donnent à cœur joie en multipliant les promesses intenables en restant dans l'euro et la construction européenne, il me semble opportun de prendre un peu de hauteur sur le débat. Si nous avons souvent abordé des questions comme le libre-échange ou l'euro, nous avons finalement moins parlé de ce qui fait le cœur de nos sociétés modernes, la finance et le marché. Il s'agit là pourtant de sujets cruciaux que l'on ne saurait traités sans prendre garde à leur importance. Ce que nous trouvons aujourd'hui normal comme organisation de la société ou de l'économie aurait très probablement choqué un homme du moyen-âge ou de la renaissance. Il ne faut pas croire que nos organisations sont là pour l'éternité des siècles ni même qu'elles sont l'apologie de l'organisation humaine sur terre. La montée en puissance de la Chine montre assez clairement que le modèle anglo-saxon qui s'est imposé à nous par la force n'est pas le seul modèle possible ni même probablement le meilleur. Les Français auraient dû y penser avant de s'imposer à eux même un modèle qui n'était pas le leur jusqu'aux années 70.

 

Dans son livre « L'avenir du capitalisme », l'économiste Jean-Luc Gréau se demandait à juste titre si à l'avenir les états n'allaient pas être obligés de refaire des productions publiques pour compenser l'abandon progressif de toutes les activités qui ne sont pas assez rentables pour le capital. La situation actuelle dans le domaine des médicaments nous apporte une preuve pratique que l'intuition que Gréau a eue dans son livre de 2005 s'avère de plus en plus probable. Les libéraux rétorqueront que les prix des médicaments n'ont qu'à augmenter pour résoudre le problème, mais est-il bien normal de faire grimper les prix artificiellement alors que les activités de production pourraient déjà être rentables en l'état simplement parce que le capital a tellement concentré les activités de production que nous nous retrouvons aux prises avec des entreprises qui sont dans des situations de quasi-monopole ou au mieux d'oligopole privé ? Et ce dont je parle ne concerne pas seulement les pays de l'UE. La Suisse qui est toujours citée en exemple a elle aussi des problèmes de pénurie de médicaments.

 

Nous acceptons avec un peu trop de facilité le mode de financement de nos économies tournées entièrement autour du système financier et de la spéculation. Ce ne fut pourtant pas le cas après guerre. En effet pendant les trente glorieuses la bourse de Paris ne pesait pas grand-chose sur l'économie française. Le système économique français tout comme celui des autres grands pays européens était essentiellement organisé autour d'un système bancaire puissant et d'un état qui a régulé l'économie avec des investissements publics financés par le circuit du trésor et la banque de France. Donc sans des intérêts forts pour nourrir toute une ribambelle de parasites économiques comme c'est le cas aujourd'hui. Car le terme parasite qui est si souvent employé pour décrire les chômeurs ou les personnes touchant les aides sociales s'avère en réalité bien plus pertinente pour décrire notre système actionnarial et boursier actuel. Un certain Sébastien Tixier vient de faire un très intéressant graphique qui montre le caractère extrêmement parasitaire du système financier français. On y voit ce que la bourse apporte aux entreprises et ce qu'elles reversent comme dividende. On voit clairement que la bourse ne finance pas les entreprises, c'est exactement l'inverse. Ce sont les entreprises qui financent la bourse et l’actionnariat. Une réalité bien éloignée de l'image d’Épinal forgée par la propagande anglo-saxonne de ces 80 dernières années. Monsieur Tixier n'est pas le premier à le souligner, c'était déjà le cas de Bernard Maris par exemple, qui nous a quittés bien trop tôt, dans son Antimanuel d’Économie datant de 2003.

 

 

La bourse n'est pas un système qui prend des risques, risques qui justifieraient les énormes rémunérations par la suite. C'est aujourd'hui un système de prédation et de rente qui ponctionne une forme d’impôt privé sur les entreprises et donc indirectement sur les travailleurs et les citoyens. Et cette nuisance ne s'arrête pas là, puisque la nature même du système boursier force parfois les entreprises à se cannibaliser pour maintenir leur cours. Loin d'être un système qui favorise la fameuse gestion en bon père de famille, la bourse favorise la vision à court terme et l'absence de stratégie profonde. L'important étant d'aller dans le sens du vent des cours boursiers. Keynes qui lui même a fait fortune à la bourse le disait par expérience. Mieux avoir tort avec la foule que raison contre elle. En clair même si les mouvements de foule qui touchent très souvent le système boursier produisent des catastrophes, il est irrationnel d’essayer d'aller contre en tant qu'investisseur. L'important étant de savoir quand les bulles risquent d'exploser. Croire qu'un tel système de financement des entreprises est un bon système relève plus de la foi religieuse que d'un raisonnement rationnel. D'un point de vue collectif, c'est une catastrophe.

 

Comme je l'ai dit précédemment, ce système n'arrive même plus à financer les activités les plus essentielles comme la production de médicament. L'industrie pharmaceutique qui est l'une des plus rémunératrices pour les actionnaires est sans doute l'un des secteurs les plus abîmés par ce système. Les délocalisations absurdes qui ont rendu nos pays totalement dépendants d'importations, dans un secteur aussi important pour la qualité de vie de nos concitoyens, sont une preuve de cette nuisance. Il faut rappeler que si l’appât du gain est un puissant outil de motivation et qu'il est au cœur du système capitaliste, sans garde-fou ce moteur peut aussi nous détruire. Les garde-fous étaient dans la limitation de la fluidité du capital par de multiples frontières . Les frontières nationales sur les capitaux tout d'abord qui obligeaient le capital à rester dans le pays et donc soumettaient ce dernier à l'impôt. Le capital avait aussi des limites grâce aux séparations des activités bancaires. Séparation qui a été progressivement détruite dans les années 70-80 en particulier après la mise en place du marché unique en Europe.

 

Durant toutes les années 80-90, les élites françaises et occidentales ont tout fait pour faire renaître le monstre qui avait produit la crise de 1929. Le mélange entre les banques de dépôt et les banques d'investissement étant l'erreur la plus grossière de ces années folles nouvelle version. Le fait de favoriser la fluidité du capital en limitant le lien qu'il pouvait y avoir entre l'actionnaire et l'entreprise a transformé le système capitalistique à visage relativement humain en une machinerie de production de dividende. Hélas pour nos dirigeants, loin de produire un accroissement de l'investissement réel ou une amélioration de l'appareil productif, ce système a fortement participé à la destruction du tissu économique réel favorisant comme je l'ai dit le court terme et les délocalisations massives. En gros en faisant de la finance un système de casino, on a déresponsabilisé les actionnaires et créé un système de servage sous une nouvelle forme. Un système qui ressemble fortement au système féodal à la grande différence que les seigneurs d'alors avaient des richesses limitées par les terres qu'ils possédaient et donc limitées par les lois de la physique elle-même. Le système de servage actuel n'a pour ainsi dire aucune limite puisqu'il ne s'agit que de chiffres sur les banques de données numériques.

