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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 16:00

 drapeau europeIl s'agit d'une question un peu abrupte vue comme cela, mais la situation de déliquescence actuelle du continent ne peut que nous forcer à nous la poser. En effet, alors même que les résultats des multiples plans de rigueur commencent à se faire sentir sur le continent nos élites toujours aussi peu éclairées appuient sur l'accélérateur de la compression des dépenses publiques. Je l'ai expliqué à de multiples reprises sur ce blog, mais je le répète, ce genre de politique n'a de sens que si la nation qui la pratique est la seule à la faire. Et elle ne marchera que si par ailleurs on trouve de la croissance à l'extérieur pour que les exportations puissent prendre le relais de la croissance intérieure anémiée. Or il n'y a pas d'extérieur sur lequel les nations européennes puissent s'appuyer. La croissance aux USA ne redémarrera plus à cause de la contrainte du déficit extérieur. Et l'Asie quant à elle ne fait que tirer sa croissance par ses excédents, ce qui signifie qu'en aucun cas elle ne peut devenir le moteur de la croissance mondiale. Les autres zones économiques sont elles trop petites pour qu'elles puissent tirer le paquebot Europe de la langueur économique.

 

  À cette réalité basique s'ajoute le fait que l'industrie du continent est aujourd'hui en voie d'extinction grâce à la lubie du libre-échange et de l'euro monnaie surévaluée. Je rappelle au passage que même l'Allemagne connait des difficultés sur les marchés extérieurs à la zone euro. Elle a de gros déficits commerciaux avec la Chine, le Japon et certains pays d'Europe de l'Est qui sont ses premiers déficits. Ce qui signifie que l'euro est aussi surévalué pour l'Allemagne. La Zone euro est d'ailleurs globalement en déficit sur son commerce extérieur. Seulement certains pays comme l'Allemagne ou les Pays-Bas compensent ce déficit par des excédents avec leurs proches voisins qui ne peuvent se protéger par des dévaluations, des taxes ou des quotas.  Pour se convaincre de cette réalité des pays phares de l'excédent commercial en Europe il suffit de regarder ces données que vous pouvez retrouver sur le site des statistiques allemandes destatis.de.

 

 

exedents-allemands.png

Sur le site des statistiques allemandes, on trouve aussi les premiers déficits et excédents allemands qui sont assez parlant en eux-mêmes. On voit bien par exemple que les premiers excédents sont surtout des pays de la zone euro. Les USA malgré leur poids économique n'arrivent qu'en troisième position sur le plan des excédents allemands avec 20,5 milliards d'euros contre près de 29 pour la France et de 21 pour la GB. Il n'y a aucun pays asiatique dans la liste, on dit pourtant souvent que l'Allemagne contrairement à ses partenaires bénéficierait de la dynamique asiatique grâce à ses machines-outils. Cela n'est en tout cas pas visible sur la balance commerciale. Bien au contraire d'ailleurs comme on peut le voir sur le tableau suivant .

 

 

 deficits-allemands-copie-2.pngSur le graphique suivant, nous voyons ici les principaux déficits commerciaux de l'Allemagne avec en tête la Chine avec près de 23 milliards de déficits. Il y a tout de même des pays européens dans les décis, allemands, mais seule l'Irlande fait partie de la zone euro. La Hongrie et la république tchèque étant les usines de l'Allemagne au même titre que la Chine, il est normal que ce pays connaisse un déficit avec eux. Nous sommes donc très loin d'une Allemagne qui tirerait sa croissance des pays en voie de développement. Et c'est la même chose pour les autres pays excédentaires de la zone euro.

 

 

  Dans ces conditions, croire qu'une politique de contrition salariale et de compression de la demande intérieure pourra résoudre les problèmes d'endettement et de croissance relève une tare intellectuelle congénitale de la part de ceux qui nous servent d'élite. Nos dirigeants continuent pourtant à croire que leurs remèdes fonctionneront et ce n'est pas le changement de dirigeant en 2012 en France qui y changera quoi que ce soit . On voit d'ailleurs que la crise recommence à se faire sentir en Allemagne puisque la production manufacturière recommence à baisser, alors qu'elle n'avait pas encore atteint le niveau d'avant crise.

 production manufacturière

 Production manufacturière allemande

Les descendants spirituels de Laval et Hoover

 

En fait, la comparaison avec les dirigeants les plus stupides des années trente est tout à fait pertinente. Nous voyons sous nos yeux et en direct l'histoire se répéter, on peut tout à fait comparer Sarkosy et ses sbires à Pierre Laval ou à Edgar Hoover aux USA, même délires sur les grands équilibres et mêmes résultats en pratique. Les élites d'ailleurs ne parlent en général que des conséquences et non des causes des dettes. On ne parle par exemple absolument pas des déficits commerciaux qui sont parfaitement ignorés de la presse mainstream qui lui préfère des déficits publics. Pourtant la dette et les déficits publics viennent forcément de quelque part? Mais personne dans les médias en dehors de quelques personnalités n'ose dire sa provenance. On oublie qu'ils proviennent d'une part des aides monstrueuses accordées sans contre partie aux banques. Mais aussi et surtout du fait que les délocalisations et la destruction du tissu économique de ces trente dernières années ont contraint bon nombre de nos concitoyens et de nos entreprises à s'endetter pour continuer à vivre. La crise actuelle n'est pas un produit de la météo. C'est avant tout le résultat d'un pourrissement commencé dans les années 70 et qui a été caché par un amoncellement de dettes privées et publiques. Ignorer cet état de fait c'est passer à côté de l'essentiel et c'est surtout ne pas être en mesure de résoudre les problèmes de nos concitoyens. Une nation ne peut pas éternellement importer tout ce qu'elle consomme sans s'appauvrir. Le libre-échange ne nous a pas enrichis, mais appauvris. Importer un produit, alors qu'hier vous le fabriquiez vous même ne peut en aucun cas enrichir votre pays. C'est une chose que les libéraux n'ont toujours pas comprise malheureusement.

 

C'est à cette réalité qu'est confrontée aujourd'hui non seulement l'Europe, mais tout l'occident. Et c'est une réalité qui est niée par nos dirigeants qui cherchent n'importe quel prétexte pour continuer comme si rien n'avait changé et comme si l'occident était toujours le centre du monde sans aucun concurrent extérieur. Pourtant nombreuses sont les nations aujourd'hui à se jouer des règles établies par les Occidentaux. À commencer par la Chine qui ne joue le jeu du libre-échange que lorsqu'il l'avantage. L'agressivité commerciale de ce pays non seulement contre les nations développées, mais aussi contre d'autres pays en voie de développement devrait faire réagir n'importe quelle personne saine d'esprit. Le paradoxe actuel c'est que l'histoire de ce début de 21e siècle ressemble à celle de la fin du 19e, mais avec une inversion des protagonistes et de leurs comportements commerciaux et économiques. En effet à la fin du 19e c'est l'Europe et les USA qui commencent à pratiquer le protectionnisme essentiellement contre la GB et sa révolution industrielle qui lui a fait prendre une bonne longueur d'avance en matière de productivité du travail. Les pays d'Asie et d'Amérique du Sud à l'exception du Japon sont alors libre-échangistes. Cela conduira ces régions du monde à un sous-développement au 20e siècle. Et cela alors même que l'Amérique du Sud par exemple avait un niveau de vie équivalent, voire même supérieur à la plupart des pays d'Europe avant cette époque. Aujourd'hui, nous assistons à l'histoire inverse. L'Europe reste grande ouverte malgré son déclin industriel accéléré, il en va de même pour les USA. Ces deux régions préparent même psychologiquement leurs populations à vivre dans la grande misère en attendant le retour de la peste et du choléra. En Amérique du Sud par contre ou en Asie on fait du protectionnisme voir même du mercantilisme. Laurent Pinsolle vient d'ailleurs de rappeler dans son dernier texte que l'Argentine protectionniste va plutôt bien et qu'elle se passe très bien de l'emprunt sur les marchés internationaux. La présidente sortante vient d'ailleurs d'être brillamment réélue dès le premier tour. Preuve que le protectionnisme ne rend pas si impopulaire surtout s'il améliore le sort de la majorité de la population. De toute façon, elle n'en a plus besoin puisqu'elle n'a plus de déficit commercial extérieur à couvrir et que sa monnaie est adaptée à son tissu économique. Je rappelle au passage que j'avais parlé plus précisément du cas argentin dans ce texte. On peut espérer qu'un jour la France ou d'autres nations d'Europe puissent suivre le même chemin si par hasard nos pays revenaient à la raison.

 

 

Une Europe en déclin accéléré

 

 

De fait, nous assistons à une inversion des places dans l'histoire et malheureusement pour les Européens on sait très bien historiquement où finissent les nations qui ne prêtent pas attention à leur tissu industriel. Dans une vingtaine d'années, l'Europe fera probablement partie du tiers-monde si elle n'inverse pas immédiatement la tendance. On voit d'ailleurs déjà chez les jeunes européens des comportements économiques des populations de pays pauvres. Cela va de la restriction volontaire des soins, y compris des soins dentaires, à la réduction à minima des dépenses nutritionnelles. Les jeunes européens ont d'ailleurs pour la plupart déjà baissé les bras et ne s'attendent probablement pas à une quelconque amélioration de leur sort ajoutant ainsi à leurs difficultés, le pessimisme, voire le désespoir pour les plus mal lotis. D'ores et déjà les jeunes européens partent de leurs pays sinistrés économiquement pour fuir la misère. On sait qu'aujourd'hui c'est par l'Espagne et le Portugal que commence la nouvelle grande migration des peuples d'Europe. C'est un phénomène d'autant plus grave qu'il s'agit de pays en fort déclin démographique et vieillissant. Pour que la jeunesse déjà peu nombreuse décide de partir, il faut vraiment que la situation soit intenable. Pour l'instant, la jeunesse de ces pays se réfugie dans d'autres nations d'Europe qui pour l'instant semble moins touchée par la crise. Mais comme vous le savez vous qui lisez ce blog depuis longtemps, la crise touchera tous les pays d'Europe y compris l'Allemagne. Avec l'euro et l'UE pour la première fois, le destin de l'Europe est uniforme, nous coulerons tous ensemble.



Les évènements qui suivront sont assez simples à imaginer en fait. L'étape ultime de la crise sera l'effondrement de la demande française. Car la France est en fait le dernier pilier de la demande en Europe. C'est notamment le pilier qui maintient un semblant de croissance chez nos amis outre-Rhin . Comme je l'avais dit précédemment, c'est donc l'effondrement de la demande intérieure français sous les coups des politiques de compression économique que l'euro devrait être mis en danger. Du moins c'est ce qu'il faut espérer. En effet lorsque l'Allemagne verra ses excédents avec la France fondre, l'intérêt pour elle de se maintenir dans la zone euro aura disparu. La panne économique en Allemagne et la dégradation de la balance des paiements faute de demande dans les pays occidentaux pour compenser les déficits croissants avec l'Asie et l'Europe de l'est, devraient convaincre les Allemands les plus récalcitrants à mettre fin à la zone euro. Il s'agit pour moi de la seule hypothèse crédible qui puisse nous conduire à la fin de la zone euro. Car on ne peut pas compter sur les élites françaises ou autres pour aller dans ce sens, ni sur une révolte des peuples qui semblent tout simplement résignés à leur sort. C'est d'ailleurs probablement un gouvernement socialiste qui fera la grande purge libérale en France et qui mettra ainsi en péril la maigre croissance du continent. On peut aussi imaginer un maintien de la zone et une vaste émigration des jeunes européens comme cela se passe à l'heure actuelle en Espagne et en Grèce. À dire vrai plus le temps passe et plus cette hypothèse me semble crédible. On pourrait assister dans les années qui viennent à une vaste fuite de population de l'Europe vers d'autres régions du monde moins stupidement gérées. Le déclin démographique déjà palpable du continent s'accélèrerait alors subitement pour faire en quelques décennies du continent une espèce de no man's land peuplé de vieux dans des territoires en déclin. Certaines régions d'Allemagne de l'Est préfigurent peut-être déjà ce que sera l'Europe du 21e siècle. L'Allemagne de l'Est avait une accumulation de phénomène du même genre déclin de la natalité, plus une fuite migratoire au début des années 90, avec un déclin économique. Le résultat pour l'Allemagne de l'Est fut une perte de près de trois millions d'habitants.



Nous vivons en tout cas une époque charnière pour le continent, mais l'on sent intuitivement que les bonnes décisions ne seront pas prises. On peut mettre cela sur le dos du vieillissement, de la corruption, ou de la stupidité, le fait est que je ne vois pas vraiment ce qui pourrait inverser la tendance. On peut aussi avoir des surprises aux prochaines élections en France, mais elles ne seront pas forcément très bonnes. L'avenir de l'Europe est donc plus que jamais dans les mains de l'Allemagne, il faut espérer que pour une fois l'égoïsme national allemand serve le continent de façon positive en mettant fin à l'euro. Cela ne mettrait pas fin à tous nos problèmes, mais obligerait les élites à revoir leurs copies. En attendant, nos dirigeants vont à nouveau prêter de l'argent en pure perte pour sauver des banques pour éviter d'avoir à traiter les vrais problèmes de nos nations.

