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Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.

Produire en France

 

L'actualité donne toujours l'impression de l’accélérer en permanence. Nous parlions il y a encore peu de temps des élections en Allemagne et de la montée de l'AFD et du BSW, des partis eurosceptiques, anti-immigration, et voilà que les effets politiques commencent déjà à se faire sentir. Visiblement, les élites allemandes ont décidé de faire différemment des élites françaises dont la seule méthode pour calmer les choses consiste à faire taire les gens qui ne votent pas bien. Alors qu'en France il y a en permanence de tentative pour étouffer le vote RN et plus généralement le vote contestataire. Les élites étant persuadées d'avoir toujours raison, les dirigeants allemands semblent plus pragmatiques et rationnels, en essayant de répondre aux attentes des électeurs. Enfin en essayant de faire semblant de répondre aux problèmes des électeurs. Car ne soyons pas naïf, l'Allemagne ferme ses frontières pour l'instant, mais dans le même temps signe des accords pour faire venir des immigrés de certains pays spécifiques, à l'image d'accords récents avec l’Ouzbékistan.

 

Quoiqu'il en soit, on voit bien que la forteresse tranquille du néolibéralisme européen commence à sérieusement connaître des fissures dans ses murs. L'accumulation de mauvaises nouvelles économique avec là encore l'Allemagne au cœur montrant les limites du modèle économique européen basé sur les excédents commerciaux, contrition salariale, et le laissez-faire général en matière macroéconomique. La zone euro est la lanterne rouge de la croissance depuis plus de 20 ans, mais elle vient enfin de s'en apercevoir comme on a pu le voir avec le rapport de monsieur Draghi. Alors le rapport Draghi finira bien sûr dans les poubelles parce qu'il n'y a en réalité rien à attendre de l'UE et de sa structure bureaucratique apatride, nous en avons déjà amplement parlé sur ce blog, mais au moins l'UE commence à comprendre qu'elle n'est ni dynamique, ni en croissance, et qu'elle est même l'homme malade de l'économie planétaire. On peut dire que c'est déjà un petit progrès.

 

Les solutions envisagées par Draghi sont de toute manière contraires à toute la philosophie de l'UE et de la zone euro. Elles ignorent totalement en plus les problèmes structurels que connaît la zone euro avec les très grands déséquilibres que cette monnaie unique a engendrée et qui a cassé la croissance de nombreux pays membre comme la France et l'Italie. Faire une relance par l'investissement sans rien changer à la structure de l'euro et de l'UE revient à concentrer encore une fois les activités dans certaines zones et à laisser couler les zones déjà en fort déclin. Car n'en doutait pas l'Allemagne serait le principal gagnant d'un tel effort, Draghi parlant d'injecter 750 milliards d'euros dans l'économie européenne. L'industrie étant concentrée à l'Est et en Allemagne c'est là que se ferait l'essentiel des effets. Mais l'Allemagne a déjà des problèmes de main-d'œuvre et il n'est pas certain qu'elle puisse réellement profiter pleinement de telles injections monétaires. Comme nous l'avions vu, la zone euro est une zone monétaire non optimale. Si les capitaux et les marchandises s'y déplacent librement, ce n'est pas le cas des habitants qui restent globalement ancré sur leur territoire. L'UE n'est pas les USA. La dynamique de l'emploi en Allemagne ou aux Pays-Bas ne fera pas se déplacer massivement les populations italiennes ou françaises dans ces pays.

 

Encore une fois le problème de fond et dont ne parle évidemment pas Draghi qui est un européiste c'est que l'UE n'est pas une nation et les Européens ne sont pas un peuple. Il est dès lors bien difficile d'y pratiquer des politiques uniques à une telle échelle. Si le laissez-faire a été le fer de lance de l'UE, c'est aussi parce que c'est la seule politique uniforme qui puisse être pratiquée à cette échelle puisque c'est une non-politique en réalité. Le plan Draghi s'il était appliqué dans l'UE actuelle augmenterait massivement l'investissement en Allemagne, en Autriche ou même en Pologne , mais augmenterait surtout la consommation en France par exemple. Bref, de quoi aggraver encore un peu plus les énormes déséquilibres de la zone sans forcément résoudre le problème de croissance à long terme. En réalité, résoudre les problèmes macroéconomiques de l'UE et de la zone euro c'est un peu comme essayer de résoudre la quadrature du cercle, on n’y arrive pas.