 

Redresser notre économie ne demandera donc pas seulement un retour à des politiques économiques nationales rationnelles comme le protectionnisme visant à rééquilibrer les balances commerciales. Il s'agira également de reconstruire un système de financement des entreprises dont l'unique but ne soit pas la maximisation des dividendes pour les actionnaires. La limitation de ces derniers pourrait d'ailleurs être une action d'assainissement du système financier. En plafonnant les revenus possibles de l'actionnariat, on pourrait passablement limiter la course à l'échalote du dividende maximal, et ainsi limiter la démolition des entreprises au résultat moins mirifiques que les secteurs qui ont les plus fortes croissances. Si un système économique viable doit bien évidemment faire en sorte que les activités ne soient pas à perte, cela va de soi. Il doit également faire en sorte que tous les besoins de la population soient remplis, c'est la condition même pour que la civilisation subsiste à long terme d'ailleurs. Le mauvais génie de la finance doit être remis dans sa bouteille au contour bien délimité par l'intérêt général. Un système vicié qui ne promeut que les activités les plus rémunératrices ne pourra que provoquer notre extinction à long terme et là on se demande bien à quoi pourront bien servir alors les fameux dividendes.

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13 juin 2024 4 13 /06 /juin /2024 15:14
La gauche grecque qui a trahi son pays bientôt chez nous?

 

Nous sommes donc en route pour une législative précipitées. L'étrange calcul électoral d'Emmanuel Macron semble pour l'instant se retourner contre lui dans un chaos de plus en plus incontrôlable. Cependant, cette affaire a mis en avant la mentalité dramatiquement basse des candidats politiques, quel que soit leur bord. La situation de certains partis politiques commence à ressembler à des épisodes du « Trône de fer » ou des Rois maudits qui avaient servi d'inspiration à George R. R. Martin pour son œuvre. Le pauvre parti d'Eric Zemmour, dont j'avais déjà parlé et qui me semblait être une impasse, explose aujourd'hui sous les effets du carriérisme de certaines de ses têtes de liste. On pourrait en dire autant des Républicains d'ailleurs. À gauche on fait semblant de ressusciter le Front Populaire, mais sans le peuple puisqu'en réalité les couches populaires votent plutôt pour le camp d'en face n'en déplaise à Mélenchon. Peut-être faudrait-il plutôt parler de Front Bobo. C'est d'autant plus vrai maintenant qu'ils cherchent à faire fusionner LFI avec le PS de Glucksmann qui est pourtant nettement plus proche philosophiquement du macronnisme. On peut déjà imaginer la grande implosion si ce Front Populaire arrive au pouvoir à la suite des législatives. Il est difficile d'aller à gauche et à droite en même temps.

 

Les électeurs voient donc bien que derrière tout ce cirque se cache en réalité surtout des ambitions personnelles et que les motivations réelles n'ont en fait que peu de rapport avec l'intérêt de la population. Il faut dire que depuis Maastricht puis la mise en place de l'euro, la politique en France n'est plus qu'une coquille vide, un théâtre où l'on fait semble de prendre des décisions importantes, alors que l'essentiel est décidé ailleurs . Il est assez étonnant en fait que la population continue à voter, c'est presque triste de voir une population continuer à croire un peu dans un système à ce point avili. Il est vrai également que dans un système aussi centralisé où il n'y a plus aucun corps intermédiaire et où les grands pouvoirs ont été transférés ailleurs, les citoyens n'ont plus de prise sur rien. Les élections sont en quelque sorte le dernier lieu de semblant de civilité où l'on joue à la démocratie.

 

Alors que va-t-il se passer aux prochaines élections ? Il est tout à fait possible que nous nous retrouvions dans une situation avec un RN sans majorité absolue et dans ce cas il sera incapable de diriger puisque visiblement il est bien en peine d'obtenir des alliés. Si c'est le pseudo-Front de gauche qui gagne, on aura automatiquement un nouveau pouvoir centriste. D'abord parce que la gauche devra sa victoire en partie à l'aile PS-Glucksmann et qu'en général dans ces conditions c'est souvent les minoritaires qui pèsent. Ce fut d'ailleurs l'une des raisons de la cinquième république par rapport à la quatrième, mettre fin au jeu des partis qui donnait trop de pouvoir de négociation aux petites listes par le jeu des alliances. On voit bien ici que la constitution du général de Gaulle a échoué même avec tout le respect que l'on peut avoir pour le grand Charles. Il est donc assez probable que la victoire de la « gauche » soit en fait le retour de la gauche plurielle sous une autre forme c'est-à-dire un mouvement centriste et européiste. L'Europe étant le seul socle commun à la gauche actuelle. Car même si LFI parle souvent de rupture avec la construction européenne, c'est toujours en dernier recours, et en réalité contraint et forcé.

 

Autant dire qu'il n'y aura jamais de rupture avec l'UE venant de la gauche. Car pour le faire, il faut avoir un vrai attachement à la nation française, ce qui n'est pas le cas des gens de gauche pour leur grande majorité. Ils se plaindront des conséquences de la disparition des solidarités nationales, mais jamais de la perte du liant nécessaire à cette solidarité. Cela fait partie des grands paradoxes de la gauche française, celle qui consiste à conchier ce qui permet en pratique la solidarité entre les classes sociales d'un même pays, le patriotisme. Les drapeaux palestiniens que brandissent les gauchistes en lieu et place du drapeau français démontrent en soi l'incapacité de la gauche à renouer avec l'esprit national. Ils peuvent s'amouracher de patries étrangères maltraitées, mais pas de la leur. Comme si les maux des Français n'avaient pas d'importance en tout cas beaucoup moins que ceux des étrangers. À ce stade c'est d'un avis psychiatrique dont nous aurions besoin, même si l'on peut toujours se rappeler de la fameuse formule de Rousseau sur cet amour du lointain promu par les cosmopolites :

 