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9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 20:50

  Nicolas Dupont Aignan est passé hier soir à la télévision sur France2. Je n'ai pas regardé la télévision, mais j'ai pu voir l'émission grâce à sa diffusion sur le net. Comme d'habitude, la télévision grand public reste un format d'une médiocrité effarante dès qu'il s'agit de faire fonctionner la logique et la raison au détriment des formules courtes et des idées reçues. NDA ne s'est pas trop mal débrouillé. Et il faut dire qu'il avait fort à faire face à l'avalanche d'idées reçues et fausses que la pauvre Pulvar a accumulé. Entre l'émission monétaire qui serait naturellement inflationniste et le protectionnisme qui ferait grimper l'inflation, on a eu droit à tous les poncifs du genre. Rappelons au passage que Audrey Pulvar est mariée Arnaud Montebourg ce qui est quand même assez louche vis-à-vis de la déontologie journalistique. Il est évident par exemple que cet état de fait a eu une légère influence sur son comportement vis-à-vis du président de Debout La République qui défend une thématique proche sur le plan économique de celle de son époux. Même si elle était totalement impartiale, le doute ne pourra que subsister. Mais il n'y a pas eu que Pulvar à édicter des poncifs et des idées reçues, je vais essayer succinctement de répondre à ces réflexes pavloviens et à ces idées usées jusqu'à la corde.

 

 

 

 

 Quelques explications succinctes en réponse:

 

1- La planche à billets = inflation

 

  C'est faux dans l'absolu, mais vrai suivant les conditions d'application. Dans le domaine monétaire comme dans beaucoup d'autres, ce n'est pas tant l'acte, la nature de l'action ou celle du produit qui compte que sa dose. L'économie d'une nation a besoin de monnaie, et la monnaie est le sang de l'économie qu'il y en ait trop et c'est l'hypertension, l'hémorragie et la rupture d'anévrisme. Mais qu'il en manque et c'est l'arrêt cardiaque, la fatigue et la mort. On ne dit pas du sang qu'il est mauvais par nature, tout dépend de ses proportions et ses composants. Il en va de même pour le corps économique et son sang, la monnaie. Quand le corps économique grandit que la population augmente que l'activité physique augmente ainsi que l'échange, il faut que la masse monétaire augmente avec le reste de l'économie sous peine de la freiner. Si la masse monétaire était constante eu égard à l'évolution des gains de productivité et de l'augmentation de la population nous nous retrouverions comme nos ancêtres pendant la crise de 1929 avec une panne artificielle créée par  le manque monétaire. Ce genre de crise s'appelle la déflation, elle prend la forme d'un chômage de masse et d'une surproduction systématique.

 

À l'inverse l'augmentation excessive de la masse monétaire peut effectivement produire de l'inflation, l'inverse de la déflation. En réalité à l'origine les termes inflation et déflation parlaient essentiellement de l'évolution de la masse monétaire. Ce sont les théories monétaristes qui ont lié automatiquement la déflation et l'inflation à l'évolution des prix. Car en réalité l'inflation, c'est-à-dire l'augmentation de la masse monétaire, ne produit de l'inflation que s'il y a des tensions sur le marché de l'emploi et si le système de production est aux limites de ses possibilités en matière de fabrication. Une telle situation n'existe qu'en période de plein emploi ou de saturation de l'appareil productif. Autant le dire tout de suite, l'occident et le monde sont très éloignés d'une telle situation, la vraie menace c'est bien plus la déflation et les déséquilibres commerciaux que l'inflation qui est aujourd'hui une chimère. Certes, il y a des tensions sur l'énergie et les matières premières, mais le moteur de cette inflation est en grande partie le fruit de l'économie chinoise. Une économie dont on sait par ailleurs qu'elle est en situation de surproduction et qu'elle n'évitera pas un brutal réajustement. Un réajustement qui sera le fruit du rééquilibrage commercial entre elle et ses clients au bord du gouffre. J'ajouterai que madame Pulvar s'est amusée à dire que les USA étaient dans une situation catastrophique alors qu'ils pratiquent la politique de planche à billets, en visant ici à discréditer une telle politique. D'une part, il n'est pas vrai que les USA pratiquent la planche à billets, ils font surtout une planche à titre de dette, ce n'est pas la même chose. Les dettes laissent des traces comptable et des intérêts à payer. Ensuite que ce n'est pas l'émission monétaire qui est en cause, mais le fait que les plans de relance sont entièrement absorbés par la Chine et les pays excédentaires. On voit très nettement en étudiant les statistiques économiques que les plans de relance américains ont surtout relancé la Chine , l'Allemagne ou encore la Corée du Sud. De ce fait, oui les plans de relance fonctionnent. Encore faudrait-il que ce soit les producteurs locaux qui en bénéficient et non les importateurs. Enfin comme je l'ai dit la masse monétaire augmente obligatoirement tant que les besoins de la société augmentent. On comprendra donc qu'un système où l'essentielle de la hausse de la masse monétaire se fait par des prêts à intérêt ne peut qu'exploser un jour où l'autre. C'est d'ailleurs un système hautement inflationniste puisque nécessitant une croissance de plus en plus rapide de la masse monétaire pour effectuer le remboursement des intérêts cumulés.

 

2- L'état doit emprunter aux banques privées parce que c'est comme çà!  

 

  Toujours dans le même registre nous avons droit à la logique tautologique qui veut que l’émission monétaire soit l'affaire des banques privées. Mais quelle drôle d'idée que celle qui consiste à laisser à des acteurs privés le soin de battre monnaie ! Parce que bien évidemment c'est de cela qu'il s'agit à travers leur possibilité d'émettre bien plus de crédit qu'ils n'ont de dépôts en réserve, le fameux effet de levier. À travers ce mécanisme et par le fait que l'état a décidé dans les années 70 d'emprunter sur les marchés financiers, nous avons laissé au secteur privé la garde de l'émission monétaire. Une émission monétaire qui est donc devenue décentralisée avec tout ce que cela comporte comme inconvénient. En effet sans pour autant faire l'apologie des Jacobins, il faut bien comprendre qu'une gestion décentralisée et en plus privatisée a beaucoup d'inconvénients. Tout d'abord, aucun acteur privé n'a conscience de l'évolution d'ensemble de la masse monétaire. Dans un système décentralisé, chacun voit midi à sa porte. À cela s'ajoute l'intérêt privé qui peut produire, notamment dans le secteur bancaire, des effets de mouvement de foule, appelés aussi mouvement moutonnier. Cela s'explique en fait très simplement. Une banque qui voit se former une bulle spéculative est naturellement forcée à s'y impliquer. Non parce qu'elle est irrationnelle, bien au contraire, parce que c'est son intérêt à court terme. On n’a pas compris la critique du marché de Keynes si l'on ne voit pas que c'est bien parce que les acteurs du marché sont rationnels d'un point de vue égoïste et individuel qu'ils sont collectivement irrationnels. Une banque qui n'aurait pas suivi le mouvement de la spéculation dans les années 2000 se serait fait racheter par une autre. Dans les mouvements spéculatifs, il est rationnel d'être irrationnel et de suivre la foule. Comme le disait Keynes il vaut mieux avoir tort avec la foule que raison contre elle, c'est la véritable nature du marché complètement dérégulé. Et c'est bien pour cela, qu'il est complètement idiot de donner les clefs, de la finance et du développement d'un pays à une telle forme d'organisation, ou plutôt de désorganisation économique.

 

Les premiers effets de la décentralisation/privatisation de la monnaie dans les années 70 ne se sont pas fait attendre puisque l'inflation n'a pas décéléré, mais a au contraire accéléré après la mise en place de ce nouveau système. Ce n'est qu'une fois le chômage de masse installé et la croissance cassée que l'inflation est retombée. Du reste entre 1945 et 1973 l'inflation était certes plus forte qu'aujourd'hui, mais la hausse du niveau de vie et la croissance étaient elles sans commune mesure avec la nôtre. Le pays n'avait pas un chômage à deux chiffres et les gains de productivité étaient largement plus forts. À titre personnel je pense qu'il vaut mieux trop d'inflation que pas assez, l'expérience montre que les pays à très faible inflation finissent en général très mal, il n'y a aucune raison pour que l'Europe actuelle échappe à la règle. L'inflation, si les salaires sont indexés dessus, est d'ailleurs un bon moyen pour rééquilibrer les richesses dans le pays, et de favoriser le travail au détriment de la rente. L'inflation obligera d'ailleurs tous les petits « paysans » français qui cherchent à être enterrés avec leur magot de consommer une plus grande partie de leur revenue et de dégager ainsi de l'activité pour permettre un retour au plein emploi. Bien sûr avant cela il faudra régler la question de l'euro et du libre-échange. Mais il faut bien se mettre dans la tête qu'une inflation à 3 ou 4% ce n'est pas un drame, bien au contraire.

 

3- La France est trop petite

 

Enfin, terminons par le sempiternel argument sur la faible taille de la France. C'est vraiment l'argument le plus pitoyable qui puisse exister et le plus impérialiste aussi. En effet pourquoi la France aujourd'hui serait-elle plus petite que la France d'hier? Je rappelle par exemple qu'à l'époque de Napoléon la Chine c'était un humain sur trois... En fait, la Chine qui fait si peur aujourd'hui n'a pas cessé de perdre du poids à l'échelle mondiale du point de vue des proportions démographiques. Or est-ce qu'en 1800 les Français s'inquiétaient de leur trop faible taille démographique? Et les pauvres coréens qui ne sont que 49 millions et qui sont coincés entre des fous au nord, le géant japonais à l'est et l'empire du milieu, que devraient-ils faire. Rejoindre l'UE? Non, ils ont leur propre monnaie, leur propre politique et ils se débrouillent très bien comme cela. Alors évidemment il est certain que la Corée du Sud n'ira pas dicter sa loi à la Chine ou au Japon et alors? Est-ce que l'on vit si mal dans un petit pays? Demandez donc aux Suisses. Ce que sous-entend cette argumentation et qui n'est jamais dit, c'est que la France est trop petite pour dominer le monde.

 

Évidemment, on comprend pourquoi les gens de gauche évitent de finir leur raisonnement sur la taille. C'est le mauvais côté de l'universalisme, l'impérialisme. Ils ne veulent pas être gros pour être indépendant, cela n'a aucun sens puisque des pays comme la Suède ou Singapour sont parfaitement indépendants sans être des géants. D'autres nations sont d'ailleurs des géants tout en étant fortement dépendantes à l'image des USA. La taille n'a jamais été un gage d'indépendance, l'indépendance provenant surtout de votre capacité à produire seul ce dont vous avez besoin. Si certaines élites françaises rêvent de grandeur, c'est uniquement pour remplir l'un des plus mauvais côtés de l'égalitarisme français celui qui consiste à vouloir imposer aux autres notre propre conception de la civilisation. Ce fantasme de la taille c'est vieux comme le colonialisme français. Au 19e siècle aussi la France était trop petite face à la Grande-Bretagne et son empire. Alors nous nous sommes lancés dans la construction de cet extravagant empire colonial dont nous n’avons pas encore fini de voir les effets dramatiques à long terme. Mais cette expérience n'a, semble-t-il, pas servi de leçon à notre élite qui rêve toujours de la France en plus grande. Cette fois à l'échelle de l'Europe quitte encore une fois à sacrifier l'intérêt de son propre peuple. On constate qui plus est que plus l'Europe est unie et moins elle pèse à l'internationale. Puisque cette unification contre nature affaiblit considérablement le continent sur le plan économique comme nous l'avons vu à de multiples reprises. Une Europe de petites nations en très bonne santé pèsera toujours plus qu'une Europe unie, mais minée par le chômage et le déclin démographique et industriel. De toute façon, il est certains que l'utopie européenne finira comme les autres grands délires mégalos de la grande Nation.

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5 octobre 2011 3 05 /10 /octobre /2011 21:25

  C'est le journal les Échos qui nous l'apprend, pour la première fois la totalité des commerces de détail ont vu leurs ventes reculer cet été. Une telle synchronisation est une nouvelle historique. Car jamais les services de vente n'avaient enregistré un recul simultané de toutes leurs activités. D'habitude même pendant les crises graves, il y avait toujours quelques secteurs pour résister. Mais là rien n’y fait. On avait vu il y a peu l'effondrement des ventes dans l'informatique en Europe, dans un secteur aussi dynamique et innovant c'était déjà un symbole. Mais ces chiffres-là confirment la récession qui commence et qui sera bien plus brutale que celle qui l'a précédé. Et cette fois les politiques sont directement responsables, car ils n'ont fait que multiplier les erreurs et aggraver une situation en répétant inlassablement les mêmes politiques inefficaces. Bien sûr, cet article des échos journal d'obédience libéral ne s'est pas risqué à sortir des cadres de pensés habituelles, mettant sur le dos de la psychologie des masses cette baisse. Celle-ci n'étant dû qu'à une petite déprime collective ou à une paranoïa vis-à-vis de l'avenir. Il ne serait pas venu à l'idée du journal de voir dans ces chiffres le révélateur de la gravité de la situation sur l'emploi les salaires et les perspectives d'avenir. Sans oublier le prix des logements qui reste à des niveaux délirants et qui permet aux rentiers de ponctionner des revenus astronomiques sur le dos de la société productive. Une ponction qui, bien évidemment, pèse aussi lourdement sur la consommation des ménages. Et qui comme le dit Jean-Michel Quatrepoint nuit aussi énormément à la compétitivité française. En effet, le prix du logement augmente mécaniquement le coût du travail, l'absence de bulle immobilière en Allemagne pour des raisons démographiques évidentes expliquant en partie l'acceptation plus facile de la modération salariale de ces dix dernières années. En France la simple hausse des prix du logement empêche la modération salariale et pousse à une hausse des salaires, même si celle-ci n’a pas suivi la hausse du logement. On rappellera également que des prix trop élevés réduisent fortement la mobilité salariale.

