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5 juin 2011 7 05 /06 /juin /2011 21:40

Comme je l'avais dit il y a quelque temps déjà, la croissance économique US va connaître un fort ralentissement, et le premier signe est la dégradation de l'emploi outre-Atlantique les chiffres étant assez mauvais. Le taux de chômage recommence à grimper avec une création d'emploi totalement insuffisante pour absorber l'accroissement de la population active. Et cela au moment où, le gouvernement US continue d'injecter des sommes  énormes dans l'économie du pays. Je rappelle que le déficit public estimé en moyenne annuelle pour cette année 2011 est de 8.8%. Et ce n'est qu'une estimation qui se base elle même sur un retour à la croissance. Et cela malgré deux épisodes de Quantitative easing successifs. Si la croissance n'est pas aussi forte que prévu ce qui est très probable, ce déficit sera largement dépassé. Les USA se retrouvent donc devant une contradiction phénoménale soit arrêter l'endettement et plonger l'économie dans une dépression auto-entretenue soit continuer à injecter de la monnaie dans le tonneau des danaïdes.  Cette contradiction est bien évidemment le fruit des orientations économiques prises par l'oncle Sam depuis trente ans à savoir un libre-échange total. L'argent injecté par l'économie américaine arrosant en fait de plus en plus l'extérieur de l'économie USA comme nous allons le voir par la suite. La puissance américaine est devenue l'empire de l'endettement, mais elle est prise dans ses contradictions et s'est probablement trop élargie en absorbant les nouvelles puissances émergentes. Les USA arrivaient très bien à dominer leur empire lorsqu'il ne s'étendait que sur l'Europe et le Japon, les excédents de ces deux zones dominées étaient encore supportables. Mais avec l'élargissement vers l'Europe de l'Est, l'Asie émergente et la Chine le morceau est probablement devenu trop gros pour l'économie américaine.

 

deficit-public.png

 

 

Les USA sont le seul moteur de la demande mondiale

 

 

Pour l'instant, cette dégradation de l'économie US ne se ressent pas sur le déficit commercial du pays qui recommence à se creuser depuis mai 2009. La reprise mondiale n'a été possible que parce que les US ont appuyé comme jamais sur l'endettement de leur propre économie. On mesure mal cet accroissement parce que les Américains n'ont pas hésité à en monétiser une bonne part. Lorsque le déficit commercial américain s'est seulement divisé par deux entre juillet 2008 et février 2009 la croissance dans les pays exportateurs comme l'Allemagne, le Japon, ou la Chine s'est effondré. Nous avons affaire là au cœur du fonctionnement de l'économie mondiale. Les USA sont le seul moteur de la demande qu'il vienne à caler et toute la structure s'effondre. Je vous laisse imaginer la situation en Europe et en Asie si les USA se mettaient à équilibrer leur balance commerciale. En 2009 l'Allemagne a vu son PIB reculer de 4.7%, la Chine est passée à 8.4% alors qu'elle était habituée à une croissance de plus de 10%, quant au Japon il recula de 6.3%. Si les USA réduisaient leur déficit à néant, on pourrait facilement imaginer une récession de 8% en Allemagne, une croissance à 5% en Chine et un recul de 12% au Japon. On comprend là tout le ridicule qu'il y a chez certains à réclamer de la rigueur aux USA alors qu'une telle politique produirait à court terme un effondrement des principaux donneurs de leçon comptable de la planète.

 

 

balnce-commerciale-long-terme.png

 

Trade.png

 

  Nous en revenons donc toujours à cette question. Pourquoi les nations du reste du monde préfèrent-elles l'asservissement par la dette US? D'où vient cette esprit de servitude volontaire qui conduit toute l'humanité à dépendre ainsi de la capacité des USA à s'endetter indéfiniment? On pouvait croire que la crise allait mettre fin à cette situation, il semble pourtant que le système reparte de plus belle en atteignant des niveaux toujours plus incroyables de déséquilibre. Les Européens et les Asiatiques préférant continuer à torturer leur propre population pour acquérir leurs précieux excédents commerciaux, plutôt que de tirer leur croissance de leur demande intérieure. La raison principale est probablement dans le fait que cette orientation économique permet aux élites des différents pays excédentaires d'avoir de la croissance sans avoir à augmenter les salaires et sans avoir à mieux répartir les richesses. L'inconvénient c'est de devoir supporter la lourdeur de la puissance américaine sur les épaules.