« Défiez-vous de ces cosmopolites qui vont chercher loin dans leurs livres des devoirs qu'ils dédaignent de remplir autour d'eux. Tel philosophe aime les Tartares, pour être dispensé d'aimer ses voisins »

 

Il faudrait d'ailleurs rappeler au passage à nos amis de gauche que le Front Populaire de l'époque, s'il était bien entendu farouchement opposé au racisme, n'en demeurait pas moins opposé également à l'immigration sans limite. Comme le rappelle dans ce texte l'historien Ralph Shor le Front Populaire était aussi très patriotique. Il a même fait appliquer la lois de 1932 limitant l'emploi des étrangers dans les entreprises privées, même le RN actuelle ne propose pas ça. Et comme le dit l'historien lui-même en 1936, les Français ont d'abord pensé à eux même et le Front Populaire a pu accéder au pouvoir dans ce cadre bien loin de la gauche actuelle pour qui les problèmes du lointain semblent nettement plus importants que les problèmes immédiats des Français. C'est d'ailleurs très bien expliqué par Christophe Guilluy dans un article récent où il résume très bien la situation qui a permis au RN d'atteindre son score actuel et la gauche bourgeoise à une très grosse responsabilité dans l'affaire.


 

Le piège néolibéral et l'UE

 

Comme je l'ai dit dans mon texte précédent brillamment commenté par La Gaule, le prochain gouvernement va se retrouver dans une impasse. Quel que soit le courant montant au pouvoir. Car aucun des deux courants ne veut rompre réellement avec le système européen. Et de toute manière, il ne pourra pas le faire dans des conditions de cohabitation. En effet, les référendums par exemple ne pourront pas être organisés sans l'approbation du président. Et connaissant Macron, il n'y a strictement aucune chance pour qu'il collabore ouvertement avec le prochain gouvernement qui ne sera pas de sa couleur. Son esprit enfantin et capricieux, pour ne pas dire pire, le poussera certainement à multiplier les coups pour nuire au gouvernement. Il le faisait déjà passablement avec ses propres troupes alors imaginait avec un gouvernement d'un autre courant politique qu'il méprise en plus . Donc imaginons qu'un gouvernement de Front Populaire ou du RN voulant mettre en place des lois ou des politiques contraires au droit européen. La Commission européenne bloc, tout comme la cour de justice européenne. La BCE décide de menacer la France directement et de provoquer une crise économique sévère dans le pays en nous asséchant les rentrées monétaires. Que se passe-t-il ?

 

Le gouvernement courageux veut organiser un référendum sur la sortie de l'UE ce qui est extrêmement improbable avec le RN ou avec le Front de Gauche. Il ne le pourra pas puisque le président ne le voudra pas et le référendum reste la prérogative du président de la République. Donc vous voyez le dilemme. Même si le futur gouvernement voulait rompre avec l'UE, il ne le pourra pas dans le cadre de l'exercice du pouvoir sous une cohabitation. Il faut impérativement avoir le président de son côté. On voit ici encore une fois les limites de la cinquième république qui a été un peu trop pensé pour le meilleur des hommes que fut le général de Gaulle.

 

L'autre facteur est éminemment économique. Nous vivons dans une structure économique entièrement façonnée par l'idéologie néolibérale depuis les années 70. Si l'UE est l'incarnation de ce pouvoir n'oublions pas que la première contrainte qui a été introduite artificiellement fut la fin du circuit du trésor et l'imposition qui a été fait à l'état d'emprunter uniquement sur les marchés financiers. Comme le disait Raymond Barre lui-même,  maintenant l'état devra payer ses dettes. Sous-entendant que l'état ne pourrait plus les monétiser comme il le faisait un peu jusque là. En mettant l'augmentation de la masse monétaire sous condition d'emprunt à intérêt privé, la France a mis les mains dans l'engrenage de l'accroissement de la dette sans fin. Un engrenage qui a permis depuis de justifier tous les renoncements et qui explique que la France de 2024 ne peut plus se payer la sécurité sociale qu'elle avait en 1945 quand le pays était pourtant ruiné.

 

Pour résoudre les problèmes de la France, il faut donc en préalable enlever les chaînes qui empêchent les politiques publiques d'aller dans un autre sens que celui de la dérégulation et de la privatisation généralisée. Si vous ne revenez pas à un système de monnaie nationale et d'emprunt à la banque de France, effectivement ce sont les marchés financiers en plus de la BCE et de la Commission européenne qui imposeront leur agenda. Il est d'ailleurs tout à fait possible que ce soit là, en réalité, le piège ultime d'Emmanuel Macron. Un homme, qui, il faut le rappeler, est un pur produit de la finance. On peut très bien imaginer que toute sa stratégie fut de surendetter le pays, pour ensuite le faire tomber sous la coupe des marchés financiers, et pour justifier la démolition totale des derniers services publics et du système de retraite. Le pays se retrouverait ainsi vendu à la découpe pour des entreprises et des pays étrangers. La France arrive à un moment similaire à celle de la Grèce en 2010 et il faut rappeler qu'à l'époque c'est la gauche qui a préféré rester dans l'euro l'UE et piller le pays pour les beaux yeux des marchés financiers. Il n'est pas exclu que nous soyons au bord d'une évolution semblable.

 

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7 juin 2024 5 07 /06 /juin /2024 15:41

 

 

Depuis une vingtaine d'années, en fait depuis la mise en place de l'euro, l'Allemagne a semblé redevenir une très grande puissance économique. À mon sens cette montée fut essentiellement une illusion d'optique produite par les effets catastrophiques de l'euro sur les pays du sud que ce soit sur la France ou sur l'Italie. L'Allemagne n'allait pas bien dans l'euro, elle allait surtout moins mal que ses voisins, car elle était plutôt bénéficiaire de la monnaie unique. Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d'abord comme je l'ai déjà expliqué, la zone euro favorise la spécialisation des territoires tout comme les unifications monétaires des nations l'avaient fait autrefois. Or l'Allemagne est le pays le mieux placé géographiquement grâce à ses ports et ses fleuves. Elle est au centre du commerce européen surtout depuis la chute du mur et la fin de la coupure avec les pays de l'Est. Cet avantage est structurel et il explique en partie pourquoi l'industrie européenne sous les effets de l'euro s'est concentrée autour des pays bordant le Danube par exemple.

