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12 janvier 2024 5 12 /01 /janvier /2024 15:30

 

Une fois n'est pas coutume, nous devons de nouveau subir les affres du spectacle communicant sur le changement de gouvernement de Premier ministre. Les uns applaudissent et magnifient l'audace d'avoir mis un poussin comme Premier ministre. Les autres éructent contre cette ignominie d'un homme qui n'a rien prouvé et qui n'a pas l'expérience pour diriger le pays. Les plus sages bien entendu n'auront guère réagi à ce qui n'est finalement qu'une parade nuptiale électorale. La stratégie est tellement grossière d'ailleurs que cela en devient véritablement risible. Les propos récents tenus par l'ex-ministre de l'Enseignement apparaissant pour ce qu'ils étaient, des coups de com visant à préparer le terrain à sa mise en place comme Premier ministre. Cela montre en tout cas le peu d'importance que revêt les ministères même les plus importants comme celui de l'éducation nationale pour nos intérimaires de la politique. Ce n'était qu'un job parmi d'autres en quelque sorte. Il fallait draguer la droite, pas seulement celle de l'ex-UMP, mais aussi celle du RN avec des discours traditionalistes sur la valeur travail , l'éducation et autres poudres de perlimpinpin pour grand naïf.

 

Ce que montre encore une fois toute cette communication autour de la nomination de Gabriel Attal c'est la vacuité abyssale de la politique en France aujourd'hui. Réduite à un théâtre d'ombres à coup de stratégie visant à s’approprier le plus de temps médiatique possible pour préparer sans arrêt les prochaines élections. L'homme politique est devenu un marchand de tapis dont le produit est lui même. Avec au centre du mécanisme le système médiatique qui adore faire du bruit pour faire de l'audience. Peut-on encore parler sérieusement de démocratie avec un mécanisme de sélection des élites aussi ridicule au centre du système ? Peut-on même encore parler de nation ou gouvernement ? Le concours de pitreries auquel nous sommes parvenues après 50 ans de dégradation constante est tel, qu'il n'est plus possible de décrire la France comme une nation avec un état et un gouvernement.

 

Alors on pourrait ici débattre longuement sur ce qui a conduit à cette dégradation. Le système médiatique en lui-même est assez probablement l'un des facteurs majeurs du déclin de la politique. La course à l'audience et à la recherche du prochain coup pour faire parler et donc pour gagner des parts de marché est un mécanisme qui en lui même favorise la médiocrité. Pour parler bien et intelligemment d'un sujet, il faut du temps et ça, les médias rapides sont incapables de l'octroyer. De la même manière, tout ce qui nécessite de la réflexion et des efforts tend également à limiter l'audience. Ce n'est pas un hasard si la télévision d’aujourd’hui est objectivement beaucoup plus bête que celle des années 60-70, son moteur économique a changé. Et aujourd’hui même le service télévisuel public se comporte exactement comme le secteur privé dans une course sans fin pour l'audience, seul critère valable de mesure de la réussite. Les hommes politiques ont été en quelque sorte entraînés par ce mécanisme implacable. Les hommes politiques qui continuaient à faire de la politique à l'ancienne avec des programmes, une cohérence, s’adressant à des citoyens et non à des consommateurs, ont naturellement été expulsés du champ médiatique. Il ne reste alors que les communicants, les agitateurs d'idées reçues et les manipulateurs de symboles.

 

Mais ce poids des médias n'est pas le seul facteur explicatif. L'on disait autrefois que la charge de l'état transformait les individus. En effet le fait de se retrouver à une place importante pouvait entraîner une transformation individuelle liée à l'importance des décisions à prendre. Faire des discours pour les médias et se retrouver en charge des affaires concrètes étant deux choses radicalement différentes. Or ce poids qui pèse normalement sur les chargés d'affaires et sur nos dirigeants semble ne plus avoir lieu. Au contraire, tout est pris avec légèreté. Un peu comme si toutes les décisions prises n'avaient pas vraiment d'importance. Alors bien évidemment il y a toujours les apparences. Et Macron qui aurait dû faire du théâtre plutôt que de la politique, joue et même surjoue fréquemment l'homme qui semble prendre la mesure de l'importance des décisions qu'il prend. Mais l'on sent bien au fond qu'il fait semblant tout comme monsieur Attal faisait semblant de s'intéresser aux problèmes de l'instruction publique.