 

Réindustrialiser la France

 

À mes yeux, il n'y a rien à attendre de l'UE. Quand bien même elle aurait des gens compétents et plein de bonnes intentions au pouvoir, ce qui n'est clairement pas le cas avec l'actuelle occupante de la présidence de la commission. Un plan « Marshall » à l'échelle de l'UE se transformerait vite en fiasco surtout pour la France qui est maintenant dans une situation commerciale et industrielle assez dramatique. En quelque sorte si Draghi a l'immense mérite de mettre fin au mythe du laissez-faire économique en soulignant les besoins d’investissements massifs en Europe, il n'aborde pas le cœur du problème européen qui est l'impossibilité d'une politique économique unique à une telle échelle. L'hétérogénéité des besoins et des spécificités nationale rend impossible une gestion à une telle échelle. Résoudre les problèmes européens ne peut être que précédé d'une rupture avec la monnaie unique et le marché commun. Chaque pays doit d'abord retrouver une liberté monétaire, fiscale, frontalière et budgétaire avant de véritablement pouvoir redynamiser le continent.

 

Alors en supposant que des élites un peu moins apatrides arrivent un jour au pouvoir en France et veuillent réellement redresser le pays que devraient-ils faire en premier ? Comme nous l'avons déjà abordé, la priorité absolue n'est pas d'augmenter les salaires comme le veulent de façon démagogique les gauchistes. Si les salaires sont effectivement trop bas en France, le pays est trop dépendant des importations pour se permettre à l'heure actuelle une forte hausse des salaires. Et si celle-ci s'avère obligatoire pour des raisons politiques, il ne faudra pas alors hésiter à faire comme de Gaulle en 58 et dévaluer fortement le franc de 30% ou plus suivant les conditions. Je rappellerai ici que les dévaluations reviennent à taxer les importations du montant de la dévaluation, mais aussi de subvention aux exportations puisque le prix des marchandises locales sont réduites en proportion vis-à-vis de l'étranger. C'est pour cela que les dévaluations ont de tels effets macroéconomiques. La priorité absolue d'un gouvernement doit d’abord être un retour à l'équilibre de la balance commerciale. C'est encore plus vrai lorsque vous avez votre propre monnaie. Il est d'ailleurs probable que l'euro a agi sur nos élites comme une drogue déresponsabilisante puisqu'il leur a semblé que la situation commerciale n'avait plus d'importance avec l'euro. Ce qui était passablement faux, les effets ont mis juste plus de temps à se faire sentir et les dégâts sur notre industrie sont après plus de 20 ans de surévaluation monétaire absolument catastrophique.

 

L'essentiel est un retour à l'état stratège. Un état qui fait de la planification un gros mot depuis qu'on l'associe au communisme alors que la planification est en réalité la pratique de toute organisation visant à organiser des stratégies de développement. Les entreprises font de la planification, les gens font de la planification dans leur vie de tous les jours, et même les chirurgiens ou les médecins quand ils vous soignent en font, s'interdire de le faire à l'échelle nationale fut d'une bêtise intersidérale, le symbole du dogmatisme du tout marché des années 80. La stratégie visera en premier lieu à ouvrir des usines pour produire sur le territoire national ce dont la population a besoin. Contrairement aux discours courant sur cette question, je ne pense pas que viser les industries les plus complexes dès le départ soit très judicieux. Au contraire, la réindustrialisation devait plutôt se faire sur les techniques les plus faciles à récupérer comme l'industrie sidérurgique ou l'industrie textile. La France à l'heure actuelle serait totalement incapable de faire directement une industrie de semi-conducteur ou alors cela se réduirait à de l'assemblage sur notre sol.

 

Les matières premières sont aussi essentielles pour l'indépendance énergétique

 

L'exploitation de matière première est aussi un bon moyen de relancer des industries et de faire repartir la machine à produire. Cela tombe puisque les bonnes nouvelles s'accumulent depuis quelques années. La France semble avoir sous son sol quelques réserves de matières intéressantes. On l'avait vu il y a quelque temps avec l'hydrogène blanc dont on parle de plus en plus, mais c'est aussi le cas du lithium ou encore de l'hélium découvert dans la Nièvre. Et n'oublions pas les immenses ressources maritimes dont la France dispose et qu'elle serait bien inspirée d'exploiter au lieu de se l'interdire stupidement par dogmatisme pseudoécologique. La réindustrialisation en France doit se faire surtout par le bas, en commençant par le plus simple et le plus accessible. Il faut sortir de l'idée de faire pousser des usines clef en main qui ne nous rendraient pas vraiment une indépendance nationale, mais nous soumettraient en fait à des autorités étrangères pas vraiment intéressées par l'indépendance française.

 

Il faudra aussi clairement arbitrer à l'avenir sur la nature des emplois dans le pays. Jusqu'à présent la France ne se souciait guère de la nature de ses emplois qu'ils soient industriels ou tertiaire. Dans un pays qui souffre avec le franc fort puis l'euro d'un chômage de masse, ce n'était pas une priorité. Mais nous allons vers un déclin rapide de la population en âge de travailler. Il faudra donc à nouveau arbitrer entre l'emploi industriel, l'emploi tertiaire, et agricole. Les emplois de production devant être fortement valorisée, car ce sont les seuls qui permettent d'équilibrer les comptes extérieurs. Rappelons aussi au passage que ce type d'arbitrage est impossible dans les contraintes actuelles de l'UE.