 

 

Les marchandises pouvant être librement transportés sur tout le continent sans frontières, les endroits où les coûts des transports sont les moins élevés attirent mécaniquement les investissements industriels. Pas de chance, la France n'avait aucun avantage sur ce plan. Le second point était qu'avant même la création de l'euro l'Allemagne avait déjà l'industrie la plus puissante du continent. Cet avantage vient de loin puisque c'était déjà le cas avant-guerre. Même si l'Allemagne a été rattrapée un peu par la France et l'Italie pendant les trente glorieuses, elle a toujours gardé un certain avantage. À cela on peut y ajouter un marché intérieur nettement plus gros surtout depuis la réunification. Il faut également rappeler que l'inflation allemande a toujours été plus faible que celle de ses deux gros concurrents immédiats. Pour compenser ce différentiel, l'Italie et la France ont utilisé régulièrement des politiques de dévaluation. Ces politiques fonctionnaient très bien d'ailleurs puisque ces deux pays avaient une croissance plus forte que l'Allemagne jusqu'à l'époque du SME puis de l'euro. Évidemment la monnaie unique va casser cette possibilité et provoquer une impossibilité d'ajustement économique entre l'Allemagne et ses voisins.

 

Rappelons que l'Allemagne va également casser ses salaires dès le lendemain de la mise en place de la monnaie unique. En effet, les lois Hartz seront mises en place sous le chancelier Gerhard Schröder entre 2003 et 2005,et elles auront comme conséquence une baisse des salaires en Allemagne. Dites-vous bien que ces « réformes » ne visaient pas à concurrencer la Chine ou d'autres pays de ce type, mais bien les autres pays ayant la monnaie unique. La baisse des salaires allemands provoqués par ces réformes fut d'environ 15%, insuffisant pour rendre compétitif contre les Chinois. Par contre, c'était efficace contre des pays de niveau de vie comparable et n'ayant plus la possibilité de dévaluer comme la France et l'Italie. Le miracle allemand n'est donc pas une surprise, c'est le produit même de l'UE et de l'euro et de la stratégie mercantiliste de l'Allemagne au sein de la zone euro. Ajoutons à tout ceci le fait que l'euro reflète l'ensemble de l'économie de la zone euro. L'excédent de la zone étant plus faible que celui de l'Allemagne, il permet à celle-ci de bénéficier d'une monnaie sous-évaluée en permanence. Un avantage qui explique aussi les excédents de ce pays en dehors de la zone euro. À l'inverse des pays comme la France ou l'Italie sont très désavantagées. Les excédents récents de l'Italie ne sont malheureusement pas dus à un quelconque retour à la compétitivité de ce pays, mais simplement à l'effondrement de la demande intérieure. Une situation qui explique aussi l'état dramatique de la natalité locale. Comment faire des enfants dans un pays qui connaît de telles difficultés économiques et une stagnation du PIB sur plus de vingt ans ?

 

 

L'Allemagne est dépassée par la Chine

 

Pendant vingt ans l'Allemagne a donc chanté tout l'été ne voyant pas le danger intrinsèque de son modèle basé sur le pillage de ses voisins immédiats. Il faut dire que les élites de France ou d'Italie n'ont guère contesté ce tournant. Les élites françaises ont été particulièrement lamentables, ne défendant jamais leur intérêt national, le paroxysme étant atteint aujourd'hui avec Emmanuel Macron. L'autre facteur fut évidemment le facteur énergétique. L'Allemagne bénéficiant du gaz russe pas cher. Les délires pseudoécologistes ont accompagné cette « révolution verte » qui a surtout donné des illusions à ce pays. En effet, les panneaux solaires et les éoliennes n'ont pas rendu l'Allemagne plus écolo, mais surtout plus dépendante du gaz de Russie. Cela ne plaisait pas aux USA et vous connaissez la suite. Aujourd'hui, l'Allemagne, qui ne veut pas de nucléaire, se retrouve avec une énergie très chère et très polluante, elle a même rouvert ses mines de charbon et de lignite. Cependant, il faut bien reconnaître une chose, c'est que les élites allemandes savent parfaitement utiliser l'eurolatrie des élites françaises pour renverser à leur avantage les situations. Le marché européen de l'énergie a ainsi permis aux Allemands de faire payer une grosse partie de la facture de leurs choix énergétiques ineptes aux Français qui avaient gardé leur production électrique électronucléaire. Là encore, on voit bien que pour l'Allemagne l'UE est un outil de puissance visant à réduire la concurrence sur le continent, rien d'autre.

 

Mais cette stratégie mercantiliste allemande s'inscrivait dans le système de globalisation néolibéral américain. Pour l'Allemagne la demande intérieure n'avait pas d'avenir surtout avec la démographie allemande. Le pays s'est donc imaginé en pays de production et d'exportation pour le monde entier avec le reste de l'Europe, en particulier l'Europe de l'Est comme main-d’œuvre pas chère pour faire tourner les usines. Le modèle allemand ce n'est pas le marché unique comme déversoir pour les produits germaniques, pour l'Allemagne l'UE n'était que le marchepied qui lui permettrait de vivre grâce à ses exportations vers le cœur de la croissance mondiale, l'Asie et l'Amérique du Nord. Ce modèle supposait une stagnation salariale en Europe, une énergie pas trop chère, mais aussi une permanence dans la spécialisation industrielle de l'Allemagne. Elle supposait très stupidement que les pays d'Asie, en particulier la Chine, ne pourraient jamais faire concurrence aux produits allemands. Malheureusement pour l'Allemagne c'était une grossière erreur. Et à dire vrai, il suffisait d'observer les trajectoires du Japon, de la Corée du Sud, ou encore de Taïwan pour comprendre que la Chine ferait de même, mais avec un marché intérieur colossal de 1,4 milliard d'habitants.

 

Comme l'avait déjà bien vu l'économiste Jean-Luc Gréau derrière le libre-échange, il y a fondamentalement un esprit ethnocentrique et raciste. L'idée que certains sont forcément meilleurs que les autres pour l'éternité des siècles. Autrefois, les Anglais, qui avaient accumulé un énorme avantage comparatif derrière des murs de droits de douane au dix-huitième siècle et la précocité de l'industrialisation, crurent aussi à leur supériorité en signant partout des accords de libre-échange. Ce fut aussi le cas des USA après 1945. Mais ces avantages ne durent jamais, et les pays en rattrapage finissent toujours par dépasser les anciennes puissances dominantes. En particulier à cause des effets de rattrapage technique, les nouveaux pays industrialisés n'ayant pas besoin de moderniser un appareillage et des infrastructures vieillissantes. Il était bien prétentieux de croire qu'il n'en serait pas de même avec la Chine. Les machines-outils et les biens d'équipement qui sont au cœur de la puissance industrielle allemande sont de plus en plus dominés par la Chine. Et il est très probable que dans les dix ans qui viennent, celle-ci s'accapare l'essentiel du marché mondial. Entre la perte de l'automobile sous les effets de la voiture électrique, celle de la chimie sous les effets de l'énergie chers et le rattrapage chinois que va-t-il donc rester de la stratégie allemande ? Et bien pas grand-chose en fait.

