Blog parlant d'économie vue sous une orientation souverainiste et protectionniste.
Regardant la une de Marianne2 de ce soir je vois qu'il y a une critique du programme économique du FN avec un titre toujours aussi tapageur, comme il est coutume de le faire sur ce site: "Quand Marine Le Pen se met à l'économie banale". En lisant le titre de l'article de Hervé Nathan, on pourrait se dire au premier abord que le FN s'est "centrisé" pour ratisser plus large sur le plan électoral, c'est en tout cas l'angle d'attaque que prend le journaliste de Marianne. Sauf qu'il y a tout de même un énorme point sur lequel il y a peu de chance à l'heure actuelle que les autres grands partis politiques peuvent être en accord, la sortie de l'euro et un protectionnisme revendiqué. En tout cas je remarque au premier abord que la neutralité journalistique est vraiment absente sur le programme économique du FN, et c'est le même son de cloche chez leur concurrent du Figaro. Quoique l'attaque du Figaro est plus classique face au FN puisqu'il s'agit d'une attaque de type décrédibilisation par une série de propos n'ayant pour seul fond qu'un étalage de croyances libérales et d'idées reçues censées servir d'argument d'autorité. En effet le journaliste du figaro un certain Marc Landré nous dis carrément en parlant du programme économique du FN :"Non, il est simplement passéiste, irréaliste et contreproductif.". Du haut de sa haute opinion le journaliste nous dit en substance circulez c'est de la merde en barre. C'est dommage parce moi ce qui m'intéresse en lisant un journal ce n'est pas forcement le point de vue du journaliste, mais les faits ou les propos tenus, en l'occurrence ceux de Marine Le Pen. Mais bon qui lit le Figaro pour avoir des informations?
Les journalistes français feraient bien de temps en temps de prendre exemple sur leurs confrères anglo-saxons moins en clin à se laisser déborder à ce point par leurs émotions. A mon humble avis, les journalistes devraient s'en tenir aux faits et aux propos tenus et non passer leur temps à donner leur opinion, mais ce n'est que mon point de vue. Surtout qu'en lisant de tels propos on ne peut que défendre Marine Le Pen à cause d'un sentiment d'injustice qui lui est fait. Donc avant de faire la critique du programme économique du FN, qui est actuellement impossible puisque nous ne savons pas exactement de quoi il retourne. Je vais donc d'abord essayer de montrer les grossières approximations analytiques de nos deux journalistes pourtant si prompte à l'insulte. D'autant que paradoxalement leurs attaques, notamment sur l'euro, sont des attaques qui auraient tout aussi bien pu m'être adressé, car bien que non sympathisant du FN, que je crois être un parti qui stérilise le vote plus qu'autre chose, je suis tout de même un souverainiste, anti-UE et anti-euro convaincu. Je vais donc défendre ici mon point de vue et montrer l'inanité de certains des raisonnements de nos deux journalistes au comportement prépubère. Car au final en lisant ces deux articles on en apprend plus sur l'opinion économique des deux journalistes en question que sur le programme du FN dont il faudra attendre une version d'origine sous forme écrite pour avoir une idée du contenu véritable.
Le Délit d'opinion
Je commencerais d'abord par une remarque, les deux journalistes feignent de s'étonner que des membres du FN apparemment de hauts responsables ne veuillent pas donner leur nom comme le dit ici le Parisien. Ce n'est pourtant pas très surprenant. Et c'est à mon sens un signe grave de l'état actuel de la démocratie française où l'on punit un homme pour délit d'opinion. Dans un pays où le débat public est à ce point malade que des gens se cachent, plutôt que d'assumer leurs idées, il serait bon que les journalistes critiquent cet état de fait plutôt que de faire des remarques désobligées à l'encontre de ces personnes. En France, il n'y a pas de crime pour blasphème, ni de crime d'opinion que je sache, on ne doit être jugé que sur des actes, ou alors nous ne sommes plus vraiment en démocratie. Que des gens aient peur de dire qu'ils appartiennent à un parti politique pour des raisons de pression ou de danger professionnel, voilà qui est à mes yeux une catastrophe nationale. Si le FN est une organisation dangereuse qu'on l'interdise, mais si ce n'est pas le cas nul ne doit pouvoir être menacé parce qu'il en fait partie. Au moment où l'on s'inquiète de la stigmatisation des musulmans, on pourrait tout autant s'inquiéter de la stigmatisation des membres du FN dont cette petite aventure nous montre la véracité. Tout comme on pourrait s'inquitéter du nombre incroyable de sujets publics devenus tabous.