 

Vassalisation et infantilisme

 

L'explication est à mon sens assez simple, ils savent très bien qu'ils n'ont aucune importance en matière décisionnelle. Au fond des choses, la France n'est plus une nation. Elle ne bat plus monnaie, elle n'a plus d'armée, car ce n'est pas son armée, mais celle de l'OTAN et donc des USA. Elle ne fait plus justice puisque le droit européen est aujourd'hui au-dessus du droit français. Et elle ne gère même plus son budget qui doit être pratiquement validé par Bruxelles et Berlin. Même sur le plan énergétique on voit bien que l'état français ne décide plus de rien même quand c'est extrêmement dommageable pour le pays.

 

À partir du moment où vous n'êtes plus souverain, la politique n'a plus de sens. Vous n'êtes plus qu'un bureaucrate qui valide les décisions prises ailleurs. La politique en France depuis plusieurs décennies c'est ça. Entre les pressions américaines et la construction européenne où les hommes politiques français ont cédé petit à petit tous les pouvoirs à la Commission européenne, il n'y a plus rien qui reste de pouvoir à Paris. D'où des comportements de plus en plus ridicules et antinomiques avec les fonctions qu'ils sont censés exercer. On peut littéralement parler d'infantilisation du personnel politique. Ils jouent à faire semblant de prendre des décisions, mais comme ils savent qu'ils font semblant, ça n'a pas vraiment d'importance. On peut parler de politique économique, et de stratégie d'effondrement de l'économie russe un jour, puis écrire un bouquin pornographique le lendemain comme notre ministre de l'économie. C'est exactement comme les enfants qui jouent et singe les adultes sans conséquences pour eux-mêmes et pour leurs proches. Évidemment cette dégradation absolument dramatique du comportement des hommes politiques en France aggrave encore plus la crise démocratique que nous traversons. Quand les gens souffrent de politiques stupides comme l'explosion du prix de l’électricité à cause du marché européen de l'énergie, il est bien évident que les comportements grotesques de la classe politique agacent encore plus. Nos politiques qui n'ont eu de cesse de vouloir démolir la politique nucléaire française depuis trente ans, se fichent aujourd'hui de nous en nous parlant de faire de nouvelles centrales, évidemment en nombre totalement insuffisant. Puisque jamais ils ne prennent un sujet au sérieux même le plus important. La moutarde monte au nez de la population et tout ceci finira probablement très mal.

 

Ce que doivent comprendre nos acteurs politiques c'est que les conséquences à terme c'est bien eux qui vont les prendre dans la figure. Jusqu'à ces dernières années, le système européen a pu tant bien que mal survivre à ses errements et à ses politiques contradictoires en faisant exploser les dettes publiques. On voit bien que la crise des subprimes de 2008-2010 a été comblée par des monticules de dettes, mais qu'aucune réelle prise de décision pour changer le système économique n'a été réellement entreprise. La dérégulation financière et commerciale a continué tout comme la désindustrialisation. Les très mauvaises décisions prises systématiquement à l'échelle européenne conduisent à des catastrophes sur le terrain de plus en plus difficiles à camoufler. Et maintenant même le champion germanique de l'exportation est en déclin notamment à cause des mesures suicidaires en matières énergétiques, que ce soit à cause des sanctions contre la Russie totalement contre-productive, ou à cause de l'abandon du nucléaire pour des énergies intermittentes dont on voit bien en pratique qu'elles sont inefficaces. La crise de l'Europe ne peut plus vraiment être camouflée et les conséquences pour notre population sont de plus en plus graves. L'on peut penser que le comportement irresponsable des dirigeants français, qui font comme si de rien n'était, finira probablement par de violentes insurrections à terme. Le temps de l'insouciance où papa Washington réglait tous les problèmes est terminé, mais nos élites n'ont pas envie de grandir et de devenir adultes. Le réveil risque d'être assez brutal à terme.

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