 

Ainsi si l'Allemagne a jusqu'ici compensé son déficit commercial avec la Chine par des excédents avec les USA et le reste de la zone euro, il n'est pas certain que cela dure. En effet, la Chine concurrence maintenant l'Allemagne sur ses points forts et elle monte en gamme de plus en plus vite. De la même manière, cette montée en puissance se voit dans l'automatisation massive de la Chine. Elle est aujourd'hui et de loin le pays qui fait le plus progresser le nombre de robots par exemple. Il ne fait aucun doute que la Chine s'accaparera à long terme les marchés de pointes jusqu'ici dominés par l'Allemagne ou le Japon. Et derrière la Chine il y a d'autres puissances qui montent à l'image de l'Inde, du Vietnam ou encore de l'Indonésie. Et-il bien sérieux de croire que le modèle fondé sur l'excédent commercial, dans un pays anciennement développé en Europe, a un quelconque avenir ?

 

 

Le second facteur de l'absurdité du modèle allemand tient aussi à la perte du marché nord-américain. Les USA qui croulent sous les déficits commerciaux ne peuvent plus l'accepter. Les mesures protectionnistes se multiplient et vont mettre à rude épreuve là aussi la stratégie allemande. D'ailleurs, on pourrait penser quelque part que le coup de matraque que les USA ont fait avec l'explosion du gazoduc de Nord Stream visait surtout l'Allemagne et pas vraiment la Russie. Les principales délocalisations des industriels allemands à l'heure actuelle se font d'ailleurs vers les USA à l'image du chimiste BASF. Si l’Allemagne n'a plus d'excédent avec les USA et l'Amérique du Nord, elle ne pourra plus compenser avec les déficits commerciaux qu'elle a avec la Chine. On le voit, la seule possibilité rationnelle serait un retour à une économie basée sur la demande intérieure. Mais cela nécessiterait une rupture conceptuelle avec la logique germanique de ces vingt ou trente dernières années. Cela obligerait aussi l'Allemagne à être moins agressive avec ses voisins. En effet en concentrant toutes les activités industrielles fructueuses du continent, elle a cassé la demande italienne, française, ou encore espagnole.

 

Pour revenir à une situation plus équilibrée, il faudrait que les dirigeants allemands remettent en cause leur obsession pour les excédents commerciaux. Une chose plus facile à dire qu'à faire. Mais le but d'une économie n'est pas d'engranger des excédents, le but est d'améliorer la situation économique de sa population. La balance commerciale doit être à peu près à l'équilibre sur une longue période, mais en aucun cas excédentaire. D'autant que ces excédents conduisent mécaniquement à des crises avec les pays en déficit. L'Allemagne a depuis longtemps inversé l'objectif avec les moyens appauvrissant une partie de sa population au nom des excédents commerciaux censés apporter la prospérité, pour qui on ne sait pas trop, mais certainement pas pour les travailleurs pauvres. Le résultat est un modèle absurde qui en plus a nourri la dépopulation en limitant la capacité des jeunes à faire des enfants non seulement en Allemagne, mais sur toute la zone euro. Ce qui est nuisible à long terme sur le plan économique. On voit bien dans cette situation allemande ce qu'Emmanuel Todd décrit dans son dernier livre comme une société-machine. Elle n'a qu'un seul but engrangé des excédents, mais elle ne sait pas vraiment pour quelle raison. Elle le fait machinalement sans se demander quel est le sens de tout ça et au mépris même du bon sens le plus élémentaire oubliant tous les autres aspects extrêmement importants de la société. Elle semble moins mal fonctionner que la pauvre France, mais ce n'est en réalité qu'une apparence trompeuse.

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27 mai 2024 1 27 /05 /mai /2024 14:58

 

 

Depuis quelques années on sent poindre aux USA un changement d'orientation macroéconomique. La montée en puissance de la Chine commence à sérieusement inquiéter les impérialistes américains, car la structure de l'économie américaine est totalement liée à la capacité des USA à émettre de la monnaie mondiale. Comme nous en avons déjà parlé, je ne vais pas trop m'étendre sur le sujet. Mais le dollar américain bénéficie depuis 1944 d'un statut particulier faisant de lui une monnaie de réserve et d'échange international comme l'était la Livre sterling pendant un temps, ou l'or. Le dollar jusqu'en 1973 était d'ailleurs gagé sur l'or ce qui garantissait jusque là que les USA ne puissent justement émettre autant de dollars qu'il le désirait sous peine d’entraîner un rachat de leur stock d'or par les puissances étrangères. Mais ce système prit fin en 1973 et les USA purent alors émettre autant de dollars qu'ils le désiraient produisant une grande partie des crises que la planète connaît depuis. Les USA ont par exemple utilisé l'émission monétaire pour en quelque sorte faire payer aux Européens et aux Japonais une partie du coût de la guerre du Vietnam.

 

À l'époque la crise inflationniste a été imputée uniquement au choc pétrolier, mais c'est oublier que les prix du pétrole sont très vite retombés alors que la crise inflationniste fut bien plus longue. On peut probablement imputer une grosse partie de l'inflation de l'époque à la fin de l'étalon or et à l'émission massive de dollar. C'était la fameuse phrase de John Bowden Connally « Le dollar est notre monnaie, mais c’est votre problème ». Nous ne sommes pas sorties de cette situation depuis bien au contraire. Les USA n'ont plus que leur statut de monnaie international comme moyen pour maintenir leur croissance et leur économie. Notons que le caractère virtuel de l'économie américaine s'inscrit dans le fonctionnement de ses entreprises « géantes ». La survalorisation des actifs et des actions s'inscrit dans cette capacité à produire de la monnaie et rien d'autre. L’extraordinaire aventure d'un type comme Elon Musk n'a de sens que dans une économie virtualisée. Les entreprises d'Elon Musk n'ont pas construit leur fortune sur des gains réels. La plupart d'entre elles n'ont jamais été bénéficiaires, mais uniquement grâce à la valorisation boursière. L'économie étrange des USA est une économie où il faut attirer le capital dans des rêves de valorisation qui n'ont plus aucun rapport avec l'économie normale, celle qui découle d'un calcule investissement, coût, bénéfice. Et c'est parce que la bourse américaine est maintenue artificiellement par des injections monétaires permanentes qui « sauvent » l'économie US quand elle est en crise que ce type de comportement est possible. On est dans la spéculation pure. Et c'est un des effets à mon avis de ce statut monétaire absurde.

