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19 avril 2019 5 19 /04 /avril /2019 23:21

 

En ces temps de campagne électorale européenne, l'on revoit poindre les sempiternels arguments répétés inlassablement depuis 40 ans. L'Europe c'est la paix, l'Europe c'est la prospérité, l'Europe c'est la force contre les grandes puissances comme les USA ou la Chine. Les récents accords entre l'Italie de Salvini et la Chine ayant donné du grain à moudre à cette objection contre la montée du nationalisme et du méchant repli sur soi. L'on pourrait faire remarquer que l'Italie est justement membre de l'UE, et l'un des membres fondateurs qui plus est. Or cette appartenance n'a apparemment pas protégé l'Italie des ambitions chinoise. L'on pourrait même affirmer que c'est bien au contraire cette appartenance qui a finalement déclenché un déclin séculier du pays l’entraînant dans les pattes de la nouvelle superpuissance.

 

Du reste l'accord en question, qui a fait beaucoup de bruit dans les médias mainstream, n'engage en fait à pas grand-chose. La Chine roulant des mécaniques plus qu'autre chose avec sa route de la soie. Un concept totalement douteux d'ailleurs pour quiconque connaît un peu l'histoire. La Chine faisait du commerce asymétrique et du mercantilisme punissant même de morts toute personne sortant des vers à soie de Chine. Les hurluberlus qui font comme si la Chine était une nation bienveillante contrairement aux méchants Occidentaux devraient un peu réviser l'histoire de ce pays et de ses multiples tributaires. Du reste comme nous le verrons dans une analyse plus poussée de l'économie chinoise dans un autre texte, ce pays accumule les problèmes du fait de sa trop grande dépendance aux exportations. Les Chinois épargnent toujours énormément avec une demande intérieure qui ne prend toujours pas le relais d'un occident moribond et aujourd'hui beaucoup trop petit pour tirer la croissance chinoise. La nouvelle route de la soie n'est à mon avis qu'une tentative désespérée des élites chinoises pour sauver ce modèle de croissance totalement déséquilibré basé sur des exportations massives qui prend l'eau depuis la crise de 2008.

 

Quand l'union fait la faiblesse

 

Pour en revenir à la question européenne, l'UE elle n'est pas une protection contre la Chine. Pas plus qu'elle ne l'a été contre les USA. De nombreux historiens et économistes rappellent d'ailleurs sans cesse que l'UE est avant tout une structure politique créée en grande partie par les USA eux même. Comment imaginer une minute que ces derniers auraient favorisé une structure capable de les concurrencer ? Bien au contraire grâce à l'UE les USA ont eu plus de facilité à contrôler le continent face à la menace soviétique. Je pense même que la construction européenne était surtout là au début pour cadenasser la France Gaulliste dans le camp occidental. Rappelons tout de même que jusqu'au milieu des années 70 la France fût une nation montante et qu'elle était la seule nation occidentale avec une force de frappe nucléaire autonome vis-à-vis des USA ainsi qu'un système de production militaire lui aussi autonome. C'est avant tout ça que les USA voulaient détruire et la construction européenne a été un bon moyen d'y parvenir avec l'aide des élites à la fois corrompue et antipatriote qui dirige le pays depuis Giscard.

 

La construction européenne n'a pas amélioré la croissance du continent. Pire que ça, l'euro a finalement plongé les pays membres dans une récession permanente. Les traités de libre-échange et la libre circulation des capitaux ont été maximums dans l'Union européenne. Non seulement l’Europe n'a pas protégé les Européens de la concurrence mondiale, mais elle l'a largement favorisé. C'est au nom de l'Europe que l'on a ouvert le continent et les frontières à tout le monde. Si l'on regarde la principale faiblesse du continent aujourd'hui c'est sa démographie. Que fait donc l'UE contre le déclin démographique du continent ? Sa seule réponse est l'immigration . Rien sur le plan de politique familiale. Paradoxe supplémentaire, le continent connaît un très fort taux de chômage chez les jeunes alors même que le continent est le plus vieux de la planète . Tous se passent comme si l'UE appliquait systématiquement les pires politiques pour accoucher de la destruction du continent. Ce qui n'est guère étonnant puisque la seule politique possible au sein de la construction européenne est la non-politique libérale. Aucun grand programme européen n'est né grâce à l'UE. Airbus ou Ariane ont été créés par des nations membres. La plupart des projets réellement conçus par l'UE échouent systématiquement .

