Un nouveau sujet polémique vient de faire son entrée à gauche, après les attaques sur la démondialisation d'Arnaud Montebourg qui pour la "gauche" officielle défend ainsi les thèses du Fn, voici le communiste André Gerin lepénisé à cause de ses propos récents qu'il a tenus sur l'immigration. Malheur à lui pour avoir osé mettre en doute l'intérêt de l'immigration de masse pour la société française. Comme pour la question du protectionnisme le procès en lepénisme aggravé frappe quiconque réfléchit à ces questions autrement qu'avec le bréviaire du petit livre rose illustré qui sert de prêt à penser à gauche. Le fait est que discuter de l'immigration c'est déjà être un lepéniste. Tant pis si le Medef tient étrangement le même discours favorable à l'immigration de masse sous des prétextes de soi-disant générosité. Lui qui n'hésite pourtant pas à jeter des millions de nos concitoyens au chômage sans que cela le gêne outre mesure. Il semble bien qu'André Gerin soit effectivement turlupiné par le fait que le grand patronat français, défenseur bien connu des travailleurs français, peut à ce point défendre l'immigration de masse sans avoir quelques arrières pensés. Voici donc André Gerin excommunié par l'église officielle de l'immigration infiniment enrichissante. Cet état d'esprit est en tout point similaire à l'état d'esprit avec lequel on aborde la question du protectionnisme et du libre-échange, car dans les deux cas on tombe sous la loi du tabou. Un tabou que nul n'est censé ignorer et bafoué, malgré les accumulations de problèmes que l'idéologie officielle produit dans le pays. L'amalgame entre racisme et opposition à l'immigration est ainsi devenu un réflexe pavlovien, une idée commune. Il s'avère pourtant que si effectivement le racisme peut motiver l'opposition à l'immigration il y a bel et bien des raisons tout à fait rationnelles à cette opposition. Le fait que le FN se soit bâti sur cette opposition à l'immigration ne doit pas automatiquement faire que cette question amène aux idées du FN. Tout comme il ne viendrait à l'esprit de personne de s'opposer à la l'idée qu'il existe une gravité universelle sous prétexte que Marine Le Pen y croirait également. Sur ces questions comme sur beaucoup d'autres nous devons sortir de l'esprit télévisuel de la pseudopensée émotionnelle pour revenir à la tradition cartésienne de la démonstration rationnelle. Les invectives et les psaumes ne changent pas le réel, seuls la réflexion et l'esprit scientifique le peuvent.
L'immigration de masse est un phénomène récent
Il faut rappeler que l'immigration massive est un phénomène relativement récent en France quoiqu'en dise l'idéologie officielle. Jamais dans l'histoire humaine il n'y eut des mouvements de population aussi importants que ceux qui se sont produits depuis le 19e siècle. Les grandes invasions historiques si elles ont parfois changé les régimes politiques concernaient souvent une bien maigre population quantitativement parlant. La France gallo-romaine était ainsi largement plus gauloise que romaine dans sa démographie. De la même manière, les invasions des francs n'ont concerné qu'une petite population face à une France qui comptait déjà des millions d'âmes. Si les mouvements de population étaient relativement faibles en quantité c'est que les voyages étaient difficiles et souvent périlleux à qui s'y risquait. Il faut arrêter de voir le monde tel qu'il nous apparaît à nous moderne si l'on veut essayer de comprendre l'action des hommes du passé. Pour la majorité des hommes de ces époques lointaines, 100 km était déjà une distance énorme. De plus la grande majorité des humains étaient analphabètes et ne connaissaient que vaguement l'apparence du monde, même celles des connaissances limitées que les gens de ces époques avaient. L'immigré d'alors était souvent un proche culturellement parlant et était surtout l'étranger de l'autre bout de la colline que l'on voyait dans le lointain. La preuve de ce peu de mouvement des populations historiquement est dans l'existence même d'une multiplicité de langues et de patois locaux qui n'auraient jamais existé si les hommes s'étaient autant mélangés que ce que prétendent les théoriciens de l'homme flux. L'homme flux étant un homme qui a toujours immigré et dont notre présent ne serait qu'une énième répétition historique. En effet, les hommes communiquent et en général lorsqu'ils habitent un même lieu ils ont tendance à essayer de parler la même langue. Les divergences progressives naissent avec la distance et le non-mélange justement.