 

Donc on le voit rapidement ici, ce statut doit à tout prix être maintenu, ou le roi sera nu d'un seul coup. Déjà comme l'a souligné récemment Emmanuel Todd, la réalité des USA transparaît dans les capacités de production réelle, comme celle de la guerre. Les USA n'arrivent pas à suivre le rythme de production d'un pays comme la Russie pourtant théoriquement plus pauvre et beaucoup moins peuplé. Quand les USA ne peuvent pas acheter quelque chose, leur capacité réelle de production apparaît immédiatement. C'est dans ce contexte d'un pays totalement financiarisé ne vivant que de rentes, et occupant sa population dans des Bullshit jobs du tertiaire, qu’apparaît la dangereuse concurrence chinoise. De deux manières en premier lieu, le yuan peut se substituer au dollar dans les échanges. C'est d'ailleurs ce qui commence à arriver et de plus en en plus de pays veulent utiliser d'autres monnaies que le dollar pour acheter et vendre sur les marchés internationaux. Les capacités de production ayant été délocalisées ailleurs qu'aux USA le monde n'a plus vraiment besoin de l'Amérique. Particulièrement d'une Amérique qui achète sans jamais rien produire, ce qui se traduit par ses énormes déficits commerciaux.

 

Si les USA ont effectivement été un temps la nation indispensable surtout après la Seconde Guerre mondiale, la délocalisation massive des capacités de production de ce pays a mis fin à cette réalité depuis longtemps. Et c'est paradoxalement ce statut monétaire qui s'est retourné contre eux. Les producteurs locaux étant devenus inutiles puisque les USA peuvent acheter tout ce qui est produit ailleurs avec des dollars qui ne tiennent à eux d'émettre. Cette question est d'ailleurs mal comprise aux USA puisqu'on apprend chez Bruno Bertez que le conseiller commercial de Trump, Lighthizer, veut dévaluer le dollar pour favoriser la production aux USA. En théorie on ne peut pas lui donner tort, le problème c'est que les USA ne contrôlent pas leur monnaie et sa valeur. De la même manière qu'ils peuvent émettre autant de dollars qu'ils veulent sans produire d'inflation chez eux, ils ne peuvent pas dévaluer leur monnaie. Pourquoi ? Parce que les autres pays adaptent leur monnaie au marché américain. La mécanique est simple, les autres pays maintiennent la valeur de leur monnaie en achetant des dollars ou en les vendant, suivant les besoins. Les marchés US étant centraux, du moins jusqu'à présent, il faut tout faire pour faire en sorte que les produits que vous vendez ne soient pas trop chers sur le marché américain. C'est pour ça que des pays comme le Japon par exemple n'hésitent pas à dévaluer par rapport au dollar. De toute façon, on achète très peu de choses produites aux USA, donc une dévaluation n'a pas d'effet fortement inflationniste sur ce plan.

 

À l'inverse les USA peuvent donc acheter, à pas cher, les produits provenant des pays qui dévaluent par rapport à eux. D'où ce discours récent et un peu ridicule sur l'appauvrissement relatif des Européens par rapport aux USA. Parce qu'acheter quelque chose aux USA ça coûte très cher pour un Européen à l'heure actuelle, parce que l'euro s'est affaibli par rapport au dollar. Mais en réalité cela ne signifie pas un appauvrissement, c'est le produit du statut du dollar et du marché monétaire . Et à part pour les touristes rares sont les Européens à acheter plus cher leurs biens à cause de la hausse des prix des produits américains, nous ne leur achetons en réalité pas grand-chose. La plupart des produits des multinationales américaines ne viennent pas USA, mais d'Asie ou d'Europe. Mais dans le même temps comment les USA peuvent-ils rééquilibrer leur balance commerciale et se réindustrialiser si personne ne peut acheter leurs produits à cause de la surévaluation monétaire ? L'idée de dévaluer le dollar comme le préconise Lighthizer n'est donc pas stupide bien au contraire, le problème c'est que cette solution n'est pas praticable, parce que les USA ne contrôlent pas leur monnaie. La majorité des dollars qui circulent dans le monde le font en dehors des USA par exemple. C'est tout le problème d'avoir une monnaie internationale, cela vous rend à la fois tout puissant et impuissant. Les Américains eurent mieux fait d'écouter Keynes lors du traité de Bretton Woods qui leur proposait de créer une monnaie internationale ne dépendant d'aucun pays en particulier. Ils ne se seraient pas retrouvés dans cette triste situation.

 

Protectionnisme ou sanctions commerciales contre la Chine?

 

C'est donc dans ce contexte qu'arrive le retour du protectionnisme américain. Beaucoup se réjouissent de ce retour en particulier en France puisqu'une partie de la population a bien conscience des méfaits du libre-échange qui n'a jamais été à l'avantage de notre pays bien au contraire. Certains voient donc dans cet apparent changement de direction aux USA une chance pour faire de même en France et en Europe. Mais j'y vois surtout une erreur d'analyse quant aux mesures prises par les USA et l'administration Biden. Un peu comme nous nous sommes trompés sur les motivations du Brexit de la part des élites anglaises, nous nous trompons sur les mesures protectionnistes américaines. Si on peut saluer le fait que cette action américaine montre que la pensée unique libérale a fait son temps, cela ne signifie pas pour autant qu'il y est une réelle volonté de changement aux USA. Si l'on regarde les mesures prises par Biden on n’est pas vraiment dans une optique de réindustrialisation. Certes, ils distribuent des aides directes pour les batteries électriques. Mais la dernière mesure qui concerne la taxation des importations ne concerne que les productions chinoises.