 

 Chutede laconsommationMais passons. Tout ceci n'intéresse pas les Échos qui risquerait de mettre en doute les croyances libérales bien établies du journal si l'analyse était portée trop loin. Le fait est que la crise est bien là. Les chiffres du commerce de détail sont bien plus importants que ceux de la bourse. Car comme tout le monde le sait maintenant la bourse ne représente qu'elle-même tant les valeurs sont déconnectées de la réalité économique du pays. La bourse de Paris a d'ailleurs connu sa hausse ces trente dernières années alors même que le pays détruisait tout sa substance économique réelle. Pendant les trente glorieuses, la bourse ne pesait rien et faisait du surplace, ce fut pourtant la période la plus prospère de l'histoire de France. Bref, ne regardons pas trop la bourse, les chiffres y ont peu d'importance à part bien évidemment ceux des taux de change. Mais la France n'est pas la seule à voir ses ventes de détails chuter comme vous pouvez le voir sur le graphique suivant provenant du site Gecodia. Le fait est que comme pour la France toute l'Europe connait une baisse de la demande intérieure. Il n'est donc pas étonnant de voir que la production en Allemagne commencer à plonger comme nous l'avions vu dans un texte récent.

Europe-copie-1.jpg

 

Il n'y a plus de consommateur en dernier ressort

 

Le fait est que la contradiction fondamentale de l'économie mondiale est arrivée à maturité. Maintenant que tout le monde cherche à rééquilibrer la balance des paiements par la contraction de la demande intérieure, plus personne ne consomme les produits fabriqués dans les deux usines du monde l'Allemagne et la Chine. S'ajoute à cela les absurdités manifestes en Europe puisque maintenant même l'Allemagne appelle à recapitaliser les banques toujours sans contre-partie, histoire d'endetter toujours plus les états. On constatera que l'Allemagne veut bien s'endetter pour les acteurs privés alors qu'elle prône la vertu dès qu'il faut s'endetter pour d'autres nations. C'est une étrange conception de la vertu en vérité. On attend toujours que les états prennent enfin leurs responsabilités et qu'ils nationalisent purement et simplement le système bancaire qui a bien montré son incapacité ces dernières années. Si la vertu comptable consiste à dilapider l'argent public sans rien obtenir en retour c'est que le monde ne tourne plus tout à fait rond. De toute façon, la seule nationalisation des banques ne suffira pas à redresser la barre, il faut reconstruire le système économique mondial.

 

 Cette note récente du site geocodia montre que le ralentissement est mondial pas seulement français ou même européen. Aux USA les plans de relances ne fonctionnent plus comme le montre ce graphique ci-dessous le multiplicateur keynésien c'est amoindri avec l'ouverture aux échanges. Plus les USA importent et moins les plan de relance ont d'effet sur l'économie réelle. C'est normale puisque le supplémente de demande s'addresse de plus en plus à des sites de production situés à l'étranger et que donc ces relances produisent surtout des déficits commerciaux. Encore une fois tant que les USA et les pays en déficit pouvait s'endetter le système pouvait faire semblant de marcher, ce n'est plus le cas aujourd'hui.

creditUSA.jpg

transmission.jpg

Ci-dessus le graphique représentant la transmission de l'impulsion monétaire, cependant si l'on se fit à WIKIPEDIA il n'y a pas de M0:

M1 correspond aux billets, pièces et dépôts à vue (515 000 000 000 de billets et de pièces en 2005 dans la zone euro).
M2 correspond à M1 plus les dépôts à termes inférieurs ou égaux à deux ans et les dépôts assortis d'un préavis de remboursement inférieur ou égal à trois mois (comme, par exemple, pour la France, le livret jeune ou le CODEVI, les livrets A et bleu, le compte d'épargne logement, le livret d'épargne populaire...).
M3 correspond à M2 plus les instruments négociables sur le marché monétaire émis par les institutions financières monétaires (IFM), et qui représentent des avoirs dont le degré de liquidité est élevé avec peu de risque de perte de capital en cas de liquidation (ex : OPCVM monétaire, certificat de dépôt, créance inférieure ou égale à deux ans).
M4 correspond à M3 plus les Bons du Trésor, les billets de trésorerie et les bons à moyen terme émis par les sociétés non financières.

 

On supposera en toute logique que M0g est en fait M1, M1g est M2, et M2g est M3. Donc ce graphique représente l'évolution de l'effet des injections monétaires sur le volume de crédit en circulation dans l'économie. C'est une mesure indirecte du multiplicateur d'investissement keynésien. Si le rapport entre M2/M1 et M3/M1 passe à 1 voir moins cela signifie que l'augmentation de la masse monétaire n'a plus d'effet multiplicatif. Donc qu'il y a de fortes chances pour que l'endettement supplémentaire ne puisse être remboursé grâce à une augmentation de PIB supplémentaire qui permettrait à terme du désendettement. Je rappellerai ici qu'à la base Keynes n'a jamais dit "endettez-vous, endettez-vous!". Dans la théorie keynésienne, l'endettement avait pour but de réactiver une économie en sous-production par une demande supplémentaire. Une fois, un cercle vertueux réenclenché le PIB se met à croire plus vite que l'endettement et l'état peut sans hausse d'impôt diminuer l'endettement grâce à des recettes supplémentaires. Mais il faut rappeler que cette théorie ne fonctionne qu'en circuit FERME! Ce que nos élites ont complètement oublié. Il faut, pour que cela marche, que l'essentielle de la demande se fasse sur des produits fabriqués dans le pays faisant la relance, sinon c'est un autre pays qui en profite. Une politique de relance doit donc forcément être accompagnée de mesure de protection ou de dévaluation voir les deux si possible pour éviter les fuites. Sur le graphique précédent, on voit les effets d'une politique keynésienne sans protectionnisme et sans dévaluation. Et cela se traduit par des déficits de la balance des paiements toujours croissants.

 

Et la France alors?

 

  C'est exactement la même situation qu'aux USA avec un léger retard comme d'habitude. C'est d'autant plus grave en France que le pays a la même monnaie que son principal ennemi commercial à savoir l'Allemagne. Je parle ici d'ennemi commercial, car on ne saurait parler d'échange quand le déséquilibre est aussi important. L'Allemagne est notre premier déficit bilatéral devant la Chine avec un beau 27milliards d'euros de déficit l'année dernière. À ce stade on ne parle plus d'échange. Toute politique de relance en France est donc condamnée à échouer. Mais plutôt que de décider de mettre fin à cette situation par des mesures de protection, comme nos amis d'Amérique du Sud, nous préférerons réduire notre demande intérieure. Il faut dès lors ne pas s'étonner de voir les ventes de détail s'effondrer, il n'y a pas de magie. On ne voit pas d'où pourrait venir la demande si les salaires baissent, le chômage augmente, et que le crédit stagne à cause d'un endettement excessif des ménages. Ajoutons à cela le fait qu'effectivement l'inquiétude pousse les Français à épargner et l'on se retrouve avec la fameuse déflation à la japonaise. Cependant, le Japon qui connait une déflation depuis vingt ans pouvait compter sur son commerce extérieur pour compenser, ce qui lui a évité une dépression. Aujourd'hui, tout l'occident devient japonais et il n'y a pas d'autre consommateur de masse pouvant tirer ses exportations, on va donc bien vers une grosse dépression.

 

Le plus drôle c'est que les élites françaises semblent vouloir appuyer sur l'accélérateur pour produire une crise encore plus grave. Des délires sur la retraite à 67 ans,des chiffres identiques à l'Allemagne alors que les Français n'ont pas du tout le même problème démographique, aux fous comme Alain Juppé, le plus nul d'entre nous, qui prône un fédéralisme européen. Alors que la seule chose qui unit les Européens entre eux c'est la stupidité économique de leurs élites. Mais il est vrai que Juppé est un grand spécialiste de l'aggravation de crise, lui qui a considérablement aggravé la dette française en augmentant la TVA et en cassant la maigre croissance du pays en 95. Que voulez-vous? Il fallait bien faire le Franc fort pour pouvoir faire la monnaie unique qui devait ensuite tous nous sauver et réduire le chômage à zéro... J'ose espérer que les Français ont enfin compris que ce n'est pas en sacrifiant les plus pauvres et en réduisant sans arrêt le niveau de vie de la population pour avoir des excédents que l'on « sauve » une économie. Trente ans de sortie du tunnel à la Raymond Barre les auront peut-être enfin vaccinés contre ce restant de pseudovertu chrétienne. En attendant que les Français jugent enfin correctement leurs élites en nettoyant au karcher électoral cette bande d'attardés pourtant diplômés, on va pouvoir rire en voyant l'accélération de la crise de l'euro. Nos cousins italiens viennent en effet de voir leur note dégradée par Moody's ( le LEAP va encore y voir un complot anglo-saxon, associé aux méchants souverainistes infiltrés par les Chinois du FBI). Le prochain pays de la zone euro à voir sa note dégrader va donc surement être la France. Je suis sûr que nos brillantes élites trouveront ici l'occasion d'encore une fois appeler à la « vertu » des Français, eux qui en font tellement preuve lorsqu'il s'agit d'arroser les entreprises des copains d'école avec de l'argent public.

 
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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 12:08

Et bien voilà, même le journal la Tribune commence enfin à comprendre la quadrature du cercle construite par le libre-échange international. Un article sur l'évolution de l'économie chinoise parle même de choc extérieur. Je parlerai plutôt de retour à l'envoyeur. Car la croissance chinoise, fruit des exportations industrielles et de l'excédent commercial, ne pouvait durer que tant que les Occidentaux pouvaient croitre à crédit. Le fait est que même les USA sont arrivés au terme de cette logique macroéconomique. Pour la pauvre Chine, les déboires ne font que commencer puisqu'elle pourrait rapidement se retrouver avec une montagne de papier ne valant strictement rien. En effet les états occidentaux et notamment les USA ne pourront en aucun cas rembourser les dettes contractées. En fait, le modèle exportateur que la Chine ou l'Allemagne pratiquent est d'une bêtise sans nom puisque, pour résumer, il consiste à exporter des biens de production tangibles contre des promesses de remboursement. Ces pays, au lieu de profiter de la hausse de leur productivité pour en faire bénéficier leur population en augmentant les salaires en proportion, ne font qu'accumuler des déséquilibres pour obtenir des montagnes de papier qui ne vaudront bientôt plus rien.  Car la purge est inéluctable, tant que les pays déficitaires n'auront pas retrouvé un semblant de base industrielle et de croissance réelle, ils seront totalement incapables de rembourser la fameuse dette. Et ils seront tout aussi incapables de continuer à engraisser les pays excédentaires.

 

ExcedentChinois.png

 

 

  C'est d'autant plus vrai que l'épargne chinoise reste à des niveaux complètement surréalistes, tout comme l'investissement. Le pays est une énorme bulle économique qui produit largement plus qu'il ne consomme. Tôt ou tard la Chine devra traverser une phase de crise de surconsommation comme l'a connu le monde occidental en 1929. C'est l'effondrement de la demande occidentale qui devrait produire cette crise. Une crise qui sera aggravée d'une part par la nature même de la production chinoise qui est spécialisée dans le remplissage des besoins occidentaux. Cette situation devrait créer, comme je l'avais analysé il y a quelques temps dans ce texte, une distorsion inflationniste avec les éventuelles politiques de relance de la demande intérieure. En effet, si théoriquement pour pallier à l'absence de demande extérieure il suffit de créer une demande intérieure supplémentaire, en augmentant les salaires par exemple. Il ne faut pas oublier pour autant que les produits d'exportation ne sont pas forcément les mêmes que ceux qui seront demandés par le surplus de consommation produite par la hausse de la demande locale. C'est d'ailleurs extrêmement vrai pour la Chine dont le niveau de vie moyen reste très bas, alors qu'elle produit beaucoup de biens de consommation hors d'atteinte du pouvoir d'achat local. La grande distorsion introduite par la mondialisation néolibérale et qui voit des ouvriers fabriquer des objets dont ils ne pourront jamais jouir, atteint en Chine ses conséquences maximales.