 

  Bientôt une rechute de l'économie mondiale?

 

Cependant, cette stratégie visant à faire des USA l'état keynésien de la planète entière (expression utilisée par Emmanuel Todd dans  « Après l'empire ») a un énorme point faible. L'accumulation de déficits commerciaux rend de moins en moins efficaces les plans de relance américains, comme je l'avais expliqué dans ce texte sur le multiplicateur keynésien. L'affaiblissement de l'efficacité des plans de relance est aujourd'hui palpable, elle décline continument depuis l'époque de Reagan. Avec une franche accélération depuis le début des années 2000. Déjà à l'époque de Bush la croissance américaine après la bulle internet a mis plus de temps qu'à l'accoutumée pour reprendre son souffle et elle a connu une croissance au final assez lente au prix d'une bulle immobilière énorme. Comme les déséquilibres commerciaux du pays n'ont cessé de croitre, une part de plus en plus importante de la masse monétaire sort chaque année du pays. Pour maintenir la croissance, il faut donc que l'état américain injecte des sommes de plus en plus importantes pour maintenir le dynamisme économique à un niveau suffisant. À l'heure actuelle malgré un déficit record et deux QE successifs le chômage recommence à croitre et la croissance retombe. Il faudra donc que les USA aillent plus loin encore avec un troisième QE s'ils veulent toujours maintenir leur système de libre-échange total.

 

On peut conclure de cette situation que les pays excédentaires sont devenus trop gros et trop nombreux pour que les USA arrivent à en supporter les effets. Et pour cause, les USA ne représentent plus qu'un quart du PIB mondial. Une part qui décroit d'ailleurs chaque année. Il est normal que leur influence décroisse et que leurs plans de relance aient de moins en moins d'effets à l'échelle planétaire. Les autres régions du monde devraient prendre leurs responsabilités, mais elles préfèrent se comporter en prédateur commercial. La politique de Quantitative easing actuelle n'est qu'une réponse à ces déséquilibres monstrueux que l'économie américaine est obligée de supporter. Bon nombre d'économistes pensent que cette politique va nous mener à une hyperinflation mondiale, en réalité cette politique nous a évité pour l'instant une déflation planétaire. Déflation résultant des politiques mercantilistes agressives d'une partie croissante de bon nombre de pays et de la déflation salariale provoquée par le libre-échange entre des zones économiques très hétérogènes. Encore une fois, le déficit américain permet la mondialisation de fonctionner s'il venait à disparaître, s'en serait fini de la mondialisation. Malheureusement, il y a peu de chance pour que nous connaissions une sortie par le haut de cette situation, nous le voyons rien qu'à l'échelle européenne. L'Allemagne et les autres pays excédentaires continuant à tirer la couverture à eux tout en nourrissant les mécanismes qui mettront fin à la monnaie unique.

 

On dit souvent que la crise des années 30 fut le résultat du retour du protectionnisme, quiconque est bien informé sait qu'il n'en est rien. Le protectionnisme fut la nécessaire politique menée par les pays qui ne pouvaient plus supporter les excédents d'autres nations. Nous vivons exactement le même phénomène. Les pays en déficit doivent soit suivre les pays excédentaires et comprimer leur demande intérieure en provoquant misère et chômage ainsi qu'une délation à l'échelle planétaire. Soit se protéger pour permettre un retour à leur demande intérieure sans avoir à se soucier de leurs déséquilibres commerciaux. L'Amérique est aussi dans cette situation, elle doit de plus compter sur le plan intérieur avec une extrême droite libertarienne prônant des politiques qui seraient en pratique suicidaire pour l'oncle Sam. On imagine si les USA essayaient à leur tour de devenir excédentaires dans quel état se retrouverait l'économie mondiale. C'est d'autant plus vrai que comme vous pouvez le voir ci-dessous le Baltic Dry, qui est un bon indicateur de l'évolution du commerce mondial, est loin d'avoir rejoint son niveau d'avant crise.