Il faut admettre que l'immigration de masse ne commence réellement qu'avec la possibilité de voyage à grande distance à un coût et à un niveau de danger raisonnable. On peut donc dater le début des mouvements de population de masse des grandes invasions de l'Amérique par les Européens. Pour que l'immigration de masse puisse se produire, il faut un vecteur qui puisse la porter. Le bateau à voile puis à vapeur et aujourd'hui l'avion constituent ces vecteurs de plus en plus rapides qui ont permis à cette immigration massive d'exister. Avant cela il n'y avait que des micromouvements locaux. Nous vivons donc quoiqu'on en dise une rupture historique puisque pour la première fois des populations vont pouvoir s'installer dans des lieux très éloignés de leur point d'origine. Un éloignement qui est autant géographique que culturel, j'espère pouvoir au moins tomber d'accord avec les pro-immigration sur ce point. Mais pour produire une immigration de masse, il ne suffit pas d'avoir des vecteurs de mouvement. Il faut aussi des raisons à ces mouvements. La première raison est tout simplement démographique, les déséquilibres démographiques du 20e sicle constituent la principale raison de ces mouvements de population. Le tiers-monde s'installe en occident un peu pour la même raison que l'occident s'est installé en Amérique du Nord. Une expansion démographique trop rapide ayant entrainé des déséquilibres poussant certains à tenter leur chance ailleurs. Le deuxième point crucial est dans l'inégalité du développement qui crée un idéal dans la tête des futurs émigrés un idéal bien souvent fruit de l'influence néfaste de la culture occidentale. Néfaste parce qu'elle déforme bien souvent la réalité de nos pays, ce fut le cas également avec l'american dream, dont certains historiens comme Howard Zinn ont montré le caractère faussaire. C'est le vieux rêve de l'herbe est plus verte ailleurs. Avec les médias modernes, la vision de l'inégalité s'est généralisée tout comme la frustration de ne pas avoir ce que les gens semblent avoir à la télévision. Une partie de l'immigration est le fruit des masses médias. Enfin, il existe aussi des catastrophes ou des guerres pouvant contraindre les populations à fuir.
L'opposition à l'immigration peut avoir plusieurs origines
Maintenant que nous avons fait le point sur l'immigration de masse et son origine, parlons des différentes hypothèses valables pour en critiquer l'existence. Les partisans de l'immigration de masse ont comme principal argument à la bouche la question de l'affaiblissement démographique de la France et de l'Europe. L'immigré étant vu comme une espèce de bouche-trou démographique. Il y a deux présupposés à cela. D'une part, il faut considérer que tous les hommes sont interchangeables c'est-à-dire que l'être humain est fondamentalement universel, et donc, que la culture, la langue et l'histoire personnelle n'ont aucune importance dans la construction de l'individu. Des hypothèses qui, je l'affirme, sont des absurdités intellectuelles. Ensuite, cela suppose que les populations qui émigrent seront toujours là en nombre suffisant pour boucher nos trous. Sur le premier point, on voit bien l'influence toute libérale de l'individu qui se construit tout seul en dehors de toute considération sociale. Faire usage d'un tel présupposé montre ici en fait le caractère libéral de la gauche actuelle. En réalité, l'être humain est en grande partie façonné par son milieu social et familial. Il est absurde de penser que l'homme se crée tout seul dans son coin. Il est donc absurde de penser que n'importe quel homme puisse vivre tranquillement dans n'importe quelle société moyennant quelques adaptations linguistiques.
On pourrait s'appuyer sur les travaux d'Emmanuel Todd sur les structures familiales pour montrer à quel point ces relations interfèrent avec vos relations futures à la société qui vous environne. Si les jeunes maghrébins sont plus violents et moins bien intégrés, ce n'est pas parce qu'ils sont musulmans ou parce qu'ils porteraient une tare génétique liée à la race arabe comme pourraient le penser sans le dire beaucoup de membres du FN. Car auquel cas le Maroc ou la Tunisie seraient des pays ingérables. Non, c'est parce qu'ils vivent dans une société qui a créé des codes des lois et des organisations qui étaient faits pour des populations ayant des structures familiales qui se sont développées sur le territoire français. On peut donc ici montrer la première forme d'argument contre l'immigration est l'impossibilité pratique pour les immigrés pour des raisons familiales culturelle ou anthropologique de s'intégrer dans la forme d'organisation que notre pays a développée et adaptées aux populations historiques qui ont fait ce pays. On notera au passage que le cas des Maghrébins est assez curieux puisque comme l'a noté Malika Sorel, les filles maghrébines s'intègrent largement mieux que leurs frères. Cela dénote que la question de l'éducation familiale est au cœur de la problématique de l'intégration très au-dessus des questions purement économiques, ou sociales.
