Je continue un peu mon petit tour des candidats politiques alternatifs. Après Marine Le Pen et son procès qui, comme nous l'avons vue dans un autre texte, ne fût probablement pas une bonne stratégie pour les tenants du système. Tant elle est apparue comme victime dans cette émission sur France2. Nous avons vu ensuite les brillantes propositions de Chevènement qui reste tout de même l'homme politique français le plus précis, rationnel et cohérent dans ses propositions. Nous voyons aujourd'hui l'autre outsider de la campagne à savoir Nicolas Dupont Aignan avec qui je partage une bonne part des analyses et des propositions. Il a eu la chance de passer dans une émission moins caricaturale que celle à laquelle a participé Marine Le Pen. Même s'il est évident que les journalistes et le choix des différents économistes invités visaient essentiellement à discréditer ses propos notamment sur l'euro, la dette, ou encore sur les nationalisations. Quoi qu'il en soit, il a eu un temps relativement long pour s'exprimer, ce ne sera malheureusement pas toujours le cas. Sur la forme de l'émission si le temps imparti est déjà plus intéressant on constate toujours cette vilaine habitude des médias qui dans leur course à l'originalité et à l'audimat s'astreignent à produire des émissions à la forme douteuse. Ici il s'agit de mettre le candidat dans son costume de président. C'est grotesque à plus d'un titre. Tout d'abord, cela pousse à ignorer les changements de contexte dans le cas d'une telle élection. Ensuite, cela déforme nécessairement les propos et le discours tenu pour s'adapter au contexte futurologique de l'émission. En bref, cette forme nuit en partie au fond, mais il ne fallait pas s'attendre à ce que les journalistes"vedettes" se taisent et laissent le candidat seul proposer son programme. Ce serait trop demandé à des gens qui pensent plus à leur notoriété qu'au débat public.
Quelques remarques sur l'émission
Je remarque tout d'abord que les deux économistes invités à parler l'un sur le plateau, l'autre de façon enregistré, constituent une certaine idéologie économique. Encore une fois, l'on fait croire sous le vocable "économistes" que ces derniers formeraient un bloc homogène et que les évidences de ces deux personnes invitées représenteraient l'avis de l'ensemble des économistes. En fait, on suppute ici que les économistes se comportent comme les physiciens ou les mathématiciens et qu'ils ont un ensemble de savoir totalement accepté comme étant reconnu par tous. En réalité, les économistes sont très loin d'avoir cette homogénéité. Et les évidences des deux économistes invités ne sont des évidences que pour eux-mêmes et leur courant de pensée. Mais il y a quelque chose de plus grave. NDA en parle, mais pas avec assez de force et de convictions. Il ne cite pas de chiffre par exemple. En effet, le premier économiste ment outrageusement. Il ment à plusieurs reprises et si ce n'est pas intentionnel c'est que c'est un incompétent. Tout d'abord, affirmer comme il l'a fait que la croissance allemande a été plus forte que la nôtre alors que ce pays est aussi dans l'euro. C'est une escroquerie comptable. Sur les dix dernières années, l'Allemagne a eu une croissance nettement plus faible que la nôtre. Ce n'est que récemment que la croissance allemande a été plus forte. Elle a profité des plans de relances des autres pays de la zone euro pour tirer son excédent vers le haut en pompant la croissance de ses voisins. Autre mensonge. Dire que l'euro nous protège est une insulte à l'intelligence humaine. La zone euro est lanterne rouge de la croissance mondiale depuis une décennie. Les pays de l'UE qui ne sont pas dans la zone euro ont eu une croissance plus forte que ceux qui sont dans la zone euro. Et cerise sur le gâteau, non seulement ces dix dernières années ont fait de la zone euro la zone mondiale à la croissance la plus faible, mais en plus notre zone monétaire est avec le Japon la zone du monde qui a senti le plus durement la crise mondiale. Le PIB de la zone euro a reculé bien plus que celui des USA d'où la crise des subprimes était pourtant partie.