 

Le deuxième point sur lequel risque de se briser la croissance chinoise est bien évidemment celui de l'énergie. C'est d'autant plus vrai que la Chine n'est pas vraiment un parangon de vertu écologique, c'est le moins que l'on puisse dire. Et ce même si le pays s'amuse à multiplier les champs d'éolienne.  Il n'y a plus guère de doute sur la pénurie qui arrive. Il y a même un article récent du Financial Times qui parle du fait qu'il nous faudrait quatre Arabie Saoudite d'ici dix ans pour répondre à la croissance de la demande mondiale en pétrole. Autant le dire tout de suite c'est impossible. Je ne ferai pas ici un numéro de prédicateur de fin du monde comme certains aiment le faire, tout en donnant des leçons de morale. Je ne crois pas du tout à la fin du progrès technique ou à l'impossibilité qu'il y aurait à résoudre le problème de la production énergétique. Il est cependant dommage que les Chinois, qui sont un peuple ancien, se soient lancés dans l'imitation totale d'un modèle de consommation énergétique et d'organisation dont on savait depuis longtemps qu'il n'avait pas d'avenir. C'est d'autant plus grave que la Chine a imité le pays occidental le plus gaspilleur, les USA. Il suffit de regarder la façon dont ce pays modernise ses villes pour voir dans quel dilemme elle va rapidement se retrouver.

 

Pour éviter la double panne, il faut un sursaut intellectuel

 

    Le monde issu de la mondialisation néolibérale se dirige donc vers deux pannes simultanées, la première est structurelle. Elle est le fruit de la nature même de la mondialisation et des contradictions qu'elle produit entre pays excédentaires et pays déficitaires. La crise produite par les déséquilibres résultants du laissez-faire commercial n'a pu être caché que par des dettes de plus en plus importantes dans les secteurs privés ou publics. Ces dettes ont fini par produire la fameuse crise de la dette en Europe et aux USA.  La deuxième panne est celle du modèle de production énergétique. On ne peut pas durablement utiliser comme source d'énergie une matière première en voie d'épuisement rapide, c'est d'autant plus vrai que le pétrole entre aussi dans la composition de nombreux produits qui auront du mal à être fabriqué sans lui. L'humanité fait donc face à deux problèmes majeurs qui auraient très facilement pu être évités sur une longue période historique, mais qui à cause de leur simultanéité et du faible laps de temps qu'il nous reste risquent de provoquer de véritables catastrophes.



Mais soyons honnêtes, ces deux crises ont tout de même une origine commune. C’est l'absence totale de prévision et l'aveuglement des élites. Ici et contrairement à beaucoup d'analystes, je mettrais les élites chinoises et allemandes dans le même sac que les autres. L'Allemagne et la Chine ne sont pas meilleures ou mieux gérées, comme les autres elles se sont laissées aller, en apparence elles ont bénéficié du système de la mondialisation, mais c'est une apparence trompeuse. Ces deux pays seront les premiers à souffrir d'un effondrement de la demande mondiale. On le voit d'ailleurs déjà très nettement en Allemagne où la croissance flanche déjà à cause des multiples plans de rigueur qui traversent ses principaux clients. D'ailleurs, les conseils donnés par les dirigeants allemands et chinois montrent que ces élites n'ont rien compris ou font semblant de ne pas comprendre la contradiction qu'il y a à réclamer des gestions plus saines dans les pays endetter, tout en faisant l'éloge des excédents commerciaux. Ce sont justement ces déséquilibres qui sont au coeur de la prospérité momentanée de l'Allemagne et de la Chine. Voir les deux principales nations responsables des déséquilibres mondiaux donner des leçons de bonne gestion à leurs victimes à quelque chose de passablement malsain.



Bien évidemment on peut croire quelque part que l'Allemagne notamment semble vouloir mettre un frein à un système fou. Comme le notait mon collègue Laurent Pinsolle, c'est l'Allemagne qui bloque sur la mise en place d'un système de solidarité sur la dette en Europe. Sauf que ce n'est malheureusement pas parce que les élites allemandes ont compris le sens de la crise, mais simplement parce qu'elles pensent que les « bons » élèves ne devraient pas payer pour les « mauvais ». C'est essentiellement cette motivation-là qui conditionne l'action de l'Allemagne et des pays en excédent commercial. Si bien évidemment cette mentalité peut parfois coïncider par hasard avec l'intérêt réel des nations, il ne faut pas non plus s'attendre à ce qu'une mauvaise analyse puisse un jour nous sortir de la crise actuelle. L'Allemagne et la Chine vont continuer à prôner des politiques de purge, de contrainte et de « saine » gestion sans voir le paradoxal effet sur la croissance mondiale et sur leurs propres excédents. Il se peut que momentanément ces nations aident à mettre en place de vraies alternatives en poussant le système vers sa fin comme l'Allemagne dans la zone euro. Mais ces nations auraient eu un meilleur rôle à jouer si leurs élites avaient réellement compris le problème.



Si la Chine et l'Allemagne avaient compris d'où vient la crise, elles auraient dû commencer par faire des relances internes de la demande. En Chine la hausse des salaires et la réorientation de la production vers le marché intérieur auraient dû être la priorité gouvernementale, il n'en a rien été. En Allemagne on ne voit pas le début d'un commencement d'une politique de relance salariale. Pourtant ce serait un bon moyen de sortir de la crise par le haut. En toute logique les pays excédentaires devraient rééquilibrer les balances des paiements par la hausse de leur demande intérieure. Ces pays devraient remplacer les USA et les pays déficitaires d'Europe dans leur rôle de source de la demande mondiale. Mais à cause d'une mentalité de petit paysan assis sur leur tas d'or comme le disait Keynes, ces pays préfèrent continuer à tirer leur croissance uniquement par les excédents. Nous nous dirigeons donc vers un clash inévitable et le protectionnisme sera la seule réponse que les pays victimes trouveront pour pallier à ces politiques non coopératives.



Sur la crise énergétique aussi ces pays devraient donner l'exemple et investir un maximum dans la sortie du pétrole. Ici ces nations jouent mieux leur rôle notamment l'Allemagne. Sauf pour ce qui concerne le nucléaire, le dogmatisme allemand en la matière lui interdisant de trouver d'autres voies que le simple arrêt des centrales à fission. Nous avions vu pourtant qu'il y a d'autres voies que la fission de l'uranium , le thorium aurait par exemple de nombreux avantages à remplacer l'uranium comme combustible. On pourra cependant compter sur la Chine pour développer des centrales à thorium, les autres nations en retard devraient rapidement imiter le géant asiatique dans cette direction . Ensuite, on peut saluer l'effort scientifique considérable de la nation chinoise. Ainsi ce pays sera bientôt doté d'une base spatiale en orbite, démontrant sa capacité technologique. Mais plus important, j'ai appris, que des chercheurs chinois veulent lancer un projet visant à pouvoir capturer des astéroïdes dans le but de les exploiter. C'est une des voies les plus intéressantes qui soit pour sortir de la contrainte des réserves de matières premières terrestre. Je rappellerai au passage que la totalité des ressources en métal terrestre présent en surface provient d'astéroïdes qui se sont écrasés au fil des millénaires. Comme je l'avais noté dans un autre article un seul astéroïde de grande taille pourrait subvenir aux besoins actuels de l'humanité pendant plusieurs millénaires, et des astéroïdes il y en a des quantités astronomiques dans notre système solaire. À long terme si l'humanité doit survivre elle aura besoin de ces matières premières, il est donc très intéressant de voir que la Chine compte se lancer dans ce type d'aventure.



  Comme on le voit que ce soit pour résoudre les questions macroéconomiques, ou la crise énergétique, il faudra rompre avec les habitudes de pensée et les raisonnements classiques. Le fatalisme a littéralement rongé la pensée occidentale,et ce fatalisme est la conséquence logique de l'idéologie du libéralisme économique qui présente le système économique comme un système naturel et autorégulé. Puisque l'intervention humaine est mauvaise dans le système économique nous ne pouvons rien faire, et la politique se réduit alors à choisir des représentants sans pouvoir. L'autre problème est la croyance dans la vertu des exportations et des excédents. On est persuadé que l'excédent c'est bien et que le déficit commercial c'est mauvais, sauf que l'un est la conséquence de l'autre. Et qu'à l'échelle du monde il ne peut pas y avoir d'excédent dans un pays, sans déficit dans un autre et donc sans crise de la dette à plus ou moins long terme. La seule politique qui est vertueuse est celle qui prône l'équilibre des balances des paiements, car c'est la seule qui puisse être généralisée à l'ensemble des peuples de la planète simultanément. Le fatalisme a cependant fait une autre victime, c'est celle de l'ambition scientifique et technique. Les pays d'occident n'ont plus de grands projets. Ils en sont réduits à se réjouir de la décroissance économique, voir de la dépopulation. C'est une formidable régression intellectuelle au moment même où les découvertes se multiplient. un période où l'on trouve une faille  dans la théorie de la relativité, au moment même où l'on découvre des milliers de planètes dans d'autres systèmes solaires dont certaines seraient potentiellement vivables. C'est un paradoxe que de voir un tel progrès cacher par un pessimisme délirant. Des voies pour sortir du pétrole, il y en a pourtant beaucoup qui sortent des labos de recherche. Mais encore faudrait-il que les pouvoirs publics impulsent de vraies politiques comme à l'époque de Roosevelt  ou de De Gaulle plutôt que de laissez-faire le marché. Là encore, le libéralisme économique a détruit toute possibilité d'action forte, il est pourtant urgent que nos nations prennent ces problèmes au sérieux, sans quoi les pires fantasmes sadiques des décroissants se réaliseront.

 

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17 septembre 2011 6 17 /09 /septembre /2011 23:02

Mon titre ne concerne malheureusement pas la découverte de civilisations extraterrestre, même si le sujet est presque aussi important puisqu'il s'agit du protectionnisme. En effet lors de sa dernière réunion l'association pour un débat sur le libre-échange vient de faire un nouveau coup en révélant un sondage nous montrant que le protectionnisme est maintenant majoritaire dans la plupart des pays européens. Et, chose plus surprenante, l'Allemagne, championne de l'excédent commercial, semble, elle aussi, touchée par cette vague. Il faut cependant relativiser ce sondage, car il se trouve que lorsque l'on regarde ce que la population pense de l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour leurs pays respectifs, seuls les Français répondent massivement non. En effet dans cette étude, seuls 24% des Français pensent que le libre-échange est une bonne chose pour la France, alors qu'en Allemagne 62% estiment que l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour l'Allemagne. En Grande-Bretagne le chiffre est curieusement bas avec 51% des Britanniques qui pensent que le libre-échange est bon pour la GB. Ce chiffre relativement bas pour le royaume des libre-échangistes forcenés s'explique probablement par la très forte détérioration de la situation de l'économie britannique. Chez nos amis italiens, il y a aussi un petit 51% de la population pour penser que l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour l'Italie. Par contre dans tous ces pays le constat fait par la population est le même, ce n'est pas bon pour les salariés.

 

En-France.png

  Cette remarque est importante parce qu'elle caractérise fondamentalement la réussite du bourrage de crâne néolibéral. En effet à l'exception des Français manifestement plus lucide, il semble que chez nos voisins européens on peut tranquillement affirmer que ce qui est mauvais pour les salariés, c'est-à-dire la très grande majorité de la population, peut quand même être bon pour le pays.  En France il y a aussi un léger décalage entre le nombre de personnes pensant que l'ouverture aux échanges est bonne pour le pays et bonne pour les salariés. On trouve presque deux fois plus de français pour dire que c'est bon pour le pays avec 24% alors que seuls 13% des Français pensent que c'est bon pour les salariés. Cependant chez les Allemands par exemple on se retrouve avec 64% qui pensent que le libre-échange est bon pour l'Allemagne, mais seulement 42% pour dire que c'est bon pour les salariés allemands.  Cet étrange paradoxe s'explique par imprégnation des idées néolibérales qui séparent production et consommation, salariés et consommateurs, exportateurs et importateurs. Dans l'esprit des Européens d'aujourd'hui la croissance n'est plus liée à l'amélioration de la situation des salariés. Un pays peut faire des gains de productivité, et en même temps avoir des salariés dont la situation se dégrade. Ce qui est le cas dans tous les pays d'Europe y compris l'Allemagne qui est le pays qui a le plus compressé ses salaires ces 15 dernières années.

 

Évidemment ce que les Européens ne voient pas c'est que cette situation, cette anomalie logique qui voit les créateurs des gains de productivité ne pas en bénéficier, ne fut possible que parce que certains pays ont pu s'endetter et creuser d'énormes déficits commerciaux. La remise des compteurs à zéro qui arrive à grands pas rendra caduque cette dichotomie étrange qui découple situation de l'emploi et santé de l'économie en général. Un jour ou l'autre, progrès économique et situation de l'emploi remarcheront ensemble, c'est inéluctable. Mais il faudra pour cela que les déséquilibres notamment commerciaux disparaissent.

