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Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.

L'échec sud-africain (partie 1)

 

Nous avions déjà parlé des autres membres des BRICS il y a quelque temps. Les économies de l'Inde, de la Chine, de la Russie, et même du Brésil ont été rapidement abordées même si bien évidemment à cause de son poids je parle beaucoup plus régulièrement de la Chine que des autres membres des BRICS. Mais je n'avais absolument pas parlé de l'Afrique du Sud. Il ne s'agit pas bien évidemment d'une négligence liée à un quelconque racisme. C'est simplement parce que l'Afrique du Sud est quand même un poids plume à côté des autres puissances membres des BRICS. Sa mise en avant par les BRICS fut surtout un coup de communication visant à impliquer l'Afrique dans ce courant de sécession avec la globalisation américaine. Rappelons tout de même que comme l'explique très bien Jacques Sapir régulièrement dans ses interviews et dans son dernier livre « La Fin de l’Ordre Occidental », les BRICS à l'origine n'étaient pas une organisation créée contre l'occident. Elle l'est devenue petit à petit par la force des choses et par l'intransigeance américaine à ne pas vouloir adapter les instances internationales héritées de Bretton Woods aux rapports de forces actuels.

 

Il est indéniable que les pays occidentaux, en particulier les USA, pèsent beaucoup trop lourd au FMI ou à la banque mondiale, chose qui aurait dû être rééquilibrée depuis longtemps comme le préconisait d'ailleurs très justement Dominique Strauss-Kahn . Comme souvent dans l'histoire, les empires déclinant en refusant les changements ne font qu'accélérer leur chute. Nous sommes en présence d'un phénomène de ce type. Par leur intransigeance les USA ont fini par se mettre à dos l'ensemble de la planète en développement. Il se pourrait même qu'ils finissent par se mettre à dos leurs propres vassaux à terme, même si ces derniers, en particulier en Europe, semblent prêts à tout sacrifier, y compris leur peuple pour pouvoir continuer à jouer les vassaux de l'empire. Mais revenons à notre sujet du jour l'Afrique du Sud. Ce pays à l'histoire tourmentée est de nouveau au cœur de l'actualité pour une raison assez triste à savoir que les présidents des USA cherchent à attirer des « réfugiers » blanc sud africain fuyant les persécutions, enfin selon Trump.

 

Dans la tête de Trump, les blancs d'Afrique du Sud sont en quelque sorte des migrants et des colons récents. Sauf qu'une grande partie des blancs d'Afrique du Sud que l'on appelle aujourd'hui les Afrikaners, hier les Boers, sont en fait les descendants de populations protestantes venues de France, des Pays-Bas et d'Allemagne au 17e siècle. Ces populations fuyaient souvent les persécutions religieuses en Europe, surtout les huguenots français après l'abrogation de l'édit de Nantes. À l'origine l'Afrique du Sud était pratiquement vide. Les techniques d'élevage d'agriculture des peuples africains aux alentours ne leur permettant pas une installation durable sur ces territoires. Donc on peut dire que la colonisation par les Boers fut une véritable colonisation et non une invasion comme en Amérique par exemple où les peuples autochtones ont été écrasés même si les épidémies ont été en réalité les principales responsables de l'effondrement démographique des peuples précolombiens. L'Afrique du Sud est bien leur pays même si l'Afrique est un continent majoritairement peuplé de noirs.

 

Comble de l'horreur, les Boers ont aussi été victimes du colonialisme anglais. On le sait peu, mais ce ne sont pas les allemands qui ont inventé le génocide moderne dans des camps, ce sont les Anglais. Ces derniers ont pratiqué contre les Boers un véritable génocide à la fin du 19e siècle entre 1899 et 1902. Les Anglais avaient besoin d'assurer ses routes commerciales avec l'Inde. On voit donc bien ici que l'impérialisme n'est pas une question de couleur de peau puisque les blancs eux-mêmes en étaient victimes en réalité. Évidemment ce genre de réalité historique n'entrera probablement pas dans les discours de Trump, puisque comme le pressent Emmanuel Todd, la question raciale est de retour aux USA même si elle est comme toujours camouflée. Ici les Afrikaners sont présentés comme victime des noirs qui dirigent l'Afrique du Sud et c'est tout ce qui intéresse probablement Trump et son entourage, rappelons qu'Elon Musk est lui-même d'origine sud-africaine. Il est vrai que la politique de l'état sud-africain vise à redistribuer les richesses et les terres qui sont majoritairement contrôlées par les blancs. Cependant, ce genre de politique interventionniste directe finit souvent très mal. Sans parler de l'exemple du Zimbabwe voisin, la Chine de Mao avec son grand bond en avant produisit l'une des plus grandes catastrophes de l'histoire humaine récente avec 20 à 30 millions de morts de faim tout de même.

