S'il m'arrive souvent de parler de ce qui ne va pas et de construire des textes passablement pessimistes, c'est essentiellement parce que la situation l'exige. Et à bien y réfléchir, il vaut mieux penser au pire pour mieux l'éviter, même si bien évidemment ce blog n'est qu'une minuscule goûte d'eau dans l'océan . Il semble d'ailleurs comme le note Laurent Pinsolle sur son blog que le réveil commence à toucher l'intelligentsia eurobéate puisque même des économistes dits « sérieux » commencent à parler ouvertement de sortir de l'euro. Je note d'ailleurs l'évolution salutaire d'Oncle Bernard alias Bernard Maris dont le positionnement pro-européen m'avait toujours étonné surtout lorsque l'on a lu ses très bons livres comme l'Antimanuel d'économie. J'attachais son positionnement officiel à sa condition personnelle et professionnelle autant qu'à son milieu plus qu'à une adhésion réelle. L'homme qui décrivait les économistes modernes comme des adeptes d'une nouvelle scolastique religieuse ne pouvait pas vraiment être totalement coupé des réalités économiques et du caractère délirant de la construction monétaire européenne. Ce changement me fait donc diablement plaisir et devrait réjouir quiconque n'est pas trop sectaire. L'erreur est humaine et les contraintes sociales peuvent parfois pousser des esprits brillants à s’asseoir sur leurs convictions. Tout juste peut-on parler de manque de courage personnel. Mais il est plus facile de se dire courageux derrière un ordinateur que devant l'adversité. Je ne jugerai donc pas de ces revirements ni ne ferai de procès. Plus nous serons nombreux à déclarer morte l'UE et l'euro et plus vite notre peuple pourra passer à autre chose.
Le retour de l'histoire européenne
Et c'est justement de cet autre chose que j'aimerai ici à nouveau discuter. Parce que la fin de l'UE ce n'est pas la fin de l'histoire, mais son renouveau. À nouveau parce que la discussion en elle même n'est pas nouvelle. Nous en avions même parlé sur le blog de notre illustre et regretté Malakine qui a malheureusement disparu totalement du circuit des blogs et dont je n'ai absolument aucune nouvelle. Pour ceux qui n'ont pas connu ce blog, il est toujours possible de consulter les articles du blog. L'autre chose dont je parle est bien sûr la construction d'une autre Europe. Mais il ne s'agit pas d'une autre Europe construite à partir de l'actuelle décadente. De celle-ci il n'y a plus rien à attendre, qu'elle meure le plus vite possible. Je parle ici de l'hypothèse d'une Europe polycentrique dont nous parlait jadis Malakine et qui peut s'esquisser sur une carte comme celle que je donne maintenant. Alors tout d'abord il faut expliquer pourquoi construire autre chose sur les décombres de l’ancienne UE. Peut-être pour donner un sens à l'action collective, un projet positif pour montrer que la fin de l'UE ce n'est pas la fin du monde. Et que l'erreur de la construction européenne construite sous domination américaine ne doit pas nous décourager de vouloir construire des associations positive entre nations. Du moment que l'on se sert bien évidemment de l'exemple de l'UE actuelle pour ne pas réitérer les mêmes erreurs. Il y a également des raisons de dynamique économique. Avoir un marché plus large n'est pas forcément une mauvaise chose surtout en face de mastodonte comme la Chine. Un marché large permet d'imposer des règles et des normes plus facilement que pour un petit marché qui peut subir les normes des autres faute d'une taille suffisante pour imposer les siennes. Je vous rassure, nul besoin d'un marché de 500 millions d'habitants pour cela. Le Japon et ses 127 millions d'âmes arrivent assez bien imposer ses propres normes dans les domaines de pointes comme l'informatique ou la microélectronique. Une simple alliance de l'Italie et de la France fait par exemple à mon sens un marché assez large pour cela.
L'europe potentielle d'après l'UE
Mais nous devons aussi prendre en compte l'histoire et notre héritage historique tous comme nos contraintes que l'évolution récente nous donne. Je me suis donc amusé à découper l'Europe en plusieurs zones potentielles pour de nouvelles unions qui me semblent plus cohérentes sur le plan économique et historique que l'actuelle Union européenne. Des unions qui permettraient une dynamique positive tout en respectant les liens historiques et les affinités. Il s'agit ici surtout de construire des ensembles logiques qui auraient une grande autonomie sur le plan commerciale avec des unions douanières et des monnaies commune et non unique. J'insiste sur la différence. La monnaie commune étant une monnaie de réserve, d'investissement entre pays, et non une monnaie qui remplace celle des états nations. C'est ce qu'aurait dû être l'euro en définitive. L'Europe est ainsi découpée en trois grands ensembles plus des zones floues dans lesquelles il est difficile de savoir quelle serait potentiellement l'évolution. Tout au nord, nous aurions la renaissance de la ligue hanséatique ensemble scandinave avec un très haut niveau de productivité et une proximité culturelle forte. Il se pourrait que la Grande-Bretagne y adhère, mais cela dépendra de l'évolution des liens transatlantiques. Ensuite une union germanique qui correspond en fait à la réalité de l'influence allemande. Les pays bas sont par exemple devenus le port de l'Allemagne. Une réalité qui se traduit dans l'énorme excédent commercial des pays bas qui représente 7,6 % du PIB un record mondial devant l'Allemagne. Même chose pour l'Autriche qui connaît un excédent à 3,4 % du PIB et dont les liens culturels et linguistiques avec l'Allemagne sont évidents. On pourrait y ajouter la Suisse, mais la neutralité historique du pays pourrait s'opposer à un principe d'union. Reste le cas belge. Ce pays ayant une coupure nette entre l'évolution économique de la Flandre et de la Wallonie. Tout porte à croire qu'une scission pourrait un jour apparaître tant les dissensions s'accroissent. Enfin il y a la zone qui nous intéresse et nommée l'union latine ou union méditerranéenne. Vieux mots qui furent employés même par Sarkozy, mais dont les significations changent suivant ce que l'on met derrière. J'y reviens dans la dernière partie de ce texte.