 

Ainsi la place de l'UE dans le monde ne cesse de régresser et il ne s'agit pas uniquement d'une question démographique. L'union connaît des croissances extrêmement faibles et une incapacité à agir sur les dernières évolutions industrielles fondamentales. Où sont donc les concurrents européens à Google, Microsoft, Netflix, Huawei, Sony etc.. Sur tout un tas de secteurs fondamentaux, les Européens sont désormais totalement absents. Ce n'était absolument pas le cas dans les années 70 avant la folie du libéralisme européiste. Le libéralisme européen a non seulement entraîné la panne du continent, mais l'a entraîné vers un déclin absolu par dogmatisme et incapacité à protéger et à développer des producteurs locaux en lieu et place des producteurs étrangers. La construction européenne ne nous a pas protégés, elle nous a considérablement affaiblis. Et ce ne sont pas les excédents allemands faits sur le dos d'autres nations européennes ou d'autres pays occidentaux qui y changera quelque chose. Il est bien loin le temps béni du tarif extérieur commun.

 

La force de l'Europe a toujours été sa division

 

L'idée qu'une grande nation c'est toujours mieux qu'une petite est vieille comme le monde. Ce n'est pas la première fois que le délire de puissance dévore le continent, c'est même assez traditionnel en fait. L'Europe tout entière tremblait face au gigantesque Empire ottoman à son apogée. Combien de nations à l'époque cherchaient d'ailleurs à s'attirer ses faveurs à l'image de la France de François Premier. Pourtant où est donc l'Empire ottoman aujourd'hui ? Que reste-t-il de l'Empire austro-hongrois ou du gigantesque Empire mongol ? La France est pourtant toujours là elle tout comme la Grande-Bretagne ou l'Espagne. Nous n'étions pourtant pas grand-chose face à ces puissances à l'époque. Le fait est que la grosseur a été il est vrai un gros avantage, mais pas sur le plan du développement économique ou technologique. La taille était surtout un avantage sur le plan militaire. C'est uniquement cette réalité qui a poussé les nations à grossir toujours plus jusqu'à parfois devenir d'immenses empires. Il fallait grossir pour ne pas être mangé par les voisins ou pour pouvoir avoir accès à certaines denrées. Mais depuis l'industrialisation, puis la Seconde Guerre mondiale que constate-t-on ? Que la taille moyenne des nations a en fait reculé. En 1945 il y avait 75 pays dans le monde, aujourd’hui on est à 197. Pourquoi cela ?

 

Nombre de pays dans le monde

Si la grandeur permet la force en matière militaire, elle entraîne aussi de graves problèmes internes. L'hétérogénéité des empires multiethniques et multiculturels entraîne des problèmes politiques et des instabilités. À l'inverse une certaine homogénéité permet des politiques sociales et économiques avancées. Il est plus facile d'avoir une politique économique et sociale cohérente quand tout le monde reconnaît une autorité étatique. Quand on pense ne pas appartenir vraiment à une communauté nationale, l'on remet beaucoup plus facilement en question les politiques données. L'expérience yougoslave des années 90 en a été un triste exemple. La Belgique actuelle montre également que même avec seulement deux entités membres la cohésion peut-être extrêmement difficile. Tous se passe donc comme si l’inefficace inhérente à l'hétérogénéité culturelle, ethnique, et religieuse, poussait les anciennes structures polaques trop vastes à se fragmenter pour atteindre une taille plus réduite et un ensemble plus cohérent. Ce mécanisme s'accompagne d'une solidification de la croyance nationale ainsi qu'un progrès sur le plan démocratique. Et quand les nations pluriethniques ou pluriculturelles ne se fragmentent pas, elles tentent l'assimilation de leur partie exogène avec plus ou moins de succès.

 

Il y a tout de même un autre avantage à la petite taille que la cohérence, c'est la créativité. Comme l'historien Jared Diamond je pense que la principale force qui explique le succès historique de l'Europe par rapport au reste du monde a été sa division en de multiples nations relativement autonomes. La grande diversité anthropologique associée à une impossibilité d'unification depuis l'effondrement de l'Empire romain a permis au continent de respirer culturellement. C'est la compétition constante entre ses diverses nations et l'équilibre relatif des puissances qui a permis les prodiges techniques et intellectuels de la vieille Europe. Continent qui n'était en fait qu'à la marge du progrès humain lorsque l'Empire romain s'est effondré, faut-il le rappeler. Alors que les autres aires de développement technique et scientifique ont été souvent unifiées sous d'immenses empires, l'Europe a gardé pour de multiples raisons historiques ses territoires divisés. Cette division a empêché l'unification culturelle et politique du continent. Certaines nations prenaient parfois l'ascendant grâce à certains progrès, mais bien vite les autres l’imitaient pour éviter d'être engloutis. Le jeu des alliances permettant parfois de maintenir le statu quo.