Je regrette que sur ces sujets Dupont Aignan n'ait pas été à la hauteur. Comme il ne l'a pas été non plus sur la question de la dette où il a été trop flou, même s'il n'est pas dans l'amateurisme de Marine Le Pen. L'inflation qui obsède ce journaliste, visiblement parti à la défense des rentiers qui le font surement vivre à travers des investissements en portefeuille financiers, n'est pas la catastrophe qu'il défend. Il faut vraiment rappeler la base de l'économie puisque ces clowns semblent répéter inlassablement les mêmes bêtises pour plaire à leurs maitres. Ce qui compte ce n'est pas l'inflation dans l'absolue, c'est le pouvoir d'achat. Si les prix augmentent de 5 %, mais que votre salaire augmente de 6% votre pouvoir d'achat, augmente de 1%. À l'inverse si les prix n'augmentent que de 2% mais votre salaire de 1% vous perdez 1% de pouvoir d'achat. La peur de l'inflation est donc une peur imbécile, une peur qui en réalité a été instillée dans la population pour l'intérêt de la rente sous toutes ses formes. Car la rente elle craint évidemment l'inflation qui dévalue la valeur de son capital.
Autre problème que malheureusement NDA n'a pas souligné et qui montre qu'il devrait encore étudier la question. C’est sur la question de la dette publique une fois revenue à l'euro. Il aurait dû demander à son interlocuteur économiste si la dette libellée en franc en 1999 l'est restée après le passage à l'euro. Nos économistes défenseurs de la rente montrent ici toute leur inféodation puisque lors du passage du franc à l'euro les dettes publiques ont été converties. Pourtant nous aurions beaucoup gagné à les avoir gardés sous forme de francs puisqu'avec l'appréciation de l'euro la valeur des anciennes dettes se serait fortement allégée en euro. À l'époque personne ne s'est comme par hasard soucié de savoir si les dettes françaises anciennement acquises resteraient exprimées dans la valeur du franc de l'époque du passage. Mais étrangement lorsque l'on passe de l'euro au franc voilà que la question se pose. C'est étrange non? L'explication est simple en fait. Dans le premier cas, les rentiers, détenteurs de titres de dettes françaises, savaient que l'euro serait plus fort que le franc. Ils n'avaient donc pas d'inquiétude quant à leur valeur sur le marché international de leurs titres. Au contraire même. Ils savaient que ce passage ferait que leurs titres de dette française vaudraient plus de dollars ou de Yen une fois exprimé en euro. Cette fois c'est la situation inverse, ils savent pertinemment eux et leurs représentants bancaires, que le franc sera probablement plus bas que l'euro actuel. Ils insistent donc pour que la dette française accumulée jusqu'ici reste exprimée en euro CQFD. Mais c'est une aberration, on ne voit pas pourquoi la France ne convertirait pas sa dette dans sa propre monnaie. On laisse une période de trois mois aux détenteurs de dette pour faire leurs changements à la banque de France pour convertir leur titre. Pendant ce temps, un euro reste égal à un franc. Une fois ce délai passé, on laisse filer le franc et le tour est joué. Sur le plan intérieur, la valeur des titres n'aura pas changé, par contre effectivement la dette exprimée en euro vaudra moins et ces titres de dette auront perdu de la valeur à l'échelle internationale. Mais franchement on s'en fout un peu.
Enfin dernier point sur ce petit débat. NDA n'a pas été bien clair sur la question des moyens et de la monétisation. Il aurait dû à mon sens prendre plus appui sur la période de la reconstruction d'après-guerre, époque durant laquelle on émettait du crédit productif. Il faut vraiment expliquer aux gens que la monnaie cela se crée. Et que la valeur de cette monnaie va dépendre ensuite de son usage. Un capital cela se fabrique. Et il n'y a aucune raison pour que la monnaie de base soit produite par le système bancaire privé sous forme de prêt à intérêt plutôt que par l'émission monétaire de la banque de France et de l'état. Pour ceux qui s'inquiètent de la dégradation de la note des titres des dettes françaises, rappelons que l'emprunt à l'étranger n'a de sens que pour combler le déficit commercial. Si vous n'avez pas de déficit commercial, vous n'avez pas besoin d'accumuler les emprunts à l'étranger. Lorsque par exemple l'état construit une route en France, avec des salariés français, des entreprises françaises, etc. Pourquoi devrait-il emprunter l'argent sur les marchés extérieurs? Si ce système a été instauré ainsi depuis 1973 c'est pour donner un argument comptable à ceux qui veulent la mort de la sphère publique française. Car les intérêts de la dette servent à déséquilibrer le budget de l'état et in fine à justifier la destruction et la privatisation de tous les services publics. Pour conclure sur cette question, je mets cette vidéo sur l'économiste iconoclaste Louis Even qui expliquait déjà cela dans les années 60.