Comment se faire élire en France quand on a pas de solutions aux problèmes des électeurs, que l'on a renoncé à la souveraineté nationale, que l'on veut continuer à arroser les amis milliardaires et que l'on adore le libre-échange? La réponse est simple, il faut se débrouiller pour qu'il n'y est personne en face avec de vrais solutions pour se faire élire. On parle souvent chez les alternatifs de l'UMPS pour désigner le système électoral français, contraction qui signifie qu'en réalité ces deux partis politiques défendent à peu de choses près la même politique. Mais les français se sont aperçus de la supercherie depuis longtemps, à vrai dire ils ont compris depuis au moins l'élection de Jacques Chirac en 1995 qui n'a pas voulu rompre avec l'Europe et le tournant libéral pris par Mitterrand et les socialistes en 1983. Ce tournant de l'ex-gaulliste fut le vrai moteur de cette prise de conscience du fait que maintenant la France n'avait plus qu'un seul parti politique au pouvoir. Mais cette prise de conscience n'a pas empêché ces derniers de se faire réélire régulièrement. L'absence d'apparition d'un troisième larron défendant une véritable politique alternative est en soit un mystère dans un pays qui n'a jamais autant abhorré ses élites et les politiques qu'elles mènent. Mais c'est que dans ce jeu électoral il y a un troisième participant, le Front Nationale, car bien loin d'être un parti d'alternative ce dernier joue plutôt le rôle d'une soupape de sécurité, c'est le troisième pied du trépied électorale de l'oligarchie française, celui qui permet de stériliser toute réelle opposition au pouvoir politique en place.
Si le FN a été à l'origine utilisé comme outils pour permettre à François Mitterrand de neutraliser son opposition en divisant son électorat, par la suite l'unification progressive des visions politiques et économiques entre le PS et la droite officielle ont rendu caduque ce raisonnement. Dans ce cadre le FN a changé progressivement de fonction, le PS et l'UMP se partageant intelligemment le pouvoir, il leur fallait un moyen de détruire tout les discours un tant soit peu dangereux pour leur idéologie libérale européïste et mondialiste. C'est ainsi que tout discours violant la doxa se voit renvoyer à l'état d'extrémisme, même la laïcité, autrefois grand principe unificateur de la gauche française, se retrouve ainsi cataloguée au rayon des idées nauséabondes, le FN partie de droite catholique devenant d'un seul coup le défenseur de la république laïque, c'est le miracle de l'amalgame et de la nov-langue. Comme je l'avais déjà dit dans un autre texte nos élites ont poussé tout ce qui faisait l'identité française dans les bras du FN pour en discréditer l'existence et en interdire en pratique l'utilisation chez leurs propres membres pérennisant l'idéologie libérale devenue la seule et unique. Et le moins que l'on puisse dire c'est que cette stratégie a formidablement fonctionné, à un tel point qu'il est aujourd'hui bien difficile de crier sa joie d'être français sans se voir condamner pour racisme ou nationalisme étriqué. Vouloir être français en France est devenue un acte criminel et vouloir défendre les principes mêmes de notre république semble devenue un aberration chez bon nombre de nos contemporains.
Le FN n'aura jamais le pouvoir
Maintenant l'on pourrait se dire, oui le FN a joué ce rôle, mais finalement ne finira-t-il pas par renverser l'UMP et le PS en prenant le pouvoir les prenant ainsi à leur propre jeu? Et ce faisant il permettra à toutes ces politiques souverainistes et protectionnistes de sortir du placard dans lequel nos élites les ont enfermé depuis plus de trente ans. Après tout les derniers sondages on montré que Nicolas Sarkozy pourrait très bien se faire dépasser par Marine Le Pen aux premier tour des prochaines élections présidentielles. Mais il y a deux objections à faire à cela. Tout d'abord le FN même s'il pense sérieusement à peser sur les élections, ne croit probablement pas lui même à son accession au pouvoir, la preuve la plus flagrante étant son amateurisme en terme de programme comme l'avait souligné Jacques Sapir dans un texte récent sur Marianne2. J'avais moi même souligné les approximations de Marine Le Pen lors de son débat face à un Jean Luc Mélenchon tout aussi approximatif et démagogue, ce qui pourrait nous indiquer au passage que le Front de Gauche est peut-être aussi un autre outil de diversion électoral au cas où le FN ne suffirait pas.