 

Tout n'était évidemment pas parfait dans cet équilibre, il en a découlé de multiples conflits meurtriers. Mais cela a empêché les civilisations européennes de s'endormir comme ont pu le faire la Chine ou d'autres régions du monde. Cette division permettait aussi aux esprits subversifs de jouer la concurrence entre les nations pour éviter de voir leurs idées totalement détruites par des esprits trop étriqués. La diversité d'organisation et de culture a été le vrai moteur du progrès, chaque peuple apportant sa propre vision d'une bonne société. Cet équilibre des puissances comme fondement du monde européen fut littéralement organisé officiellement par le traité de Westphalie. La petitesse des nations européennes ne fut donc pas un mal, mais un bien. L'Italie de la renaissance était divisée en 15 ou 16 états, elle a pourtant eu une influence historique bien plus grande que la Chine Ming gigantesque de la même époque.

 

L'ambition impériale comme seul moteur a toujours conduit au désastre

 

La volonté d'unification du continent n'est donc pas nouvelle. Elle est motivée avant tout par une vieille maladie des civilisations, celle de l'hubris. L'UE actuelle ne cherche pas le progrès humain, elle cherche à faire retrouver aux Européens les folies impériales du 19e siècle. On le voit dans les argumentations récurrent chez les défenseurs de l'UE. Il faut une Europe forte et puissante. La France est trop petite pour survivre . Argument que l'on aurait pu sortir à l'identique vers 1220 quand Gengis Khan et les Mongoles arrivent aux portes de l'Europe de l'ouest après avoir soumis la Chine et la Perse. Mais aujourd'hui personne ne menace militairement l'Europe. L'époque moderne rend extrêmement coûteuses les guerres entre les nations développées et l'arme nucléaire la rend même impossible entre les nations qui la possède. Dès lors la taille n'a plus vraiment d'importance pour la protection directe . Par contre, les effets des incohérences politiques liées à la grande hétérogénéité interne aux grands ensembles peuvent devenir particulièrement gênants sur le plan politique et économique. De fait, l'UE est une vision politique complètement archaïque qui répond à des problèmes du 19e siècle et non à la réalité actuelle.

 

Aujourd'hui il faut être réactif, rapide dans le changement de politique, et surtout savoir quels sont ses intérêts et quels politiques appliqués pour quels objectifs. Autant de choses qui sont impossibles à obtenir dans des cadres multilatéraux aux intérêts totalement divergents. Comment avoir une politique économique cohérente avec des pays aussi différents que la Grèce, la France, l'Allemagne ou la Lituanie ? C'est juste impossible. Les accords se font dès lors sur le plus petit dénominateur commun à savoir le laissez-faire libéral ou alors le pays le plus fort impose sa loi comme c'est souvent le cas avec l'Allemagne.

 

La taille dans le monde actuel importe peu. Ce qui compte c'est votre capacité à répondre à vos besoins, à équilibrer vos comptes extérieurs, et cela peut tout à fait s'obtenir en étant une petite nation. La Corée du Sud , Taïwan, Singapour, la Nouvelle-Zélande, l'Islande, la Norvège ce sont tous de petits pays, mais qui ont leur propre politique économique. Certes ils ne font pas la loi dans le monde, mais qu'est ce que ça peut faire ? Pour ma part, je pense que la France doit enfin accepter effectivement d'être un petit pays qui n'est pas un empire universel. En ce sens, je suis d'accord avec les Europeistes qui voient eux aussi la France comme une petite nation. Mais alors que c'est dernier, parle de renoncer à notre indépendance pour avoir à nouveau ce fantasme impérialiste mue par l'hubris. Faire une grosse Europe parce que la France ne l'est plus. Je pense au contraire que nous devons abandonner notre ambition impériale pour nous consacrer surtout à notre indépendance. Soyons modestes et faisons de la France une grande Suisse par exemple. Un pays humble, mais qui gère ses affaires tout en étant quand même ouvert sur le monde. Reprenons la maitrise de nos frontières, reconstruisons une industrie avec tous les outils qu'un état peut utiliser de la dévaluation monétaire au protectionnisme et à la planification industrielle. Cela ne nous empêchera pas pour autant d'avoir des relations avec les autres pour autant et nous retrouverons enfin le vrai sens de l'histoire. La construction européenne n'est qu'une impasse construite pour faire encore fantasmer les derniers esprits impérialistes d'Europe. Abandonnons donc cette folie avant qu'il ne soit trop tard.

 

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