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25 avril 2017 2 25 /04 /avril /2017 16:00

Quelques heures ont passé depuis le résultat de la présidentielle. Le calme est revenu même si les médias mainstream ont lancé l’hallali contre le méchant FN . Mais la mobilisation fonctionne moins bien qu'en 2002, il faut dire que de l'eau a coulé sous les ponts depuis. La France vit désormais sous le régime de l'euro, elle en subit les conséquences. Et le FN n'est plus vraiment le parti repoussoir bien pratique qu'il a été durant les années 80-90. De fait si Marine Lepen perdra certainement au second tour, rien n'est encore joué sur son score . Et comme je l'ai déjà dit, c'est bien la préparation postélectorale qui compte. Une Marine Lepen avec près de 40 % au second tour sera plus à même de se présenter comme la seule vraie opposition au libéralisme Macronien, alors que ce sera plus discutable si elle peine à dépasser son score du premier tour comme son père en 2002. La population commence à bien comprendre y compris à gauche que le fameux Front Républicain© est en fait un front libéral contre toute alternative politique au libre-échange et à l'européisme. L'on aurait eu certainement le même type de déchaînement avec un Mélenchon contre un Macron au second tour. La teinture du Front aurait simplement changé de couleur avec un Front anti-bolchévique pour la liberté individuelle, ou quelque chose du genre.

 

Quoi qu'il en soit même dans la presse classique l'évidence de la fracturation du pays en deux camps diamétralement opposés devient évidente. Certains y voient la lutte de la France d'en haut contre celle d'en bas,d'autres un retour au clivage de 2005, d'autres enfin un retour de la lutte des classes. Mais c'est probablement notre bon vieux Todd à qui il arrive de sortir de sa torpeur cérébrale pour nous sortir une carte relativement parlante. Il s'agit comme vous pouvez le voir ci-dessous de la carte de l'industrie française en 1958. La comparaison avec les résultats électoraux de dimanche est relativement parlante. On y voit une France industrielle qui, on le sait, a été détruite en grande partie par le libre-échange et l'euro. Et de l'autre la France globaliste vivant de service relativement protégé du désastre. La seule exception étant la région parisienne qui n'a pas trop souffert de la désindustrialisation grâce à la captation du flux monétaire des échanges commerciaux et financiers. L'on sait cependant que ce n'est que momentané les déficits extérieurs français devant être à terme rééquilibrés. La purge libérale qui vient avec le concours de Macron et de l'Allemagne fera probablement rentrer la capitale dans le marasme généralisé que les élites autistes ont imposé depuis trente ans au pays. Paris ne pourra pas rester éternellement protégée des effets du libre-échange alors que l'on sait que la région parisienne est la principale source du déficit extérieur français.

 

A gauche résultat de 2017 à gauche proportion de l'emploi industrielle en France en 1958.

 

Pour revenir à l'élection en elle même, une étude de l'Ipsos vient d'être publiée et donne quelques données intéressantes sur l'élection. On constate notamment que Macron est le politique qui inquiète le moins l'électorat. C'est extrêmement étrange d'autant que François Fillon lui inquiète énormément ce même électorat. Il faudra m'expliquer la différence entre la politique de Fillon et celle de Macron en terme d'orientation macroéconomique, car en dehors d'une affaire de quantité les deux s'alignent sur les poncifs de la politique de l'offre. Cette opinion n'est à mon sens compréhensible que par le fait que les Français considèrent que Macron sera la continuité de François Hollande. Cependant qu'ils considèrent cela comme rassurant, peut inquiéter sur l'état de santé mentale de la population. Puisque par ailleurs Hollande est le président le plus impopulaire de l'histoire. Il faut aussi modérer ces chiffres, il ne s'agit après tout que d'une étude sondagière qui n'est pas nécessairement solide scientifiquement parlant. On remarquera par ailleurs que Fillon est considéré comme tout aussi inquiétant que Marine Lepen pour son programme. Étrange non ?

