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31 décembre 2011 6 31 /12 /décembre /2011 23:40

Les récents démêlés entre la France et la Turquie m'ont récemment poussé à étudier un peu la macroéconomie de ce géant de l’Asie mineure. Je ne polémiquerai pas ici au sujet du génocide, car génocide il y a bien eu. Même si ce n'est pas à l'état de décider des vérités historiques, mais bien aux historiens eux-mêmes. Il me semble d'ailleurs que cette affaire arrange bien les deux dirigeants de nos vieux pays, avec d'un côté un Sarkozy très peu attaché aux intérêts nationaux et qui peut se donner momentanément une bonne image dans les médias notamment ceux  de la gauche bienpensante. Et de l'autre côté, un dirigeant turc qui peut faire voir à quel point il défend l'honneur bafoué de la Turquie à un moment où la situation économique du pays pourrait très bien se retourner. Car si la croissance turque peut en émerveiller certains. Elle ne fera certainement pas frémir les lecteurs de ce blog qui sont maintenant habitués à comprendre que le seul taux de croissance est largement insuffisant pour mesurer si un pays progresse ou pas. Nous allons voir ici que la Turquie donne malheureusement tous les signes d'une économie bulle qui ne tiendra plus très longtemps étant donné son commerce extérieur. Et c'est peut-être parce que les élites turques viennent de voir leurs consoeurs grecques s'effondrer qu'elles cherchent un bouc émissaire extérieur pour le moment où la Turquie tombera.

 

  L'économie turque en quelques chiffres

 

  Décidément, les économistes mainstream n'ont toujours pas compris à quel point il est dangereux de ne voir l'économie d'un pays qu'à travers le prisme de la croissance. Les crises en Europe et un peu partout sur la planète auraient pourtant dû les éduquer un peu. Les champions d'hier, telles l'Espagne, la Grèce, ou l'Islande, ayant sombré avec pertes et fracas sous les coups des incohérences macroéconomiques de leurs modèles respectifs on aurait pu espérer une plus grande prudence avant de déclarer des nations comme modèle. Pourtant on nous présente les nouveaux champions avec la même désinvolture que l'on présentait ceux d'hier sans voir qu'eux aussi ont des problèmes structuraux de grande importance. De la Chine, dont le modèle exportateur pourrait lui être mortel avec l'effondrement de la demande en occident, à l'Allemagne qui a fondé toute sa croissance sur le pillage de ses voisins, en passant par le Brésil qui n'est dynamique qu'en parole puisque sa croissance annuelle est instable et qu'elle retombe aujourd'hui à seulement 2%. Bref rares sont les nations sur cette planète à pouvoir se targuer d'avoir un modèle cohérent et pour cause elles ont toutes été empoisonnées par l’idéologie néolibérale et son sabir pseudo-scientifique. Et les nations qui ont des modèles cohérents sont souvent d'anciennes victimes du néolibéralisme à l'image de l'Argentine qui cumule croissance économique et balance commerciale à l'équilibre, mais qui a tout de même une inflation élevée.

 

pib

 

    Dans le cas de la Turquie, il suffit de voir l'état de la balance commerciale pour voir qu'il y a une couille dans le potage comme on dit vulgairement.  Avec un joli -10% au compteur, on peut dire que la Turquie fait largement mieux que la Grèce qui n'avait jamais dépassé les 4% de déficit commercial malgré sa tare génétique de pays méditerranéen, dixit Angela Markel. Même l'Espagne championne d'Europe des déficits commerciaux avant sa panne sèche n'avait jamais dépassé 9.5% et pourtant elle était protégée par l'euro.... C'est dire si la situation turque est dramatique, et le pire c'est qu'elle aimerait y entrer dans l'euro.

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*source gecodia

Alors se pourrait-il que ce déficit commercial soit lié à une industrialisation intensive et au fait que les entreprises étrangères investissent massivement et importent donc des machines-outils? Ce qui se traduirait par un déficit commercial massif sur les biens d'équipements qui ne serait que momentané en attendant que la hausse de la productivité locale permette à la Turquie de voir sa balance se rééquilibrer. Le problème c'est que si la production industrielle augmente assez vite +11% l'année dernière les effets ne s'en font pas ressentir sur le commerce extérieur. De plus, l'industrie ne représente que 28% du PIB et seulement 25% de l'emploi. L'économie turque est déjà très post-industrielle dans le mauvais sens du terme. Et lorsque l'on regarde qui exporte en Turquie, on voit effectivement l'Allemagne grand fournisseur de bien d'équipement, mais on voit aussi la Chine et la Russie grands exportateurs de produit fini et de matière première.

 

repartition-emploi.png

principaux-part.png

*source lemoci

 De fait lorsque l'on regarde ces chiffres on voit bien que la Turquie n'est pas en voie d'industrialisation accélérée qui pourrait justifier un déficit commercial aussi abyssal à l'heure actuelle. Elle bénéficie juste de quelques délocalisations européennes sur son sol sans que cela ne se traduise par une amélioration de la balance des paiements contrairement au cas chinois. Mais il faut dire que les Chinois eux sont protectionnistes et ont une monnaie fortement sous-évaluée. On peut donc tout à fait conclure que ce pays va droit dans le mur et que le crack sera encore plus violent que ce que la Grèce a connu. Nous allons voir par la suite que cette situation est en grande partie imputable à la politique monétaire menée par les élites turques. Une politique en tout point similaire à ce que l'Argentine ou les pays déficitaires de la zone euro ont connu. Même cause, mêmes effets. Au passage, on constate bien l'effet des délocalisations allemandes. En effet l’Allemagne représente 10.1% des exportations turques et 9.5% des importations, ce léger déficit de l'Allemagne est un signe que ce pays est un des piliers de la mécanique de domination commerciale allemande en Europe. Il n'y a pas que l'Europe de l'Est qui serve de zone de basse pression salariale aux exportateurs allemands. L'Allemagne ne milite-t-elle pas activement pour l'entrée de la Turquie pour cette unique raison? Sur cette page Wikipedia, on apprend ainsi que des partis autrichiens et allemands (CDU) militent activement pour l'adhésion de la Turquie à l'UE. On sait maintenant qu'elle est le motif réel. Le patronat n'est pas loin derrière.

 

La Turquie voulait elle aussi son franc fort

 

  Mais d'où vient donc cet énorme déficit commercial? La Turquie n'a pas des salaires très élevés même si la productivité elle non plus n'est pas très élevée.  Jusqu'aux années 2000, la Turquie équilibrait à peu près sa balance commerciale et puis les idées néolibérales ont dû franchir le Bosphore. Les Turcs ont eu l'idée saugrenue de vouloir être européens jusqu'au bout en incorporant chez eux les idées très idiotes de leurs voisins de l'ouest. Probablement avec l'idée sous-jacente d'entrer dans l'UE. Et, pourquoi pas? Dans la fabuleuse monnaie unique dont tout le monde aujourd'hui a compris les immenses qualités. Il faut dire que l'inflation en Turquie a toujours été extrêmement élevée, quand on pense que nos élites ont peur de 3% d'inflation alors que l'inflation turque était souvent de 50 ou 60% par an dans les années 80-90. Cette période de forte inflation n’empêchait pourtant pas la hausse progressive du niveau de vie lorsque l'on regarde l'évolution du PIB par tête exprimé en PPA. Et la croissance était là aussi dans les années de forte inflation. Mais l'inflation ayant été déclarée mal du siècle voila les élites turques qui partent en guerre contre elle. Oubliant au passage que la forte inflation de la Turquie était aussi le fruit d'une démographie galopante que les vieillards du Nord n'ont plus depuis très longtemps. D'ailleurs si la hausse du niveau de vie s'accroit aujourd'hui en Turquie ce n'est pas parce que la croissance économique s'accélère, c'est surtout parce que la croissance démographique ralentit et permet une hausse par tête plus élevée.



Pour créer une nouvelle Turquie, les élites ont créé une nouvelle monnaie en 2005, la nouvelle livre turque. On notera que jusqu'à l'apparition de cette monnaie la livre n'était pas librement convertible dans les autres monnaies. Elle avait un cours forcé en quelque sorte un peu à la chinoise. Sur le deuxième graphique ci-dessous on peut remarquer une forte appréciation de la livre turque à partir de l'an 2000. Et étrangement le cours de la livre suit un peu l'évolution de l'euro. On peut en conclure que les élites turques ont voulu une monnaie forte qui suit les évolutions de l'euro pour favoriser leur saint Graal de l'adhésion à l'UE et à l'euro. L'arrivée des islamistes au pouvoir n'ayant rien changé dans la politique monétaire du pays.

 

BMHistoComplexe.jpeg

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* Source université de Sherbrooke

 

 

Les conséquences directes de cette livre turque forte sont les mêmes qu'en France dans les années 90 avec le franc fort ou dans les années 2000 avec l'euro, c'est une dégradation constante de la balance commerciale du pays. Dans le cas turc, cela est encore plus grave, le pays n'ayant pas une productivité forte et des secteurs capables de résister à cette dégradation de sa compétitivité. De fait, la Turquie est dans une situation en tout point similaire à la situation grecque d'avant la crise du secteur bancaire. Une forte largement surévaluée et un niveau de vie qui s'accroit artificiellement gonflant les déficits commerciaux et créant une multitude d'emplois dans les services. Il faut d'ores et déjà s'attendre à un effondrement du système financier turc dans les années qui viennent et à un effondrement monétaire puisque les déséquilibres atteignent des niveaux encore supérieurs à ceux que les nations les plus déficitaires de la zone euro ont connus. On remarque au passage que les élites turques sont aussi aveugles que leurs collègues européennes à ceci près qu'elles sont en décalage avec elles, répétant les mêmes erreurs. Et même si à court terme cette pseudo-croissance fondée sur du vent réduit le chômage, elle ne réduit pas les inégalités qui sont très importantes dans ce pays. Le coefficient de GINI est de 0,436 contre 0,34 en Grèce faisant de la Turquie un pays pratiquement aussi inégalitaire que la Chine. Qui plus est cette croissance finira, nous le savons d'expérience, en catastrophe. Il serait peut-être temps que les élites turques se soucient un peu plus de leur balance commerciale si elles ne veulent pas d'un enterrement à la grecque.



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27 décembre 2011 2 27 /12 /décembre /2011 22:40

 Silvio_Gesell_-1895-.jpgMon collègue blogueur Laurent Pinsolle relance la question de la monnaie et du rôle joué par le système monétaire international dans la crise actuelle. Si je crois tout à fait pertinent le fait que le dérèglement du système de Bretton Woods a une place centrale dans la crise actuelle, il ne faut toutefois pas tout confondre. La question monétaire doit être en réalité coupée au moins en deux parties pour permettre une analyse cohérente. En effet la question de la monnaie peut se voir de deux manières différentes. D'une part elle peut consister à vouloir résoudre la question du développement économique propre à une société. Et à faire en sorte que la nature de la monnaie ne déforme pas l'échange commercial, et permette un développement harmonieux de l'économie. On pourrait parler ici de contrainte endogène. Et la deuxième façon de voir la monnaie est de se poser la question du rapport commercial et économique entre les différentes sociétés qui composent cette planète. On pourra parler ici de contrainte exogène. On verra que l'articulation entre ces deux contraintes d'analyse de la monnaie n'est pas une sinécure. En effet, avoir une monnaie fondante par exemple pour éviter l'accumulation capitalistique produit des difficultés dans l'échange commercial avec l'extérieur et des dévaluations constantes.  

 

 On peut ainsi chercher le meilleur système monétaire pour le développement économique d'une nation et se retrouver bloquer dans son application à cause des contraintes inhérentes au commerce international et des relations monétaires qu'il engendre. Il sera ainsi bien difficile de construire un système monétaire parfait et l'on devra certainement faire appel à des expédients extérieurs à la simple logique monétaire pour pouvoir faire en sorte d'avoir le meilleur système monétaire possible tout en gardant tout de même une cohérence vis-à-vis de l'extérieur du lieu d'application de ces solutions. Un bon système monétaire doit à la fois prendre en compte l'optimum monétaire endogène tout en prenant garde aux contraintes exogènes.    

Les contraintes monétaires endogènes

J'ai souvent parlé sur ce blog de la question monétaire et du principal problème que la monnaie produit sur le fonctionnement de l'échange. Par nature, la monnaie fait perdre une information capitale dans l'échange marchand, celle du temps. Le capital monétaire s'accumule sans perte alors que toutes les marchandises, tout ce que nous consommons est usé par le temps. De fait, la nature même de la monnaie telle que nous la concevons génère une déformation dans l'échange et produit un aveuglement sur la réalité des richesses d'un peuple ou d'une nation. Ce vice fondamental produit les crises et les cracks que nous connaissons régulièrement. L'inflation est en réalité le remède naturel que trouve le système économique pour réintroduire dans l'économie le temps et l'usure des choses. L'inflation érode ce capital qui ne devrait pas s'accumuler outre mesure. Ceux qui s'affolent en entendant le mot inflation ne se rendent pas compte que l'inflation est structurellement liée à un système monétaire qui permet l'accumulation sans limites du capital. Pour ne plus avoir d'inflation, il faut un système économique qui empêche l'accumulation.



À l'époque où Keynes réfléchissait à ces questions, il en était arrivé à la conclusion que seul un impôt très important sur les plus riches pourrait mettre fin aux accumulations délirantes et réduire ainsi le besoin d'inflation. Car l'inflation si elle est une nécessité dans une société trop inégalitaire et possédant une trop grosse part de rentier, elle n'en reste pas moins un remède hautement injuste et difficilement contrôlable. Elle punit le petit épargnant tout autant que le très gros alors que c'est surtout ce dernier qui est la cause des dérèglements économiques. De la même manière l'inflation ne distingue pas l'épargne à visée rentière, de l'épargne à visée consumériste qui elle serait un jour réintroduite dans le système économique sous la forme de gros achats. Keynes préférait donc un impôt très fort sur les grosses fortunes. Il prônait une réduction du problème de l'accumulation non pas en changeant la nature de la monnaie, mais en prenant en compte ses conséquences en introduisant des solutions politiques à postériori. D'autres ont voulu résoudre cette question en changeant la nature même de la monnaie. C’est le cas de Silvio Gesell qui lui proposait de rapprocher la nature de la monnaie de la nature de l'échange réel. De fait chez Gesell la monnaie a une durée de vie limitée, c'est une monnaie fondante. Sa nature rend donc impossible l'accumulation sur une très longue période et elle annule ipso facto le problème que la rente fait peser sur le reste de l'économie. Il est à noter qu'avec le progrès technique cette solution est de moins en moins utopique et pourrait très bien s'appliquer dès aujourd'hui.