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D
Le systeme politique allemand semble en effet moins souffrir d'inertie au changement la France.<br /> Ce pays semble avoir une meilleure capacité a se réorienter avec de simples élections. Parfois pour le pire certes, mais pas forcement. Certes attendons un peu pour être sur que l'Afd nous fassent pas du Meloni.<br /> <br /> Ces gens me sont tout à fait antipathiques, mais ils sont la meilleure chance de casser la mondialisation. <br /> <br /> J'ai une petite theorie sur l'archarnement de la France à defendre la mondialisation. Ce serait liée à l'histoire de la bourgeoisie française. Elle a beaucoup investi dans la colonisation, pendant plus longtemps que l'Allemagne, ainsi que dans le commerce d'esclaves. Contrairement à l'ensemble de la France, la bourgeoisie y a trouvé son compte.<br /> Cette periode de plusieurs siécles est resté inconsciemment dans les mentalités des bourgeois. Il s'agi de compter sur la main d'oeuvre étrangère pour eviter les investissements dans la technologie ou eviter les hausses de salaires.<br /> A defaut d'esclavage et de requisitions d'indigènes, on a les délocalisations et la main d'oeuvre de pays à bas salaires, dans tous les secteurs. La tendance à delocaliser est ainsi particulierement forte, ainsi que l'immigration. Et entre parenthese, ca peut expliquer la grande indulgence de notre establishement envers Israel, comme si spolier les non-occidentaux de leurs pays c'est pas si grave, c'est des sauvages n'est ce pas ? <br /> <br /> La France n'est tout de même pas un Empire Ottoman bis, cad un cas extrême de pays dominés par des conquerants parasitaires. La France connut une expansion plus lente vers ce territoire hexagonal, et il a un pouvoir politique qui a, à plusieurs reprises eut les bonnes initiatives. Contrairement aux liberaux je pense que la politique peut avoir un effet très puissant. La France à aussi une tradition greco-romaine d'erudition, qui permet la science, comme pour le reste de l'Europe. Ce pays étant uni avant l'Allemagne, et disposant d'une geographie plus favorable à la pratique de la marine, elle a plus facilement eu l'opportunité de créer un Empire. Une page qu'il serait temps de tourner.
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Y
"J'ai une petite theorie sur l'archarnement de la France à defendre la mondialisation. Ce serait liée à l'histoire de la bourgeoisie française. Elle a beaucoup investi dans la colonisation, pendant plus longtemps que l'Allemagne, ainsi que dans le commerce d'esclaves. Contrairement à l'ensemble de la France, la bourgeoisie y a trouvé son compte."<br /> <br /> Il faudrait que je retrouve les statistiques, mais en fait le patronat français est le pire de tout l'occident en matière de délocalisation. C'est nous qui avons le plus délocalisé, loin devant les anglais et les américains. Je pense qu'il y a un mélange de xénophilie et de haine de soi aussi dans cette histoire. Quoiqu'il en soit leur courte vue a mis le pays dans une situation assez dramatique.
L
La bourgeoisie française n'a jamais été vraiment homogène. <br /> Le commerce des esclaves a été le fait de la grande bourgeoisie marchande des ports d'avant la révolution française. Au 19ème siècle la bourgeoisie industrielle, qui se démarque de la précédente n'est pas favorable à la colonisation, dont elle pense à raison qu'elle risque de freiner la dynamique de développement du pays. <br /> La colonisation sera en fait portée par la petite bourgeoisie des nouvelles classes moyennes votant à gauche (celles qui ont fait la troisième république) et l'on retrouve ici posé l'un des traits de la vie politique française depuis plus d'un siècle et demi ; l'alliance objective ou non de la bourgeoisie de gauche avec la bourgeoisie d'affaire à la recherche d'une économie de rente. Alliance qui ne sera que brièvement contrariée par l'éphémère expérience du général de Gaulle et sous la contrainte sensible de l'état. . <br /> À la différence de l'Angleterre où les forces du travail et du capital se sont trouvées objectivement alliées contre l'économie de rente défendue par les lords ruraux (et qui explique que la classe ouvrière britannique fut longtemps libre-échangiste), en France le capital s'est le plus souvent globalement mis au service de la rente contre les forces laborieuses. Il n'est pas indifférent que cette configuration propre à la république bourgeoise française se soit mise en place (définitivement ?) après l'écrasement de la Commune de Paris. <br /> Maintenant vous n'avez pas tort dans le sens où le choix du recours à la main-d'œuvre étrangère est inhérent à cette configuration politique.
D
Pour la premiere ligne je voulais dire "QUE la France". Pardon.