 

Or les USA ont d'énormes déficits avec toute la planète, pas seulement la Chine. Ils viennent par exemple d'annoncer une taxation à 25% sur les produits informatiques produits en Chine. Quel sera à votre avis l'effet sur la production ? Les usines vont-elles subitement revenir aux USA ? Bien sûr que non, puisque tout coûte plus cher aux USA pour la raison que j'ai énoncé précédemment qui est lié à leur statut monétaire. Ce qui va se produire c'est simplement que les produits informatiques destinés aux USA seront désormais produits ailleurs, au Vietnam, en Inde ou plus près au Mexique. On remarque d'ailleurs, depuis quelque temps, que les grandes entreprises chinoises investissent massivement au Mexique, comprenant probablement que les mesures anti-chinoises américaines vont se multiplier. En réalité, la situation entre les USA et la Chine rappelle celle des USA et du Japon dans les années 80. La grosse différence c'est que la Chine dépasse désormais les USA en termes de taille et que leur stratégie ne va probablement pas fonctionner. Car il ne s'agit pas de réindustrialiser les USA, mais surtout de casser la Chine.

 

Si le protectionnisme américain visait réellement à réindustrialiser, les taxes concerneraient tous les produits importés par secteur et pas seulement les produits chinois. La stratégie américaine est donc de réduire leur espace impérial en éliminant la Chine de la liste des lieux de production pour leur marché intérieur. En réduisant l'espace impérial, ils espèrent pouvoir conserver leur statut monétaire dans cet espace plus restreint, certes, mais plus facile à contrôler. La lutte qui se déploie aujourd’hui en particulier en Asie est de ce point de vue particulièrement parlante. Les USA multiplient les actions diplomatiques pour plaire aux diverses nations d'Asie comme le Vietnam, les Philippines ou la Thaïlande. Il s'agit de réduire l'espace d'influence chinois au maximum. Malheureusement, ces mesures arrivent bien tard. La Chine est déjà largement le premier partenaire commercial de ces pays. Plus largement la Chine est désormais le premier marché mondial dans bon nombre de secteurs. La seule différence avec les USA c'est qu'elle est productrice comme les USA de 1945. Elle ne domine pas par la consommation, mais par la production. Ce qui donne un rapport politique différent avec ses partenaires potentiels. Nous le voyons donc ce n'est pas du protectionnisme ce que font les USA. Ce sont des politiques de sanction économique. C'est exactement la même chose qu'avec des pays comme l'Iran ou Cuba. La grosse différence c'est que la Chine est l'atelier du monde et que son énorme population lui permettrait en théorie de se passer complètement des exportations en réalité. Il faudrait pour cela qu'elle abandonne sa politique mercantiliste pour s’orienter vers une politique à la New-Deal d'un Roosevelt , mais c'est un autre sujet. La vérité actuelle c'est que les USA sont plus que jamais dépendant d'un monde qui leur échappe alors que leur concurrent chinois peut vivre en autarcie, surtout avec leur nouvelle alliance avec la Russie provoquée par l'imbécillité des stratégies américaines sur l'Ukraine.

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17 mai 2024 5 17 /05 /mai /2024 15:30

 

La France multiplie les crises dans tous les sens sans que les énergumènes qui font semblant de diriger le pays n'esquissent même un semblant de début de compréhension sur la crise que nous traversons. Ils continuent comme s'il n'y avait aucun rapport entre les politiques menées depuis plus de quarante ans et les catastrophes à répétition que nous connaissons. La crise actuelle en Nouvelle-Calédonie n'est pas qu'une crise uniquement liée à des particularismes locaux ou à de l'ingérence étrangère. Ces deux paramètres comptent bien évidemment. Il faut rappeler que l'île est une grosse réserve de nickel, presque un tiers des réserves mondiales connues. Or comme l'a expliqué récemment l'agence internationale de l'énergie, le nickel est l'un des métaux dont les besoins mondiaux vont exploser dans les années qui viennent en particulier à cause de leur rôle dans la production de batteries électriques. À l'heure actuelle la première utilisation de ce métal se fait dans l'acier inoxydable, mais cela pourrait changer à moyen terme avec la restructuration vers les voitures électriques.

 

Usage actuel du Nickel
Evolution des besoins en métaux pour la transition énergétique selon AIE

Entre l’identité locale des autochtones, et les ressources en nickel qui deviennent un sujet d'intérêt économique puissant, on a là deux facteurs qui poussent à ce genre de crises. Les puissances étrangères pouvant utiliser les populations les plus radicales pour faire partir la France et peut-être ensuite récupérer l'exploitation locale dans leurs intérêts. On voit des candidats potentiels à la manœuvre comme la Chine ou même l'Australie. La Chine n'hésite pas à soutenir les indépendantistes à Okinawa, la célèbre île japonaise qui revêt un intérêt essentiellement stratégique. Il n'y est pas exclu qu'elle fasse la même chose en Calédonie. Mais finalement cette ingérence n'est possible que par le comportement et le déclin des puissances tutélaires de ces territoires. Dans le cas d'Okinawa la population locale a eu l'impression d'être des citoyens de seconde zone à qui on a imposé la langue japonaise. Dans le cas français, c'est probablement plus la misère et la pauvreté qui jouent un facteur primordial. On retrouve d'ailleurs des problèmes partout dans les DOM-TOM et ce n'est pas un hasard.

 

Car la Nouvelle-Calédonie c'est un peu l'arbre qui cache la forêt. Tous les DOM-TOM vont très mal dans leur ensemble, criminalité , chômage, incapacité de l'état à faire appliquer la loi. La Guyane a un taux de meurtre absolument délirant et l'état est toujours incapable de protéger les locaux contre les orpailleurs illégaux provenant du Brésil. Le désengagement de l'état est général en France, on le voit avec la désertification progressive sur le plan médical. C'est le double produit de l'idéologie libérale et de la contrainte européenne qui assèche la croissance et donc les rentrées fiscales. L'état européiste préfère subventionner les entreprises que d'assurer le régalien. Mais bien évidemment les DOM-TOM étant les territoires les plus excentrés, ce sont ceux qui subissent l'affaiblissement de l'état français le plus fortement. Loin des yeux, loin du cœur comme on dit. Et dans ce cas-là, c'est plus le faible poids politique des DOM-TOM qui joue les politiciens n'ayant d'yeux que pour leurs élections le cas des territoires d'outre-mer a toujours été largement négligé. C'est pourtant une grave erreur d'un point de vue national, les DOM-TOM étant des territoires de très grand intérêt pour le pays largement sous-exploité par la nation française. Mais pour en arriver à un tel raisonnement encore faut-il avoir à cœur l'intérêt de la nation et pas seulement l'intérêt pour les élections à court terme.