Autre problème endogène. C’est le droit d'émission monétaire. Cette question est posée par certains économistes et par des citoyens actifs comme notre célèbre collègue A-J Holbecq. La monnaie devrait théoriquement être un bien public. Cependant par le hasard et la bêtise idéologique elle se retrouve aujourd'hui bien de particuliers, en l’occurrence les banques et les très riches. Alors qu'autrefois l'état empruntait les capitaux à la banque de France pour faire des investissements nationaux à des taux très faibles, ce dernier se retrouve aujourd'hui obligé d'emprunter à des taux très élevés, et de plus en plus à cause des récents événements, sur les marchés internationaux. D'un point de vue logique, il faut être clair, rien n'oblige un état à emprunter des capitaux exprimés dans sa monnaie nationale sur les marchés financiers. Ce truc absurde provient de l'idée néolibérale qu'ainsi l'état serait obligé de rembourser ses dettes pour reprendre les propos du très néolibéral Raymond Barre. Le but était théoriquement d’empêcher l'inflation ce qui n'a pas du tout marché bien évidemment. Cette politique a surtout donné à des acteurs privés des capacités croissantes dans la domination économique sur tout le reste du corps social au détriment de l'état et de la démocratie. Et cela grâce à l'endettement public et aux intérêts composés toujours croissants d'une dette indéfiniment remboursable. Nous arrivons aujourd'hui au terme de cette logique et nous voyons directement les banques et les acteurs des marchés financiers décider des politiques publiques. Une nouvelle féodalité s'installe en Europe et aux USA de plus en plus ouvertement et le capital est sa justification existentielle.

 

Les penseurs alternatifs sont donc pour un retour à une monnaie publique seule solution pour mettre fin à cette nouvelle tyrannie. Certains comme Todd vont jusqu'à réclamer l'annulation pure et simple de la dette ce qui aurait le mérite de remettre les pendules à zéro, mais qui ne résoudrait pas le problème à plus long terme. Comme la masse monétaire doit croitre avec les besoins d'échange et la croissance économique physique il nous faut nécessairement un système qui ne soit pas fondé sur de l'argent dette pour fonctionner à long terme. C'est-à-dire un système dans lequel chaque franc supplémentaire circulant dans le système monétaire ne provient pas d'un emprunt à intérêt, mais d'une création gratuite. Cette fonction ne peut être exercée que par un organisme public pas forcément sous la tutelle de l'état d'ailleurs. Après tout la justice est publique, mais les pouvoirs judiciaires et étatiques sont théoriquement séparés. On peut imaginer la même chose dans le cadre de la monnaie pour éviter les éventuels abus. Dans ce cadre-là, des économistes ont ressorti les thèses d'Irving Fisher le fameux « 100% money » qui consistent à faire en sorte que la banque centrale soit la seule à émettre la quantité totale de monnaie. Les autres banques ne pouvant plus émettre plus de monnaie qu'elles n'en ont à travers le système fractionnaire. On évite ainsi les crises, les bulles et les cracks liés aux délires dans un sens ou dans l'autre et à l'émission excessive de monnaie. On permet aussi à l'état de faire croitre la masse monétaire de façon régulière sans que sa dette enfle.

 

Les contraintes monétaires exogènes 

 

Comme on le voit, ces différentes solutions visent à construire un système économique plus stable et plus performant en vue de produire un meilleur bien-être de la population et d'éviter les errements du chômage de masse et de la déflation économique dans lesquels nous sommes plongés à l'heure actuelle. Il se trouve cependant qu'il y a d'autres problèmes monétaires à prendre en compte dans nos raisonnements. C'est ici qu'entre en jeu le fameux système monétaire international . Jusqu'à présent les questions monétaires étaient basées sur un raisonnement purement national et fermé, en introduisant les contraintes extérieures les choses se compliquent un petit peu. Nous ne pouvons pas vivre en autarcie. Nous pourrions fortement réduire les interactions économiques, ce qui serait souhaitable pour rendre nos nations plus stables et pour mieux contrôler le développement économique. Mais même avec le système le plus autonome nous aurions encore à faire du commerce. Ne serait-ce que pour les matières premières tant que nous n'avons pas trouvé de moyens de nous en passer. De fait, il faut alors voir que les monnaies nationales sont en relation les unes avec les autres. Depuis la Seconde Guerre mondiale, l'économie de la planète fonctionne avec en son cœur une monnaie de réserve internationale, le dollar. Cette situation a permis aux USA d'importer sans avoir à se soucier des grands équilibres commerciaux. Dans les années 70, avec la mise à mort de l'étalon or par les USA, ces derniers ont pu émettre autant de monnaie qu'ils le voulaient sans se soucier de leur taux de change.

 

Il faut bien comprendre que cette situation aussi ubuesque soit elle est une nécessité dans le sens où les autres peuples de la planète se sont volontairement piégés dans les griffes des USA. L'Europe et aujourd'hui l'Asie attendant stupidement année après année que les USA relancent leur consommation intérieure pour voir la croissance repartir. De fait, les USA sont devenus comme le disait Todd dans « Après l'empire » l'état de la planète entière. Malheureusement malgré leur voracité les Américains n'arrivent plus à consommer suffisamment pour permettre l'absorption de la production croissante de la planète surtout depuis que la Chine s'est jointe à cet absurde système. La crise actuelle est une crise de surproduction à l'échelle planétaire et sa genèse se situe dans les déséquilibres commerciaux monstrueux engendrés par un système monétaire et commercial mal pensé. C'est dans ce cadre là celui d'un système de change flottant que nos monnaies alternatives vont devoir vivre. La seule réforme monétaire ne suffira pas, l'Europe et l'Asie doivent aussi à vivre sans attendre un retour de la croissance uniquement par l'exportation. Elles doivent apprendre à faire des relances et pas seulement des plans d'austérité.

 

La question du système monétaire international est donc importante, mais elle est relativement indépendante de la question du système monétaire nationale dont nous parlions au préalable. Il est d'ailleurs probable que changer le système monétaire mondiale d'un coup soit impossible. La seule fois où cela fut possible fut après la guerre, une période ou une nation, les USA pouvaient imposer un système à toutes les autres. Ce ne sera plus le cas aujourd'hui. La réforme du système monétaire se fera donc par à-coups avec des évolutions comme celle récente de l’abandon de l'étalon dollar dans les échanges sino-japonais. En Europe la priorité est de mettre fin à la stupide monnaie unique et de revenir à un système plus flexible de monnaie nationale avec une monnaie commune pour éviter une dollarisation de la zone. En plus de cela il faut aussi parler du contrôle des capitaux et des marchandises aux frontières, la monnaie n'étant pas le seul moyen de réguler le commerce. Les quotas et les douanes pourraient tout à fait rendre viable même l'euro si nos élites étaient moins bornées.

 

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27 novembre 2011 7 27 /11 /novembre /2011 16:55

 

   images.jpeg Vous qui lisez ce blog vous utilisez comme tous le monde des disques durs pour stocker les informations que vous glanez ici ou là sur votre ordinateur. Le disque dur est une pièce maîtresse d'un ordinateur. Ceux qui en ce moment chercheraient à acquérir un nouveau disque dur seront surpris par contre de l'explosion des prix de ces périphériques indispensables à l'informatique. En effet, les prix ont triplé en très peu de temps et ne sont pas près de revenir à des niveaux habituels. Pourquoi çà? Et bien c'est très simple. La quasi-totalité des disques durs de la planète est fabriquée en Thaïlande, vous savez le pays qui vient de subir d'énormes inondations. Comme une grande partie de la production est impossible, on tourne sur les stocks de disques durs et les prix s'envolent. Encore un léger inconvénient de la mondialisation et de la surspécialisation territoriale.  C'est d'autant plus ennuyeux que même les producteurs n'ayant pas tous leurs sites en Thaïlande importent tout de même des pièces de ce pays pour les fabriquer. On parle ainsi pour la production de disques durs d'un an de pénurie au minimum. Alors bien évidemment ce ne sont que des disques durs et il n'y a pas mort d'homme, mais cet exemple montre le danger inhérent à une surconcentration des activités économiques. Imaginez un instant si la même chose se produisait dans le domaine pharmaceutique ou pire dans la production agricole. Ce n'est pas un fantasme étant donné que nos nations importent de plus en plus ceux qu'elles consomment y compris dans des secteurs aussi vitaux que la nutrition ou les médicaments. On voit même des haricots verts chinois dans nos étales.

 

La mondialisation rend pour la première fois mortelle l'humanité dans son ensemble



Pour la première fois dans l'histoire humaine, la totalité des peuples de la planète est entrée en interaction. Il n'y a pas un lopin de terre sur cette planète qui ne soit pas influencé par ce grand capharnaüm qu'est la globalisation néolibérale. Si ce phénomène entraine des impossibilités de régulation macroéconomiques comme nous l'avons vue moult fois sur ce blog. Il faut également prendre en compte le danger phénoménal que court l'humanité en spécialisant autant chaque région de la planète. Car comme dans le cas de nos disques durs des pénuries pourraient se faire sentir dans des secteurs nettement plus cruciaux. Beaucoup de pays se retrouveraient alors dans des situations explosives. On imagine déjà un effondrement similaire dans la production alimentaire dans certaines régions provoquant des flambées tarifaires dans d'autres. Comme cela s'est d'ailleurs en partie passé lorsque certains pays se sont pris d'amour pour les biocarburants de première génération. Les régions insulaires comme la Grande-Bretagne par exemple, dépendant énormément de leurs importations, se retrouveraient fort dépourvues.



 Un effondrement global de l'humanité dans son ensemble devient ainsi possible malgré l'immensité de la planète et du nombre de ses civilisations. Cela simplement parce que quelques hurluberlus ont cru que rendre les peuples dépendants les uns des autres était une bonne idée. De fait, ils ont en réalité ignoré parfaitement les leçons de l'histoire. C'est bien au contraire la diversité et l'autonomie de certaines régions du monde qui ont évité à l'humanité jusqu'ici de disparaître. C'est parce qu'il y avait des « barbares » autour de Rome qu'il y a eu un après l'Empire romain qui sans cela aurait dégénéré indéfiniment jusqu'à l’épuisement total des peuples qu'il abritait. Cette diversité des us et coutumes, des moyens techniques et des façons de vivre ont été les vraies planches de salut de l'espèce humaine. Cette diversité était aussi la garantie de l'évolution par la comparaison des modèles et par le jeu d'une certaine compétition darwinienne. En uniformisant la planète et en rendant chaque région dépendante, nous avons rendu possible un effondrement par effet domino de toute l'espèce. Si par malheur nous nous sommes trompés de direction, si notre civilisation est une voie sans issue alors nous aurons entrainé l'espèce humaine vers le chemin de l'extinction.

 

Comme on le voit, la critique de la mondialisation peut aller bien plus loin que la simple question économique. La mondialisation n'est pas qu'une monstruosité sociale et économique. C'est un véritable poison pour notre espèce. Et cela vaut également pour l'uniformisation des modes de vie par l'universalisation de la civilisation marchande anglo-saxonne . On nous présente sans arrêt l'homogénéisation comme une modernisation, ou un progrès alors qu'il s'agit en grande partie d'un appauvrissement de la diversité humaine. Diversité qui paradoxalement est vantée lorsqu'elle se résume à un folklore superficiel et ridicule dans nos propres pays à l'image de la nourriture hallal et du ramadan. Les musulmans de France sont tellement divers qu'ils regardent les mêmes émissions américaines et mangent dans des fastfoods. Des fastfoods hallals cependant, pour faire croire à une légère différence avec les autochtones. Des autochtones qui ,eux, ne savent même plus ce que signifie être français. L'affaiblissement des identités et l'accouchement d'un homoéconomicus global semblaient être inéluctables jusque'à une date récente. Heureusement les dégâts que ce phénomène provoque ont fini par condamner le processus qui lui a donné naissance à savoir la globalisation sous commandement anglo-saxon. Les crises se multiplient dans tous les secteurs. Les observateurs s’aperçoivent même maintenant que la Chine n'est pas un modèle et qu'elle aura bien du mal à survivre sans ses clients tant son marché intérieur est inadapté à sa propre production. Même nos saints défenseurs de la mondialisation commencent à douter malgré leur stupidité congénitale. Un peu à l'image de ce pauvre Attali qui ne sait plus comment défendre l'euro, l'un des enfants terribles des délires postpatriotiques des années 80-90. On trouvera bien sûr des coupables extérieurs faciles, du genre c'est la faute aux Américains. Sans jamais voir que c'est l'idée même d'un monde sans frontière et unifié qui est la cause de tous nos problèmes.

 

Au Brésil on taxe les importations et çà marche!

 

Heureusement, ce processus est loin d'être irréversible.  Pour en revenir à mes disques durs je me souviens que le premier que j'avais acheté à la fin des années 90 était fabriqué en Italie, un pays développé. Chose impensable de nos jours, le second quelques années plus tard était d'ailleurs déjà fabriqué en Hongrie. Aujourd'hui ils viennent tous d’Asie du Sud-est et de Thaïlande. Il n'y a pourtant rien de fatal à cette situation et nos amis latins du sud de l'Amérique ont, eux ,bien compris qu'il était suicidaire de trop dépendre de ses importations. Non seulement parce que cela rend impossible toute forme de régulation économique, mais aussi parce que cela rend votre pays fortement dépendant des évènements extérieurs. J'avais longuement parlé de l'Argentine dans ce texte. Ce pays bien qu'ayant subi de gros problèmes a tout de même réussi à s'en sortir grâce à des dévaluations et à un protectionnisme militant. Une fois indépendants du point de vue de la production, les Argentins pourront avoir une évolution salariale indépendante de l'évolution mondiale. Car le protectionnisme et l'autosuffisance industrielle ont comme principale vertu de rendre aux pouvoirs publics la capacité de faire évoluer la demande intérieure de façon corrélée avec les capacités de production locale. En régime fermé on peut ainsi coupler les salaires à l'évolution de la production et de la productivité et ainsi éviter le chômage de masse et l'accroissement infini des inégalités.

