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15 janvier 2024 1 15 /01 /janvier /2024 14:59

Nous commencerons ce texte par la pyramide des âges de la France de 2023 qui vient d'être faite par l'INED avec les derniers chiffres de l'INSEE. Vous pouvez retrouver toutes les données démographiques et plus dans les très bons résumés de l'INED sur la situation démographique française en 2023. Et ce que l'on peut rapidement constater c'est que la catastrophique baisse de la natalité commence bien sous François Hollande suite à sa « réforme » de la politique familiale qui a fait de celle-ci une composante de la politique de redistribution économique alors qu'elle en avait toujours été exclue. Je l'ai déjà dit sur ce blog en parlant de démographie, la politique familiale en France qui a été pensée en partie par le grand démographe Alfred Sauvy. Et ce dernier avait constaté que la meilleure façon de lutter contre la sous-natalité qui ravageait la France depuis le 19e siècle était de faire en sorte que l'enfant ne soit pas vu comme une charge supplémentaire trop grande. Il fallait que l'arrivée d'un enfant n’entraîne pas une trop grande rupture dans les habitudes de vie d'une population donnée, quelle que soit la classe sociale à laquelle elles appartenaient.

 

C'est pour cette raison que la politique familiale n'était pas soumise à des conditions de ressource. Pour la redistribution en France, on utilisait l'impôt sur le revenu, pas la politique familiale. Cette politique a été à peu près maintenue sous tous les gouvernements successifs qu'ils soient de gauche ou de droite même si la générosité de celle-ci a quand même baissé avec le temps en particulier sous Giscard d'Estaing . La politique familiale comme les autres politiques d'investissement ont trop souvent été des variables d'ajustement comptable alors qu'elles auraient dû être sanctuarisées. Mais François Hollande va aller plus loin que ses prédécesseurs, trop loin, en cassant l'universalité des aides et en les mettant sous condition de ressource. Cela a clairement cassé la fécondité française, en particulier celle des classes moyennes qui subissent en plus de plein fouet la crise du logement. La conséquence est une fécondité qui est très faible au centre de la pyramide des revenus, mais qui est forte chez les pauvres et chez les couches sociales aisées. Une telle démographie est en soi porteuse de graves conséquences à long terme sur le plan politique avec une disparition des classes moyennes en quelques sortes.

 

La réforme Hollande a donc fait en démographie ce que la dérégulation économique a fait sur le plan économique c'est-à-dire une polarisation extrême entre un micropôle très riche et un autre très pauvre en éliminant les couches intermédiaires. C'est un drôle de résultat pour un président qui prétendait être de gauche et combattre son ennemi la finance. La rupture démographique est plus visible encore lorsque l'on regarde l'indice conjoncturel de fécondité qui tombe vraiment à partir de 2014. L'effet a sans doute aussi été psychologique, la population comprenant que désormais même les aides familiales pouvaient être sujettes à la suppression pour des causes budgétaires. L'incertitude devient donc totale et les gens se restreignent au maximum par peur de l'avenir dans une société économiquement fortement anxiogène. Même si les réformateurs vous expliqueront en général qu'ils agissent au nom de l'égalité, du bien commun et toutes ces formules à l'emporte-pièce pour escroquer les électeurs naïfs, la réalité triviale c'est qu'il s’agissait simplement de faire des économies de bout de chandelle à court terme. Le court terme, nous y venons, c'est la mère de toutes les catastrophes contemporaine. Qu'elles soient économiques, démographiques, énergétiques ou autres. Il n'y a pas d'action à long terme dans les décisions que prennent les chefs d'État en France depuis le départ de De Gaule.

 

 

Les effets sur la santé, l'éducation, l'industrie et l'énergie

 

Nous pourrions ici rechercher ensemble les origines de ce comportement. Nous y verrions l'effet des médias couplés au système électoral qui produit une vision de l'instant envahissante. Certains y verront les effets de la fin de la croyance religieuse produisant des hommes sans perspective autre qu'eux-mêmes nourrissant l’individualisme et l'esprit à courte vue. À quoi bon penser le futur puisque nous n'y serons pas ? dira l'homme de peu de foi, et de faible empathie. Je dois avouer qu'en réfléchissant à toutes les explications possibles il est difficile de choisir. Mon caractère athée, ma formation scientifique et rationaliste me pousseront bien évidemment à préférer l'hypothèse du poids des médias et de la sélection des élites. Mais la porte est tout à fait ouverte aux autres explications. Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons que constater le désastre dans tous les domaines. Sur la démographie nous venons d'en parler, l'avenir est sombre. Ne pas comprendre qu'investir dans les naissances et la fécondité c'est investir dans la possibilité même de l'avenir, c'est le comble de l'imbécillité pour un dirigeant. Et le problème vient de loin puisque les démographes savent depuis les années 70 que les faibles naissances ont des conséquences sur tout le reste, croissance économique, innovation, coût des systèmes sociaux, dynamisme général de la société et même politique. Le vieillissement n'étant pas étranger à l'incapacité de la France et plus généralement des pays occidentaux à s'adapter à un monde qui change. Les petites économies faites sur les politiques familiales ont un coût à long terme qui dépasse largement toutes les économies ridicules qu'on a pu faire à l'époque sur ces questions.