La deuxième objection, celle qui pèse le plus d'ailleurs, c'est que l'éventuelle présence de Marine Le Pen au second tour de l'élection présidentielle se traduira irrémédiablement par un raz de marée électoral pour son opposant. En quelque sorte, avec le FN au second, notre élection centrale devient une présidentielle à un tour, car celui des candidats qui arrive au second tour, devient automatique le vainqueur de l'élection et ceci même si la candidate du FN fait 30% au premier tour, score qui nous en conviendrons serait déjà miraculeux. Le deuxième effet de ce phénomène est la création d'un vote utile stérilisant tout renouvellement du tissu politique français qui en aurait pourtant bien besoin. Les grands partis de notables étant bloqué en terme idéologique, et n'usant des élections que pour obtenir des postes grassement rémunérés, il n'y a plus rien a attendre d'eux. Toute tentative pour modifier la ligne idéologique des ces grands partis est vouée inexorablement à l'échec, et même avec des candidats ayant du talent et une volonté de fer on voit mal le PS virer sa cuti sur la question du libre-échange ou de l'euro. Le renouvellement de la politique française ne pourrait donc se faire que par les petits organisations, malheureusement le FN joue ici un rôle d'aspirateur de la contestation en neutralisant les votes de ceux qui souhaitent le changement. Il les neutralise soit en les attirants à lui, ce qui comme nous l'avons vue précédemment ne conduit à rien puisque ce parti ne peut être élu, soit en provoquant une fuite vers les grands partis électoraux de gens de bonne volonté, mais qui ont peur de la montée au pouvoir de la "bête immonde".
C'est ainsi que la société française se retrouve bloquée depuis trente ans entre un groupe UMP-PS qui continuera pour l'éternité à faire la même politique néolibérale et pro-européenne, et un FN canalisant les rancoeurs tout en empêchant les gens de bonne volonté de voter pour les petits partis alternatifs pourtant proches de leurs idées. C'est le fameux vote utile qui est plutôt le vote absurde puisque cela consiste à voter contre ses idées, ce qui est la négation de la démocratie représentative. A ce petit jeu se rajoute bien sûr les médias et les sondeurs qui, travaillant pour le pouvoir, tendent à favoriser des stratégies de contrôle des revendications populaires, ce n'est pas un hasard si Marine Le Pen bénéficie d'un accès aux médias plus que d'autres alternatifs moins caricaturaux. De la même manière les sondages fabriquent aussi les futurs candidats, le cas de Ségolène Royale pour l'élection de 2007 fut emblématique. Elle était probablement la seule au PS à pouvoir perdre face à Sarkozy, et aujourd'hui on fait monter DSK le socialiste le moins rassembleur qui soit.
Et 2012 alors?
L'élection de 2012 commence déjà a donner son allure, le président actuel sait très bien qu'il est impopulaire et que son élection ne sera possible que grâce à une stratégie de sélection et de division de ses adversaires . L'UMP veut probablement utiliser le FN contre le PS à l'image de ce qui s'est produit en 2002, mais vue le poids croissant du FN à droite, cette stratégie pourrait très bien se retourner contre eux. Il leur faut donc le candidat du PS qui serait le plus diviseur à gauche, celui qui permettrait de faire éclater l'électorat de la gauche traditionnelle. La stratégie de monté du FN n'a donc de sens que si elle est accompagnée de la candidature de DSK, seul candidat de la désunion à gauche, si nous sommes inondés de sondages favorables à DSK ce n'est probablement pas un hasard. Tout comme il ne fut pas un hasard si Ségolène Royale a été désigné par les médias comme représentante du PS en 2007, contraignant ainsi la direction du PS a mettre la candidate ayant "le plus de chance" selon les sondages on connaît la suite... Marine Le Pen a aujourd'hui de fortes chances de figurer au second tour où elle pourra jouer son rôle de repoussoir in fine, promulguant l'autre candidat comme président extrêmement bien élu. On imagine si DSK est au second tour face à Marine Le Pen se faire élire à 75% ou plus, le voilà libre de faire les "réformes" nécessaires pour sortir la France de la crise. Un véritable boulevard pour l'application totale du néolibéralisme, une application grandeur nature de la stratégie du choc de Naomi Klein. Un DSK face à Marine Le Pen au second tour des élections présidentielles serait probablement la plus grand catastrophe qui soit pour l'économie de notre pays.
Cependant si l'élection de 2012 n'est guère encourageante, il se pourrait aussi que celle-ci soit la dernière de ce type . En effet l'état catastrophique de l'économie française au sortir de 5 ans d'un nouveau mandat sarkozien ou pire de 5 ans de DSK, serait propice aux changements et aux révoltes de toute sorte. L'autre effet c'est que la candidature de DSK va favoriser les petits partis qui vont pouvoir faire des scores relativement élevé aux prochaines présidentielles, ce qui permettra peut-être à certains candidats de percer dans l'opinion publique. De ce fait ce drame à court terme pourrait être le moyen par lequel un renouveau des partis politiques pourrait se faire en France, ce renouveau ne passant que par l'élimination électorale pure et simple du PS ,de l'UMP et du FN. Je souhaiterai bien évidement que les choses aillent plus vite, malheureusement la réalité fait que nous allons encore perdre du temps avec le maintient des mêmes politiques au pouvoir. Dans ce laps de temps il se peut bien évidement que l'euro éclate et que des drames terribles accélèrent les choses, il se pourrait même que les changements ne se fassent pas par des élections, mais par des mouvements populaires violents. Mais pour l'instant nous nous dirigeons vers le maintient du statut quo et peut-être vers un purge néolibérale accélérée, si par malheur DSK devenait président face à Marine Le Pen avec un score Stalinien.