 

Mais il n'y a pas que l'Argentine qui s'est mise au protectionnisme. Pendant que l'Europe se suicide à coup d'euro et de libre-échange l'Amérique du Sud se réarme industriellement. Le Brésil s'est ainsi décidé à taxer les importations d'iPhone. Le premier résultat vient de tomber puisque Foxconn et Apple viennent de fabriquer une usine dans ce pays pour éviter d'avoir à payer les taxes d'importations sur le marché local. Je rappelle au passage que si le Brésil est un pays peuplé son PIB est tout de même nettement inférieur à celui d'un pays comme la France. Ce qui signifie qu'un marché inférieur en taille à celui de notre pays peut quand même se protéger avec succès même dans les domaines de la haute technologie. Cela casse définitivement l'argument sur le protectionnisme d'échelle européenne qui serait notre seule planche de salut parce que la France est trop petite. Il n'en est rien en réalité. À partir du moment où votre pays laisse les entreprises étrangères investir et apporter leurs savoir-faire le protectionnisme ne conduit pas à l'explosion des prix puisqu'il y aura toujours une entreprise pour se lancer dans l'aventure.

 

Mais allons plus loin, nous pourrions rêver d'un retour réel à la diversité humaine. On pourrait voir se développer dans le futur des modèles économiques et sociaux totalement disparates d'un pays à l'autre. Des modèles qui suivraient des voies originales et qui peut-être porteraient l’humanité plus loin que l'impasse dans laquelle l'américanisation nous a conduits. Le monde de demain sera peut-être un monde où Paris ne ressemblera pas à Tokyo ou à Londres. Un monde où tous les peuples du monde ne passeront pas leurs temps à regarder la dernière idiotie sortie des studios hollywoodiens. Un monde où chaque peuple pourrait enfin apporter sa pierre à l'édifice de la modernité . Une modernité qui sera diverse ou qui ne sera pas pour paraphraser la célèbre formule d'André Malraux.

 

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5 novembre 2011 6 05 /11 /novembre /2011 22:22

   images.jpegMon titre est peut-être un mystère pour le commun des mortels qui ne s'interroge guère sur les questions économiques sauf lorsqu'elles finissent par le frapper de plein fouet. C'est, en tout cas j'en suis, sûr un véritable mystère pour nos dirigeants. Ces derniers, prenant chaque variable indépendamment les unes des autres et appliquant des recettes économiques sans vraiment comprendre  le fonctionnement des économies nationales, ne risquent guère de comprendre le lien qu'il peut y avoir entre la dette, la monnaie, l'inflation et la Grèce. En tout cas, ils ne le comprendront pas dans le sens qu'il faudrait, pour ceux qui comprennent quelque chose. On pourrait ici me trouver prétentieux ou orgueilleux, je constate simplement qu'un individu normal travaillant dans un secteur donné et répétant inlassablement les mêmes erreurs serait licencié depuis longtemps. Nos dirigeants semblent étrangement être les seuls citoyens de ce pays à ne pas être jugés selon un critère rationnel  visant à mesurer leur qualité de réussite. Un élève qui échoue sans arrêt est soit un fainéant soit un crétin, mais un homme politique qui échoue tout le temps ne serait victime que des circonstances? Un peu à l'image de notre pauvre président qui se cache derrière la crise pour justifier son dramatique bilan économique. Je me permets donc de juger nos dirigeants de la même manière  que l'on juge les mauvais élèves, car c'est bien de cela qu'il s'agit. On a passé le stade de l'erreur depuis longtemps, pour passer à celui de la débilité profonde. C'est probablement en Grèce d'ailleurs que le comble la stupidité atteint son paroxysme. Un président aux abois, qui fait appel au peuple pour contrer un accord qu'il a lui-même signé, pour ensuite se désister et montrer par inadvertance à tous ses citoyens, en tout cas à ceux qui ne s'en étaient pas encore rendu compte, que l'UE est effectivement une technocratie, voir une théocratie puisque c'est un dogme quasi religieux qui lui tient lien de politique. Si ce n'est pas de la stupidité, je ne sais pas ce que c'est. D'autant que dans le même temps tout le gratin européen se réjouit de ce retour à la « raison ». Montrant ainsi la solidarité des élites européennes contre la démocratie comme à l'époque de la Révolution française. Une époque où toutes les élites d'Europe voulaient mettre à bas les revendications populaires pour maintenir l'aristocratie en place.  

 

Pour en revenir à mon sujet du jour, il y a des liens extrêmement importants entre les quatre mots employés dans mon titre. J'ai longtemps parlé sur mon blog à une époque où j'étais plus loquace , de la nature de la monnaie et des liens entre l'inflation, la dette et l'évolution monétaire. Il me semble que vu l'état dramatique du niveau de réflexion de nos élites au vu des politiques qu'elles mènent, il est urgent de répéter quelques considérations pratiques sur ces sujets. Et la pauvre Grèce qui n'est que le premier domino européen à tomber, en sera l'application pratique la plus exemplaire.

 

1-La monnaie

 

La monnaie que nous utilisons tous les jours n'a en réalité pas de valeur intrinsèque. Les billets ne sont pas comestibles et en général ils n'ont guère de valeur propre. La monnaie n'est théoriquement qu'un moyen d'échange. L'argent n'aurait plus aucune valeur s'il n'y avait plus personne pour l'échanger, de la même manière que l'or n'aurait aucune valeur pour un naufragé sur une ile déserte. Ce qui compte en réalité dans une société c'est d'avoir les capacités PHYSIQUES de répondre aux besoins de sa population. La monnaie n'aura de la valeur que si l'échange entre les différentes parties de la société est possible. Il faut bien comprendre cela pour arriver ensuite à bien appréhender ce qu'est réellement la crise actuelle.



Cependant si la monnaie n'est théoriquement qu'un moyen d'échange elle est loin d'être le voile neutre que décrivent les théories libérales, et pour cause en transformant l'échange de marchandise en échange monétaire on perd une grande partie de la nature réelle de l'échange de marchandise. En effet, toutes les marchandises que nous utilisons, les biens, les services et même les individus sont soumis à la même loi du temps et de l'usure. Le travail ne s'accumule généralement pas et le temps finit par rendre inutilisables des objets que l'on a fabriqués. On peut ainsi dire que nous échangeons essentiellement des objets et des services qui sont instantanément créés. Instantané dans le sens où leur production n'est pas nécessairement le résultat d'un travail datant de plusieurs années. Même les biens immobiliers répondent à cette description puisque ces derniers doivent être entretenus sous peine de se dégrader relativement rapidement. Cette loi de dégradation temporelle qui touche tous les aspects de notre vie ne se retrouve pourtant pas dans la monnaie telle que nous la concevons depuis longtemps. Étrangement, la monnaie devrait être le seul bien à être insensible au temps et à son implacable puissance. Une bonne part des affres et des crises qui touchent l’économie proviennent de cette erreur de nature qui fait perdre le sens du temps à l'échange sous forme monétaire. Car nul ne saurait ignorer le temps qui passe, même si l'on peut faire semblant parfois d'oublier l'horloge jusqu'au moment où elle se rappelle à nous.



2-L'inflation

 

En oubliant la mesure du temps, la monnaie crée des distorsions dans l'échange marchand. Elle permet à certains de mettre de l'argent de côté en oubliant que ce retrait d'argent diminue en réalité l'échange instantané qui a lieu dans la société. L'épargne ainsi accumulée contracte la demande intérieure et réduit l'activité globale d'une nation dont la seule richesse réelle est instantanée, les producteurs du présent répondant à la demande des consommateurs du présent. C'est d'autant plus grave que certains tirent un revenu de leur épargne et ponctionnent donc un revenu sur une contraction de la demande qu'ils ont provoqué par le passé. On ne comprendra Keynes et son propos sur l'euthanasie des rentiers que si l'on comprend bien qu'en un sens l'épargne est profondément immorale . Même si elle est individuellement compréhensible dans l'organisation absurde qui nous sert actuellement de système économique.



L’inflation n'est au final que le remède extrême que la nature a trouvé pour répondre à l'incohérence fondamentale du système monétaire atemporel. En effet, l'inflation permet en quelque sorte de rééquilibrer la société et de réintroduire la notion de dégradation temporelle dans le système économique. En effet, l'inflation va faire perdre de la valeur à l'épargne et au capital, mais ce n'est que justice puisqu'en réalité dans le monde réel si ces richesses avaient été accumulées sous forme de biens réels elles se seraient dégradées avec le temps. De fait, l'inflation est la contrepartie naturelle d'un système monétaire atemporel. On a cru chasser le temps et vaincre la mort en accumulant des montagnes d'épargne et de rente, mais ils reviennent et frappent avec comme outil l'inflation. L'inflation est un mécanisme qui permet aux forces productives d'une nation de se défaire de l'emprise des rentiers, cependant ces derniers sont malins et ont compris depuis longtemps à quelle sauce les productifs voulaient dévorer leur épargne.



Depuis les années 70, les dirigeants ont multiplié la lutte contre la méchante inflation mère de tous les vices, pour les possédants. Ils ont donc créé des structures capables de casser, croyaient-ils indéfiniment, l'inflation. Un peu à l'image de ces vieilles personnes qui usent de la chirurgie esthétique ou de multiples produits en croyant éviter ainsi l'inévitable. Le premier outil fut la rupture du système monétaire ancien. On a donné au secteur privé le contrôle de la monnaie à travers les prêts à intérêt et on a empêché l'état d'emprunter à sa propre banque centrale. Manque de chance le premier effet de cette décision fut une explosion de la masse monétaire et de l'inflation. Les élites sont donc passées à l'étape deux , celle de la mondialisation. En maximisant la confrontation salariale avec des pays à faible revenue, les épargnants et les rentiers d'occident ont cru pouvoir vivre sans la menace de l'inflation. Et il faut dire que les bougres ont bien réussi pendant près de trente ans. L'explosion des bourses et de la finance dans les années 90 et 2000 représentant l'avènement d'une société de rentier et la fin des forces productives d'occidents. Cependant cette situation n'a été possible que parce que le monde entier n'était pas dans ce système. C'est bien parce qu'il y avait des capacités de production ailleurs que les rentiers occidentaux ont pu danser tout l'été. Car comme je l'ai dit au début de ce texte la monnaie n'a de valeur que s'il y a une production réelle de bien et une possibilité d'échange. Les sociétés changent les techniques change, la démographie change, les rapports de force sociaux changent, car tous sont soumis à l'écoulement du temps. Les changements dans les structures productives impliquent naturellement que le travail d’aujourd’hui n'est plus le même que celui d'hier et que le travail de demain ne sera pas le même qu'aujourd'hui.

 

Dans ce contexte vouloir maintenir coûte que coûte une épargne effectuée en d'autres temps n'a pas de sens. Encore une fois, l'échange est une mesure instantanée qui ne se stocke pas, il devrait en être de même pour la monnaie si nous voulions que celle-ci se comporte réellement comme un voile neutre. Pour représenter l'échange justement elle devrait en épouser les contraintes naturelles et donc être fondante comme le préconisait l'économiste hétérodoxe Silvio Gesell.Le problème c'est que la consommation seule des rentiers d'occident était insuffisante à faire fonctionner la machinerie industrielle du monde. On a donc endetté les nouveaux chômeurs d'occident et on leur a donné des emplois bidon en surnombre dans les secteurs non délocalisable essentiellement des services. Du point de vue des comptabilités nationales, cela se traduit évidemment par des déficits commerciaux.

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3-La dette



J'en viens maintenant à la question de la dette publique, car elle est directement le fruit des mécanismes précédents. La volonté de réduire au maximum l'inflation et la hausse des salaires pour maintenir la valeur de l'épargne et contrer ainsi les effets du temps ont conduit à créer de monstrueux déséquilibres dans l'économie réelle. Les pays anciennement développés se sont considérablement appauvris sur le plan des capacités de production réelle . Un appauvrissement qui se traduit par une dépendance excessive aux importations. Les déficits commerciaux créant des trous par lesquels fuit la masse monétaire induiraient normalement une dévaluation de la valeur des monnaies occidentales. Dévaluation qui rééquilibrerait les échanges. Mais là encore nos élites anti-inflationnistes ont veillé pour que les valeurs monétaires restent en suspension face à la réalité productive. Nos nations ont donc emprunté à l'extérieur pour maintenir leur valeur monétaire. C'est moins vrai pour les USA qui ont eux une monnaie universelle de réserve. La lutte contre les dévaluations est donc aussi une lutte contre une meilleure répartition des richesses et contre la réduction de la rente dans nos pays. Ce n'est pas pour le petit consommateur de banlieue que le capitaliste défend la monnaie forte, c'est pour sa propre rente. Le petit consommateur de banlieue lui vivrait bien mieux avec un chômage à 2% et une inflation à 4%. Même si à court terme, il peut ne pas bien voir où est son intérêt , tombant ainsi dans le piège de la propagande néolibérale.



Les dettes des nations sont donc en réalité le fruit de la lutte incessante contre l'inflation et contre l'usure du temps et les changements générationnels. Les riches d'occident ont voulu tromper la mort et le temps, ils n'ont fait que précipiter leurs peuples vers la misère et la pauvreté. Les Occidentaux devront nécessairement passer par une forte inflation ou par une purge quelconque des dettes et de l'épargne qui a été amassée ces trente dernières années. Nécessairement il va falloir redonner aux producteurs de richesses réelles toute leur place et laisser les salaires augmenter. Dans ce contexte la crise actuelle de l'euro est tout à fait parlante puisque l'Europe est en fait l'arme ultime des rentiers et de la finance pour empêcher l'inévitable de se produire. Le libre-échange, l'euro et la privatisation monétaire sont les trois armes de la rente contre la sphère productive. C'est en Grèce que la lutte est aujourd'hui la plus visible puisque l'on voit dans ce pays un appauvrissement considérable de la force productive du pays au nom des intérêts de la rente et de la finance qui ne se cachent même plus.