 

Autres données intéressantes, c'est la motivation derrière le vote des électeurs. Le tableau suivant indique quelle est la motivation principale qui a poussé l'électeur à choisir son candidat.

 

 

On voit très bien ici le caractère très solide du vote pour MLP. En effet, c'est elle qui a le soutien le plus fort de ses électeurs pour son programme et simultanément c'est elle qui sert le moins au calcul électoral. C'est exactement le contraire pour Macron qui est le candidat qui est le plus utilisé comme moyen de pression vis-à-vis des autres candidats avec près du quart de ses électeurs. Cela relativise encore plus le succès du poulain libéral. Plus étonnant Hamon arrive encore à avoir 18 % de gens qui votent pour lui par calcul malgré son score catastrophique. Nicolas Dupont Aignan quant à lui ferait bien de faire attention à l'avenir puisqu'il semble que près d'un électeur sur deux a voté pour lui par civisme et parce qu'ils ne trouvaient pas mieux ailleurs. Je lui laisse le soin de trouver une stratégie pour solidifier cet électorat à l'avenir.

 

 

Maintenant, intéressons-nous aux sujets qui sont jugés par les Français comme prépondérants. L'on voit tout de suite que l'économie et l'immigration sont au centre des préoccupations des Français. Le pouvoir d'achat arrivant en tête de gondole. Le paradoxe suprême est que la question Européenne, elle, ne se retrouve qu'en dixième position. Ce qui pourrait chagriner les eurosceptiques que nous sommes. Mais à y regarder de près rien n'indique ou n'explique si les français font le lien ou non entre les problèmes économiques, l'immigration et l'Europe. En fait le questionnaire est biaisé sur cette question puisqu'il a pris comme comme décision de séparer volontairement les deux. Peut-être pour mieux cacher l'euroscepticisme montant qui sait. Il aurait fallu une question plus précise sur le sujet pour se faire une idée réelle de l'état de l'opinion sur l'Europe et l'euro. Cependant la domination europhile dans les corps sociaux supérieurs, qui font et financent ce genre d'études, jouent naturellement contre ce genre d'analyse politiquement incorrecte. Il en va des études de l'opinion sur l'euro ou l'Europe comme du sujet de l'intégration et de l'immigration. Ceux qui étudient ces questions portent souvent des lunettes partisanes empêchant la nécessaire neutralité qui permettrait de produire des données objectives.

 

Quoi qu'il en soit si les Français continuent de différencier les problèmes européens des problèmes macroéconomiques du pays c'est qu'il nous reste encore du pain sur la planche pour leur faire comprendre qu'il n'en est rien. La poussée des partis eurosceptique tend quand même à penser qu'en pratique les gens ont bien conscience du lien même s'ils n'ont peut-être pas encore les idées claires sur ces sujets. Et comme nous l’avons vue, la peur du changement est probablement la dernière réelle motivation au blocage sur les questions européennes puisque les Français préfèrent souffrir avec Macron comme ils l'ont fait pendant 5 ans avec Hollande que de tenter autre chose. Loin d'être mouvement de marche en avant le mouvement de Macron a surtout l'intérêt pour les électeurs d'être un immobilisme. Il faudrait rebaptiser En Marche, le mouvement stationnaire.

 

 

Pour terminer sur l'enquête de l'Ipsos, la majorité des Français ont trouvé la campagne inintéressante. On ne pourra pas leur donner tort, le fond des problèmes ayant rarement été mis en avant. On n'oubliera pas non plus les affaires et les manipulations de toutes sortes qui ont permis en grande partie de fausser l'élection. Mais à titre personnel ce ne sont pas les candidats le problème même si le niveau n'était pas terrible. Après tout la campagne de 2007 avec Sarkozy et Royale n'était-elle pas aussi au ras des pâquerettes ? C'est surtout la dérive des médias dont le manque de plus en plus criant de neutralité commence à faire tache. Le manque flagrant de pluralisme médiatique se fait vraiment sentir . Je dirai même que la possibilité qu'ont eue les « petits » candidats de parler de sujets transversaux peu discutés d'ordinaire a souligné l'effroyable pauvreté des débats habituels.