 

Les Européens et le protectionnisme

 

Favorable-aux-droit-de-douanes.png

La question du tableau ci-dessous nous montre encore une fois la pensée paradoxale des Européens. En effet dans leur grande majorité ils nous disaient que le libre-échange était bon pour leur pays, cependant ici ils jugent l'absence de protection douanière comme étant une mauvaise chose, même en Grande-Bretagne et en Allemagne. Cela confirme l'idée que les Européens sont dans le flou complet en matière de compréhension économique. Ils ont toutefois compris dans leur immense majorité que leur intérêt personnel n'était peut-être pas dans la continuation du libre-échange. On retrouve peut-être aussi ici le paradoxe du salarié-consommateur. Le citoyen qui d'un côté pense que le plein emploi et la hausse des salaires c'est bien, mais qui de l'autre s'inquiète aussi  de la hausse des prix et de l'inflation que les hausses de salaire peuvent engendrer. Le message général de ces trente dernières années ayant présenté l'inflation comme le mal absolu pour TOUTE la population ce qui est rigoureusement faux surtout si l'on indexe les salaires sur la hausse des prix.

 

Il n'est toutefois pas étonnant de voir de telles contradictions. Après tout les élites européennes font elles aussi dans le contradictoire en prônant d'un côté le retour de la croissance tout en pratiquant des politiques d'austérités qui la détruise. Au moins les peuples d'Europe ont-ils compris que l'emploi et le libre-échange ne font certainement pas bon ménage. Quoiqu'en dise les vendeurs de soupe qui servent d'économistes mainstream. C'est d'autant plus vrai que l'Europe en plus des dégâts du libre-échange subit les errements de sa pseudomonnaie dont tout le monde commence à comprendre l'impossibilité de survie à long terme. L'euro d'ailleurs montre aujourd'hui sa vraie nature puisque le plus grand soutien à la monnaie unique provient des deux ennemies économiques du continent les USA et la Chine. Des pays qui ne cessent de vouloir empêcher l'effondrement de la monnaie unique. Les Chinois protègent l'euro avant tout pour éviter à leur commerce extérieur de s'effondrer au cas où les états européens dévaluaient, mais aussi pour sauver une partie de leurs avoirs en euro. Une dévaluation qui serait certaine pour bon nombre de pays si l'euro éclate. Et de l'autre les USA qui cherchent à protéger leur création, l'Europe, qu'ils savent condamnée si la monnaie unique disparaissait. Ce soutien continuel des deux super puissances devrait quelque part titiller les oreilles des Européens quant à l'intérêt réel pour eux de la monnaie unique. La réunion récente sur la question de l'euro où le représentant américain monsieur Geithner était invité, fut un grand révélateur de la réalité européenne. L'américain, cynique au possible, se permettant de critiquer les politiques européennes tout en soutenant la monnaie unique alors qu'il sait pertinemment que l'euro est en partie la cause de la crise européenne actuelle.

 

 

Il faut dire que la mort de l'euro serait fortement dommageable pour l'empire américain. Certes à court terme les USA pourraient attirer des capitaux en provenance d'Europe. En ces temps de déficits records, commerciaux et publics, voilà qui pourrait en apparence arranger les affaires de l'Amérique. Mais le drame pour les USA, c'est que les nations européennes une fois libérées de leurs deux boulets économiques, l'euro et le libre-échange, retrouveraient la croissance rapidement . Ce qui en quelques années anéantirait toute l'attraction potentielle des USA, et ce, à l'échelle planétaire. Loin d'affaiblir le continent, la mort de l'euro provoquerait certainement une amélioration économique, ne serait-ce qu'en produisant un ralentissement des exportations asiatiques sur le continent. Mais l'effet le plus grand serait surtout psychologique, car à l'image de leurs amis islandais les Européens auraient enfin l'occasion d'innover en matière de politique économique, d'aller dans des directions auxquelles ils n'auraient jamais pensé en temps normal. On pourrait ici parler de la monétisation de la dette par exemple. Cette libération des peuples d'Europe par la disparition de la marionnette de l'oncle Sam, l'UE et l'euro, pourrait donc engendrer une période d'euphorie sur le continent. Un continent qui d'un seul coup pourrait rattraper ces trois dernières décennies de croissance molle et de chômage de masse. Une fois, libéré des pesanteurs idéologiques, tout deviendra possible y compris, bien sûr, le protectionnisme. Un protectionnisme que les Européens, nous le savons maintenant, appellent majoritairement de leurs vœux.

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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 18:53

 mass100-vip-blog-com-280355Barack_Obama.jpgAinsi donc, les politiques contradictoires de l'occident font-elles à nouveau surface. Avec d'un côté une Amérique qui officiellement s'inquiète de la hausse de son taux de chômage, et de l'autre une Europe qui s'enferme dans une politique de contrition salariale et de baisse de la dépense publique. On ne pourra bien sûr que pencher en faveur de l'Amérique pour ce qui est de la volonté de faire baisser le chômage. Il semble bien que même corrompu au plus haut niveau, comme ses consœurs européennes, les élites américaines gardent encore un soupçon de bon sens face à la réalité du monde. Il faut dire également que l'Amérique n'a pas décidé de sortir de l'histoire et de laisser aux autres peuples le soin d'écrire ses orientations économiques ce qui n'est pas le cas de la vielle Europe aujourd'hui dominer culturellement et mentalement. Les USA gardent une farouche volonté politique et restent persuadés que ce sont bien les politiques menées qui orientent l'évolution économique, et non une espèce de météorologie hasardeuse poussant un coup vers la récession, puis un autre vers la crise. L'Europe, elle, se laisse flotter sur le flot de l'évolution économique considéré comme naturelle et comme étant la résultante de l'orientation du saint marché. Nous voyons dans cette affaire que c'est bien l'Europe et non les USA le royaume le plus achevé du libéralisme triomphant. Et c'est aussi dans cette région du monde que les crises seront les plus violentes et destructrices tant l'abandon de toute forme de politique y est devenu la seule et unique pratique. La politique n'étant plus considérée que comme un moyen de communication pour faire croire que l'on fait quelque chose.  

 

Les USA dans l'impasse libre-échangiste

 

   

La proposition de Barack Obama de vouloir faire une nouvelle relance de 447 milliards de dollars est tout à fait pertinente. Quoi qu’en dise les malades mentaux de l'équilibre budgétaire que sont ses opposants républicains, ou les dégénérés qui se pensent sage et qui dirigent la construction européenne. Tout montre pourtant que les politiques de laissez-faire ou de contrition de la demande ne font en général qu'aggraver le problème en détruisant les ressources. Même le très officiel organisme du CNUCED le reconnaît. Nous en avons parlé ici moult fois et la situation de la Grèce nous montre vers quoi les politiques de réduction de la demande dans le but de rééquilibrer les comptes publics ne règlent jamais les problèmes d'endettement, mais les aggrave.  Cependant, il y a trois obstacles majeurs qui s'opposent et s'opposeront à nouveau à la réussite du plan de relance d'Obama. Des obstacles qui font que ce nouveau plan ne marchera pas mieux que le premier et peut-être même moins bien.

 

 

 

 

   En premier lieu, la nature de ce plan de relance est loin d'être optimale pour réactiver l'économie. L'une des mesures habituelles aux USA étant de baisser les impôts ce qui en pratique n'est pas la meilleure méthode pour relancer la demande, car ce genre de baisse ne touche pas prioritairement les ménages qui ont la plus forte propension à consommer. De plus, on sait que les impôts sont trop bas aux USA surtout pour les populations les plus riches. Les USA connaissent aujourd'hui un niveau d'inégalité aussi élevé qu'au début du vingtième siècle, la baisse d'impôt n’est donc pas une bonne idée, il faudrait très certainement fortement les augmenter sur les tranches les plus élevées. Rappelons d'ailleurs au passage qu'après l'époque de Roosevelt les impôts sur les tranches les plus élevées atteignaient 94% des revenus. C’est seulement avec ce traitement de choc que la course à l'inégalité, qui empêchait le bon fonctionnement de l'économie en produisant des bulles de toute sorte, a pu être enrayée. En focalisant la relance sur la baisse d'impôt, vous minimisez ses effets en maximisant la production d'épargne, car les revenues supplémentaires dégagées par ces baisses ont de fortes chances de ne pas être utilisé dans la consommation courante, mais plutôt épargnée. Je rappelle ici que la propension à consommer est d'autant plus forte que le niveau de vie est faible, un pauvre utilisera naturellement une plus grande part de l'argent qu'il gagne dans la consommation qu'un riche. Bien sûr, cette règle n'est pas générale, il y a des exceptions et des façons d'être culturelles qui rentrent en compte. Un chinois pauvre aura ainsi plus tendance à épargner qu'un américain pauvre. Cependant le bon sens nous indique tout de même qu’au fur et à mesure que notre revenu augmente l'on a plus de mal à l'utiliser dans la consommation courante, même en étant très imaginatif. On transforme donc le nouveau revenu en épargne, ce qui collectivement se traduit par une forte augmentation du niveau de capitaux disponibles. Capitaux, qui s'ils ne trouvent pas d'utilité, produiront soit des bulles, soit une dépression à cause de la diminution de la vitesse de circulation monétaire que cela engendre. La thésaurisation étant la pire ennemie d'une société à forte productivité.

 

 

historic-tax-rates-usa.jpg

 

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Mais au-delà des choix dans l'organisation du plan de relance, il y a un autre élément qui va nuire au plan d'Obama. C'est la nature même du système politique américain. Les républicains vont tout faire pour empêcher l'application de ce plan en réduisant sa portée. Comme ils l'ont fait avec le précédent d'ailleurs. La politique demi-keynésienne d'Obama n'aura jamais le soutien de ses adversaires et le poids des lobbys de toute sorte fera que ce dernier sera réduit à peau de chagrin. De plus, le niveau du plan de relance est tout à fait insuffisant pour véritablement relancer la croissance. Pour tout vous dire le premier était déjà largement sous-dimensionné par rapport aux besoins en terme d'emploi et de croissance. Pour s'en rendre compte, il suffit de calculer ce que font 447 milliards de dollars par rapport au PIB du pays. En prenant le chiffre de 14500 milliards de dollars pour le PIB US, le plan de relance ne pèse en fait que 3% du PIB ce n'est en fait pas grand-chose. À l'époque de Roosevelt, les dépenses avaient atteint des taux nettement supérieurs sans pour autant être suffisantes pour relancer la machine durablement. Ce n'est qu'en atteignant le niveau des dépenses de guerre des années 40 que l'économie a pu atteindre le plein emploi. Comme le disait Keynes, il semble que les dépenses massives, les états n'en soient capables que pour faire la guerre et non pour remplir la satisfaction des besoins de leurs propres populations. Les comptables libéraux cessent d'ailleurs leurs critiques dès lors qu'il s'agit des affaires de la guerre et des intérêts de leurs proches. En ces périodes, ils sont alors d'invraisemblables dépensiers, mais jugent ces mêmes dépenses de gaspillage dès lors qu'elles sont dirigées vers la construction d'hôpitaux, de HLM, ou d'investissement public. L'Amérique est en partie en proie à ce dilemme, on se souvient que le keynésianisme guerrier de Regan n'avait pas vraiment heurté les chantres de l'équilibre budgétaire à l'époque, car il s'agissait de vaincre les méchants Soviétiques. Cette dichotomie de l'esprit qui consiste à juger les dépenses de solidarité comme du gaspillage et les dépenses militaires ou financière ( par exemple les aides aux banques), comme des nécessités font partie des bizarreries qui feront certainement rire les historiens du futur qui se pencheront sur l'origine de l'effondrement des civilisations occidentales.



Dernier point qui est le plus important à mon sens, le plan de relance va surtout accroitre les importations comme le fit le premier plan. Je l'ai déjà dit dans d'autres textes, mais je le répète. Les USA sont dans la même situation que la France en 1983 et probablement en pire. Le niveau de dépendance aux importations est tel qu'il réduit à néant l'impact sur l'emploi productif les effets de plan de relance. Ces derniers ne réactivant que la production d'emploi de service ce qui creuse inexorablement les déficits commerciaux. C'est d'autant plus vrai que l'Amérique est seule à faire ce type de politique tout comme la France était seule à faire une relance au début des années 80. Dans ce type de cas de figure, il faut impérativement prendre des mesures pour minimiser les importations et maximiser la consommation locale. Or on n’entend absolument rien comme proposition sur cette question, Obama avait d'ailleurs récemment fait un discours sur les bienfaits du libre-échange. L'Amérique a oublié sa propre histoire. Et le fait que jusqu'en 1945 les importations étaient taxées à 50% en moyenne ce qui avait comme avantage certain de faire que les politiques de relance réactivaient surtout la production locale. Consommer des produits chinois fabriquera certes des emplois chez Wall Mart, mais créera mécaniquement une fuite de la masse monétaire vers l'extérieur du pays. Ce n'est pas un hasard si avec l'augmentation des importations les effets des plans de relance diminuent année après année pour devenir pratiquement nuls comme en 2008-09. Il est tout simplement impossible de réactiver une croissance auto-entretenue si le pays a de forts déficits commerciaux. Injecter des liquidités dans ce contexte revenant à verser de l'eau dans une passoire en espérant la remplir. On a affaire à une politique semi-keynésienne, c'est à croire que les élites américaines ne comprennent pas le concept de circuit économique. Les USA ne sont plus assez gros pour ignorer le reste du monde et l'Asie. Ou peut-être que les élites US comptent sur une forte dévaluation du dollar, mais il y a fort à parier qu'en pareil cas le yuan suivrait, les Chinois ayant collé leur monnaie à celle du des USA. En pareil cas, la compétitivité des USA ne s'améliorerait que contre celle de la zone euro, mais cette dernière pratiquant des politiques de déflation salariales, le gain économique potentiel pour les USA ne serait guère élevé. Si les USA continue dans cette direction, les réactionnaires monteront au pouvoir en prônant des politiques à l'Européenne au nom du « bon sens » comptable. Tout comme l'on fait les idéologues néolibéraux en France après la rupture de 83. Une rupture que l'on a appelé le tournant de la rigueur et dont nous ne sommes jamais sorties. Si Obama veut vraiment une politique de plein emploi, il lui faut s'attaquer aux intérêts des grands groupes et il faut des politiques protectionnistes d'accompagnement aux politiques de relance.