La dévaluation et la sortie de l'euro sont refusées, non pas à cause d'un rêve européen, car il n'y a pas de rêve européen les rentiers ne rêvent que d'argent. C’est uniquement pour éviter le changement dans la répartition de richesse du pays. En effet, la dévaluation en Grèce nuirait aux importateurs, à la finance et aux rentiers. Elle favoriserait les producteurs locaux et les salariés grecs. Ces derniers redeviendraient indispensables et compétitifs par rapport à l'extérieur. De fait, il faudrait augmenter les salaires et faire baisser les bénéfices et en conséquence faire baisser le niveau de revenu de la rente. C'est pour cette seule et unique raison que les élites en Europe se battent contre la fin de l'euro. L'euro n'a jamais été un rêve d'unité européenne, mais juste un outil pour lutter contre l'inéluctable usure du temps. C'est l'arme d'une génération qui ne voulait pas vieillir et passer le flambeau.

 

 

 

 

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 16:00

 drapeau europeIl s'agit d'une question un peu abrupte vue comme cela, mais la situation de déliquescence actuelle du continent ne peut que nous forcer à nous la poser. En effet, alors même que les résultats des multiples plans de rigueur commencent à se faire sentir sur le continent nos élites toujours aussi peu éclairées appuient sur l'accélérateur de la compression des dépenses publiques. Je l'ai expliqué à de multiples reprises sur ce blog, mais je le répète, ce genre de politique n'a de sens que si la nation qui la pratique est la seule à la faire. Et elle ne marchera que si par ailleurs on trouve de la croissance à l'extérieur pour que les exportations puissent prendre le relais de la croissance intérieure anémiée. Or il n'y a pas d'extérieur sur lequel les nations européennes puissent s'appuyer. La croissance aux USA ne redémarrera plus à cause de la contrainte du déficit extérieur. Et l'Asie quant à elle ne fait que tirer sa croissance par ses excédents, ce qui signifie qu'en aucun cas elle ne peut devenir le moteur de la croissance mondiale. Les autres zones économiques sont elles trop petites pour qu'elles puissent tirer le paquebot Europe de la langueur économique.

 

  À cette réalité basique s'ajoute le fait que l'industrie du continent est aujourd'hui en voie d'extinction grâce à la lubie du libre-échange et de l'euro monnaie surévaluée. Je rappelle au passage que même l'Allemagne connait des difficultés sur les marchés extérieurs à la zone euro. Elle a de gros déficits commerciaux avec la Chine, le Japon et certains pays d'Europe de l'Est qui sont ses premiers déficits. Ce qui signifie que l'euro est aussi surévalué pour l'Allemagne. La Zone euro est d'ailleurs globalement en déficit sur son commerce extérieur. Seulement certains pays comme l'Allemagne ou les Pays-Bas compensent ce déficit par des excédents avec leurs proches voisins qui ne peuvent se protéger par des dévaluations, des taxes ou des quotas.  Pour se convaincre de cette réalité des pays phares de l'excédent commercial en Europe il suffit de regarder ces données que vous pouvez retrouver sur le site des statistiques allemandes destatis.de.

 

 

exedents-allemands.png

Sur le site des statistiques allemandes, on trouve aussi les premiers déficits et excédents allemands qui sont assez parlant en eux-mêmes. On voit bien par exemple que les premiers excédents sont surtout des pays de la zone euro. Les USA malgré leur poids économique n'arrivent qu'en troisième position sur le plan des excédents allemands avec 20,5 milliards d'euros contre près de 29 pour la France et de 21 pour la GB. Il n'y a aucun pays asiatique dans la liste, on dit pourtant souvent que l'Allemagne contrairement à ses partenaires bénéficierait de la dynamique asiatique grâce à ses machines-outils. Cela n'est en tout cas pas visible sur la balance commerciale. Bien au contraire d'ailleurs comme on peut le voir sur le tableau suivant .

 

 

 deficits-allemands-copie-2.pngSur le graphique suivant, nous voyons ici les principaux déficits commerciaux de l'Allemagne avec en tête la Chine avec près de 23 milliards de déficits. Il y a tout de même des pays européens dans les décis, allemands, mais seule l'Irlande fait partie de la zone euro. La Hongrie et la république tchèque étant les usines de l'Allemagne au même titre que la Chine, il est normal que ce pays connaisse un déficit avec eux. Nous sommes donc très loin d'une Allemagne qui tirerait sa croissance des pays en voie de développement. Et c'est la même chose pour les autres pays excédentaires de la zone euro.

 

 

  Dans ces conditions, croire qu'une politique de contrition salariale et de compression de la demande intérieure pourra résoudre les problèmes d'endettement et de croissance relève une tare intellectuelle congénitale de la part de ceux qui nous servent d'élite. Nos dirigeants continuent pourtant à croire que leurs remèdes fonctionneront et ce n'est pas le changement de dirigeant en 2012 en France qui y changera quoi que ce soit . On voit d'ailleurs que la crise recommence à se faire sentir en Allemagne puisque la production manufacturière recommence à baisser, alors qu'elle n'avait pas encore atteint le niveau d'avant crise.

 production manufacturière

 Production manufacturière allemande

Les descendants spirituels de Laval et Hoover

 

En fait, la comparaison avec les dirigeants les plus stupides des années trente est tout à fait pertinente. Nous voyons sous nos yeux et en direct l'histoire se répéter, on peut tout à fait comparer Sarkosy et ses sbires à Pierre Laval ou à Edgar Hoover aux USA, même délires sur les grands équilibres et mêmes résultats en pratique. Les élites d'ailleurs ne parlent en général que des conséquences et non des causes des dettes. On ne parle par exemple absolument pas des déficits commerciaux qui sont parfaitement ignorés de la presse mainstream qui lui préfère des déficits publics. Pourtant la dette et les déficits publics viennent forcément de quelque part? Mais personne dans les médias en dehors de quelques personnalités n'ose dire sa provenance. On oublie qu'ils proviennent d'une part des aides monstrueuses accordées sans contre partie aux banques. Mais aussi et surtout du fait que les délocalisations et la destruction du tissu économique de ces trente dernières années ont contraint bon nombre de nos concitoyens et de nos entreprises à s'endetter pour continuer à vivre. La crise actuelle n'est pas un produit de la météo. C'est avant tout le résultat d'un pourrissement commencé dans les années 70 et qui a été caché par un amoncellement de dettes privées et publiques. Ignorer cet état de fait c'est passer à côté de l'essentiel et c'est surtout ne pas être en mesure de résoudre les problèmes de nos concitoyens. Une nation ne peut pas éternellement importer tout ce qu'elle consomme sans s'appauvrir. Le libre-échange ne nous a pas enrichis, mais appauvris. Importer un produit, alors qu'hier vous le fabriquiez vous même ne peut en aucun cas enrichir votre pays. C'est une chose que les libéraux n'ont toujours pas comprise malheureusement.

 

C'est à cette réalité qu'est confrontée aujourd'hui non seulement l'Europe, mais tout l'occident. Et c'est une réalité qui est niée par nos dirigeants qui cherchent n'importe quel prétexte pour continuer comme si rien n'avait changé et comme si l'occident était toujours le centre du monde sans aucun concurrent extérieur. Pourtant nombreuses sont les nations aujourd'hui à se jouer des règles établies par les Occidentaux. À commencer par la Chine qui ne joue le jeu du libre-échange que lorsqu'il l'avantage. L'agressivité commerciale de ce pays non seulement contre les nations développées, mais aussi contre d'autres pays en voie de développement devrait faire réagir n'importe quelle personne saine d'esprit. Le paradoxe actuel c'est que l'histoire de ce début de 21e siècle ressemble à celle de la fin du 19e, mais avec une inversion des protagonistes et de leurs comportements commerciaux et économiques. En effet à la fin du 19e c'est l'Europe et les USA qui commencent à pratiquer le protectionnisme essentiellement contre la GB et sa révolution industrielle qui lui a fait prendre une bonne longueur d'avance en matière de productivité du travail. Les pays d'Asie et d'Amérique du Sud à l'exception du Japon sont alors libre-échangistes. Cela conduira ces régions du monde à un sous-développement au 20e siècle. Et cela alors même que l'Amérique du Sud par exemple avait un niveau de vie équivalent, voire même supérieur à la plupart des pays d'Europe avant cette époque. Aujourd'hui, nous assistons à l'histoire inverse. L'Europe reste grande ouverte malgré son déclin industriel accéléré, il en va de même pour les USA. Ces deux régions préparent même psychologiquement leurs populations à vivre dans la grande misère en attendant le retour de la peste et du choléra. En Amérique du Sud par contre ou en Asie on fait du protectionnisme voir même du mercantilisme. Laurent Pinsolle vient d'ailleurs de rappeler dans son dernier texte que l'Argentine protectionniste va plutôt bien et qu'elle se passe très bien de l'emprunt sur les marchés internationaux. La présidente sortante vient d'ailleurs d'être brillamment réélue dès le premier tour. Preuve que le protectionnisme ne rend pas si impopulaire surtout s'il améliore le sort de la majorité de la population. De toute façon, elle n'en a plus besoin puisqu'elle n'a plus de déficit commercial extérieur à couvrir et que sa monnaie est adaptée à son tissu économique. Je rappelle au passage que j'avais parlé plus précisément du cas argentin dans ce texte. On peut espérer qu'un jour la France ou d'autres nations d'Europe puissent suivre le même chemin si par hasard nos pays revenaient à la raison.

 

 

Une Europe en déclin accéléré

 

 

De fait, nous assistons à une inversion des places dans l'histoire et malheureusement pour les Européens on sait très bien historiquement où finissent les nations qui ne prêtent pas attention à leur tissu industriel. Dans une vingtaine d'années, l'Europe fera probablement partie du tiers-monde si elle n'inverse pas immédiatement la tendance. On voit d'ailleurs déjà chez les jeunes européens des comportements économiques des populations de pays pauvres. Cela va de la restriction volontaire des soins, y compris des soins dentaires, à la réduction à minima des dépenses nutritionnelles. Les jeunes européens ont d'ailleurs pour la plupart déjà baissé les bras et ne s'attendent probablement pas à une quelconque amélioration de leur sort ajoutant ainsi à leurs difficultés, le pessimisme, voire le désespoir pour les plus mal lotis. D'ores et déjà les jeunes européens partent de leurs pays sinistrés économiquement pour fuir la misère. On sait qu'aujourd'hui c'est par l'Espagne et le Portugal que commence la nouvelle grande migration des peuples d'Europe. C'est un phénomène d'autant plus grave qu'il s'agit de pays en fort déclin démographique et vieillissant. Pour que la jeunesse déjà peu nombreuse décide de partir, il faut vraiment que la situation soit intenable. Pour l'instant, la jeunesse de ces pays se réfugie dans d'autres nations d'Europe qui pour l'instant semble moins touchée par la crise. Mais comme vous le savez vous qui lisez ce blog depuis longtemps, la crise touchera tous les pays d'Europe y compris l'Allemagne. Avec l'euro et l'UE pour la première fois, le destin de l'Europe est uniforme, nous coulerons tous ensemble.



Les évènements qui suivront sont assez simples à imaginer en fait. L'étape ultime de la crise sera l'effondrement de la demande française. Car la France est en fait le dernier pilier de la demande en Europe. C'est notamment le pilier qui maintient un semblant de croissance chez nos amis outre-Rhin . Comme je l'avais dit précédemment, c'est donc l'effondrement de la demande intérieure français sous les coups des politiques de compression économique que l'euro devrait être mis en danger. Du moins c'est ce qu'il faut espérer. En effet lorsque l'Allemagne verra ses excédents avec la France fondre, l'intérêt pour elle de se maintenir dans la zone euro aura disparu. La panne économique en Allemagne et la dégradation de la balance des paiements faute de demande dans les pays occidentaux pour compenser les déficits croissants avec l'Asie et l'Europe de l'est, devraient convaincre les Allemands les plus récalcitrants à mettre fin à la zone euro. Il s'agit pour moi de la seule hypothèse crédible qui puisse nous conduire à la fin de la zone euro. Car on ne peut pas compter sur les élites françaises ou autres pour aller dans ce sens, ni sur une révolte des peuples qui semblent tout simplement résignés à leur sort. C'est d'ailleurs probablement un gouvernement socialiste qui fera la grande purge libérale en France et qui mettra ainsi en péril la maigre croissance du continent. On peut aussi imaginer un maintien de la zone et une vaste émigration des jeunes européens comme cela se passe à l'heure actuelle en Espagne et en Grèce. À dire vrai plus le temps passe et plus cette hypothèse me semble crédible. On pourrait assister dans les années qui viennent à une vaste fuite de population de l'Europe vers d'autres régions du monde moins stupidement gérées. Le déclin démographique déjà palpable du continent s'accélèrerait alors subitement pour faire en quelques décennies du continent une espèce de no man's land peuplé de vieux dans des territoires en déclin. Certaines régions d'Allemagne de l'Est préfigurent peut-être déjà ce que sera l'Europe du 21e siècle. L'Allemagne de l'Est avait une accumulation de phénomène du même genre déclin de la natalité, plus une fuite migratoire au début des années 90, avec un déclin économique. Le résultat pour l'Allemagne de l'Est fut une perte de près de trois millions d'habitants.