Un autre argument tout à fait recevable sur la question de l'immigration est l'argumentation économique justement. On présente souvent l'immigration comme un cadeau économique. C'est oublier les investissements nécessaires à l'intégration de ces populations à leurs effets sur la demande en logement, en service public ou sur le niveau des salaires comme le dit Gerin. C'est d'autant plus vrai que l'immigration est essentiellement faite par le regroupement familial celle qui nécessite donc le plus d'investissement public. On n’oubliera pas de noter non plus l'énorme masse de capitaux qui part dans les pays d'origine et qui constitue un manque dans la masse monétaire en circulation de plus en plus importante, surtout en cette période de crise économique. J'avais déjà construit une argumentation sur cette question économique de l'immigration dans ce texte. Pour résumer, disons que l'immigration n'aurait un sens que si le pays manquait réellement de main-d'oeuvre, nous en sommes très loin à l'heure actuelle. Quant à l'argument suivant lequel les Français seraient trop fainéants pour accepter certains travaux que les gens qui tiennent ce genre de propos se demandent comment les médias réagiraient si l'on tenait le même discours à propos des noirs et des Arabes ? Il y a là un profond mépris raciste vis-à-vis des autochtones les présentant comme de gros exploiteurs sans morale qui n'a pas sa place dans un discours rationnel. Les Français ne refusent pas les emplois dans l'absolu, ils refusent des emplois sous des conditions économiques qu'ils jugent à juste titre inacceptables, c'est très différent. Et c'est justement pour éviter de changer ces conditions économiques que nos généreux patrons du Medef sont si prompts à réclamer une main d'œuvre plus obéissante. En cela défendre l'immigration est équivalent à la défense de l'esclavage. On rappellera d'ailleurs au passage que si l'on faisait venir des esclaves dans nos confettis d'empire, c'était parce que les paysans français de l'époque jugeaient également inacceptables les conditions économiques que les patrons de l'époque donnaient.
Enfin, nous passons au dernier point et pour en revenir à la question démographique. Je disais tout à l'heure que l'immigration avait pour conditions que l'importation de main d'œuvre peut répondre à nos besoins quantitatifs. Or comme je l'ai souvent souligné, cet argument ne tiendra pas longtemps la route. D'une part parce que les pays en voie de développement connaissent les mêmes évolutions démographiques que nous et qu'à long terme vers 2040 pratiquement toute l'humanité aura fait sa transition démographique, dans ces conditions d'un monde vieillissant on voit bien que les mouvements de population que nous avons connus jusqu'ici vont s'arrêter. Ensuite d'autres régions du monde se développent et il n'est pas interdit de penser et d'espérer que même l'Afrique se sorte de la misère. Auquel cas on ne voit pas pourquoi les Africains partiraient de leur terre si elle arrive enfin à les nourrir. Il y a chez ceux qui défendent l'immigration massive un esprit de supériorité qui semble les convaincre que les cartes économiques actuelles ne bougeront plus. Pourtant les émigrés chinois se raréfient à cause de l'évolution démographique de la Chine et de son développement. De la même manière, l'Italie, hier fort pays d'émigration, ne voit plus ses jeunes partir, car elle s'est développée. Vouloir faire de l'Afrique une donneuse d'humain pour l'humanité, c'est quelque part continuer à appliquer les préjugés raciaux que la gauche prétend pourtant abhorrer. Ensuite, c'est aussi croire que la natalité en France et ailleurs en occident restera pour toujours trop faible. L'évolution récente en France montre pourtant que la natalité peut, de façon des fois difficilement explicable, se redresser. Plutôt que de croire sauver nos retraites par l'immigration de masse, nous ferions mieux d'aider les jeunes couples à avoir plus d'enfants. C'est d'autant plus important que les pays en voie de développement se retrouveront eux même dans nos situations de déclin démographique et qu'ils regarderont vers nous les pays expérimentés en la matière pour résoudre leurs problèmes.