 

L'euro a détruit les DOM-TOM

 

En un sens, les DOM-TOM sont le point de révélation de la situation française. Ils sont en quelque sorte par effet d'amplification les révélateurs de la crise profonde de la nation soumise à des politiques économiques stupides depuis 50 ans et à une monnaie suicidaire depuis 20 ans. Parce que ces territoires étaient les plus fragiles, ils sont ceux qui ont été frappés le plus durement par les effets du libre-échange, de la dérégulation économique, du franc fort, puis de l'euro. Nous en avions déjà longuement parlé dans un texte consacré à la situation à Mayotte en 2023 dans ce texte. Mais il est important de le répéter, l'euro a été un désastre pour les DOM-TOM. L'unification monétaire européenne a entraîné un désastre pour la production française. Comme nous n'avions aucun point fort et aucun avantage comparatif, l'unification européenne a entraîné un vaste plan de désindustrialisation du pays sans mouvement de population à l'échelle européenne concomitant.

 

Comme je l'ai déjà souvent expliqué, les unifications monétaires normalement sont le dernier point d'unification d'une nation. Elles ne sont pas trop problématiques dans le cadre d'un territoire homogène sur le plan culturel et linguistique parce que les populations parlant toute la même langue et ayant des traditions similaires, elles peuvent se déplacer facilement dans les zones les plus attractives sur le plan économique. C'est ainsi que les Bretons ou les Auvergnats ont dépeuplé leur région de base pour nourrir en partie le bassin parisien plus dynamique économiquement par exemple. Certaines régions françaises sont mortes à cause de l'unité du pays et l'unité monétaire. C'est plus parlant encore quand on regarde des pays comme l'Allemagne ou l'Italie. Alors que le sud de l'Italie était autrefois très riche, l'unification monétaire italienne a entraîné une concentration des richesses vers le nord. En Allemagne, l'Est a été détruit par l'unification monétaire trop rapide suite à la chute du mur entraînant aujourd'hui des phénomènes électoraux propres à l'est de l'Allemagne comme la poussée de l'AFD.

 

Les processus d'unification monétaire accompagnés du libre-échange et de la libre circulation des capitaux sont des processus extrêmement violents. Or on a nié cette violence en faisant comme si tout ceci allait se passer simplement. Si dans le cadre d'une nation cette violence peut être tempérée par de la redistribution ou des aides, à l'échelle de l'UE ce n'est pas possible. Ajoutons à cela que la mobilité des populations est très faible à cause des barrières linguistiques et culturelles. Rares sont les Français à vouloir bosser en Allemagne. Pourtant la logique même de l'UE et de l'euro devrait pousser une grande partie des Français à quitter leur pays qui ne peut plus leur fournir d'emploi convenable dans le cadre européistes. Les défenseurs de la construction européenne ne le disent jamais ouvertement, mais dans le cadre européen la France devrait se dépeupler au profit de l'Allemagne, des Pays-Bas, ou de l'Autriche. C'est la logique même de l'unification européenne. Ce projet est donc totalement indéfendable du point de vue de l'intérêt national. Il n'a de sens que si vous partez de l'idée que la France doit disparaître et qu'elle n'a aucun intérêt à perdurer. C'est cela le sens du projet européiste si cher à Emmanuel Macron, mais il ne le dit pas comme ça.

 

Et la même logique s'applique aux DOM-TOM avec plus de violence encore puisque ces territoires exigus et lointains ont encore moins d'avantages comparatifs que les régions métropolitaines plus proches du cœur productif européen. Pire que ça, en leur donnant une monnaie encore plus surévaluée que ne l'était le franc pour elles, l'euro, elles peinent à pouvoir concurrencer les territoires concurrents dans les régions où elles se trouvent. Même sur le plan du tourisme l'euro renchérit le coût pour les touristes qui vont plutôt aller dans les territoires proches, mais possédant une monnaie qui leur est propre. Pourquoi payer plus cher en allant dans les DOM-TOM français quand vous pouvez aller sur une île proche dont le coût de la vie est nettement plus faible grâce en grande partie au différentiel monétaire ? Non seulement l'euro est pire que l'ancien franc pour les DOM-TOM, mais en plus la construction européenne empêche tout favoritisme économique vis-à-vis de nos régions d'outremer. Pas question de faire du protectionnisme pour valoriser leur production par exemple et ainsi lutter contre le chômage local. Il y aurait pourtant tant à produire sur ces territoires pour garantir notre autonomie nationale.

 

 

De fait, l'UE et l'euro ont transformé ces territoires qui étaient des atouts en boulet économique d'un point de vue collectif. Des territoires à chômeurs, où les trafiques, l'économie informelle et la violence explosent. Et il est probable que les imbéciles qui nous dirigent les voient ainsi. Alors on donne dans le délire indépendantiste un peu comme en corse où la situation est un peu similaire même si l'état de la Corse n'est pas aussi dramatique que celle des DOM-TOM. Les néolibéraux qui nous dirigent voudront se débarrasser de ces territoires au nom de l'efficacité économique ne comprenant pas que le cœur du problème est avant tout l'UE l'euro et l'idéologie néolibérale du laissez-faire. Car demain, une fois perdus les anciens DOM-TOM au profit très probable d'autres puissances, ce sont les territoires nationaux qui seront bradés au nom de la même logique. Et la mécanique continuera inlassablement jusqu'à la disparition du pays tout entier dissous dans le grand machin européen.

 

Alors quels seraient les remèdes à la situation des DOM-TOM ? Et bien les mêmes que pour la métropole. Tout d'abord une sortie de l'UE et de l'euro. Une politique protectionniste valorisant ces territoires qui peuvent produire une grosse partie des produits exotiques agricoles que nous consommons par exemple. L'on pourrait également imaginer des monnaies locales plus adaptées aux besoins de ces territoires. Certains verraient dans ce mécanisme le début de l'indépendance, mais il faut sortir de l'idée à mon avis archaïque qu'une nation égale une seule monnaie. On peut très bien imaginer une nation avec plusieurs monnaies régulées par une banque centrale. L'objectif étant d'offrir un outil puissant pour réguler les économies locales. Mais c'est une autre débat. Quoiqu'il en soit, il est important en cette période de crise avec les DOM-TOM de rappeler que tout ceci n'est pas le fruit du hasard, mais d'un pourrissement constant produit par des politiques économiques absurdes. La crise en Calédonie n'est en définitive qu'une énième jacquerie comme les gilets jaunes provoqués par le modèle économique mis en place à partir de Giscard et qui n'a fait que dégrader le pays depuis. Plus le temps va passer et plus la violence va s’accroître jusqu'au point de rupture final. Et nul ne peut savoir ce qui sortirait d'un violent mouvement national contre les apparatchiks au pouvoir.

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