Nous vivons en tout cas une époque charnière pour le continent, mais l'on sent intuitivement que les bonnes décisions ne seront pas prises. On peut mettre cela sur le dos du vieillissement, de la corruption, ou de la stupidité, le fait est que je ne vois pas vraiment ce qui pourrait inverser la tendance. On peut aussi avoir des surprises aux prochaines élections en France, mais elles ne seront pas forcément très bonnes. L'avenir de l'Europe est donc plus que jamais dans les mains de l'Allemagne, il faut espérer que pour une fois l'égoïsme national allemand serve le continent de façon positive en mettant fin à l'euro. Cela ne mettrait pas fin à tous nos problèmes, mais obligerait les élites à revoir leurs copies. En attendant, nos dirigeants vont à nouveau prêter de l'argent en pure perte pour sauver des banques pour éviter d'avoir à traiter les vrais problèmes de nos nations.

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9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 20:50

  Nicolas Dupont Aignan est passé hier soir à la télévision sur France2. Je n'ai pas regardé la télévision, mais j'ai pu voir l'émission grâce à sa diffusion sur le net. Comme d'habitude, la télévision grand public reste un format d'une médiocrité effarante dès qu'il s'agit de faire fonctionner la logique et la raison au détriment des formules courtes et des idées reçues. NDA ne s'est pas trop mal débrouillé. Et il faut dire qu'il avait fort à faire face à l'avalanche d'idées reçues et fausses que la pauvre Pulvar a accumulé. Entre l'émission monétaire qui serait naturellement inflationniste et le protectionnisme qui ferait grimper l'inflation, on a eu droit à tous les poncifs du genre. Rappelons au passage que Audrey Pulvar est mariée Arnaud Montebourg ce qui est quand même assez louche vis-à-vis de la déontologie journalistique. Il est évident par exemple que cet état de fait a eu une légère influence sur son comportement vis-à-vis du président de Debout La République qui défend une thématique proche sur le plan économique de celle de son époux. Même si elle était totalement impartiale, le doute ne pourra que subsister. Mais il n'y a pas eu que Pulvar à édicter des poncifs et des idées reçues, je vais essayer succinctement de répondre à ces réflexes pavloviens et à ces idées usées jusqu'à la corde.

 

 

 

 

 Quelques explications succinctes en réponse:

 

1- La planche à billets = inflation

 

  C'est faux dans l'absolu, mais vrai suivant les conditions d'application. Dans le domaine monétaire comme dans beaucoup d'autres, ce n'est pas tant l'acte, la nature de l'action ou celle du produit qui compte que sa dose. L'économie d'une nation a besoin de monnaie, et la monnaie est le sang de l'économie qu'il y en ait trop et c'est l'hypertension, l'hémorragie et la rupture d'anévrisme. Mais qu'il en manque et c'est l'arrêt cardiaque, la fatigue et la mort. On ne dit pas du sang qu'il est mauvais par nature, tout dépend de ses proportions et ses composants. Il en va de même pour le corps économique et son sang, la monnaie. Quand le corps économique grandit que la population augmente que l'activité physique augmente ainsi que l'échange, il faut que la masse monétaire augmente avec le reste de l'économie sous peine de la freiner. Si la masse monétaire était constante eu égard à l'évolution des gains de productivité et de l'augmentation de la population nous nous retrouverions comme nos ancêtres pendant la crise de 1929 avec une panne artificielle créée par  le manque monétaire. Ce genre de crise s'appelle la déflation, elle prend la forme d'un chômage de masse et d'une surproduction systématique.

 

À l'inverse l'augmentation excessive de la masse monétaire peut effectivement produire de l'inflation, l'inverse de la déflation. En réalité à l'origine les termes inflation et déflation parlaient essentiellement de l'évolution de la masse monétaire. Ce sont les théories monétaristes qui ont lié automatiquement la déflation et l'inflation à l'évolution des prix. Car en réalité l'inflation, c'est-à-dire l'augmentation de la masse monétaire, ne produit de l'inflation que s'il y a des tensions sur le marché de l'emploi et si le système de production est aux limites de ses possibilités en matière de fabrication. Une telle situation n'existe qu'en période de plein emploi ou de saturation de l'appareil productif. Autant le dire tout de suite, l'occident et le monde sont très éloignés d'une telle situation, la vraie menace c'est bien plus la déflation et les déséquilibres commerciaux que l'inflation qui est aujourd'hui une chimère. Certes, il y a des tensions sur l'énergie et les matières premières, mais le moteur de cette inflation est en grande partie le fruit de l'économie chinoise. Une économie dont on sait par ailleurs qu'elle est en situation de surproduction et qu'elle n'évitera pas un brutal réajustement. Un réajustement qui sera le fruit du rééquilibrage commercial entre elle et ses clients au bord du gouffre. J'ajouterai que madame Pulvar s'est amusée à dire que les USA étaient dans une situation catastrophique alors qu'ils pratiquent la politique de planche à billets, en visant ici à discréditer une telle politique. D'une part, il n'est pas vrai que les USA pratiquent la planche à billets, ils font surtout une planche à titre de dette, ce n'est pas la même chose. Les dettes laissent des traces comptable et des intérêts à payer. Ensuite que ce n'est pas l'émission monétaire qui est en cause, mais le fait que les plans de relance sont entièrement absorbés par la Chine et les pays excédentaires. On voit très nettement en étudiant les statistiques économiques que les plans de relance américains ont surtout relancé la Chine , l'Allemagne ou encore la Corée du Sud. De ce fait, oui les plans de relance fonctionnent. Encore faudrait-il que ce soit les producteurs locaux qui en bénéficient et non les importateurs. Enfin comme je l'ai dit la masse monétaire augmente obligatoirement tant que les besoins de la société augmentent. On comprendra donc qu'un système où l'essentielle de la hausse de la masse monétaire se fait par des prêts à intérêt ne peut qu'exploser un jour où l'autre. C'est d'ailleurs un système hautement inflationniste puisque nécessitant une croissance de plus en plus rapide de la masse monétaire pour effectuer le remboursement des intérêts cumulés.

 

2- L'état doit emprunter aux banques privées parce que c'est comme çà!  

 

  Toujours dans le même registre nous avons droit à la logique tautologique qui veut que l’émission monétaire soit l'affaire des banques privées. Mais quelle drôle d'idée que celle qui consiste à laisser à des acteurs privés le soin de battre monnaie ! Parce que bien évidemment c'est de cela qu'il s'agit à travers leur possibilité d'émettre bien plus de crédit qu'ils n'ont de dépôts en réserve, le fameux effet de levier. À travers ce mécanisme et par le fait que l'état a décidé dans les années 70 d'emprunter sur les marchés financiers, nous avons laissé au secteur privé la garde de l'émission monétaire. Une émission monétaire qui est donc devenue décentralisée avec tout ce que cela comporte comme inconvénient. En effet sans pour autant faire l'apologie des Jacobins, il faut bien comprendre qu'une gestion décentralisée et en plus privatisée a beaucoup d'inconvénients. Tout d'abord, aucun acteur privé n'a conscience de l'évolution d'ensemble de la masse monétaire. Dans un système décentralisé, chacun voit midi à sa porte. À cela s'ajoute l'intérêt privé qui peut produire, notamment dans le secteur bancaire, des effets de mouvement de foule, appelés aussi mouvement moutonnier. Cela s'explique en fait très simplement. Une banque qui voit se former une bulle spéculative est naturellement forcée à s'y impliquer. Non parce qu'elle est irrationnelle, bien au contraire, parce que c'est son intérêt à court terme. On n’a pas compris la critique du marché de Keynes si l'on ne voit pas que c'est bien parce que les acteurs du marché sont rationnels d'un point de vue égoïste et individuel qu'ils sont collectivement irrationnels. Une banque qui n'aurait pas suivi le mouvement de la spéculation dans les années 2000 se serait fait racheter par une autre. Dans les mouvements spéculatifs, il est rationnel d'être irrationnel et de suivre la foule. Comme le disait Keynes il vaut mieux avoir tort avec la foule que raison contre elle, c'est la véritable nature du marché complètement dérégulé. Et c'est bien pour cela, qu'il est complètement idiot de donner les clefs, de la finance et du développement d'un pays à une telle forme d'organisation, ou plutôt de désorganisation économique.

 

Les premiers effets de la décentralisation/privatisation de la monnaie dans les années 70 ne se sont pas fait attendre puisque l'inflation n'a pas décéléré, mais a au contraire accéléré après la mise en place de ce nouveau système. Ce n'est qu'une fois le chômage de masse installé et la croissance cassée que l'inflation est retombée. Du reste entre 1945 et 1973 l'inflation était certes plus forte qu'aujourd'hui, mais la hausse du niveau de vie et la croissance étaient elles sans commune mesure avec la nôtre. Le pays n'avait pas un chômage à deux chiffres et les gains de productivité étaient largement plus forts. À titre personnel je pense qu'il vaut mieux trop d'inflation que pas assez, l'expérience montre que les pays à très faible inflation finissent en général très mal, il n'y a aucune raison pour que l'Europe actuelle échappe à la règle. L'inflation, si les salaires sont indexés dessus, est d'ailleurs un bon moyen pour rééquilibrer les richesses dans le pays, et de favoriser le travail au détriment de la rente. L'inflation obligera d'ailleurs tous les petits « paysans » français qui cherchent à être enterrés avec leur magot de consommer une plus grande partie de leur revenue et de dégager ainsi de l'activité pour permettre un retour au plein emploi. Bien sûr avant cela il faudra régler la question de l'euro et du libre-échange. Mais il faut bien se mettre dans la tête qu'une inflation à 3 ou 4% ce n'est pas un drame, bien au contraire.

 

3- La France est trop petite

 

Enfin, terminons par le sempiternel argument sur la faible taille de la France. C'est vraiment l'argument le plus pitoyable qui puisse exister et le plus impérialiste aussi. En effet pourquoi la France aujourd'hui serait-elle plus petite que la France d'hier? Je rappelle par exemple qu'à l'époque de Napoléon la Chine c'était un humain sur trois... En fait, la Chine qui fait si peur aujourd'hui n'a pas cessé de perdre du poids à l'échelle mondiale du point de vue des proportions démographiques. Or est-ce qu'en 1800 les Français s'inquiétaient de leur trop faible taille démographique? Et les pauvres coréens qui ne sont que 49 millions et qui sont coincés entre des fous au nord, le géant japonais à l'est et l'empire du milieu, que devraient-ils faire. Rejoindre l'UE? Non, ils ont leur propre monnaie, leur propre politique et ils se débrouillent très bien comme cela. Alors évidemment il est certain que la Corée du Sud n'ira pas dicter sa loi à la Chine ou au Japon et alors? Est-ce que l'on vit si mal dans un petit pays? Demandez donc aux Suisses. Ce que sous-entend cette argumentation et qui n'est jamais dit, c'est que la France est trop petite pour dominer le monde.

 

Évidemment, on comprend pourquoi les gens de gauche évitent de finir leur raisonnement sur la taille. C'est le mauvais côté de l'universalisme, l'impérialisme. Ils ne veulent pas être gros pour être indépendant, cela n'a aucun sens puisque des pays comme la Suède ou Singapour sont parfaitement indépendants sans être des géants. D'autres nations sont d'ailleurs des géants tout en étant fortement dépendantes à l'image des USA. La taille n'a jamais été un gage d'indépendance, l'indépendance provenant surtout de votre capacité à produire seul ce dont vous avez besoin. Si certaines élites françaises rêvent de grandeur, c'est uniquement pour remplir l'un des plus mauvais côtés de l'égalitarisme français celui qui consiste à vouloir imposer aux autres notre propre conception de la civilisation. Ce fantasme de la taille c'est vieux comme le colonialisme français. Au 19e siècle aussi la France était trop petite face à la Grande-Bretagne et son empire. Alors nous nous sommes lancés dans la construction de cet extravagant empire colonial dont nous n’avons pas encore fini de voir les effets dramatiques à long terme. Mais cette expérience n'a, semble-t-il, pas servi de leçon à notre élite qui rêve toujours de la France en plus grande. Cette fois à l'échelle de l'Europe quitte encore une fois à sacrifier l'intérêt de son propre peuple. On constate qui plus est que plus l'Europe est unie et moins elle pèse à l'internationale. Puisque cette unification contre nature affaiblit considérablement le continent sur le plan économique comme nous l'avons vu à de multiples reprises. Une Europe de petites nations en très bonne santé pèsera toujours plus qu'une Europe unie, mais minée par le chômage et le déclin démographique et industriel. De toute façon, il est certains que l'utopie européenne finira comme les autres grands délires mégalos de la grande Nation.

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5 octobre 2011 3 05 /10 /octobre /2011 21:25

  C'est le journal les Échos qui nous l'apprend, pour la première fois la totalité des commerces de détail ont vu leurs ventes reculer cet été. Une telle synchronisation est une nouvelle historique. Car jamais les services de vente n'avaient enregistré un recul simultané de toutes leurs activités. D'habitude même pendant les crises graves, il y avait toujours quelques secteurs pour résister. Mais là rien n’y fait. On avait vu il y a peu l'effondrement des ventes dans l'informatique en Europe, dans un secteur aussi dynamique et innovant c'était déjà un symbole. Mais ces chiffres-là confirment la récession qui commence et qui sera bien plus brutale que celle qui l'a précédé. Et cette fois les politiques sont directement responsables, car ils n'ont fait que multiplier les erreurs et aggraver une situation en répétant inlassablement les mêmes politiques inefficaces. Bien sûr, cet article des échos journal d'obédience libéral ne s'est pas risqué à sortir des cadres de pensés habituelles, mettant sur le dos de la psychologie des masses cette baisse. Celle-ci n'étant dû qu'à une petite déprime collective ou à une paranoïa vis-à-vis de l'avenir. Il ne serait pas venu à l'idée du journal de voir dans ces chiffres le révélateur de la gravité de la situation sur l'emploi les salaires et les perspectives d'avenir. Sans oublier le prix des logements qui reste à des niveaux délirants et qui permet aux rentiers de ponctionner des revenus astronomiques sur le dos de la société productive. Une ponction qui, bien évidemment, pèse aussi lourdement sur la consommation des ménages. Et qui comme le dit Jean-Michel Quatrepoint nuit aussi énormément à la compétitivité française. En effet, le prix du logement augmente mécaniquement le coût du travail, l'absence de bulle immobilière en Allemagne pour des raisons démographiques évidentes expliquant en partie l'acceptation plus facile de la modération salariale de ces dix dernières années. En France la simple hausse des prix du logement empêche la modération salariale et pousse à une hausse des salaires, même si celle-ci n’a pas suivi la hausse du logement. On rappellera également que des prix trop élevés réduisent fortement la mobilité salariale.

