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Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.

Le déclin scientifique européen et l'UE

Quand de Gaulle rencontrait le directeur du CNRS (Pierre Jacquinot) pour une véritable politique scientifique.

 

Si j'ai souvent montré sur ce blog le caractère extrêmement nuisible de la construction européenne sur notre situation économique et celle du continent, sans parler de son influence néfaste sur la géopolitique continentale. Ce n'est malheureusement pas uniquement sur ces seuls plans que la construction européenne agit. En effet en concentrant de plus en plus le pouvoir sur la Commission européenne et les structures bureaucratiques de Bruxelles l'UE a petit à petit étouffé toute forme d'autonomie sur tout un tas de sujets . Étrangement si pendant des années les hommes politiques français se sont acharnés à pointer du doigt le centralisme français excessif et le jacobinisme latent de nos institutions. Ils ne sont par contre jamais inquiétés du super-jacobinisme qui était pourtant en train de se produire à l'échelle du continent avec l'UE. Non seulement l'UE nous a volé notre indépendance politique et économique, mais elle a aussi tout simplement démoli toute possibilité d'autonomie sur tous les sujets essentiels de la politique publique. Et alors que le toutes les grandes puissances du monde s’attellent à retourner dans l'espace, et à avoir des ambitions scientifiques et techniques importantes, comment ne pas voir ce qui crève pourtant les yeux, la quasi-disparition de l’Europe sur le plan scientifique.

 

Cette disparition s'est faite de manière progressive tout comme l'augmentation du poids de l'UE sur les politiques publiques et dans le domaine géopolitique. C'est pour cela en grande partie que les principaux acteurs ne s'en sont pas rendu compte jusqu'à l'arrivée actuelle. On pourrait même dire qu'il y a chez nos élites une grave erreur d'analyse sur l'origine de ce déclin. En effet, le déclin scientifique européen est souvent mis sur le dos de la division du continent et de son absence de coopération. En créant une synergie à l'échelle du continent, nous compenserions notre relative petitesse à l'échelle globale et donc nous retrouverions notre place sur la plan scientifique. Sauf que cette analyse ne tient pas cinq minutes à l'observation des faits. L'Europe divisée de 1960 était très dynamique sur le plan scientifique et en cours de rattrapage sur les USA. Du reste l'absence de superstructure à l'échelle européenne n'a pas empêché de grandes collaborations techniques et scientifiques dans tout un tas de domaines à commencer par l'aéronautique ou l'espace . Ariane espace n'a pas été le produit de l'UE, c'est une structure complètement indépendante de la construction européenne. Quant à la taille, si un gros pays peu bien évidement compter sur un plus gros budget et sur une plus grande quantité de personnel de qualité il ne faut pas oublier que de petits pays sont à l'heure actuel leader dans nombre de domaines scientifiques. La Corée du Sud à elle seule dépose plus de brevets chaque année que l'ensemble de l'Union européenne pourtant bien plus peuplée. On pourrait parler d’Israël qui est un tout petit pays de 6 millions d'habitants, mais qui grâce à ses investissements de recherche arrive à se placer bien mieux que la France en termes d'innovations scientifiques et techniques. Bref, la taille est loin d'être si importante.

 

Du reste, n'oublions pas que la collaboration internationale entraîne des lourdeurs à cause de la bureaucratie et des problèmes de langue. Le déclin relatif actuel d'Ariane tient aussi à ces lourdeurs et au fait que les différents membres qui autrefois travaillaient ensemble se font aujourd’hui concurrence. En particulier l'Allemagne qui s'est servi des collaborations européennes pour en quelque sorte voler une partie des savoir-faire français et faire son programme spatial dans son coin. À mon sens, les collaborations internationales doivent être limitées dans le temps et avoir un objectif clair ou cela se transforme littéralement en gabegie comme le pauvre projet Iter qui va probablement devenir obsolète avant même d'entrer en activité. L'UE sur cette question est donc par nature fortement nuisible parce que favorisant la complexité organisationnelle du fait de sa nature transnationale. À cela s'ajoutent les effets économiques de l'UE et de l'euro. En faisant décliner économiquement le continent, il est bien évident que les dépenses allouées à la recherche n'ont plus guère augmenté. Elles ont même diminué en part de la valeur ajoutée sur les vingt dernières années. Pour remplir les cahiers des charges néolibéraux de l'UE, les dépenses de recherche comme celle de l'éducation ont souvent été réduites.