L'Europe l'empire libéral en décrépitude

 

trichet.jpegPour l'Europe la situation est en fait plus simple, le continent continue dans sa direction d'autodestruction macroéconomique qu'il pratique depuis les années 70-80. La seule différence c'est qu'aujourd'hui la locomotive américaine qui donnait l'illusion que ces politiques étaient saines a disparu. L'Europe a un PIB trop gros pour être tirée uniquement par le dynamisme économique du reste du monde et notamment des USA, c'est d'autant plus vrai que ces derniers sont eux même en proie aux difficultés dont nous avons parlé. Jusqu'aux débuts des années 2000, l'Europe a vécu aux crochets des politiques de relance de l'oncle Sam. Le problème c'est qu'aujourd'hui elle est fortement concurrencée par l'Asie qui la remplace en matière de zone d'exportation et qu'en plus elle s'est empêtrée dans une monnaie unique qui ne pouvait en aucun cas marcher. L'Europe est sans doute la seule zone du monde où les dirigeants croient réellement aux fadaises libérales. La mécanique européenne a d'ailleurs été un outil formidable pour atteindre l'idéal libéral d'une société sans état et sans responsabilité collective.

 

La crise de l'euro loin d'être le réveil que l'on aurait pu attendre, a été au contraire une occasion pour les idéologues néolibéraux d'accroitre encore la pression sur les états membres. L'Europe se lance dans la folle politique de déflation salariale volontaire alors même qu'elle ne peut plus compter sur les exportations pour tirer sa croissance économique. Mais les élites ne cherchent même pas à résoudre le problème du chômage. La seule chose qui les intéresse ce sont les cours de la bourse et la prospérité du système financier. L'Europe est devenue une immense corporation dirigée par des intérêts privés qui se cachent de moins en moins et dont les discours ne font même plus semblant de s'intéresser aux problèmes de la population. C''est probablement là que la division entre les USA et l'Europe était le plus palpable. Bien qu'étant moi même peu soupçonnable de proaméricanisme, je dois dire que je trouve les priorités de l'état US plus nobles que celles de l'élite européenne. On peut dire ce que l'on veut des USA, force est de constater que même s'ils font n'importe quoi une partie de l'élite a encore conscience des intérêts de sa population, on ne peut pas en dire autant de la très très vieille Europe. Il ne nous reste plus qu'à espérer que l'explosion de l'euro fasse chavirer cette construction c'est la seule porte de sortie pour les peuples d'Europe. Sinon, ces derniers devront s'habituer à une crise sans fin encore plus difficile que celle des années 30.

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2 septembre 2011 5 02 /09 /septembre /2011 22:33

 

Nouvelle forte baisse boursière ce vendredi. Comme prévu les chiffres économiques grecs et américains sont mauvais, mais ce n'est une surprise que pour les marchés boursiers et les vendeurs de soupe qui servent d'économiste à la télévision. Malgré les tripatouillages statistiques, le chômage US continue d'être à son plus haut niveau. Plus grave, comme nous l'explique Jean Luc Gréau dans ce texte, c'est que le taux d'emploi déjà mauvais avant la crise reste très en deçà de son niveau d'avant 2007.  Le nombre d'emplois aux USA est inférieur de 7 millions aux chiffres de 2007. Or durant ce laps de temps de quatre années la population active s'est accrue, on comprendra dès lors pourquoi le taux de chômage ne risquait pas de baisser. Les USA ne sont pas l'Allemagne, ils n'ont pas une démographie en déclin capable de produire une baisse du taux de chômage en période de contraction du nombre d'emplois. Il leur faut comme pour l'économie française une création d'emploi annuelle minimale, ne serait-ce que pour stabiliser le taux de chômage. La Grèce elle non plus n'a pas rassuré les marchés, et pour cause, le déficit public se creuse encore malgré la bonne purge infligée à son économie. Le déficit atteindra ainsi les 8,8 % cette année et la récession devrait dépasser les 5% aux dernières estimations. Comme prévu la diminution de la demande intérieure par la contraction brutale des dépenses publiques a produit un affaiblissement de son PIB si important que les rentrées fiscales ont plongé plus vites que les économies effectuées par le gouvernement. En considérant les états comme des acteurs micro-économiques, c'est-à-dire comme des particuliers ou des entreprises devant équilibrer leurs propres comptes, les économistes néolibéraux ont produit et préconisé des politiques suicidaires.

 

 

 

  Car les états ne sont pas des acteurs normaux, ce sont eux qui font en quelques sortes le lien entre tous les acteurs économiques du pays. Chaque membre de la société est à la fois producteur et consommateur, et les emplois publics si décriés, font également fonctionner les acteurs privés, même si ces derniers n'en ont pas souvent conscience. La monnaie circule ainsi entre tous les acteurs du système et cet échange se retrouvant dans les bilans. Certains voient l'échange en positif sur leurs comptes, et d'autres en négatif.  Nous sommes tous à la fois clients et producteurs de richesse, et cet échange se fait par la masse monétaire en circulation dans le pays. Le déficit public de l'état n'est en réalité pas une mauvaise chose pour tout le monde. En fait, le déficit veut dire que l'état fournit à la collectivité un investissement et un travail supérieur en valeur à ce que l'état demande à cette même collectivité sous forme d'impôt. Ce n'est pas un hasard si les déficits publics explosent en période de récession. C’est simplement dû au fait qu'il y a une réduction de l'activité économique qui se traduit par une réduction des dépenses des acteurs privés. In fine à masse monétaire constante il est normal que le bilan bancaire des états devienne alors fortement négatif. Le seul moyen pour que l'état maintienne son équilibre budgétaire en période de faible activité économique étant de réduire cette masse monétaire, or on sait en pratique que cela provoque des récessions, puis des dépressions économiques. Autre point sur lequel il faut insister, les déficits commerciaux produisent eux des fuites monétaires qui doivent elles aussi être compensées quelque part par le système économique pour éviter l'effondrement total de l'activité. Il y a un mécanisme qui transforme, par les multiples intermédiaires qui composent la société, le déficit commercial en déficits publics et privés puis en endettement.



La collusion de déficits commerciaux incompressibles à cause de certains dogmes et les politiques de contrition économique ne pouvait donc que produire ces mauvais chiffres économiques. Et l'on ne voit pas bien comment la situation pourrait changer tant que ces boulets seront attachés au pays de ces nations en perdition et la France en fait partie.

 

La réalité US en chiffre

 

 

Pour en revenir à des considérations plus concrètes concernant la rechute d'aujourd'hui, nous allons réactualiser notre grille de donnée sur la situation macroéconomique américaine. Car c'est bien la situation américaine qui est au cœur du problème économique mondiale eu égard à la place que ce pays tient dans l'organisation actuelle de la planète. En regardant le site shadowstats, on peut observer les évolutions de l'emploi US depuis 2007, le graphique ci-dessous montre ainsi la création d'emploi secteur par secteur depuis le début de la crise. Bien entendu, celle-ci fut négative près de 7 millions d'emplois ayant été détruits depuis cette période. Les créations récentes n'ont pas vraiment compensé les pertes. Le seul secteur à avoir vraiment créé des emplois est celui des services médicaux et de l'éducation, ces secteurs ayant probablement bénéficié d'une forte intervention visant à contrecarrer les effets de la récession.

 

 

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    Le problème c'est que ce type d'emplois, s'ils sont bien évidemment nécessaires, ne produisent rien sur le plan industriel. Ce sont des emplois de  services. Ces emplois ont donc eu un impact certainement positif sur le plan de la consommation intérieur, mais négatif sur celui de la balance des paiements.  Si la croissance américaine retombe, c'est que les emplois qu'elle crée sont d'une part trop peu nombreux pour compenser les pertes. De ce point de vue, les économistes comme Krugman ont eu raison de dire que les plans de relance US d'Obama étaient bien trop timorés. Mais, en plus, ils n'étaient pas commercialement viables, car aggravant le gouffre commercial qu'est devenue la balance des paiements US. L'augmentation de la masse monétaire aux USA ne peut plus se faire qu'à coup de planche à billets, maintenant que l'imprimante à bons du trésor est tombée en rade, plus personne à l'étranger ne voulant en acheter. Le rôle de monnaie internationale du dollar et l'intérêt de certaines nations fortement exportatrices aux US permettent toutefois à la monnaie américaine de continuer à flotter contre toute logique monétaire. On remarquera également en regardant la quantité totale d'emploi privé aux US sur le graphique ci-dessous que la situation américaine est mauvaise depuis 2000. Sur le plan de l'emploi, on peut parler d'une décennie perdue puisque le nombre total d'emplois ces dix dernières années a stagné. Je rappelle pourtant que la population en âge de travailler a fortement augmenté aux USA durant cette période la population étant passée de 282 millions d'habitants en 2000 à 311 millions en 2011. Soit une augmentation de près de 10%, la simple stagnation de la quantité d'emploi ne pouvait donc que produire une forte hausse du chômage sur la même période.

 

emploi prve US

 

 

À la suite de Jean Luc Gréau, on peut rester dubitatif devant l'aveuglement de nos élites sur la situation américaine. Le même diagnostic pouvant également se faire avec les champions du néolibéralisme comme la Grande-Bretagne ou la pauvre Espagne dont la population commence à nouveau à émigrer alors même que le pays est déjà vieillissant. La quadrature du cercle produite par la logique libre-échangiste qui rend impossibles le plein emploi et la croissance atteint aujourd'hui son paroxysme. Les bourses et les marchés commencent seulement à percevoir l'impasse dans laquelle leur idéologie dominante a plongé l'humanité. Je dis l'humanité parce qu'il faut être particulièrement idiot pour croire que des pays comme la Chine ou l'Inde pourront à court terme remplacer les USA dans leur rôle de consommateur en dernier ressort. Ce genre d'analyse est pourtant répandue et parfois même plébiscitée par certains alternatifs. On cite ainsi souvent la célèbre revue de la chronique agora ou encore l'économiste Olivier Delamarche. Un économiste qui même s'il a du bagout et un certain sens de la communication n'en demeure pas moins un borgne sur le plan de l'analyse économique. Il croit lui aussi que nous assistons à une passation de pouvoir de l'occident vers l'orient, il pense que la situation actuelle se décantera lorsque les Asiatiques prendront le relais de la fameuse croissance. La chronique agora et Olivier Delamarche font partie de ces libéraux lucides qui voient bien l'impossibilité qu'il y a dans le modèle actuel, mais qui reste avec leurs réflexions économiques de comptables. Car c'est malheureusement oublier bien vite la nature même de ces économies qui sont extraverties et qui dépendent largement de leurs exportations vers l'occident pour maintenir leur croissance et leurs investissements délirants. La chute de la maison US produira une crise planétaire et pas seulement occidentale, et bien malin qui pourra deviner quel trait prendra l'économie mondiale d'après. En tout cas, cette journée noire nous montre à nouveau l'absence totale de rationalité des marchés qui brule aujourd'hui ce qu'ils ont adoré hier.

 

La demi-bonne analyse d'Olivier Delamarche:

 

 

 

 

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25 août 2011 4 25 /08 /août /2011 22:35

440px-Codex_Magliabechiano_-folio_70r-.jpg Je vous rassure tout de suite, le blog ne se lance pas dans la théologie, simplement force est de constater que nos dirigeants correspondent parfaitement à la phrase supposée du prophète des chrétiens. La multiplication des plans de contrition montre que les dirigeants n'ont encore rien compris à la nature de la crise. Ils ne cessent de l'amplifier par comportement mimétique et leur casuistique libérale est incapable d'expliquer la nature de la crise que sa propre raison a engendré. Certes, il y a chez certaines de ces élites un cynisme certain, mais je doute honnêtement que ce soit le cas de la majorité des dirigeants français. Lorsque l'on voit ce pauvre parti socialiste qui se lance dans un concours pour savoir qui est le meilleur pour faire de l'austérité, et qu'en plus il y voit un gage de sérieux. On a juste envie de rire. Les partis dominants me font de plus en plus penser à des canards sans têtes qui continuent de courir dans tous les sens simplement parce que les muscles et les nerfs fonctionnent encore. On les voit s'agiter en criant "Il faut plus de libéralisme, il faut moins d'état, il faut plus d'Europe". Ils répètent sans cesse les mêmes politiques que pourtant ils pratiquent depuis le gouvernement Barre dans les années 70. À l'époque le gros premier ministre français vendait sa camelote frelatée mélangeant les pires idées anglo-saxonnes avec les pires idées autrichiennes avec comme but la sortie du tunnel. Vous souffrirez aujourd'hui, mais vous verrez. Demain, vous raserez gratis. Les Français ont bien souffert, mais le bout du tunnel ils ne l'ont jamais vu. Et c'est avec les mêmes politiques qu'encore une fois l'on va essayer de résoudre la crise.  