Sur les questions économiques:
1-La sortie de l'euro va faire grimper la dette
L'un des arguments utilisés par nos deux journalistes est que la dévaluation inéluctable du franc ne pourra que provoquer le gonflement de la dette détenue, pour les deux tiers, par des étrangers. C'est un étrange raisonnement que celui-ci qui montre à mon avis la grande faiblesse morale et intellectuelle des partisans de l'euro à l'heure actuelle. Il faut dire que les temps sont durs pour le dogme libéral, qui part en lambeau aussi sûrement qu'il ramène la famine et la misère en Europe. En effet, personne n'a proposé, lors du passage du franc à l'euro, que les dettes françaises déjà contractées alors, ne restassent exprimées en franc. Pourquoi donc en faisant chemin inverse devrions-nous subitement garder des dettes publiques exprimées dans une monnaie qui ne serait plus la nôtre? Rien n'empêche l'état français de transformer les dettes publiques en franc lors du passage inverse, bien évidement les détenteurs titres de dette verront probablement leurs avoirs se dégrader si le franc se dévalue. Mais la question que l'on peut alors poser aux journalistes du figaro est celle-ci: Qu'est qu'on en a à foutre? Pour parler crument. La France a-t-elle besoin de capitaux étrangers pour fonctionner? La réponse est non, d'une part parce que l'épargne est très importante en France. Ensuite parce que notre journaliste oublie que les français détiennent eux aussi des titres de dettes étrangères. Or ces derniers, si le franc est dévalué, seront largement gagnants.
Quoi qu'il en soit, cette affaire nous ramène à l'éternelle question de la de dette publique et je le rappelle encore ici. Un état n'a besoin d'emprunter à l'étranger que lorsqu'il a des déficits commerciaux. Ce sont nos règles que nous nous sommes imposées à nous même, si je puis dire, qui obligent l'état à emprunter sur les marchés financiers pour des investissements intérieurs. D'autre part et contrairement à ce qu'affirme Hervé Nathan, c'est justement parce que la dette atteint 82% du PIB aujourd'hui qu'il faut arrêter les frais d'emprunt sur les marchés financiers. Car si la France a une telle dette c'est bien à cause des mécanismes d'emprunts privés avec des taux d'intéret mirobolants. D'autant que l'euro est aussi responsable en grande partie de notre déficit commercial qui vient d'ailleurs de franchir un nouveau records
à 6.6 milliards d'euros en février. L'euro qui nous permet c'est vrai d'emprunter à des taux plus bas est aussi responsable de la nécessité de plus en plus grande d'emprunter à cause de ses effets négatifs sur notre production industrielle nationale.
2-La sortie de l'euro va faire exploser l'inflation
Deuxième argument récurant l'inflation que produira la dévaluation. Le FN est finalement relativement honnête en disant que la dévaluation produira une inflation, mais il faut vraiment cesser de présenter cette optique comme une catastrophe. En réalité, il ne peut pas y avoir vraiment de croissance sans inflation en France quoiqu'en disent les clowns du monétarisme. Pour produire une croissance sans inflation, il faut faire une politique mercantiliste à la chinoise ou à l'allemande. C'est à dire une politique de pillage des autres économies de la planète à travers les excédents commerciaux. Autrement un pays qui tire sa croissance de sa propre demande aura du mal à ne pas connaître une certaine inflation. D'ailleurs si l'on se fit aux expériences empiriques de l'Argentine ou de l'Islande que l'on a analysé sur ce blog, on voit bien qu'une bonne partie du blocage économique provient en réalité d'une inflation trop basse pendant trop longtemps. Donc bien loin d'être inquiétant le retour de l'inflation devrait au contraire nous réjouir d'une certaine façon. Bien évidemment, tout dépend des modalités d'application de cette inflation. Réindexer les salaires sur l'inflation serait par exemple un excellent moyen de rééquilibrer les richesses à l'intérieur du pays en faveur du travail et en défaveur de la rente. Ensuite l'inflation que produira la dévaluation sera fera sentir essentiellement sur les produits importés. Or il me semble que l'un des problèmes principaux de l'économie française c'est bien la dégradation constante de sa balance commerciale depuis que nous avons rejoint l'euro. Il est donc malhonnête de se plaindre d'une éventuelle hausse des prix des produits importés puisque le but de la manoeuvre est effectivement de relocaliser la production. Les produits français eux resteront à des prix identiques puisqu'ils continueront à être payés en franc. Enfin je rappellerai, au cas où, que le problème n'est jamais l'inflation, le problème c'est le pouvoir d'achat. Si l'inflation est de 10% mais que votre salaire augmente de 11% vous gagnez 1% de pouvoir d'achat. A l'inverse si l'inflation n'est que de 2%, mais que votre salaire n'augmente que de 1% vous perdez 1% de pouvoir d'achat. Parler uniquement de l'inflation est une escroquerie ou la preuve que l'on ne comprend pas grand-chose à l'économie.
