Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.
C'est une thématique que j'aborde souvent, mais elle est tellement importante. La communication est devenue le seul mécanisme régissant le comportement des hommes dits politiques français. Ce n'est d'ailleurs pas propre à la France, l'ensemble de l'occident est rongé par la médiocrité du personnel politique forgé par le système médiatique audiovisuel. Si je tenais aujourd'hui à revenir un peu sur ce sujet, c'est que j'ai appris récemment le décès de Marie-France Garaud. Une grande dame du gaullisme, et une véritable patriote. Une personnalité politique qui justement n'est jamais tombée dans le piège de la communication, qui s'est pourtant développée à son époque, aux alentours de la fin des années 60, et du début des années 70. Elle fut l'une des rares personnalités politiques françaises à ne jamais céder de terrain à la communication, et aux sirènes du marketing politique. Elle avait des convictions et l'intérêt national français chevillé au corps. Elle fait partie de ces illustres personnalités politiques qui malheureusement seront écrasées politiquement par la grande machine à lessiver la pensée que fut la domination des médias de masse et la domination de l'audiovisuel.
Car l'époque charnière qu'a vécu Marie-France Garaud durant sa carrière politique fut justement cette terrible transformation de la politique en machinerie démagogique. Une transformation aujourd’hui achevée puisqu'il est désormais bien difficile de trouver des hommes politiques ayant réellement des projets et une colonne vertébrale intellectuelle. Elle devint assez amère avec le temps et cela se comprend surtout qu'elle fut longtemps une compagne de route de Jacques Chirac, l'homme qui a tout trahi, en particulier son courant gaulliste. Elle aura cette superbe phrase désormais célèbre sur Chirac : « Je pensais que Jacques Chirac était du marbre dont on fait les statues, il est en fait de la faïence dont on fait les bidets ». Rappelons que Chirac a eu l'occasion pourtant d'arrêter la course folle à la monnaie unique. Car même si Maastricht avait été voté, il aurait très bien pu refaire un vote au prétexte que le vote était très étroit. Il avait tous les outils pour stopper la marche folle pour l'autodestruction du pays et il n'en a rien fait. Au contraire, le soi-disant gaulliste mit le pied sur l'accélérateur et fit réintégrer la France au commandement intégré de l'OTAN . On le dit rarement, car c'est sous Sarkozy que cela fut fait en pratique, mais c'est bien Chirac qui organiser cette réintégration. Pour un homme qui se prétendait gaulliste, c'était pourtant une infamie.
L'INA a ressorti un bref passage de Marie-France Garaud s'exprimant sur les hommes politiques, une vidéo rapide que je vous invite à regarder ici. Elle y exprime tout le mensonge qu'il y a dans la politique à son époque, mais le jugement est toujours valable aujourd'hui , la situation s'étant même probablement fortement dégradée. Le mensonge et la communication étant devenus l'unique caractéristique des hommes qui se prétendent faire de la politique dans ce pays. Le président actuel est caractéristique de cette évolution, à dire vrai je serais même bien en peine de vous parler d'un sujet où Emmanuel Macron ne ment pas. Que ce soit sur le chômage, sur l'énergie, sur la croissance, sur la géopolitique ou sur la défense des intérêts stratégiques du pays, Emmanuel Macron avance systématiquement caché, en ne disant pas ce qu'il fait et en ne faisant jamais ce qu'il dit. On pourrait même y voir une méthode gouvernementale systématisée. Il y a de nombreuses raisons à ce comportement, mais il faut bien comprendre que cette façon de faire de la politique est à l'origine de la dégradation du climat politique dans ce pays. Le mensonge permanent n'a pas comme conséquence unique que les gens ne croient pas dans la parole d'un homme en particulier, elle a surtout comme conséquence finale une généralisation du désamour politique. Plus personne ne croit en rien ni personne. C'est cela avant tout qui est dommageable et qui rend très difficile le redressement national. Le mensonge permanent finit par instaurer la méfiance permanente et générale.