 

Il est vrai que ces trente dernières années les accalmies relatives ont pu faire croire à certains que la crise des années 70 était finie. Et que, moyennant une bonne attente et l'effondrement démographique, l'on pourrait voir un jour la fin du chômage. C'était ne pas voir que le néolibéralisme et les politiques anti-étatistes primaires ne pouvaient perdurer que grâce aux stabilisateurs keynésiens et aux multiples délires de surendettement qui ont pu exister grâce à la libéralisation totale de la finance. Ce sont les gabegies que les libéraux n'ont eu de cesse de critiquer qui ont empêché le système économique de s'effondrer totalement. Et cela durant toute cette longue période d'agonie intellectuelle, industrielle et politique que furent les années 73-2007. Comme le dit si bien Emmanuel Todd les néolibéraux sont maintenant seuls face à la réalité. Car les libéraux ont détruit leurs adversaires non sur le plan intellectuel, mais par l'accaparement de tout l'espace médiatique. Les libéraux sont en effet les premiers à violer leurs propres principes tout comme les communistes naguère, la liberté d'expression n'est bonne que pour ceux qui étaient dans le camp des "raisonnables" et du cercle de la raison. Le résultat nous le voyons aujourd'hui, les élites ne comprennent rien, leur unique grille de lecture  leur fait répéter inlassablement les politiques qui ont pourtant provoqué la situation. Ils sont à l'image d'un pompier essayant d'éteindre un incendie avec de l'essence et pensant que la seule chose qu'il puisse faire c'est d'accroitre le débit pour éteindre le feu. Les politiques ne sont pas les seules à ne rien comprendre d'ailleurs il suffit de lire les articles des journalistes pour s'en convaincre. Ainsi l'on peut rire en lisant le titre de la dernière dépêche AFP concernant la hausse du chômage.

 

"La conjoncture économique plombe la lutte contre le chômage "

 

Si vous ne voyez pas ce qui est drôle, alors je ne peux rien faire pour vous. C'est une inversion totale de la logique de l'économie réelle, car c'est la hausse du chômage qui plombe en réalité l'économie. Nos journalistes et nos dirigeants en sont à un tel point d'incompréhension du réel qu'ils pensent l'économie comme un truc externe au travail, à la vie des gens, aux salaires, etc.. Pour eux il y a l'économie qui fonctionne toute seule, et puis si elle est gentille et si on lui fait des sacrifices (en réduisant les salaires, en cassant des fonctionnaires ou en brulant des communistes), peut-être qu'elle daignera produire des emplois. On marche littéralement sur la tête, on a affaire à des adorateurs de totems magiques. À ce stade-là l'économie est plus proche du Vaudou qu'autre chose.  On voit les mêmes réactions ailleurs avec des raisonnements cloisonnés ignorant les fondamentaux du fonctionnement économique. Ainsi en lisant un article informatique je tombe sur ce lien de la tribune nous annonçant un effondrement des ventes de PC en Europe. En effet, les ventes ont baissé de 19% au printemps. Pensez-vous que le journaliste aura fait le lien avec la conjoncture et l'effondrement de la croissance et de la production partout en Europe? Non, c'est la faute aux tablettes graphiques, aux notebook, à la pluie, aux extraterrestres et probablement à la démission de Steve Jobs qui a provoqué un afflux vers les produits Mac. En aucun cas, cela ne peut être la faute de la stagnation des salaires et de la dégradation de l'emploi. Nos journalistes sont tellement habitués à trouver normal qu'il y ait de la croissance de la consommation sans hausse de salaire qu'ils n'arrivent pas à comprendre que cette croissance provenait des crédits et que l'arrêt de la consommation à crédit ne pouvait que provoquer cette baisse de la consommation. Trente ans de néolibéralisme n'auront pas seulement désertifié notre appareil industriel. Cela aura également désertifié les cerveaux de nos contemporains. Cette affaire de grigri économique me fait d'ailleurs penser à l'excellent épisode de Southpark sortie en plein crise des subprimes, je crois que cet épisode est même encore en dessous de la réalité par certains côtés:

 

 

 

 

Faire la bise aux riches, pour taper les pauvres

 

La plus grosse blague est quand même cette histoire d'impôts sur les riches que ces derniers consentiraient à faire (qu'ils sont généreux") à condition de bien casser l'état providence et les "rentes" sociales. J'use du terme de rente sociale parce qu'il me semble que c'est la vision que ces gens ont de la politique sociale, pour eux c'est une rente et une anomalie. Alors même que les riches vivent eux-mêmes de rente beaucoup plus considérable lorsque l'on connait la répartition du patrimoine. Car les vrais parasites ce sont bien les riches qui coutent infiniment plus qu'ils ne servent la société dans laquelle ils vivent. Pour vous donner un ordre de grandeur, vous pouvez lire l'article de Patrick Raymond. Il montre d'ailleurs l'impossibilité qu'il y a à sauver l'économie par les taxes sur les pauvres. C'est d'autant plus grotesque que l'on sait pertinemment que les riches sont globalement moins taxés que les autres eu égard à leur capacité à jouer sur les lois pour planquer d'énormes masses de capitaux dans les paradis fiscaux. Ils le savent d'ailleurs pertinemment, la hausse d'impôt même forte n'aura aucune incidence tant que l'état ne mettra pas fin à la libre circulation des capitaux. Tout ceci n'est qu'un grotesque plan marketing visant à justifier toujours plus de sacrifices pour ceux qui subissent déjà les effets de la crise. Une crise provoquée par ces mêmes couches supérieures et leurs délires libertaires.   On parle souvent de dégraisser le Mammouth en critiquant l'éducation nationale. On pourrait enfin penser à dégraisser les riches, dont la plupart en France, comme dans d'autres nations occidentales, ne sont que des héritiers. L'héritage qui est pourtant la quintessence de l'immobilisme qu'ils critiquent tant.

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23 août 2011 2 23 /08 /août /2011 22:44

friedmantime.jpgL'une des idées les plus néfastes exprimées par la "pensée" néolibérale fut probablement de vouloir présenter le vice sous les traits de la vertu. Non seulement en préconisant contre le bon sens naturel des individus l'égoïsme, et la compétition sans règle qui se résume au massacre des plus faibles par les plus forts, mais aussi en présentant les inégalités entre les êtres humains comme un phénomène naturel. Les néolibéraux sont même allés jusqu'à justifier la croissance des inégalités à des niveaux délirants, comme le connaissent à l'heure actuelle les USA, en produisant tout un verbiage savant cherchant à démontrer que toute la société finirait par bénéficier de ces inégalités. On connait ainsi le proverbe néolibéral qui présente le communisme égalitariste comme étant une doctrine partageant équitablement la misère. Le raisonnement néolibéral pensant au contraire qu'en favorisant les individus "exceptionnels" que seraient les entrepreneurs et les créateurs de richesses, on augmenterait la richesse globale et donc le niveau de vie des moins bien lotis. La pensée néolibérale est ainsi en partie une perversion des théories de Darwin. Théorie probablement incomprise des néolibéraux eux-mêmes, celle-ci s'attelant surtout a expliqué l'évolution des espèces sur de longues périodes de temps. Appliquer les idées de l'évolution par la compétition directement à la sphère culturelle et économique est en fait une démarche bien peu scientifique. D'autant que l'on sait que la coopération et les symbioses existent aussi dans la nature où tout ne se réduit pas à la compétition.  

 

  On pourrait même dire par certains côtés que le néolibéralisme est une caricature des pensées inégalitaires de la fin du 19e siècle coincé entre le naturalisme d'un Nietzsche ultrasimplifié et un délire de darwinisme social. L'idée de se référer à la science naturelle pour justifier les comportements les plus méprisables est de toute façon une constante dans le fonctionnement de la pensée économique. On peut penser à Mandeville et ses abeilles par exemple. Le néolibéralisme partage aussi avec les réflexions du 19e siècle le scientisme, et cette espèce de conviction de toute puissance lui interdisant le doute sur ses propres réflexions. Une absence d'humilité qui condamne en réalité toute réflexion réellement scientifique, car le doute est la base même de la raison et de l'esprit scientifique. Réduire d'ailleurs la vie humaine à une question d'optimum économique révèle le caractère essentiellement maladif des penseurs du néolibéralisme.

 

Le néolibéralisme, une sauvagerie faussement libérale

 

 

  Il y a également une opposition logique entre le fait de rechercher la liberté et le fait de supprimer les règles et les mécanismes d'organisation sociaux. En effet, la notion de liberté est une notion fortement élastique dès que l'on commence à chercher et à comprendre un peu le sens des mots. Comme je l'avais dit dans un texte précédent, on est jamais libre dans l'absolu, on est libre par rapport à quelque chose. Nous ne serions réellement libres de tout que si nous étions des êtres éthérés sans aucun besoin d'aucune sorte. Mais qu'adviendrait-il alors de nous si nous n'avions aucun besoin? Dans le monde réel, nous avons des contraintes qui sont le fruit de notre existence, nous devons manger, boire, dormir. Nous craignons le froid, nous aimons, nous détestons, nous sommes curieux, etc.. Autant de choses qui sont à la fois des contraintes et des motivations à l'existence, car ce sont ces contraintes qui font que nous existons. Nous naissons donc esclaves, en quelque sorte. La liberté dans ce sens est donc très relative, et elle consistera essentiellement à nous rendre libres de choisir la façon dont nous répondrons à nos contraintes. La liberté est essentiellement une notion qui interviendra dans la recherche de la satisfaction de ces besoins, ce n'est donc pas la liberté dans l'absolu.

 

 

C'est ici qu'il faut un peu sortir des raisonnements purement individualistes comme le font les néolibéraux et qu'il faut un peu commencer à se questionner sur la mécanique collective. En effet, nous vivons dans un monde physique limité. Par exemple un monde où il y a autant d'hommes que de femme et donc un monde où il sera difficile de parvenir à satisfaire les envies et les désirs sexuels de tous en même temps. Car la nature n'est pas ainsi faite que chacun puisse trouver un partenaire à la hauteur de ses désirs, si tant est que cette hauteur soit réellement atteignable. Le domaine de la sexualité est d'ailleurs fortement intéressant, car il s'agit probablement du lieu sur lequel le marché libre et sans règle a fait le plus de dégâts. En effet en amour il n'existe pas de gain de productivité pouvant accroitre le gâteau. Et en attendant le jour très fantasmé chez nos amis japonais où les robots sexuels feront leur apparition, comme dans « Ghost in the shell », le marché du sexe restera un gâteau stagnant. De fait, la logique de compétition produit une maximisation non de la satisfaction en moyenne, mais de la satisfaction d'une petite partie de la population. Et une immense frustration chez tous les moins bien lotis. À cela s'ajoutent la mécanique marchande et les médias de masse qui nous ont inculqué des désirs de perfection trop excessifs pour que notre entourage proche puisse y répondre. Le marché du sexe est donc une caricature de ce vers quoi conduit une logique de pure confrontation des individus sans règle et sans limitation collective. Cela mène vers une société très inégalitaire malheureuse et fortement dépressive où quelques-uns ont tout, et les autres riens.

  

Dans le domaine économique, l'absence de règle ne conduit pas à la victoire des individus les plus aptes à améliorer le sort de la collectivité, mais de ceux qui au contraire sauront maximiser leur ponction sur le reste de la société. La compétition sans règles ne mène qu'à la barbarie et à la domination, non pas des plus intelligents ou des plus travailleurs, comme aiment à le dire les néolibéraux, mais à la domination de ceux qui sont le plus aptes à violer les plus élémentaires des règles de vie sociale. La profusion de corruption et l'inefficacité spectaculaire de nos élites malgré les milliards qu'elles pompent sur le dos de l'appareil productif, devraient nous faire enfin comprendre une chose, l'individu qui n'est mû que par l'appât du gain n'est pas le plus efficace pour diriger une société. Et l'absence de règles n'a pas libéré la créativité, elle l'étouffe en écrasant ceux qui aiment les arts, les sciences, la création au profit de ceux qui n'aiment que l'argent que ces processus créatifs produisent . Notre société néolibérale favorise ceux qui aiment créer pour gagner un statut social et non ceux pour qui l'acte de créer est le but même de leur action. C'est ce qui explique le déclin généraliser les arts et des sciences occidentales. Au lieu de favoriser les meilleurs, le néolibéralisme favorise les plus mauvais pour l'intérêt collectif. Maximiser l'individualisme n'a pas maximisé l'efficacité collective, et ce n'est guère étonnant en réalité.