 

 Chutede laconsommationMais passons. Tout ceci n'intéresse pas les Échos qui risquerait de mettre en doute les croyances libérales bien établies du journal si l'analyse était portée trop loin. Le fait est que la crise est bien là. Les chiffres du commerce de détail sont bien plus importants que ceux de la bourse. Car comme tout le monde le sait maintenant la bourse ne représente qu'elle-même tant les valeurs sont déconnectées de la réalité économique du pays. La bourse de Paris a d'ailleurs connu sa hausse ces trente dernières années alors même que le pays détruisait tout sa substance économique réelle. Pendant les trente glorieuses, la bourse ne pesait rien et faisait du surplace, ce fut pourtant la période la plus prospère de l'histoire de France. Bref, ne regardons pas trop la bourse, les chiffres y ont peu d'importance à part bien évidemment ceux des taux de change. Mais la France n'est pas la seule à voir ses ventes de détails chuter comme vous pouvez le voir sur le graphique suivant provenant du site Gecodia. Le fait est que comme pour la France toute l'Europe connait une baisse de la demande intérieure. Il n'est donc pas étonnant de voir que la production en Allemagne commencer à plonger comme nous l'avions vu dans un texte récent.

Europe-copie-1.jpg

 

Il n'y a plus de consommateur en dernier ressort

 

Le fait est que la contradiction fondamentale de l'économie mondiale est arrivée à maturité. Maintenant que tout le monde cherche à rééquilibrer la balance des paiements par la contraction de la demande intérieure, plus personne ne consomme les produits fabriqués dans les deux usines du monde l'Allemagne et la Chine. S'ajoute à cela les absurdités manifestes en Europe puisque maintenant même l'Allemagne appelle à recapitaliser les banques toujours sans contre-partie, histoire d'endetter toujours plus les états. On constatera que l'Allemagne veut bien s'endetter pour les acteurs privés alors qu'elle prône la vertu dès qu'il faut s'endetter pour d'autres nations. C'est une étrange conception de la vertu en vérité. On attend toujours que les états prennent enfin leurs responsabilités et qu'ils nationalisent purement et simplement le système bancaire qui a bien montré son incapacité ces dernières années. Si la vertu comptable consiste à dilapider l'argent public sans rien obtenir en retour c'est que le monde ne tourne plus tout à fait rond. De toute façon, la seule nationalisation des banques ne suffira pas à redresser la barre, il faut reconstruire le système économique mondial.

 

 Cette note récente du site geocodia montre que le ralentissement est mondial pas seulement français ou même européen. Aux USA les plans de relances ne fonctionnent plus comme le montre ce graphique ci-dessous le multiplicateur keynésien c'est amoindri avec l'ouverture aux échanges. Plus les USA importent et moins les plan de relance ont d'effet sur l'économie réelle. C'est normale puisque le supplémente de demande s'addresse de plus en plus à des sites de production situés à l'étranger et que donc ces relances produisent surtout des déficits commerciaux. Encore une fois tant que les USA et les pays en déficit pouvait s'endetter le système pouvait faire semblant de marcher, ce n'est plus le cas aujourd'hui.

creditUSA.jpg

transmission.jpg

Ci-dessus le graphique représentant la transmission de l'impulsion monétaire, cependant si l'on se fit à WIKIPEDIA il n'y a pas de M0:

M1 correspond aux billets, pièces et dépôts à vue (515 000 000 000 de billets et de pièces en 2005 dans la zone euro).
M2 correspond à M1 plus les dépôts à termes inférieurs ou égaux à deux ans et les dépôts assortis d'un préavis de remboursement inférieur ou égal à trois mois (comme, par exemple, pour la France, le livret jeune ou le CODEVI, les livrets A et bleu, le compte d'épargne logement, le livret d'épargne populaire...).
M3 correspond à M2 plus les instruments négociables sur le marché monétaire émis par les institutions financières monétaires (IFM), et qui représentent des avoirs dont le degré de liquidité est élevé avec peu de risque de perte de capital en cas de liquidation (ex : OPCVM monétaire, certificat de dépôt, créance inférieure ou égale à deux ans).
M4 correspond à M3 plus les Bons du Trésor, les billets de trésorerie et les bons à moyen terme émis par les sociétés non financières.

 

On supposera en toute logique que M0g est en fait M1, M1g est M2, et M2g est M3. Donc ce graphique représente l'évolution de l'effet des injections monétaires sur le volume de crédit en circulation dans l'économie. C'est une mesure indirecte du multiplicateur d'investissement keynésien. Si le rapport entre M2/M1 et M3/M1 passe à 1 voir moins cela signifie que l'augmentation de la masse monétaire n'a plus d'effet multiplicatif. Donc qu'il y a de fortes chances pour que l'endettement supplémentaire ne puisse être remboursé grâce à une augmentation de PIB supplémentaire qui permettrait à terme du désendettement. Je rappellerai ici qu'à la base Keynes n'a jamais dit "endettez-vous, endettez-vous!". Dans la théorie keynésienne, l'endettement avait pour but de réactiver une économie en sous-production par une demande supplémentaire. Une fois, un cercle vertueux réenclenché le PIB se met à croire plus vite que l'endettement et l'état peut sans hausse d'impôt diminuer l'endettement grâce à des recettes supplémentaires. Mais il faut rappeler que cette théorie ne fonctionne qu'en circuit FERME! Ce que nos élites ont complètement oublié. Il faut, pour que cela marche, que l'essentielle de la demande se fasse sur des produits fabriqués dans le pays faisant la relance, sinon c'est un autre pays qui en profite. Une politique de relance doit donc forcément être accompagnée de mesure de protection ou de dévaluation voir les deux si possible pour éviter les fuites. Sur le graphique précédent, on voit les effets d'une politique keynésienne sans protectionnisme et sans dévaluation. Et cela se traduit par des déficits de la balance des paiements toujours croissants.

 

Et la France alors?

 

  C'est exactement la même situation qu'aux USA avec un léger retard comme d'habitude. C'est d'autant plus grave en France que le pays a la même monnaie que son principal ennemi commercial à savoir l'Allemagne. Je parle ici d'ennemi commercial, car on ne saurait parler d'échange quand le déséquilibre est aussi important. L'Allemagne est notre premier déficit bilatéral devant la Chine avec un beau 27milliards d'euros de déficit l'année dernière. À ce stade on ne parle plus d'échange. Toute politique de relance en France est donc condamnée à échouer. Mais plutôt que de décider de mettre fin à cette situation par des mesures de protection, comme nos amis d'Amérique du Sud, nous préférerons réduire notre demande intérieure. Il faut dès lors ne pas s'étonner de voir les ventes de détail s'effondrer, il n'y a pas de magie. On ne voit pas d'où pourrait venir la demande si les salaires baissent, le chômage augmente, et que le crédit stagne à cause d'un endettement excessif des ménages. Ajoutons à cela le fait qu'effectivement l'inquiétude pousse les Français à épargner et l'on se retrouve avec la fameuse déflation à la japonaise. Cependant, le Japon qui connait une déflation depuis vingt ans pouvait compter sur son commerce extérieur pour compenser, ce qui lui a évité une dépression. Aujourd'hui, tout l'occident devient japonais et il n'y a pas d'autre consommateur de masse pouvant tirer ses exportations, on va donc bien vers une grosse dépression.

 

Le plus drôle c'est que les élites françaises semblent vouloir appuyer sur l'accélérateur pour produire une crise encore plus grave. Des délires sur la retraite à 67 ans,des chiffres identiques à l'Allemagne alors que les Français n'ont pas du tout le même problème démographique, aux fous comme Alain Juppé, le plus nul d'entre nous, qui prône un fédéralisme européen. Alors que la seule chose qui unit les Européens entre eux c'est la stupidité économique de leurs élites. Mais il est vrai que Juppé est un grand spécialiste de l'aggravation de crise, lui qui a considérablement aggravé la dette française en augmentant la TVA et en cassant la maigre croissance du pays en 95. Que voulez-vous? Il fallait bien faire le Franc fort pour pouvoir faire la monnaie unique qui devait ensuite tous nous sauver et réduire le chômage à zéro... J'ose espérer que les Français ont enfin compris que ce n'est pas en sacrifiant les plus pauvres et en réduisant sans arrêt le niveau de vie de la population pour avoir des excédents que l'on « sauve » une économie. Trente ans de sortie du tunnel à la Raymond Barre les auront peut-être enfin vaccinés contre ce restant de pseudovertu chrétienne. En attendant que les Français jugent enfin correctement leurs élites en nettoyant au karcher électoral cette bande d'attardés pourtant diplômés, on va pouvoir rire en voyant l'accélération de la crise de l'euro. Nos cousins italiens viennent en effet de voir leur note dégradée par Moody's ( le LEAP va encore y voir un complot anglo-saxon, associé aux méchants souverainistes infiltrés par les Chinois du FBI). Le prochain pays de la zone euro à voir sa note dégrader va donc surement être la France. Je suis sûr que nos brillantes élites trouveront ici l'occasion d'encore une fois appeler à la « vertu » des Français, eux qui en font tellement preuve lorsqu'il s'agit d'arroser les entreprises des copains d'école avec de l'argent public.

 
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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 12:08

Et bien voilà, même le journal la Tribune commence enfin à comprendre la quadrature du cercle construite par le libre-échange international. Un article sur l'évolution de l'économie chinoise parle même de choc extérieur. Je parlerai plutôt de retour à l'envoyeur. Car la croissance chinoise, fruit des exportations industrielles et de l'excédent commercial, ne pouvait durer que tant que les Occidentaux pouvaient croitre à crédit. Le fait est que même les USA sont arrivés au terme de cette logique macroéconomique. Pour la pauvre Chine, les déboires ne font que commencer puisqu'elle pourrait rapidement se retrouver avec une montagne de papier ne valant strictement rien. En effet les états occidentaux et notamment les USA ne pourront en aucun cas rembourser les dettes contractées. En fait, le modèle exportateur que la Chine ou l'Allemagne pratiquent est d'une bêtise sans nom puisque, pour résumer, il consiste à exporter des biens de production tangibles contre des promesses de remboursement. Ces pays, au lieu de profiter de la hausse de leur productivité pour en faire bénéficier leur population en augmentant les salaires en proportion, ne font qu'accumuler des déséquilibres pour obtenir des montagnes de papier qui ne vaudront bientôt plus rien.  Car la purge est inéluctable, tant que les pays déficitaires n'auront pas retrouvé un semblant de base industrielle et de croissance réelle, ils seront totalement incapables de rembourser la fameuse dette. Et ils seront tout aussi incapables de continuer à engraisser les pays excédentaires.

 

ExcedentChinois.png

 

 

  C'est d'autant plus vrai que l'épargne chinoise reste à des niveaux complètement surréalistes, tout comme l'investissement. Le pays est une énorme bulle économique qui produit largement plus qu'il ne consomme. Tôt ou tard la Chine devra traverser une phase de crise de surconsommation comme l'a connu le monde occidental en 1929. C'est l'effondrement de la demande occidentale qui devrait produire cette crise. Une crise qui sera aggravée d'une part par la nature même de la production chinoise qui est spécialisée dans le remplissage des besoins occidentaux. Cette situation devrait créer, comme je l'avais analysé il y a quelques temps dans ce texte, une distorsion inflationniste avec les éventuelles politiques de relance de la demande intérieure. En effet, si théoriquement pour pallier à l'absence de demande extérieure il suffit de créer une demande intérieure supplémentaire, en augmentant les salaires par exemple. Il ne faut pas oublier pour autant que les produits d'exportation ne sont pas forcément les mêmes que ceux qui seront demandés par le surplus de consommation produite par la hausse de la demande locale. C'est d'ailleurs extrêmement vrai pour la Chine dont le niveau de vie moyen reste très bas, alors qu'elle produit beaucoup de biens de consommation hors d'atteinte du pouvoir d'achat local. La grande distorsion introduite par la mondialisation néolibérale et qui voit des ouvriers fabriquer des objets dont ils ne pourront jamais jouir, atteint en Chine ses conséquences maximales.

 

Le deuxième point sur lequel risque de se briser la croissance chinoise est bien évidemment celui de l'énergie. C'est d'autant plus vrai que la Chine n'est pas vraiment un parangon de vertu écologique, c'est le moins que l'on puisse dire. Et ce même si le pays s'amuse à multiplier les champs d'éolienne.  Il n'y a plus guère de doute sur la pénurie qui arrive. Il y a même un article récent du Financial Times qui parle du fait qu'il nous faudrait quatre Arabie Saoudite d'ici dix ans pour répondre à la croissance de la demande mondiale en pétrole. Autant le dire tout de suite c'est impossible. Je ne ferai pas ici un numéro de prédicateur de fin du monde comme certains aiment le faire, tout en donnant des leçons de morale. Je ne crois pas du tout à la fin du progrès technique ou à l'impossibilité qu'il y aurait à résoudre le problème de la production énergétique. Il est cependant dommage que les Chinois, qui sont un peuple ancien, se soient lancés dans l'imitation totale d'un modèle de consommation énergétique et d'organisation dont on savait depuis longtemps qu'il n'avait pas d'avenir. C'est d'autant plus grave que la Chine a imité le pays occidental le plus gaspilleur, les USA. Il suffit de regarder la façon dont ce pays modernise ses villes pour voir dans quel dilemme elle va rapidement se retrouver.