 

 

Baltic-dry-juin-2011.png

 

On peut aussi imaginer un scénario étrange autre que celui du retour du protectionnisme américain ou d'une déflation planétaire. Ce scénario serait celui évoquer par Todd dans l'ouvrage précédemment cité, de l'arrivée à complétude de l'empire américain. Les USA n'équilibreraient plus du tout leurs comptes extérieurs et se contenteraient d'émettre indéfiniment de la monnaie pour couvrir leurs déséquilibres. Todd ne croyait pas vraiment à un tel scénario, mais qui sait ? On objectera que le dollar devrait tomber, mais force est de constater que trop de monde à intérêt à court terme à le maintenir. L'euro ne risque pas de le remplacer et la Chine est tout aussi obsédée que le Japon ou l'Allemagne par ses excédents pour courir le risque de changer le système. L'Amérique est peut-être en passe de devenir une espèce de banque du monde vis-à-vis de laquelle nul ne se demande d'où viennent ses prérogatives. Est-ce si inimaginable? Nous qui vivons déjà dans un monde étrange où des acteurs privés peuvent faire des bénéfices en prêtant de la monnaie qu'ils n'ont pas par un simple jeu d'écritures.

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commentaires

Y
<br /> <br /> @ Emmanuel B<br /> <br /> <br /> Oui c'est déflation qu'il fallait lire mais vous l'aviez compris .<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> @La Gaule<br /> <br /> <br /> Alors cette fois c'est à moi de vous donner une leçon d'histoire. En fait j'ai revue les textes de Paul Bairoch sur la question et il se trouve que la GB était sortie de la crise par exemple.<br /> Mais il est les vrai que la guerre nous empêche d'imaginer ce qui se serait passer en tamps normal si je puis dire. De plus il ne faut pas oublier quela mondialisation à l'époque c'est<br /> essentiellement les pays occidentaux. Il y avait bon nombre re régions du monde y compris les colonie qui vivaient leur propre vie. Pour Todd c'est un rationnaliste positiviste quand quelque<br /> chose est aberrant il pense que la raison humaine y mettra naturellement fin. C'est peut-être vrai à très long terme, mais l'humanité a montré qu'elle pouvait vivre longtemps avec des régimes<br /> politiques ou des organisations économiques absurdes. On a bien cru que la terre était plate pendant des siècles... <br /> <br /> <br />  @capinego<br /> <br /> <br /> On a pas besoin d'une guerre pour relancer les économies. Seulement les esprits grégaires de certains les obligent à avoir une raison énomre pour débloquer des sommes en quantité nécessaire pour<br /> que l'économie fonctionne. Mais j'insiste sur el fait que le problème fondementale ne vient pas vraiment des USA. Il vient plutôt de l'Europe et de l'Asie qui se comportent comme simples<br /> exportateurs; Il suffirait que ces deux régions, et les pays excédentaire relancent leurs demandes intérieures pour que les déséquilibres se résorbe naturellement et que la croissance reparte.<br /> Seulement nos dirigeants ne sont effectivement pas raisonnable et poussent sans trop s'en rendre compte à augmenter les conflit en exportant leurs problèmes dans d'autre pays. Pour ce qui est du<br /> risque de guerre je me répète mais je n'y crois absolument pas. On est plus en 1940 les guerres entre grandes puissance ne sont plus possible à cause de l'arme atomique. Il y aura juste des<br /> conflits locaux mais pas de quoi produire un nouvel effort de guerre comme à l'époque de Roosvelt.<br /> <br /> <br /> <br />
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E