Pour le reste de l'Europe il y a un flou qui dépend des évolution d'état puissant et externe à l'UE actuelle. Par exemple le destin britannique est intimement lié à l'avenir des USA. Il est possible que si l'empire américain s'effondre avec son dollar, les Anglais se mettent à vouloir rejoindre une des unions précédemment citées. Il est possible également que l'on assiste à l'explosion du Royaume-Uni avec l'indépendance de l'Écosse qui pourrait précéder celle du pays de Galle. Il faut également noter que la surdépendance de la Grande-Bretagne vis-à-vis de la fiancée internationale pourrait se révéler fatale lorsque le monde aura muté et que l'empire de la finance anglo-saxonne aura cessé d'être avec l'effondrement du dollar. Ce n'est pas qu'une conjecture, l'empire US c'est le dollar. Il leur permet grâce à son pouvoir d'achat universel de matière première d'engranger des déficits extérieurs permanents et donc de faire vivre leur économie sous perfusion monétaire permanente. En 2007 on a vu l'effet sur l'économie US de la simple division par deux de leurs déficits extérieurs. Imaginez maintenant leur balance commerciale revenant à l'équilibre. Lorsque le monde aura retrouvé le sens des nations, chacune d'entre elles contrôlera à nouveau ses frontières des marchandises et des capitaux. L'on peut dès lors imaginer l'impact sur une nation comme la Grande-Bretagne. La City à elle seule pèse plus de 10 % du PIB. La fin de la circulation des capitaux à l'échelle internationale signifierait simplement la disparition de la City et de ses activités de piratage du capital planétaire. On comprend mieux l'attachement de ce pays à la liberté de circulation des capitaux lorsque l'on connait cette réalité.
Pour ce qui est de l'Europe de l'Est, il y a la question russe. Vous remarquerez que je n'inclus pas la Grèce dans la sphère de l'union latine et méditerranéenne. C’est essentiellement parce que je pense que la Russie va voir son influence grandir dans ce pays. Les liens religieux et historiques ayant une grande importance à mes yeux, il me semble, que le destin de la Grèce sera plutôt avec celui de l'Europe centrale et de la Russie. Même chose pour la Pologne, on pourrait cependant imaginer une union d'Europe de l'Est avec la Pologne en son centre. Plus à l'Est, la Russie reprendra son rôle historique, c'est d'ailleurs déjà en train d'advenir.
L'objectif de ces unions n'est pas de construire des états unis, ni même de petites confédérations. Il s'agit simplement de zone de coopérations étendue qui aurait plusieurs critères simples visant à créer localement ce que Keynes voulait créer avec son célèbre Bancor.
Chaque zone aurait ainsi :
-Une monnaie de réserve commune servant à l'investissement productif des nations membres
-Un tarif extérieur commun et des des quotas restrictifs qui viseraient l'autosuffisance de la zone ainsi commerciale créée.
-Une politique de contrainte des équilibres commerciaux interne. Chaque pays devant équilibrer sa balance des paiements.
-Une politique globale visant le plein emploi, le chômage de masse étant considéré comme l'ennemi public numéro 1. Dans ce cadre un pays déficitaire pourrait prendre des mesures pour restreindre les importations. Un pays excédentaire serait encouragé à relancer sa demande intérieure par des injections monétaires sous forme de grands travaux ou de hausse salariale. Il n'y a rien à imposer comme solution, seulement il faut que la règle de l'équilibre et l'objectif de plein emploi soient appliqués.
-La circulation des capitaux sera soumise dans ce cadre à un contrôle étatique important. L'épargne locale doit servir à l'investissement local. Les pays ayant des besoins importants d'investissement et devant faire appel à des producteurs étrangers pourront emprunter à la banque d'investissement de l'union. Elle est faite pour cela. Nul besoin de marché financier pour financer l'investissement réel. Ils ont d'ailleurs passablement démontré leur incapacité chronique à financer l'économie réelle ces dernières années.
