Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.
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Nous abordons régulièrement sur ce blog les questions macroéconomiques. La situation très grave dans laquelle se trouve notre pays est en réalité le produit d'un laissez-faire économique qui date maintenant de presque 50 ans, et dont le moteur se trouve dans l'idéologie libérale économique. Une idéologie que plus personne aujourd'hui n'ose vraiment décrire pour ce qu'elle est, à savoir une idéologie tout aussi mortifère en réalité que son jumeau opposé, le communisme. Elle est cependant tellement ancrée dans l'esprit de la population qu'il est désormais extrêmement difficile de sortir du cadre du libéralisme même en expliquant patiemment que ce que nous vivons n'est pas l'état d'un socialisme débilitant ou d'un communisme qui frapperait la France a posteriori.
Persuadé que le poids de l'état dans les dépenses publiques s'explique par le prétendu socialisme de nos élites, une grande part de notre population, surtout chez les plus « éduqués » s'enferme dans un discours antiétatique délirant proche de ce qu'on pu connaître de pauvre pays comme l'Argentine avec toutes les conséquences que l'on sait. Il faut tout couper, tout privatiser, tout détruire. On retrouve ici le caractère nihiliste de notre époque avec des discours irrationnels mue par la colère et non par la raison et la compréhension précise des problèmes. Pires que cela, certains se mettent à faire de la négation du réel, purement et simplement. L'on voit ainsi certains commentateurs ne pas hésiter à donner la Chine en exemple pour parler de la lourdeur de l'état en France. Cela dénote évidemment une ignorance crasse des politiques économiques chinoises qui sont tout sauf libéral. Il n'y a pas plus interventionniste que la Chine en matière économique, même les capitaux sont contrôlés. Ce qui d'ailleurs permet à l'état de compenser l'énorme épargne chinoise par des dépenses massives d'investissement, mais c'est un autre débat.
De fait, nous avons avec la Chine un exemple fatal d'un pays qui a pris un chemin totalement différent de la direction néolibérale sous impérialisme américain qui est la nôtre depuis les années 70. Et c'est bien la Chine qui gagne de façon assez spectaculaire. Pourtant il faudrait plus de libéralisme et moins d'états d'après nos idéologues libéraux en carton-pâte. Quelqu'un qui réfléchit un peu même s'il est engoncé dans certaines croyances erronées devrait au moins se poser quelques questions. Comment se fait-il que l'occident qui dominait largement la planète jusqu'aux années 70 ait perdu tant de poids et soit obligé aujourd'hui d'aller copier les Chinois parce qu'il n'arrive plus à suivre techniquement ? Pourquoi accumulons-nous des dettes sans cesse croissantes alors même que nous sommes en paix depuis si longtemps ? Si l'on exclut le conflit en Ukraine bien évidemment. C'est la faute à l'état, c'est la faute aux fonctionnaires c'est la faute aux vieux, c'est la faute aux jeunes, c'est la faute aux immigrés, choisissez votre bouc émissaire favori. Voilà à quoi se réduit aujourd'hui le débat public en France. Ne soyons pas naïfs tout de même, il y a derrière ça une stratégie bien huilée visant à camoufler les vrais enjeux derrière des débats stérilisants pour le débat public.
À ces mauvaises intentions de notre direction politique, s'ajoute bien évidemment le rôle des médias qui n'est pas d'informer ou de nourrir un débat rationnel, mais plutôt de faire du bruit médiatique, de l'audience, et d'étaler les idées reçues sur tous les sujets possibles. De fait, il est aujourd'hui pratiquement impossible d'aborder des sujets sérieusement dans les médias. Et c'est particulièrement vrai des questions politiques et économiques. Et sur les médias dits « sociaux », la situation n'est pas forcément meilleure. Les mécanismes de l'audience sont les mêmes qu'à la télévision. Si vous avez un discours complexe ne se résumant pas à des formules tonitruantes il y a peu de chance que vous ayez du succès. On l'oublie trop souvent, mais le néolibéralisme a eu son heure de gloire en même temps que la télévision envahissait tout. C'est un peu le produit de cet abrutissement généralisé favorisant les formules simplistes et les raisonnements sans queue ni tête. Et le problème est assez connu, pour s'opposer à des formules simplistes comme moins il y a d'états, mieux c'est, il faut souvent construire tout un raisonnement et une démonstration historique complexe qui prend du temps. L'idéologie libérale a en quelque sorte un avantage évolutif dans un univers fait d'informations instantanées et d'inculture profonde.