<br /> <br /> " ... les pays en déficit doivent suivre les pays excédentaires et comprimer leur demande intérieure en provoquant misère et chômage ainsi qu'une délation à l'échelle<br /> planétaire."<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Il y a des coquilles qui sont droles, il y en a d'autres qui fonctionnent comme des lapsus révélateurs, mais pas au sens de la psychanalyse ici : parce que c'est vrai le système produit bien une<br /> sorte de "délation à l'échelle planétaire".<br /> <br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Ceci étant, rien ne restera dans le domaine du raisonnable économiquement. OBAMA est, comme SARKOZY, en pré-campagne longue de ré-élection.Comme dans sur un champ de bataille, on bourre la plaie<br /> ouverte du blessé américain, en attendant l'ambulance de 2013.<br /> <br /> <br /> les états-unis c'est une sorte de grèce grassouillette, menteuse avec la m^me aide de GOLMANN, avec quasiment les mêmes chiffres bidouillés. la seule différence est que les grecs sont maigres,<br /> savent ce qu'est la démocratie et courent bien dans les manifestations. De plus, ils ne possèdent pas les agences de notation privée à leur botte.<br /> <br /> <br /> les états-unis se comportent exactement comme dans le militaro-industriel. Ils créent des points de friction, dans des pays de seconde zone (GRECE,PORTUGAL) comme des sortes d'IRAK économiques.<br /> Et pendant ce temps-là, la planche à billets tourne et l'euro monte, ainsi que le franc suisse.<br /> <br /> <br /> une politique d'AFGHANISTAN économique conduit à autant de meurtres d'emplois et de précarité. Le pire est qu'ils ne maîtrisent rien du tout, car on ne bâtit pas un pays sur un racket à la rome<br /> antique.Bientôt, on va distribuer dans les écoles du lait concentré, comme j'ai connu en 1956.<br /> <br /> <br /> Le plus inquiétant est que si je me place dans le raisonnement militaro-industriel du tea_party bushien, la seule issue est une guerre, civile ou pas, en EUROPE DU SUD, vers 2013.c'est la<br /> seule manière de reprendre l'empire, sans risque en étant à distance économique et guerrière, avec un gavage de folie, avec un nouveau plan MARSHALL remboursé en 20 ans.Même avec toute la<br /> symphatie sur la situation d'acquis de démocratisme guerrier maghrebin et autre, les ETATS-UNIS ne vont-ils pas nous contraindre à voler au secours d'un ISRAEL et nous balancer dans une<br /> guerre de croisade économico-religio-petrolo-militaire autour de la méditerranée, avec la bénédiction dont des chino-algéro-iraniens? En plus, sur le terrain, cela va être une vraie boucherie,<br /> car, en face, beaucoup aurant la bombe nucléaire (dont l'IRAN). On aura droit qu'aux armes conventionnelles... et au terrorisme.<br /> <br /> <br /> Tous ces chiffres présentés restent bidons pour un décisionnaire à la REAGAN ou BUSH. il y a toujours deux cannonières, économiques et militaires,prêtent en prendre la mer et, exclusivement, à<br /> destination de l'EUROPE. Le lendemain, vos chiffres sont balayés comme un fêtu de paille.<br /> <br /> <br /> WALL STREET, en programmant la fin de BRETTON WOOD(je ne suis pas sûr du nom) ont programmé une troisième guerre mondiale. Ils devraient être conduits manu-militari à une table de négociation,<br /> avant que ce ne soit YALTA.<br /> <br /> <br /> Comme dit le vieux médaillé: rien ne vaut une bonne guerre, après trop de paix, soit plus de 65 ans aujourd'hui.Il est temps qu'elle prenne sa retraite! C'est d'autant plus vrai, qu'aucun<br /> décideur politique, jusqu'à présent, n'a été formé autrement qu'en management de sortie de guerre, c'est à dire dans le simplicisme de la croissance de reconstruction. Tout le monde n'a pas le<br /> malheur chanceux d'un tsunami que l'on peut qualifier d'économiquement biblique. Cordialement.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> Oui, mais le monde n’est pas sorti non plus de la crise des années trente par la mondialisation du protectionnisme mais par la mondialisation de<br /> la guerre. Ce détail mis à part, il est exact que le système bancaire américain mondial (appelons-le ainsi) peut en théorie fonctionner jusqu’à l’absurde. Todd est de toute façon trop optimiste<br /> pour envisager une solution réellement déraisonnable au mécanisme.<br /> <br /> <br /> <br />
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