 

Pour éviter la double panne, il faut un sursaut intellectuel

 

    Le monde issu de la mondialisation néolibérale se dirige donc vers deux pannes simultanées, la première est structurelle. Elle est le fruit de la nature même de la mondialisation et des contradictions qu'elle produit entre pays excédentaires et pays déficitaires. La crise produite par les déséquilibres résultants du laissez-faire commercial n'a pu être caché que par des dettes de plus en plus importantes dans les secteurs privés ou publics. Ces dettes ont fini par produire la fameuse crise de la dette en Europe et aux USA.  La deuxième panne est celle du modèle de production énergétique. On ne peut pas durablement utiliser comme source d'énergie une matière première en voie d'épuisement rapide, c'est d'autant plus vrai que le pétrole entre aussi dans la composition de nombreux produits qui auront du mal à être fabriqué sans lui. L'humanité fait donc face à deux problèmes majeurs qui auraient très facilement pu être évités sur une longue période historique, mais qui à cause de leur simultanéité et du faible laps de temps qu'il nous reste risquent de provoquer de véritables catastrophes.



Mais soyons honnêtes, ces deux crises ont tout de même une origine commune. C’est l'absence totale de prévision et l'aveuglement des élites. Ici et contrairement à beaucoup d'analystes, je mettrais les élites chinoises et allemandes dans le même sac que les autres. L'Allemagne et la Chine ne sont pas meilleures ou mieux gérées, comme les autres elles se sont laissées aller, en apparence elles ont bénéficié du système de la mondialisation, mais c'est une apparence trompeuse. Ces deux pays seront les premiers à souffrir d'un effondrement de la demande mondiale. On le voit d'ailleurs déjà très nettement en Allemagne où la croissance flanche déjà à cause des multiples plans de rigueur qui traversent ses principaux clients. D'ailleurs, les conseils donnés par les dirigeants allemands et chinois montrent que ces élites n'ont rien compris ou font semblant de ne pas comprendre la contradiction qu'il y a à réclamer des gestions plus saines dans les pays endetter, tout en faisant l'éloge des excédents commerciaux. Ce sont justement ces déséquilibres qui sont au coeur de la prospérité momentanée de l'Allemagne et de la Chine. Voir les deux principales nations responsables des déséquilibres mondiaux donner des leçons de bonne gestion à leurs victimes à quelque chose de passablement malsain.



Bien évidemment on peut croire quelque part que l'Allemagne notamment semble vouloir mettre un frein à un système fou. Comme le notait mon collègue Laurent Pinsolle, c'est l'Allemagne qui bloque sur la mise en place d'un système de solidarité sur la dette en Europe. Sauf que ce n'est malheureusement pas parce que les élites allemandes ont compris le sens de la crise, mais simplement parce qu'elles pensent que les « bons » élèves ne devraient pas payer pour les « mauvais ». C'est essentiellement cette motivation-là qui conditionne l'action de l'Allemagne et des pays en excédent commercial. Si bien évidemment cette mentalité peut parfois coïncider par hasard avec l'intérêt réel des nations, il ne faut pas non plus s'attendre à ce qu'une mauvaise analyse puisse un jour nous sortir de la crise actuelle. L'Allemagne et la Chine vont continuer à prôner des politiques de purge, de contrainte et de « saine » gestion sans voir le paradoxal effet sur la croissance mondiale et sur leurs propres excédents. Il se peut que momentanément ces nations aident à mettre en place de vraies alternatives en poussant le système vers sa fin comme l'Allemagne dans la zone euro. Mais ces nations auraient eu un meilleur rôle à jouer si leurs élites avaient réellement compris le problème.



Si la Chine et l'Allemagne avaient compris d'où vient la crise, elles auraient dû commencer par faire des relances internes de la demande. En Chine la hausse des salaires et la réorientation de la production vers le marché intérieur auraient dû être la priorité gouvernementale, il n'en a rien été. En Allemagne on ne voit pas le début d'un commencement d'une politique de relance salariale. Pourtant ce serait un bon moyen de sortir de la crise par le haut. En toute logique les pays excédentaires devraient rééquilibrer les balances des paiements par la hausse de leur demande intérieure. Ces pays devraient remplacer les USA et les pays déficitaires d'Europe dans leur rôle de source de la demande mondiale. Mais à cause d'une mentalité de petit paysan assis sur leur tas d'or comme le disait Keynes, ces pays préfèrent continuer à tirer leur croissance uniquement par les excédents. Nous nous dirigeons donc vers un clash inévitable et le protectionnisme sera la seule réponse que les pays victimes trouveront pour pallier à ces politiques non coopératives.



Sur la crise énergétique aussi ces pays devraient donner l'exemple et investir un maximum dans la sortie du pétrole. Ici ces nations jouent mieux leur rôle notamment l'Allemagne. Sauf pour ce qui concerne le nucléaire, le dogmatisme allemand en la matière lui interdisant de trouver d'autres voies que le simple arrêt des centrales à fission. Nous avions vu pourtant qu'il y a d'autres voies que la fission de l'uranium , le thorium aurait par exemple de nombreux avantages à remplacer l'uranium comme combustible. On pourra cependant compter sur la Chine pour développer des centrales à thorium, les autres nations en retard devraient rapidement imiter le géant asiatique dans cette direction . Ensuite, on peut saluer l'effort scientifique considérable de la nation chinoise. Ainsi ce pays sera bientôt doté d'une base spatiale en orbite, démontrant sa capacité technologique. Mais plus important, j'ai appris, que des chercheurs chinois veulent lancer un projet visant à pouvoir capturer des astéroïdes dans le but de les exploiter. C'est une des voies les plus intéressantes qui soit pour sortir de la contrainte des réserves de matières premières terrestre. Je rappellerai au passage que la totalité des ressources en métal terrestre présent en surface provient d'astéroïdes qui se sont écrasés au fil des millénaires. Comme je l'avais noté dans un autre article un seul astéroïde de grande taille pourrait subvenir aux besoins actuels de l'humanité pendant plusieurs millénaires, et des astéroïdes il y en a des quantités astronomiques dans notre système solaire. À long terme si l'humanité doit survivre elle aura besoin de ces matières premières, il est donc très intéressant de voir que la Chine compte se lancer dans ce type d'aventure.



  Comme on le voit que ce soit pour résoudre les questions macroéconomiques, ou la crise énergétique, il faudra rompre avec les habitudes de pensée et les raisonnements classiques. Le fatalisme a littéralement rongé la pensée occidentale,et ce fatalisme est la conséquence logique de l'idéologie du libéralisme économique qui présente le système économique comme un système naturel et autorégulé. Puisque l'intervention humaine est mauvaise dans le système économique nous ne pouvons rien faire, et la politique se réduit alors à choisir des représentants sans pouvoir. L'autre problème est la croyance dans la vertu des exportations et des excédents. On est persuadé que l'excédent c'est bien et que le déficit commercial c'est mauvais, sauf que l'un est la conséquence de l'autre. Et qu'à l'échelle du monde il ne peut pas y avoir d'excédent dans un pays, sans déficit dans un autre et donc sans crise de la dette à plus ou moins long terme. La seule politique qui est vertueuse est celle qui prône l'équilibre des balances des paiements, car c'est la seule qui puisse être généralisée à l'ensemble des peuples de la planète simultanément. Le fatalisme a cependant fait une autre victime, c'est celle de l'ambition scientifique et technique. Les pays d'occident n'ont plus de grands projets. Ils en sont réduits à se réjouir de la décroissance économique, voir de la dépopulation. C'est une formidable régression intellectuelle au moment même où les découvertes se multiplient. un période où l'on trouve une faille  dans la théorie de la relativité, au moment même où l'on découvre des milliers de planètes dans d'autres systèmes solaires dont certaines seraient potentiellement vivables. C'est un paradoxe que de voir un tel progrès cacher par un pessimisme délirant. Des voies pour sortir du pétrole, il y en a pourtant beaucoup qui sortent des labos de recherche. Mais encore faudrait-il que les pouvoirs publics impulsent de vraies politiques comme à l'époque de Roosevelt  ou de De Gaulle plutôt que de laissez-faire le marché. Là encore, le libéralisme économique a détruit toute possibilité d'action forte, il est pourtant urgent que nos nations prennent ces problèmes au sérieux, sans quoi les pires fantasmes sadiques des décroissants se réaliseront.

 

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17 septembre 2011 6 17 /09 /septembre /2011 23:02

Mon titre ne concerne malheureusement pas la découverte de civilisations extraterrestre, même si le sujet est presque aussi important puisqu'il s'agit du protectionnisme. En effet lors de sa dernière réunion l'association pour un débat sur le libre-échange vient de faire un nouveau coup en révélant un sondage nous montrant que le protectionnisme est maintenant majoritaire dans la plupart des pays européens. Et, chose plus surprenante, l'Allemagne, championne de l'excédent commercial, semble, elle aussi, touchée par cette vague. Il faut cependant relativiser ce sondage, car il se trouve que lorsque l'on regarde ce que la population pense de l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour leurs pays respectifs, seuls les Français répondent massivement non. En effet dans cette étude, seuls 24% des Français pensent que le libre-échange est une bonne chose pour la France, alors qu'en Allemagne 62% estiment que l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour l'Allemagne. En Grande-Bretagne le chiffre est curieusement bas avec 51% des Britanniques qui pensent que le libre-échange est bon pour la GB. Ce chiffre relativement bas pour le royaume des libre-échangistes forcenés s'explique probablement par la très forte détérioration de la situation de l'économie britannique. Chez nos amis italiens, il y a aussi un petit 51% de la population pour penser que l'ouverture aux échanges est une bonne chose pour l'Italie. Par contre dans tous ces pays le constat fait par la population est le même, ce n'est pas bon pour les salariés.

 

En-France.png

  Cette remarque est importante parce qu'elle caractérise fondamentalement la réussite du bourrage de crâne néolibéral. En effet à l'exception des Français manifestement plus lucide, il semble que chez nos voisins européens on peut tranquillement affirmer que ce qui est mauvais pour les salariés, c'est-à-dire la très grande majorité de la population, peut quand même être bon pour le pays.  En France il y a aussi un léger décalage entre le nombre de personnes pensant que l'ouverture aux échanges est bonne pour le pays et bonne pour les salariés. On trouve presque deux fois plus de français pour dire que c'est bon pour le pays avec 24% alors que seuls 13% des Français pensent que c'est bon pour les salariés. Cependant chez les Allemands par exemple on se retrouve avec 64% qui pensent que le libre-échange est bon pour l'Allemagne, mais seulement 42% pour dire que c'est bon pour les salariés allemands.  Cet étrange paradoxe s'explique par imprégnation des idées néolibérales qui séparent production et consommation, salariés et consommateurs, exportateurs et importateurs. Dans l'esprit des Européens d'aujourd'hui la croissance n'est plus liée à l'amélioration de la situation des salariés. Un pays peut faire des gains de productivité, et en même temps avoir des salariés dont la situation se dégrade. Ce qui est le cas dans tous les pays d'Europe y compris l'Allemagne qui est le pays qui a le plus compressé ses salaires ces 15 dernières années.

 

Évidemment ce que les Européens ne voient pas c'est que cette situation, cette anomalie logique qui voit les créateurs des gains de productivité ne pas en bénéficier, ne fut possible que parce que certains pays ont pu s'endetter et creuser d'énormes déficits commerciaux. La remise des compteurs à zéro qui arrive à grands pas rendra caduque cette dichotomie étrange qui découple situation de l'emploi et santé de l'économie en général. Un jour ou l'autre, progrès économique et situation de l'emploi remarcheront ensemble, c'est inéluctable. Mais il faudra pour cela que les déséquilibres notamment commerciaux disparaissent.

 

Les Européens et le protectionnisme

 

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La question du tableau ci-dessous nous montre encore une fois la pensée paradoxale des Européens. En effet dans leur grande majorité ils nous disaient que le libre-échange était bon pour leur pays, cependant ici ils jugent l'absence de protection douanière comme étant une mauvaise chose, même en Grande-Bretagne et en Allemagne. Cela confirme l'idée que les Européens sont dans le flou complet en matière de compréhension économique. Ils ont toutefois compris dans leur immense majorité que leur intérêt personnel n'était peut-être pas dans la continuation du libre-échange. On retrouve peut-être aussi ici le paradoxe du salarié-consommateur. Le citoyen qui d'un côté pense que le plein emploi et la hausse des salaires c'est bien, mais qui de l'autre s'inquiète aussi  de la hausse des prix et de l'inflation que les hausses de salaire peuvent engendrer. Le message général de ces trente dernières années ayant présenté l'inflation comme le mal absolu pour TOUTE la population ce qui est rigoureusement faux surtout si l'on indexe les salaires sur la hausse des prix.

 

Il n'est toutefois pas étonnant de voir de telles contradictions. Après tout les élites européennes font elles aussi dans le contradictoire en prônant d'un côté le retour de la croissance tout en pratiquant des politiques d'austérités qui la détruise. Au moins les peuples d'Europe ont-ils compris que l'emploi et le libre-échange ne font certainement pas bon ménage. Quoiqu'en dise les vendeurs de soupe qui servent d'économistes mainstream. C'est d'autant plus vrai que l'Europe en plus des dégâts du libre-échange subit les errements de sa pseudomonnaie dont tout le monde commence à comprendre l'impossibilité de survie à long terme. L'euro d'ailleurs montre aujourd'hui sa vraie nature puisque le plus grand soutien à la monnaie unique provient des deux ennemies économiques du continent les USA et la Chine. Des pays qui ne cessent de vouloir empêcher l'effondrement de la monnaie unique. Les Chinois protègent l'euro avant tout pour éviter à leur commerce extérieur de s'effondrer au cas où les états européens dévaluaient, mais aussi pour sauver une partie de leurs avoirs en euro. Une dévaluation qui serait certaine pour bon nombre de pays si l'euro éclate. Et de l'autre les USA qui cherchent à protéger leur création, l'Europe, qu'ils savent condamnée si la monnaie unique disparaissait. Ce soutien continuel des deux super puissances devrait quelque part titiller les oreilles des Européens quant à l'intérêt réel pour eux de la monnaie unique. La réunion récente sur la question de l'euro où le représentant américain monsieur Geithner était invité, fut un grand révélateur de la réalité européenne. L'américain, cynique au possible, se permettant de critiquer les politiques européennes tout en soutenant la monnaie unique alors qu'il sait pertinemment que l'euro est en partie la cause de la crise européenne actuelle.