Quand on parle des retraites, on ne parle pas du fond
Dans ce cadre de simplification massive des raisonnements, les mécanismes de bouc émissaire fonctionnent à fond. Quoi de plus simple en effet que de faire de quelques populations les responsables de tout ? Le débat sur les retraites est en ce sens assez emblématique. Je ne suis pas en train de dire qu'il ne faut pas changer quelques règles ou faire quelque chose pour compenser le déclin de la population active. Cependant, réduire cela à une simple question de temps de travail ou d'âge de départ est tellement simpliste. Et je ne parlerai même pas des délires autour de la capitalisation. C'est d'une part irréaliste puisqu’en réalité cela augmenterait à court terme les charges sur les actifs. En effet une transition serait nécessaire pour passer d'un système à l'autre. Mais en plus cela ne peut pas résoudre le problème de fond qu'est le déclin du nombre d'actifs par retraité.
Le débat est en plus assez ridicule alors même que la France connaît une très forte poussée du chômage qui en plus était encore à des niveaux extrêmement élevés. Car il n'y a pas eu de baisse du chômage sous Macron ou alors à la marge pour créer des emplois précaires et des autoentrepreneurs très mal payés. Parler de l'âge de départ à la retraite pour résoudre le déséquilibre des caisses de retraite alors qu'il y a tant de gens qui ne cotisent pas parce qu'ils n'ont pas d'emploi relève de la stupidité maladive à ce stade. L'urgence de la réforme prendrait du sens si nous étions dans une situation où toute la masse de la population en âge de travailler était employée, mais c'est très loin d'être le cas. En soi la disparition du sujet du chômage est en soi assez inquiétante. Et ne parlons pas de l'explosion des déficits commerciaux bien plus inquiétants que la question des retraites ou de la dette publiques. C'est à peine si les médias parlent de ce sujet de temps en temps. Nous avons quitté le monde du réel pour celui des fantasmes en quelque sorte. Probablement parce que nos politiques ont simplement renoncé à résoudre les problèmes puisque nous sommes enfermés dans un cadre européen qui empêche toute politique alternative réel.
L'Europe c'est l'autre grande absente des débats d'ailleurs. Nos débatteurs publics font comme si la France était l'homme malade de l'UE. La réalité c'est que tout le continent va très mal. L'Allemagne connaît une désindustrialisation massive et la non-réaction des élites européennes face aux agressions économiques américaines n'arrange rien. On vient d'apprendre que Stellantis qui détruit des emplois en France va ainsi investir 13 milliards d'euros aux USA. Est-ce grâce au laissez-faire libéral ? Bien sûr que non, c'est l'effet du protectionnisme US. Pourtant il n'y a personne pour prôner le protectionnisme dans les débats en France. Quant à parler de la sortie de l'euro et de l'UE, cela reste encore très timide. Le débat sur les retraites dans ce cadre ne sert qu'à une seule chose, occuper le temps de cerveau disponible comme disait l'ancien directeur de TF1.
Il est bien triste de voir que la réforme des retraites accapare tant de place alors qu'elle a en réalité très peu d'importance. Si notre pays continue sa désindustrialisation, il n'y aura simplement plus de retraite du tout et la population risque de devoir simplement s'expatrier pour survivre le pays plongeant dans une situation de misère massive. Le temps n'est plus aux petits débats comptable pour savoir si le budget machin dépassera ou non 3 ou 4% dans dix ans. Tout ceci c'est justement ce qui nous a conduits à la situation actuelle, des politiques de petit tableau Excel sans vision globale produit d'esprit étriqué qui confonde politique économique et comptabilité. Il faut aujourd'hui des politiques de rupture et un retour de l'état stratège, mais aussi l'abandon de la stratégie du couvercle sur la marmite à coût de mesures sociales. Mais pour cela vous le savez aussi bien que moi, il faut préalablement rompre avec l'UE et l'euro. Et c'est bien de ce débat-là que nos élites évitent absolument.