 

L'inégalité réduit l'efficacité économique

 

Mais au-delà des questions d'ordre philosophique,si l'on s'en tient à la simple question économique, les raisonnements néolibéraux qui consistent à présenter les inégalités comme un moyen d'optimiser la croissance et la prospérité sont tout simplement faux. Ils sont faux non seulement dans la pratique, les nations fortement inégalitaires n'étant pas plus productives, mais aussi d'un strict point de vue logique. Tout d'abord, rappelons que comme je l'ai dit précédemment l'absence de règle de limite ne permet pas aux créateurs, ceux qui créent pour créer et non uniquement pour gagner de l'argent, de s'imposer. Ces derniers sont en général écrasés par les individus les plus égotiques et moins créatifs. Sans règle les gros écrasent les petits et les nouvelles idées, les nouvelles techniques peuvent avoir bien du mal à sortir. On sait d'ailleurs d'expérience que les marchés sans règles et sans acteurs externes pour limiter les abus conduisent toujours au monopole ou au cartel. Dans un tel cadre, la compétition et la concurrence n'ont plus guère de sens. L'univers sans frontière et sans règle des néolibéraux conduit donc à l'inverse de ce qu'ils semblent chercher à promouvoir. Un peu comme l'on remarquera avec Frédéric Lordon que le néolibéralisme est une politique qui produit du surendettement et non du désendettement public et privé. En un sens, le néolibéralisme est naturellement antinomique avec ses objectifs affichés.

 

Ensuite si l'on raisonne au sens collectif et plus uniquement au niveau des individus, l'idée de maximiser les inégalités consiste au final à concentrer la consommation des biens en haut de la pyramide sociale. L'idéal, en ce sens, étant la société victorienne de la fin du 19e siècle en GB, toutes les richesses étant essentiellement accaparées par une fine tranche de la population. Le problème de ce raisonnement est que d'une part l'on ne voit pas en quoi il serait normal que ceux qui produisent la richesse ne bénéficient pas de son accroissement fruit de leur labeur. Car il ne faut quand même pas oublier ici que ceux qui s'enrichissent sont essentiellement ceux qui possèdent les moyens de production, on ne contredira pas Marx sur ce point. Et que les possesseurs de ces moyens de production sont rarement les créateurs dont je parlais précédemment, mais bien plus souvent des héritiers bien nés y compris et même surtout aux USA. Ensuite, cette concentration des richesses produit le fameux problème des débouchés que Keynes a si bien décrit. À savoir que les riches ont une propension à consommer qui décroit au même rythme qu'ils s'enrichissent. En quelque sorte, il est bien difficile de continuer à gaver quelqu'un qui n'a plus faim.

 

De ce fait, il arrive un moment où la quasi-totalité de l'augmentation des richesses des plus aisée se transforme uniquement en épargne et en capital. C'est la situation absurde ou nous arrivons en Europe et aux USA. Et cette épargne contrairement à la vulgate libérale ne se transforme pas en investissement, car l'investissement n'est pas égal à l'épargne. Une bonne partie va se planquer à la bourse faisant monter artificiellement les cours, ou va faire grimper les prix de l'immobilier, ou alors va nourrir les dettes des états ce qui accroitra encore le fossé entre riches et pauvres, ces derniers devant s'acquitter des impôts pour rembourser les dettes. Et plus les inégalités sont fortes d'ailleurs et moins l'investissement sera fort, car pour investir il faut de la demande. Car c'est l'augmentation de la demande qui rendra à long terme rentable les investissements qu'une entreprise fera. Donc non seulement la hausse des inégalités produit un assèchement de la demande, un riche consommant toujours une part moins grande que mille pauvres ayant collectivement le même poids économique. Mais en plus cette baisse de la demande stérilise l'épargne dégagée par la concentration vers le haut des revenus. C'est ce qui explique que les USA ont conjointement eu une forte hausse des inégalités et une baisse des investissements productifs ces vingt dernières années. L'inégalité économique est non seulement moralement inacceptable, démocratiquement dangereusement, mais en plus économiquement c'est une aberration.

 

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22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 18:06

impact.jpgLes bourses semblent s'être momentanément calmées ce lundi, les médias en profitent pour détourner l'attention de la population vers ce qui se passe en Libye. Même s'il est vrai que l'occident agit là-bas comme naguère les puissances européennes le faisaient. Le conflit libyen est typiquement un conflit théâtral, car qui peut croire un instant que la volonté occidentale et surtout américaine est réellement de vouloir installer dans ce pays un régime démocratique alors même que la démocratie est morte en occident. À moins que l'on appelle désormais démocratie tout régime en accord avec les intérêts occidentaux. Quoi qu'il en soit le guignol au pouvoir va tomber, on va pouvoir voir à quoi ressemblera la démocratie libyenne. Avec un régime politique qui devrait fonctionner à l'occidentale, c'est à dire par le jeu d'une gauche libérale qui fait semblant d'être contre la droite libérale, mais qui sont tous fondamentalement proaméricain et pour le libre-échange intégral. Pendant que cette mauvaise farce continue à se jouer, le monde occidental continue lui son rapide déclin dans le monde réel. La situation en Europe est particulièrement préoccupante puisque l'on vient d'apprendre que grâce aux "remèdes" miraculeux proscrits par les néolibéraux européens la Grèce connait un véritable plongeon économique. Ainsi son PIB pourrait reculer de 5.3% cette année. Ce qui devrait rendre négatifs les effets des plans de contrition économique sur les déficits et la dette publique. Comme prévu les politiques de déflation salariale et d'austérité économiques n'ont aucun effet positif, surtout si tous les pays font la même chose en même temps, ce qui est aujourd'hui le cas sur toute la zone  euro et sur une large partie de l'occident décadent. C'est dans ce contexte-là que la sortie de l'euro, loin de produire une catastrophe comme nous le répètent les médias, pourrait nous donner au contraire une bouffée d'oxygène. Mais encore faudra-t-il faire un bon usage de cette sortie et de l'éventuelle dévaluation qui s'en suivrait.  

 

Sortir de l'euro ne détruira pas la France, bien au contraire 

 

  Pour rassurer mes lecteurs sur l'hypothétique catastrophe que représenterait la fin de l'euro, comparons un peu les quelques pays européens membres et non membres de la zone euro sur le plan de la croissance économique. J'ai pris l'exemple de pays ayant beaucoup souffert de la crise parce que c'est dans ces cas là, que la différence entre le fait de faire ou non partie de la zone euro se fait le plus sentir. Commençons tout d'abord par deux pays membres des fameux PIGS l'Irlande ex-championne de la croissance européenne, et la Grèce, le pays de la feta du sirtaki, et des fainéants. Si l'on en juge par les simplismes racistes qui ont nourri nos médias depuis que la crise grecque a commencé. Le premier graphique représente l'évolution du PIB irlandais.

 

PIB-Irlande.png

 

PIB-Grece.png

 

 Dans les deux cas, on constate que la croissance n'est toujours pas revenue à un niveau d'avant crise. Et même si l'Irlande semble connaitre une remontée celle-ci stagne à un magnifique 0.037% de croissance en moyenne annuelle pour janvier 2011. On remarquera également dans le cas de l'Irlande que la croissance a fortement ralenti lorsque le tigre celtique a rejoint la monnaie unique à la fin des années 90. L'avantage de ces graphiques à plus ou moins longue durée c'est que contrairement au verbiage des économistes de salon, ils nous disent la vérité au sujet de l'euro. Quoi qu'il en soit nos deux PIGS sont loin d'être sorties de la crise. Et la rechute qui s'annonce un peu partout que ce soit aux USA où la croissance ralentit, en Allemagne où la production industrielle baisse, ou même en Chine où la croissance connait un déclin progressif, ne devrait pas améliorer la situation de ces deux nations. D'autant que comme je l'ai dit au début de ce texte les politiques visant à faire des dévaluations compétitives à travers les compressions salariales et la contraction de la demande intérieure ne peuvent fonctionner que dans un monde ou peu de nations les pratiques. Ce n'est plus le cas aujourd'hui puisque l'humanité a décidé de s'enfermer toute seule dans une vaste dépression salariale et économique.  Dans ce contexte-là, vouloir tirer sa croissance par l'exportation  est probablement du suicide à plus ou moins long terme sauf peut-être pour des pays de petite taille comme nous allons le voir maintenant. Si l'on regardait la situation dans quelques pays non membres de la zone euro :

 

PIB-Suede.png

PIB-Islande.png

 

Première remarque, ces deux pays la Suède et l'Islande sont comme la Grèce et l'Irlande des petits pays par leurs marchés intérieurs. Ils sont donc naturellement plus influençables que les grands pays aux variations économiques mondiales. D'autant que ces pays ont tous plus ou moins choisi de faire du commerce extérieur un élément essentiel de leur économie. Il est donc normal que ce genre de pays subissent des secousses plus grandes lorsque la terre économique tremble. La Suède et l'Islande ont toutes les deux subi une forte récession en fin 2008, comme tout le monde, mais en plus fort. Dans le cas de l'Islande, ce fut même dramatique puisque ce pays avait la situation bancaire la plus catastrophique loin devant l'Irlande par exemple. Nous avions d'ailleurs déjà parlé du cas islandais dans ce texte. L'Islande n'a heureusement pas fait le choix de nationaliser les pertes bancaires du secteur privé contrairement à ses homologues du reste du continent, elle a ainsi évité la crise sur la dette que les Européens subissent aujourd'hui. Quoi qu'il en soit son PIB s'est fortement contracté en 2008. Cependant, la forte dévaluation de la monnaie locale a permis au commerce extérieur du pays de rapidement connaître une amélioration . On peut dire aujourd'hui que contrairement à la Grèce et à l'Irlande, l'Islande est belle et bien sortie de la zone rouge. Ce que ne dit pas  ce graphique c'est que la balance commerciale du pays est aussi dans le vert et que le chômage recule. Même chose en Suède où la croissance est redevenue très forte, elle progresse même à un rythme asiatique. Et c'est bien la dévaluation de la couronne suédoise et le fait que le pays ait gardé sa monnaie qui permet à la Suède d'afficher de tels taux de croissance, à un moment où  le reste de l'Europe sombre dans le marasme.

 

Il est probable d'ailleurs que la bonne santé de la suède soit en fait indirectement un effet de la monnaie unique. En effet, la Suède fait l'essentiel de ses échanges avec le reste de l'Europe et notamment la zone euro.  Si le reste de la zone connait une surévaluation prolongée de sa monnaie, la Suède peut engranger facilement des excédents commerciaux, en ce sens la Suède a bel et bien un modèle à l'asiatique vis-à-vis de la zone euro. Mais on voit bien ici la limite du raisonnement, il s'agit ici de petits pays dont les PIB ne représentent qu'une faible part du PIB du continent. Si la Suède et l'Islande nous montrent que la dévaluation et le fait d'avoir sa propre monnaie ne sont pas les catastrophes annoncées par certains, il n'est pas certain que des dévaluations mêmes de cette ampleur auraient les mêmes effets dans des pays au PIB plus important comme la France ou l'Italie. On le voit avec l'Allemagne qui même avec de très gros excédents ne connait pas un rythme de croissance très important. Il faut bien prendre en compte la taille des nations pour évaluer les effets des politiques, et c'est particulièrement vrai lorsque toute l'économie mondiale se contracte et que tout le monde pratique la dévaluation compétitive ou la contrition salariale.

 

La sortie de l'euro, seule, ne suffira pas



Dans le cas de pays comme la France l'Italie ou l'Espagne, la dévaluation et la sortie de l'euro devraient impérativement s'accompagner d'une politique de relance de la demande intérieure. Celle-ci peut prendre n'importe quelle forme, du moment que la demande stimule l'appareil productif du pays à un moment où les exportations seules ne pourront pas tirer notre croissance, faute de demande mondiale suffisante. C'est un point que les partisans de la sortie de l'euro peuvent parfois oublier, mais qu'il est bon de rappeler. Si dans le cas de la Grèce ou de l'Irlande la simple dévaluation peut être suffisante, la France, l'Italie ou l'Espagne sont trop grosses pour que la relance ainsi provoquée puisse être durable et d'un niveau suffisant. Seule une politique coordonnée de relance de la demande intérieure et d'une dévaluation, et d'un certain protectionnisme pourront contrecarrer le destin vers lequel la situation actuelle nous conduit. En régime de dépression planétaire, la dévaluation seule, ou les politiques de relance dans un cadre de libre-échange ne mènent nulle part, surtout pour les pays de taille importante. Nous ne devons pas substituer une politique déséquilibrer, celle de la relance sans protectionnisme et dévaluation, par une autre tout aussi déséquilibrer et qui consisterait à remplacer le dumping salarial par le dumping monétaire. Les dévaluations ou le protectionnisme ne doivent servir qu'à soutenir des politiques de plein emploi et d'investissement. Ce sont les politiques de dumping et de dévaluations agressives visant à l'accumulation d'excédents commerciaux qui ont mené l'économie mondiale à la situation actuelle. Nous ne devons pas rentrer dans ce cercle infernal en essayant d'expatrier à travers des excédents commerciaux nos problèmes.

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