 

La démographie de l'Afrique du Sud :

 

Réduire les inégalités ne passe pas forcément par ce genre de mesure, mais plutôt par des politiques éducatives et d'investissement à long terme, sans parler de l'impôt sur le revenu bien sûr. Mais il est vrai que c'est probablement moins vendeur sur le plan électoral que de dresser les communautés les unes contre les autres. Quoiqu'il en soit, l'ANC, qui dirige le pays depuis la fin de l' apartheid, a échoué à développer le pays. Les chiffres sont indubitables sur la question. Ce qui fait d'ailleurs de l'Afrique du Sud un peu le camard boiteux des BRICS. Des économistes ont comparé la croissance de l'Afrique du Sud avec celle de l'Afrique subsaharienne et bien l'Afrique du Sud fait bien moins. Mais nous allons commencer à parler de ce pays par des données humaines. Les plus fondamentales, celles de la natalité, de la mortalité infantile et de l'espérance de vie. Les données qu'Emmanuel Todd affectionne le plus comme vous le savez déjà. Si l'on regarde les données, on s'aperçoit bien vite que l'Afrique du Sud est un pays à part en Afrique subsaharienne. La natalité du pays est par exemple tombée à des niveaux raisonnables bien plus tôt que dans le reste de l'Afrique. En 2023, la natalité est ainsi de 2,22 enfants par femmes en Afrique du sud contre 4,07 pour l'ensemble de l'Afrique.

 

 

L'Afrique du Sud est tombée en dessous de 3 enfants par femme au milieu des années 90, ce qui en fait un pays assez précoce sur ce plan par rapport au reste du continent. Il est bien évident qu'il y a une grosse divergence au sein de l'Afrique du Sud, les Boers ayant fait la transition démographique bien avant les populations noires. C'est d'ailleurs ce qui a certainement participé le plus à la fin de l'apartheid ce changement de rapport de force démographique. Quoiqu'il en soit, cette transition démographique devrait normalement tirer la croissance économique vers le haut. En effet, comme je l'ai déjà expliquer la baisse de la natalité à court terme crée une augmentation pendant deux décennies de la population active, avant que le vieillissement n'arrive. Cette période est idéale pour avoir un développement économique rapide. Comme cette transition a vraiment commencé vers le milieu des années 80 l'Afrique du Sud devrait avoir un surplus de dynamisme économique. Hélas comme nous le verrons dans la partie consacré à l'économie, cela ne semble pas être le cas.

 

 

Et la mauvaise situation du pays ressort d'ailleurs dans les données démographique. Depuis la fin de l'apartheid, le pays a connu une violente baisse de l'espérance de vie. Le niveau de l'espérance de vie de 1990 n'a ainsi été rattrapé qu'aux alentours de 2019. Le plus inquiétant est que le pays qui était en avance sur le reste de l'Afrique se fait rattraper très rapidement. En 1990, un sud africain avait une espérance de vie de 63 ans, un Africain en moyenne de 52 ans. 35 ans plus tard, l'espérance de vie d'un sud africain est de 66,1 ans, celui d'un africain moyen de 63,8 ans. Un sud africain en 1990 avait l'espérance de vie d'un asiatique moyen, aujourd'hui il est très loin derrière. Autre indicateur démographique qui nous montre le désastre dans ce pays, c'est la mortalité infantile. En 1990 la mortalité infantile d'Afrique du Sud était nettement supérieure à celle des pays développés à 5,8 %, mais elle était nettement inférieure à celle de l'Afrique ou de pays comme l'Inde, 13%, 13% également dans un pays comme le Ghana. 35 ans plus tard, la baisse de la mortalité infantile malgré ce haut niveau n'a même pas baissé de moitié à 3,5% alors qu'elle s'est effondrée dans les autres pays en développement. L'Inde est à 2,8%, le Ghana est 3,7%, c'est-à-dire maintenant au même niveau que l'Afrique du Sud qui avait pourtant pas mal d'avance dans le domaine. Pire que cela, on constate une hausse de la mortalité infantile depuis 2019. Ce n'est jamais un bon indice sur la santé réelle d'un pays.

 

 

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