Ces quelques règles communes laissent bien évidemment toute liberté aux états membres quant à leur application pratique. La règle la plus importante étant l'équilibre des balances des paiements. C'est la seule règle qui peut permettre un développement harmonieux à long terme. Le tarif extérieur commun lui vise à créer une solidarité économique locale entre les membres de l'union.
Pour une union latine et méditerranéenne
L'union latine est à mon sens un espace de proximité culturel et humain assez naturel pour la France. L'Italie, l'Espagne, la France, et le Portugal partagent ensemble des comportements économiques assez proche et leur histoire monétaire fait qu'ils peuvent s'entendre sur le plan économique assez facilement. L'intégration du Maghreb tient par contre de la stratégie à long terme visant plusieurs buts. Le premier est de refaire du monde méditerranéen un monde dynamique. Depuis l'avènement du commerce transatlantique, la méditerranée fut assez largement délaissée par les Européens. La stagnation du monde musulman n'a pas vraiment arrangé les choses et les empires coloniaux n'ont pas non plus vraiment relancé la dynamique économique de la zone. Alors que le monde bascule petit à petit vers l'Asie et que le destin du commerce transatlantique est de décliner en même temps que l'empire américain. Pourquoi ne pas faire de la méditerranée à nouveau cette mer des échanges qu'elle a si longtemps été ? Bien évidemment pour y arriver il faut que le sud de la méditerranée rattrape en partie le nord. Nous pourrions imaginer ainsi dans le cadre de l'union latine un équivalent au plan Marshall pour les Maghrébins. Le plan Marshall ce n'était pas seulement une aide financière. Il y avait une logique keynésienne derrière. C’était aussi un moyen pour les USA d'écouler leurs surplus de machines-outils vers le vieux monde. Nous pourrions faire de même ici en créant une banque de développement méditerranéenne qui prêterait en monnaie commune de l'argent aux états du Maghreb qui construirait ainsi une industrie en achetant des biens d'équipement avancés en Italie et en France. Cette région du monde pourrait facilement obtenir des taux de croissance à l'Asiatique pendant quelques années pour peu qu'elle consomme ce qu'elle produise. Il faut simplement lancer la pompe à croissance en lien investissement locale, gain de productivité local à la consommation locale. Nous devons faire pour l'Afrique du Nord cet effort qui nous sera mutuellement profitable. Les villes du sud profiteraient largement de ce développement sans parler des régions Italiennes comme la Sicile.
L'autre but évidemment de l'accrochage du Maghreb à l'Europe Latine est migratoire. Si nous ne voulons plus que l'immigration augmente, il faut impérativement que ces pays se développent. Et là encore, la réalité humaine fait que l'Italie, l'Espagne, et la France partagent la même source d'immigration l'Afrique du Nord. Cet intérêt commun rajoute donc des arguments à la pertinence de la construction d'un ensemble latin et méditerranéen. Encore une fois, l'objectif de cette union n'est pas de créer une nation, mais simplement un espace de développement collaboratif dans lequel les nations agissent positivement les unes avec les autres. Et comme nous l'a appris l'UE, ce sont les règles communes qui font la nature des relations entre les peuples de ce genre d'union. En voulant uniformiser le continent et en niant les réalités humaines locales, l'UE a créé les conditions d'une guerre commerciale en Europe. Loin d'unir les peuples, l'UE les a séparés. Les règles communes doivent donc prendre en compte le fait que les peuples ont des aspirations et des modes de fonctionnement différents. Les constructions d'union doivent donc plutôt rapprocher les peuples qui ont des affinités, des comportements et des intérêts communs. Les règles et les mécanismes de ces unions doivent rester simples et respecter l'indépendance de chaque peuple. Elles doivent être construites sur le respect de l'indépendance de chaque nation. L'union latine si bien ficelée pourrait être un vrai projet pour nos nations dans les années qui viennent. C'est une solution élégante à plusieurs de nos problèmes. C'est également une réponse à ceux qui pensent que les souverainistes et les patriotes sont contre toute forme d'organisation internationale. Il n'en est rien. Des projets scientifiques, industriels et culturels internationaux doivent au contraire être encouragés. Avec une telle union latine, nous aurions un marché de 250 millions d'habitants avec à la fois des ressources en matière première et des capacités de production de haute technologie. Ainsi qu'un espace potentiel de développement humain important. Cette union aurait en plus pour elle la profondeur historique puisqu'elle apparaît comme une lointaine descendante de l'Empire romain d'occident. On pourrait parler de la proximité linguistique des langues latines ou encore du fait que le français est extrêmement parlé au magret de quoi faciliter l'échange humain et commercial. Ainsi l'Europe post-UE pourraient enfin retrouver le chemin de son histoire celui qu'elle a perdu après la Seconde Guerre mondiale. Se redécouvrant multiple, l'Europe retrouverait enfin le chemin de sa prospérité en acceptant des divergences entre les peuples latins et germaniques. Entre ceux du nord, ceux du sud et ceux de l'Est. Ce n'est qu'en acceptant ces réalités que le continent pourra à nouveau aller de l'avant et pourra affronter ses problèmes démographiques, économiques et énergétiques à long terme.