 

 

Pour terminer, voici un petit tableau assez drôle indiquant « l'efficacité » médiatique des candidats en rapportant le nombre de citations dans les médias au nombre de voix obtenues par le candidat à l'élection. Nicolas Dupont Aignan arrive largement gagnant devant Asselineau. Hamon est le moins efficace, mais il faut mettre cela sur le compte de la trahison formidable de son parti et de François Hollande. Macron arrive en tête des grandes têtes de la campagne avec plus de deux fois plus de citations par millions de voix que Marine Lepen ou Mélenchon. Cela devrait rassurer un peu ceux qui pensent que les médias dominent tout et fabriquent le futur gagnant de l'élection. La réalité est plus compliquée que ça. Je rajouterai d'ailleurs, que ces de chiffres ne prennent pas en compte la « qualité » de la citation. En effet, être cité dans un grand journal sur Le Monde ou sur TF1, et être cité sur un site obscur du web, il y a évidemment un effet médiatique complètement différent. Le nombre pur de citations n'indiquant pas du tout cette qualité, on peut sans trop se mouiller que Macron et Fillon ont eu une qualité de citation bien meilleure que NDA ou même Marine Lepen.

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commentaires

L
Sur le côté « rassurant » de Macron (moi, je le trouve rassurant comme un spectre mais je sais ne pas être normal) je me demande s'il n'y a pas tout simplement une confusion sémantique entre « rassurant » au sens émotionnel et « rassurant » au sens de  familier, sachant que les instituts de sondage adorent entretenir ce genre de confusion.<br /> Le drôle est tellement omniprésent qu'il fait déjà partie des meubles pour tout le monde.<br /> Je ne conçois plus ainsi d'attendre le bus sans une affiche de mon Manu carnassier habituel à proximité. S'il échoue, il pourra toujours se recycler dans la pub de pâté pour chat.<br /> Sur la force de frappe réelle des médias, tout ce que l'on peut dire est que les gens ne sont pas des chiens de Pavlov et que là s'arrête le pouvoir des médias.<br /> Il ne faut pas se leurrer pour autant, leur pouvoir reste énorme précisément de par leur omnipotence. Le problème fondamental est que l'être humain a aussi une fâcheuse tendance à agir par mimétisme.<br /> Quelque part Todd s'arrête là où commence René Girard, sans que les deux ne s'excluent forcément.
Répondre
Y
"Le drôle est tellement omniprésent qu'il fait déjà partie des meubles pour tout le monde."<br /> <br /> Il y a probablement un peu de ça. Je pense que c'est la peur du changement qui pousse les Français à voter pour ce type. Mais le fait qu'ils aient peur de Fillon montre qu'ils n'ont probablement pas compris que Macron c'est la même chose. Du reste ils vont vite le comprendre puisque le MEDEF le soutient de plus en plus ouvertement. On pourrait même avoir Parisot comme premier ministre. Mon plan fonctionne à merveille, les libéraux pourront être enfin jugés à l'aune de leur médiocrité pratique. <br /> <br /> "Il ne faut pas se leurrer pour autant, leur pouvoir reste énorme précisément de par leur omnipotence. Le problème fondamental est que l'être humain a aussi une fâcheuse tendance à agir par mimétisme."<br /> <br /> Je prends cette réalité en compte. C'est bien pour ça que je voulais Macron au second tour. Une fois élu, il va non seulement accélérer le déclin des partis traditionnels, mais aussi celui des médias qui l'auront soutenu de manière totalement transparente. Comme le dit Philippe Grasset contre le système, il faut pratiquer l'Aïkido pour retourner sa force contre lui-même. <br /> <br />