 

 

Il faut dire que la mort de l'euro serait fortement dommageable pour l'empire américain. Certes à court terme les USA pourraient attirer des capitaux en provenance d'Europe. En ces temps de déficits records, commerciaux et publics, voilà qui pourrait en apparence arranger les affaires de l'Amérique. Mais le drame pour les USA, c'est que les nations européennes une fois libérées de leurs deux boulets économiques, l'euro et le libre-échange, retrouveraient la croissance rapidement . Ce qui en quelques années anéantirait toute l'attraction potentielle des USA, et ce, à l'échelle planétaire. Loin d'affaiblir le continent, la mort de l'euro provoquerait certainement une amélioration économique, ne serait-ce qu'en produisant un ralentissement des exportations asiatiques sur le continent. Mais l'effet le plus grand serait surtout psychologique, car à l'image de leurs amis islandais les Européens auraient enfin l'occasion d'innover en matière de politique économique, d'aller dans des directions auxquelles ils n'auraient jamais pensé en temps normal. On pourrait ici parler de la monétisation de la dette par exemple. Cette libération des peuples d'Europe par la disparition de la marionnette de l'oncle Sam, l'UE et l'euro, pourrait donc engendrer une période d'euphorie sur le continent. Un continent qui d'un seul coup pourrait rattraper ces trois dernières décennies de croissance molle et de chômage de masse. Une fois, libéré des pesanteurs idéologiques, tout deviendra possible y compris, bien sûr, le protectionnisme. Un protectionnisme que les Européens, nous le savons maintenant, appellent majoritairement de leurs vœux.

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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 18:53

 mass100-vip-blog-com-280355Barack_Obama.jpgAinsi donc, les politiques contradictoires de l'occident font-elles à nouveau surface. Avec d'un côté une Amérique qui officiellement s'inquiète de la hausse de son taux de chômage, et de l'autre une Europe qui s'enferme dans une politique de contrition salariale et de baisse de la dépense publique. On ne pourra bien sûr que pencher en faveur de l'Amérique pour ce qui est de la volonté de faire baisser le chômage. Il semble bien que même corrompu au plus haut niveau, comme ses consœurs européennes, les élites américaines gardent encore un soupçon de bon sens face à la réalité du monde. Il faut dire également que l'Amérique n'a pas décidé de sortir de l'histoire et de laisser aux autres peuples le soin d'écrire ses orientations économiques ce qui n'est pas le cas de la vielle Europe aujourd'hui dominer culturellement et mentalement. Les USA gardent une farouche volonté politique et restent persuadés que ce sont bien les politiques menées qui orientent l'évolution économique, et non une espèce de météorologie hasardeuse poussant un coup vers la récession, puis un autre vers la crise. L'Europe, elle, se laisse flotter sur le flot de l'évolution économique considéré comme naturelle et comme étant la résultante de l'orientation du saint marché. Nous voyons dans cette affaire que c'est bien l'Europe et non les USA le royaume le plus achevé du libéralisme triomphant. Et c'est aussi dans cette région du monde que les crises seront les plus violentes et destructrices tant l'abandon de toute forme de politique y est devenu la seule et unique pratique. La politique n'étant plus considérée que comme un moyen de communication pour faire croire que l'on fait quelque chose.  

 

Les USA dans l'impasse libre-échangiste

 

   

La proposition de Barack Obama de vouloir faire une nouvelle relance de 447 milliards de dollars est tout à fait pertinente. Quoi qu’en dise les malades mentaux de l'équilibre budgétaire que sont ses opposants républicains, ou les dégénérés qui se pensent sage et qui dirigent la construction européenne. Tout montre pourtant que les politiques de laissez-faire ou de contrition de la demande ne font en général qu'aggraver le problème en détruisant les ressources. Même le très officiel organisme du CNUCED le reconnaît. Nous en avons parlé ici moult fois et la situation de la Grèce nous montre vers quoi les politiques de réduction de la demande dans le but de rééquilibrer les comptes publics ne règlent jamais les problèmes d'endettement, mais les aggrave.  Cependant, il y a trois obstacles majeurs qui s'opposent et s'opposeront à nouveau à la réussite du plan de relance d'Obama. Des obstacles qui font que ce nouveau plan ne marchera pas mieux que le premier et peut-être même moins bien.

 

 

 

 

   En premier lieu, la nature de ce plan de relance est loin d'être optimale pour réactiver l'économie. L'une des mesures habituelles aux USA étant de baisser les impôts ce qui en pratique n'est pas la meilleure méthode pour relancer la demande, car ce genre de baisse ne touche pas prioritairement les ménages qui ont la plus forte propension à consommer. De plus, on sait que les impôts sont trop bas aux USA surtout pour les populations les plus riches. Les USA connaissent aujourd'hui un niveau d'inégalité aussi élevé qu'au début du vingtième siècle, la baisse d'impôt n’est donc pas une bonne idée, il faudrait très certainement fortement les augmenter sur les tranches les plus élevées. Rappelons d'ailleurs au passage qu'après l'époque de Roosevelt les impôts sur les tranches les plus élevées atteignaient 94% des revenus. C’est seulement avec ce traitement de choc que la course à l'inégalité, qui empêchait le bon fonctionnement de l'économie en produisant des bulles de toute sorte, a pu être enrayée. En focalisant la relance sur la baisse d'impôt, vous minimisez ses effets en maximisant la production d'épargne, car les revenues supplémentaires dégagées par ces baisses ont de fortes chances de ne pas être utilisé dans la consommation courante, mais plutôt épargnée. Je rappelle ici que la propension à consommer est d'autant plus forte que le niveau de vie est faible, un pauvre utilisera naturellement une plus grande part de l'argent qu'il gagne dans la consommation qu'un riche. Bien sûr, cette règle n'est pas générale, il y a des exceptions et des façons d'être culturelles qui rentrent en compte. Un chinois pauvre aura ainsi plus tendance à épargner qu'un américain pauvre. Cependant le bon sens nous indique tout de même qu’au fur et à mesure que notre revenu augmente l'on a plus de mal à l'utiliser dans la consommation courante, même en étant très imaginatif. On transforme donc le nouveau revenu en épargne, ce qui collectivement se traduit par une forte augmentation du niveau de capitaux disponibles. Capitaux, qui s'ils ne trouvent pas d'utilité, produiront soit des bulles, soit une dépression à cause de la diminution de la vitesse de circulation monétaire que cela engendre. La thésaurisation étant la pire ennemie d'une société à forte productivité.

 

 

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Mais au-delà des choix dans l'organisation du plan de relance, il y a un autre élément qui va nuire au plan d'Obama. C'est la nature même du système politique américain. Les républicains vont tout faire pour empêcher l'application de ce plan en réduisant sa portée. Comme ils l'ont fait avec le précédent d'ailleurs. La politique demi-keynésienne d'Obama n'aura jamais le soutien de ses adversaires et le poids des lobbys de toute sorte fera que ce dernier sera réduit à peau de chagrin. De plus, le niveau du plan de relance est tout à fait insuffisant pour véritablement relancer la croissance. Pour tout vous dire le premier était déjà largement sous-dimensionné par rapport aux besoins en terme d'emploi et de croissance. Pour s'en rendre compte, il suffit de calculer ce que font 447 milliards de dollars par rapport au PIB du pays. En prenant le chiffre de 14500 milliards de dollars pour le PIB US, le plan de relance ne pèse en fait que 3% du PIB ce n'est en fait pas grand-chose. À l'époque de Roosevelt, les dépenses avaient atteint des taux nettement supérieurs sans pour autant être suffisantes pour relancer la machine durablement. Ce n'est qu'en atteignant le niveau des dépenses de guerre des années 40 que l'économie a pu atteindre le plein emploi. Comme le disait Keynes, il semble que les dépenses massives, les états n'en soient capables que pour faire la guerre et non pour remplir la satisfaction des besoins de leurs propres populations. Les comptables libéraux cessent d'ailleurs leurs critiques dès lors qu'il s'agit des affaires de la guerre et des intérêts de leurs proches. En ces périodes, ils sont alors d'invraisemblables dépensiers, mais jugent ces mêmes dépenses de gaspillage dès lors qu'elles sont dirigées vers la construction d'hôpitaux, de HLM, ou d'investissement public. L'Amérique est en partie en proie à ce dilemme, on se souvient que le keynésianisme guerrier de Regan n'avait pas vraiment heurté les chantres de l'équilibre budgétaire à l'époque, car il s'agissait de vaincre les méchants Soviétiques. Cette dichotomie de l'esprit qui consiste à juger les dépenses de solidarité comme du gaspillage et les dépenses militaires ou financière ( par exemple les aides aux banques), comme des nécessités font partie des bizarreries qui feront certainement rire les historiens du futur qui se pencheront sur l'origine de l'effondrement des civilisations occidentales.



Dernier point qui est le plus important à mon sens, le plan de relance va surtout accroitre les importations comme le fit le premier plan. Je l'ai déjà dit dans d'autres textes, mais je le répète. Les USA sont dans la même situation que la France en 1983 et probablement en pire. Le niveau de dépendance aux importations est tel qu'il réduit à néant l'impact sur l'emploi productif les effets de plan de relance. Ces derniers ne réactivant que la production d'emploi de service ce qui creuse inexorablement les déficits commerciaux. C'est d'autant plus vrai que l'Amérique est seule à faire ce type de politique tout comme la France était seule à faire une relance au début des années 80. Dans ce type de cas de figure, il faut impérativement prendre des mesures pour minimiser les importations et maximiser la consommation locale. Or on n’entend absolument rien comme proposition sur cette question, Obama avait d'ailleurs récemment fait un discours sur les bienfaits du libre-échange. L'Amérique a oublié sa propre histoire. Et le fait que jusqu'en 1945 les importations étaient taxées à 50% en moyenne ce qui avait comme avantage certain de faire que les politiques de relance réactivaient surtout la production locale. Consommer des produits chinois fabriquera certes des emplois chez Wall Mart, mais créera mécaniquement une fuite de la masse monétaire vers l'extérieur du pays. Ce n'est pas un hasard si avec l'augmentation des importations les effets des plans de relance diminuent année après année pour devenir pratiquement nuls comme en 2008-09. Il est tout simplement impossible de réactiver une croissance auto-entretenue si le pays a de forts déficits commerciaux. Injecter des liquidités dans ce contexte revenant à verser de l'eau dans une passoire en espérant la remplir. On a affaire à une politique semi-keynésienne, c'est à croire que les élites américaines ne comprennent pas le concept de circuit économique. Les USA ne sont plus assez gros pour ignorer le reste du monde et l'Asie. Ou peut-être que les élites US comptent sur une forte dévaluation du dollar, mais il y a fort à parier qu'en pareil cas le yuan suivrait, les Chinois ayant collé leur monnaie à celle du des USA. En pareil cas, la compétitivité des USA ne s'améliorerait que contre celle de la zone euro, mais cette dernière pratiquant des politiques de déflation salariales, le gain économique potentiel pour les USA ne serait guère élevé. Si les USA continue dans cette direction, les réactionnaires monteront au pouvoir en prônant des politiques à l'Européenne au nom du « bon sens » comptable. Tout comme l'on fait les idéologues néolibéraux en France après la rupture de 83. Une rupture que l'on a appelé le tournant de la rigueur et dont nous ne sommes jamais sorties. Si Obama veut vraiment une politique de plein emploi, il lui faut s'attaquer aux intérêts des grands groupes et il faut des politiques protectionnistes d'accompagnement aux politiques de relance.



L'Europe l'empire libéral en décrépitude

 

trichet.jpegPour l'Europe la situation est en fait plus simple, le continent continue dans sa direction d'autodestruction macroéconomique qu'il pratique depuis les années 70-80. La seule différence c'est qu'aujourd'hui la locomotive américaine qui donnait l'illusion que ces politiques étaient saines a disparu. L'Europe a un PIB trop gros pour être tirée uniquement par le dynamisme économique du reste du monde et notamment des USA, c'est d'autant plus vrai que ces derniers sont eux même en proie aux difficultés dont nous avons parlé. Jusqu'aux débuts des années 2000, l'Europe a vécu aux crochets des politiques de relance de l'oncle Sam. Le problème c'est qu'aujourd'hui elle est fortement concurrencée par l'Asie qui la remplace en matière de zone d'exportation et qu'en plus elle s'est empêtrée dans une monnaie unique qui ne pouvait en aucun cas marcher. L'Europe est sans doute la seule zone du monde où les dirigeants croient réellement aux fadaises libérales. La mécanique européenne a d'ailleurs été un outil formidable pour atteindre l'idéal libéral d'une société sans état et sans responsabilité collective.

 

La crise de l'euro loin d'être le réveil que l'on aurait pu attendre, a été au contraire une occasion pour les idéologues néolibéraux d'accroitre encore la pression sur les états membres. L'Europe se lance dans la folle politique de déflation salariale volontaire alors même qu'elle ne peut plus compter sur les exportations pour tirer sa croissance économique. Mais les élites ne cherchent même pas à résoudre le problème du chômage. La seule chose qui les intéresse ce sont les cours de la bourse et la prospérité du système financier. L'Europe est devenue une immense corporation dirigée par des intérêts privés qui se cachent de moins en moins et dont les discours ne font même plus semblant de s'intéresser aux problèmes de la population. C''est probablement là que la division entre les USA et l'Europe était le plus palpable. Bien qu'étant moi même peu soupçonnable de proaméricanisme, je dois dire que je trouve les priorités de l'état US plus nobles que celles de l'élite européenne. On peut dire ce que l'on veut des USA, force est de constater que même s'ils font n'importe quoi une partie de l'élite a encore conscience des intérêts de sa population, on ne peut pas en dire autant de la très très vieille Europe. Il ne nous reste plus qu'à espérer que l'explosion de l'euro fasse chavirer cette construction c'est la seule porte de sortie pour les peuples d'Europe. Sinon, ces derniers devront s'habituer à une crise sans fin encore plus difficile que celle des années 30.

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