 

 

Mais les effets de la pensée à court terme ne s'arrêtent bien évidemment pas à la question cruciale de la démographie. Commençons par la plus grossière des catastrophes provoquées par le courtermisme, celle de l'effondrement de notre système de santé. En effet s'il y a un lien de cause à effet extrêmement simple à comprendre c'est bien celui des effets de la baisse artificielle du nombre de médecins formés à partir du début des années 70. En effet, l'administration à l'époque a d'abord décidé du numerus clausus afin de limiter le nombre d'étudiants en médecine puis elle a réduit ce nombre année après année. Il faut bien comprendre que cette stratégie n'avait pas d'autre but que de faire des économies à court terme et de faire artificiellement grimper les revenus des médecins. La rareté fabriquant une pression à la hausse des revenus médicaux. À terme, les empaffés qui ont décidé de ça pensaient que cela réduirait mécaniquement les dépenses de santé. Évidemment quand on réduit artificiellement le nombre de médecins et qu'on additionne à ça l'allongement de la durée de vie et du vieillissement de la population, on se retrouve des décennies plus tard avec un manque criant de médecins et des hôpitaux surchargés. Le résultat à long terme de ces politiques était totalement prévisible dès 1972. Et pourtant, ils l'ont fait. Si ce n'est pas une vision à court terme, rien ne l'est. Mais la culpabilité n'est pas seulement politique, c'est toute la chaîne de commandement de la médecine française qui a participé à la catastrophe avant de commencer à se plaindre des conséquences quarante ans plus tard. La faillite est donc collective, elle va de la politique (droite et gauche confondues) jusqu'aux médecins, aux syndicats et à l'ordre des médecins. Preuve que l'esprit du temps n'était plus à la stratégie de long terme et au bien-être général, mais simplement à l'intérêt et aux bénéfices immédiats.

 

Continuons en parlant de l'éducation nationale. Le manque de prof tout comme celui des médecins vient de loin. Les salaires des enseignants n'ont eu de cesse de se dégrader dans le temps alors même que l'on augmentait les exigences pour devenir enseignant. De la même manière, les différentes réformes pédagogiques souvent présentées comme des réformes pour améliorer l'enseignement camouflaient en réalité des besoins de coupe budgétaire qu'on avait du mal à assumer politiquement. On n'a donc réformé l'école depuis quarante ans non pour améliorer l’enseignement, mais en réalité pour faire des économies comptables. Là encore, le prix à payer à long terme pour le pays est largement supérieur aux économies ridicules faites à l'époque. Combien de vie brisée par un enseignement médiocre ? Combien d'échecs scolaires auraient pu être évités et donc combien notre PIB aurait-il pu croître si nous n'avions pas fait ces actions de petits comptables ? C'est difficile à estimer, mais aujourd'hui l'échec général de l'enseignement en France a un coût invraisemblable et met en péril l'avenir même du pays. Comment reconstruire une industrie sans ingénieurs qualifiés, sans ouvriers spécialisés ? Comment être à la pointe de la recherche avec des jeunes au niveau mathématique et scientifique lamentable ?

 

Même chose pour l'énergie et l'industrie. La France Gauliste et interventionniste nous avait légué un puissant appareil industriel et énergétique. EDF et l'énergie nucléaire nous permettaient d'avoir une électricité bon marché et stable. Une bonne base pour entretenir une base industrielle dans un pays dépourvu de pétrole et de gaz. Las, par calcul bassement électoral, les politiciens ont abandonné le nucléaire, sous l'influence des lobbys pseudoécologistes dont bon nombre roulaient en fait pour des intérêts étrangers en particulier allemands. Toute la guerre faite à notre système de production électrique n'avait rien avoir affaire avec l'écologie dans un pays qui avait déjà fait une transition écologique en réalité grâce au nucléaire. Avec le marché européen de l'énergie, les élites françaises ont délibérément détruit le seul avantage comparatif de l'industrie française et entraîné une véritable hécatombe dans ce qui nous reste de capacité de production. Tout ça par dogme européiste cette fois. Ajoutons à cela la dérégulation commerciale des années 70 qui ont eu pour conséquence la destruction de notre appareil industriel. Les dominants de l'époque voulaient payer un peu moins cher le travail et leurs produits de consommation. Résultat, la production est partie ailleurs notamment en Chine. Mais la Chine dans leur esprit devait rester à produire des biens de bas niveau technique alors que l'Europe et les USA devaient continuer à produire de la haute technologie. Manque de chance la Chine a fait exactement comme tous les pays en rattrapage avant elle, elle est aussi montée en gamme. Nous nous retrouvons donc maintenant à importer des biens de technologie avancée en plus des produits de base. Nos déficits commerciaux malgré une stagnation de la demande en disent long sur l'état de notre production.

 

L'arrêt de Superphénix est le produit de ces deux politiciens. Un arrêt fatal pour la filière nucléaire à long terme.

Même dans le domaine agricole, la vision dérégulatrice à court terme se retourne contre nous. Vouloir les produits les moins chers possibles sans se soucier de la production nous a fait oublier que produire c'est aussi verser des salaires pour consommer. Les Français sans revenu pourront toujours admirer les produits de consommation dans les vitrines, qui, même pas cher, restent trop coûteux pour leurs revenus inexistants. La crise inflationniste que nous vivons est aussi la conséquence de tout ceci. Nous ne produisons pas assez de ce que nous consommons. Et tout ceci est la conséquence de l'inconséquence justement de nos prétendus élites qui se servent plutôt qu'elles servent depuis plus de quarante ans. L'heure est bien tardive aujourd'hui, et le temps des conséquences à long terme de l'irresponsabilité de toutes nos élites de droite comme de gauche est arrivé. Oublions la question idéologique, notre maladie n'est finalement que la résultante du calcul égoïste et simpliste de quelques-uns qui ne payent jamais les conséquences de leurs choix.

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