3-Le protectionnisme et l'inflation
Enfin dernier point l'effet du protectionnisme douanier et des quotas sur l'inflation. Là encore, il est évident qu'il y aura hausse des prix, mais une part importante de cette hausse ira produire du salaire en France. Encore une fois, j'ai l'impression désagréable que les journalistes ne défendent que le point de vue d'un consommateur qui n'aurait pas de salaire ou qui ne travaillerait pas. Il y a un échange dans l'acte d'achat et lorsque vous achetez un produit importé vous importez avec le modèle social du pays en question. Les endettements publics et privés ont permis aux puissances occidentales de faire illusion quelques décennies et de continuer à croitre malgré une disparition progressive de leur tissu industriel, mais nous arrivons à la limite de ce modèle. On le voit d'ailleurs aux USA où une orgie de masse monétaire arrive à peine à réanimer l'économie locale, car toute la relance est pompée par les exportations chinoises, japonaises ou allemandes. Une économie ne peut pas fonctionner sans industrie, et sans produire ce qu'elle consomme. A partir de ce constat que fait-on? On laisse la population française s'appauvrir et peut-être crever de faim dans quelques années comme cela commence à être le cas actuellement en Hongrie. Et tout ça pour éviter d'avoir à redistribuer les cartes économiques et permettre à une microminorité de chanter les louanges de la mondialisation heureuse. Ou est-ce que l'on remet la France au travail en faisant en sorte que la consommation locale sert surtout à payer les salaires des travailleurs français? Ce qui signifie effectivement payer un peu plus cher son écran plasma et donner un peu moins aux actionnaires, mais ils y survivront, ne vous inquiétez pas pour eux. C'est effectivement un choix de civilisation, mais les progressistes ne sont pas forcément ceux qui sont les plus ouverts.
Attaquer le FN sur son programme oui, mais avec des arguments valables
C'est une précision qu'il aurait peut-être était nécessaire de faire avant de lâcher une horde d'eurolâtre sur le programme économique du FN. Parce que là effectivement le résultat c'est l'assurance d'un renforcement de la position électorale de Marine Le Pen. L'argumentation des deux journalistes sur les questions de la monnaie montre une tentative désespérer pour convaincre de l'impossibilité de la sortie de l'euro. En réalité il n'y chez ces deux gars aucun argument réel, juste des affirmations gratuites , une façon de faire qu'ils reprochent pourtant à Marine Le Pen. Ils ont eu raison de dénoncer la préférence nationale qui est un gadget qui de toute façon n'aura pas l'effet escompté, mais la façon dont ils traitent des questions de la dette et de l'euro rend caduc tout le reste de leurs analyses. Ce faisant ils renforcent probablement le FN d'autant que les journalistes sont de moins en moins populaires auprès de la population. Ce n'est pas un hasard si un politique comme Mélenchon, de l'autre coté de l'échiquier politique, tape tout le temps sur les journalistes, il utilise leur impopularité pour améliorer la sienne. Donc on peut en déduire que cet acharnement irrationnel ne pourra que renforcer MLP. Le programme du FN est peut-être contestable sur de nombreux points, mais il est difficile de se prononcer sérieusement pour le moment.
Mais il se trouve par contre que critiquer le FN justement sur les points les plus sérieux de son programme est une très mauvaise idée. je parle ici de l'euro et du libre-échange. Et d'ailleurs on voit bien que la vrai question de la prochaine élection présidentielle sera la question européenne et celle du protectionnisme. Les opposants à ces idées essaient ici de confondre le programme sur la préférence nationale du FN avec les questions de dette et de monnaie pour en dénigrer l'existance. Nos deux journalistes font ici l'amalgame entre les positions anti-euro et anti-libre-échange, avec les préférences nationales et xénophobes thèmes effectivement malheureux du FN. C'est un stratagème classique qui a fonctionné de puis trois décennies. Cependant la grande question est de savoir si au prochaines élections le FN jouera encore sont rôle de parapluie au système en neutralisant ces options macro-économique et en les rejetant hors du champ politique comme c'est le cas depuis trente ans. Ou si finalement le fait que ces idées sont en fait les seules à pouvoir nous sortir de la crise actuelle finiront par rendre possible l'accession du FN au pouvoir malgré ses idées nauséabondes. Ce faisant l'ostracisme qui touche le protectionnisme ou la question européenne finiront à force par légitimer les plus mauvais côtés du nationalisme français.