Mais ne dédouanons pas non plus la responsabilité des dirigeants français en matière de politique scientifique. Le général de Gaulle fut en fait le seul dirigeant d'après guerre à vraiment prendre conscience de l'importance d'avoir un secteur scientifique et technique fort. Mais il avait aussi compris qu'il y avait une articulation d’importance entre l'industrie et la science. Croire qu'on peut maintenir un secteur scientifique de premier plan sans avoir d'industrie est tout simplement ridicule. La recherche scientifique et technique nécessite un biotope et le maintien d'un vivier de populations aux caractéristiques de formations scientifiques et techniques variées. L'illusion de la fin des années 90 qui a consisté à croire que l'on pouvait maintenir un niveau de recherche scientifique et technique important tout en délocalisant l'industrie a vécu. Ajoutons à cela un déclin des dépenses en R&D depuis plusieurs décennies. Sous de Gaulle la recherche avait bénéficié d'une vraie dynamique et avait atteint près de 6% du PIB. Aujourd’hui, la France est à moins de 2% de dépense dans la recherche. Et nos voisins ne font pas beaucoup mieux à quelques exceptions près.

 

Les effets de ces baisses budgétaires ont mis du temps à se faire sentir. La France des années 80 était encore très innovante même si l'état avait déjà abdiqué pour se jeter à corps perdu dans le bain glacé du laissez-faire libéral. C'est ainsi qu'alors que nous avions tous les savoir-faire pour avoir notre propre industrie du microprocesseur et de l'informatique nous préférâmes liquider nos entreprises du secteur pour nous jeter sur les produits américains. Giscard eut là encore un rôle très néfaste sur le développement des semi-conducteurs en France. Mitterrand ne fit guère mieux d'ailleurs. Durant la période 74-90, la France gâcha énormément les talents nombreux des scientifiques et inférieurs Français de l'époque. C'est toujours un peu le cas, mais la France entre temps a cassé sa capacité à produire de l'innovation par ses restrictions budgétaires et l'effondrement du niveau d'instruction. Le fait que l'éducation nationale n'arrive même plus à former assez d'enseignants et à les attirer semble être le dernier acte d'un sabordage continu de la puissance scientifique française de la part de ses « élites ».

 

La notion de souveraineté scientifique européenne est stupide

 

Je profite de ce sujet pour également aborder une notion que je trouve largement stupide. C'est celle de la souveraineté scientifique et technique européenne. Tout d'abord, rappelons que la souveraineté n'a de sens que si elle s'accroche à la notion de peuple et de nation. Seul un peuple peut être souverain et cette souveraineté prend la forme de la souveraineté nationale. Par définition, une structure supranationale comme l'Union européenne ne peut donc pas être souveraine puisqu'il n'y a pas de peuple européen et donc encore moins de nations européennes. Cela est vrai pour toutes les formes de souveraineté. Mais dans le cas scientifique, c'est encore plus voyant. Les diverses structures des projets scientifiques européens, que ce soit dans le domaine civil ou pire dans le domaine militaire, se transforment très souvent en foire d’empoigne pour savoir qui tirera le plus du partenariat, avec les Français qui sont généralement ceux qui acceptent les plus gros perdants. La compétition entre les nations européennes promues par la construction européenne et sa concurrence non faussée favorisant de facto la non-coopération des membres.

 

 

En effet si en théorie la construction européenne vous parle de coopération, en pratique elle a mis tous les peuples du continent dans un marché hautement concurrentiel et en plus non-protégé des puissances externes. Non seulement cette structure ne favorise absolument pas la coopération, mais elle favorise bien au contraire l'égoïsme de chaque membre de la structure. Loin d'avoir fait de l'unité une force, elle l'a transformé en grande faiblesse collective. Et dans la science cela prend la forme de coup bas et d'action égoïste comme celle de l'Allemagne dès qu'il s'agit de partenariat scientifique et technique. À l'heure actuelle je suis persuadé que les pays européens ont certainement de meilleures relations scientifiques et techniques avec les pays qui ne sont simplement pas membre de la construction européenne qu'entre eux. Il est donc à mon sens parfaitement risible de parler de souveraineté scientifique européenne quand on voit ça. Et le déclin du continent par rapport au reste de la planète semble largement donner raison à mon analyse. La seule chose que semble savoir faire la construction européenne est de légiférer sur les entreprises et les activités scientifiques et techniques provenant de l’extérieure au lieu de développer ses propres solutions techniques. Il s'agit là d'un indice clair du déclin d'un continent qui a renoncé au progrès, au savoir, et à l'indépendance. Dans le secteur scientifique comme dans le reste des activités, l'UE est une énorme machine à paralyser le continent.

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