La communication au pays du nihilisme
Cette évolution n'est pas le fruit du hasard, elle a plusieurs facteurs qui l'ont produite. Le premier est celui décrit par Emmanuel Todd, le nihilisme produit par l'effondrement des croyances collectives classiques qu'elles soient religieuses ou nationales. Cette perte a entraîné l'effondrement des cadres culturels qui rendaient possibles les anciens liens politiques. Le patriotisme poussait même les plus riches, parfois à penser l'intérêt national. L'on pouvait concevoir la solidarité par l'impôt parce que nous étions tous français. Le grand boom d'après-guerre et le développement du système social français étaient le produit de cette forte solidarité. De la même manière, l'esprit chrétien qui imprégnait encore la société poussait à la méfiance vis-à-vis des fortes inégalités et à une certaine méfiance vis-à-vis de la course à l'enrichissement pour l'enrichissement. Si les patrons de 1955 gagnaient proportionnellement beaucoup moins par rapport à leur salarié comparé à ceux d'aujourd'hui, c'est surtout parce qu'ils avaient une éducation et une culture qui tendait à les faire se contenter de cela. On remarquera que la gauche moderne n'a pas cessé de combattre les deux piliers qui permettaient au système français de fonctionner à peu près correctement sans faire exploser les inégalités à savoir la nation et l'église. C'est un drôle de paradoxe sauf si l'on consent à accepter l'idée que le gauchisme est un moyen de faire avancer les intérêts des classes bourgeoises en réalité.
Quoiqu'il en soit, cet effondrement des croyances collectives produit les individus perdus qui peuplent la France actuelle, et pas seulement au niveau politique. Cela se traduit par un désintérêt pour la cause nationale et favorise la corruption. La politique n'est plus qu'un job comme un autre où il faut se faire de l'argent rapidement. Macron n'a pas fait autre chose. Il a probablement vendu les intérêts du pays pour faire quelques grosses affaires personnelles derrière et placer sa personne pour plus tard grâce au jeu du renvoi d’ascenseur. Il n'est pas le seul, cela fait longtemps que la politique n'est plus qu'affaires d'intérêts particuliers. De la même manière, l'effondrement des valeurs chrétiennes et plus seulement de la croyance en dieu a également permis l'étalage phénoménal de vulgarité et de désintérêt pour l'image politique. Il n'y a plus de honte ni de limite d'aucune sorte pour encadrer à minima les comportements individuels. Encore une fois, cette dérive est ancienne maintenant, mais elle a atteint un paroxysme sous Emmanuel Macron qui a ridiculisé la fonction présidentielle à un niveau inimaginable il y a seulement dix ans. On a très clairement ici affaire aux conséquences du nihilisme toddien.
À ces comportements orduriers s'ajoutent également des croyances alternatives de substitution. l'écologisme irrationnel et l'européisme en sont les deux plus gros représentants. Les élites françaises sont devenues francophobes dans leur immense majorité. Et cette évolution est ancienne puisque c'était déjà le cas sous Giscard puis sous Mitterrand. Elles ont remplacé la France par l'Europe qu'elles défendent ardemment bien plus que la France. Mais si les anciennes élites pouvaient camoufler cette orientation grâce à leur connaissance et à leur niveau culturel, c'est beaucoup moins vrai pour les « élites » actuelles. En d'autres mots, la baisse de qualité du personnel politique lié à l'effondrement des croyances, et du sérieux engendre aussi un mécanisme de révélation du vrai sens des actions politiques. Les élites françaises de plus en plus nulles ont de plus en plus de mal à camoufler le fait qu'elles agissent contre l'intérêt des Français. C'est au moins une bonne chose.
Le dernier facteur est bien évidemment le système médiatique lui-même. Comme je l'ai déjà longuement écrit et comme l'avait très bien décrit Pierre Bourdieu lorsqu'il parlait du journalisme et de la télévision, nous sommes passés d'une civilisation de l'écrit à une civilisation de l'image. Il s'agit là d'un facteur prépondérant qui explique en grande partie d'ailleurs l'effondrement de la qualité du personnel politique. En effet depuis l'arrivée de la télévision, les hommes politiques doivent avant tout défendre leur image. Ils vivent dans un univers qui n'a plus de mémoire et qui ne se soucie plus que du temps présent dans le cadre du discours du moment qui est à la mode. L'absence de projet et de pensée à long terme est directement le fruit de la manière dont nous sélectionnons nos élites politiques. À partir du moment où vous choisissez les gens dont on parle beaucoup à la télévision. Uniquement à travers des critères qui passent par l'optimisation de la communication à la télévision et dans les médias de masse, vous sélectionnez structurellement les pires individus qui soient pour diriger un pays. Car ces gens passent plus de temps à préparer leur plan de communication qu'à essayer de penser les problèmes du pays.
Le passage de personnalité comme Marie-France Garaud à des personnages comme Gabriel Attal ou son clone du RN, Jordan Bardella, c'est le passage d'une civilisation de la communication lente par l'écrit à la communication instantanée par l'image. C'est la forme qui a remplacé le fond. Il n'y a donc pas grand-chose à attendre d'un tel système de sélection pervers. En ce sens, ce n'est pas tant les personnalités politiques qu'il nous faut changer que la manière dont nous sélectionnons ces dernières. Au risque de passer pour un dangereux dissident, il faut sérieusement se demander si le vote de représentant est encore sain dans l'état actuel de notre société.