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30 octobre 2023 1 30 /10 /octobre /2023 16:52

 

On avait déjà remarqué le fait que les élites de l'occident n'avaient plus toute leur tête avec la crise du Covid. La guerre en Ukraine a accéléré le processus, les élites occidentales ayant perdu tout sens des réalités, en particulier en Europe, et cette folie collective a entraîné la pauvre Ukraine dans un bourbier sans fin où elle perd sa jeunesse, déjà peu nombreuse, dans un conflit qu'elle ne peut gagner. La raison aurait dû pousser l'Ukraine à négocier dès le début, mais les politiciens d'occident en ont décidé autrement et ont poussé ce pays à maintenir un conflit dramatique pour leur avenir. S'il est très facile de trouver des raisons objectives à ces hystéries et à cette colère occidentale comme nous allons le voir, il ne faut pas réduire non plus cette hystérie à un phénomène purement occidental. En effet, l'hystérie touche toutes les sociétés, y compris les nouvelles puissances montantes. Il ne faut pas croire que l'occident à l'apanage de l’irrationalité . Les mouvements antisémites et islamistes qui profitent du conflit en Israël pour nourrir leur propagande, y compris en France, valent bien les va-t-en-guerre du gouvernement israélien ou américain. Du reste, les extrêmes se nourrissent les uns les autres, car le conflit les fait exister.

 

Il faut sauver l'empire américain

 

L'ambiance dans l'occident actuel, ou ce que l'on appelle de façon excessive l'occident, est clairement sombre et pessimiste. Pour commencer, définissons clairement l'occident dont nous parlons. Il s'agit bien évidemment de l'empire américain. Ce qui explique que des nations qui ne sont clairement pas occidentales d'un point de vue culturel puissent être vues comme occidentales à l'image de la Corée du Sud et du Japon. À l'inverse l'Amérique du Sud qui est totalement occidentale d'un point de vue culturel se retrouve exclue étrangement du club. L'occident tel qu'il est utilisé sans précision par les masses médias c'est donc les nations qui font partie du système économique américain mis en place après la Seconde Guerre mondiale. L'Europe de l'Ouest et l'Asie d'Extrême-Orient ayant été acquis par l'invasion militaire américaine suite à la défaite germano-nipponne. Dans le passé on n'aurait pas hésité à présenter cela comme un empire avec ses vassaux et ses colonies. Mais après la Seconde Guerre mondiale, les empires n'avaient plus bonne presse, il fallait donc inventer autre chose. De là est parti à mon avis l'imbroglio linguistique qui fait user de termes imprécis la définition de cet empire qui ne veut pas qu'on l'appelle ainsi. Parfois, il se singe aussi en communauté internationale.

 

Cependant, il est vrai qu'après guerre étant donné les rapports de force technologiques, humain et industriel, on pouvait considérer l'Empire américain comme un empire pratiquement planétaire par son influence. L'URSS et la Chine étaient des nains à côté . En contrôlant l'Europe et le Japon, les USA détenaient alors au moins 80 % de l'industrie et de la richesse de la planète. Mais voilà en vassalisant ces régions, l'empire a petit à petit entraîné leur déclin. Et la globalisation que l'Empire a voulu imposer à partir des années 70, surtout pour financer les effets de la guerre du Vietnam sur son économie, a déplacé petit à petit le centre de gravitation de la richesse mondiale vers des états qui n'étaient entièrement dominés par Washington. Illustrant à merveille les propos de Lénine disant que les capitalistes vendraient la corde avec laquelle il les pendrait, les USA, par courte vue et clientélisme politique, ont favorisé les puissances qui aujourd’hui les font tomber. À tel point que la question du dollar comme monnaie de réserve internationale est de plus en plus sur la table. La fin de ce statut représentant une véritable épée de Damoclès sur la tête de l'oncle Sam.

 

C'est dans ce contexte que l'effet hystérie arrive. En effet, la perte de puissance et l'incapacité à agir comme on le faisait avant crée une angoisse chez les dominants. C'est vrai aux USA où les élites multiplient depuis des années les plans tordus et les stratégies pour maintenir à tout prix leur domination si lucrative pour leur classe sociale. Mais c'est aussi vrai pour les élites secondaires, celles des vassaux qui ont une peur panique de la fin de l'empire américain. Car si l'empire est une structure économique qui a enrichi une population. Il ne faut pas oublier que les empires ont aussi comme caractéristique d'avoir de fortes inégalités internes. L'empire par nature rend inutiles les producteurs locaux, les importations coûtant moins cher grâce justement à la domination impériale. C'est là la maladie mortelle qui tue les empires. La source de leur prospérité est également ce qui les conduit au déclin au fil du temps. Grâce au dollar, les USA ont pu consommer gratuitement, avec des dollars qui ne tient qu'à eux d'émettre comme disait de Gaulle, des marchandises venant de la terre entière. De sorte que l'immense capacité de production des USA de 1945 déclinera jusqu'à presque disparaître puisque les producteurs locaux n'étaient plus utiles. L'économie impériale devient un système de ponction économique alimenté par l'émission monétaire permanente qui permet d'acheter des biens à l'extérieur et des entreprises. C'est de là que vient l'exceptionnel déficit commercial permanent des USA.

 

Mais la ponction impériale ne s'est même pas arrêtée aux biens , aux entreprises et aux services, les personnes elles-mêmes sont importées pour faire tourner l'Empire. Aujourd'hui, les centres de recherche américains ne pourraient plus fonctionner sans ses chercheurs chinois, indiens ou européens. Là aussi la logique impériale a parlé, il est moins coûteux d'importer des gens formés que de les former soi-même. Les USA ont donc renoncé à instruire leur jeune correctement pour se concentrer dans l'importation de gens déjà formés qu'ils conditionnent à leurs besoins ensuite dans leur réseau universitaire. C'est comme cela qu'il se retrouve avec un niveau d'instruction générale lamentable, mais un bon système universitaire très coûteux. Ce système de pillage est aujourd’hui indispensable au fonctionnement même des USA. Car sans ce flux de marchandises et de personnes permanent les USA s’arrêteraient simplement de fonctionner, les magasins seraient vides et plus personne ne pourrait faire fonctionner le pays. L'hystérie vient de cette extrême dépendance, d'autant qu'en cas de perte du dollar la population extrêmement armée et violente des USA pourrait déchaîner sa colère dans tous les sens. Les multiples conflits internes étant maintenus par l'arrosage monétaire impériaux. Je continue de penser que la fin de l'empire américain sera beaucoup plus violente pour la population de l'empire que celle de l'URSS. On comprend mieux dans ces conditions la pression permanente qui pousse parfois les élites à l'hystérie surtout lorsqu'il faut défendre les précarrés de l'empire contre la Russie ou la Chine.

 

Chez les élites des vassaux, la situation est un peu différente. Les pays européens sont eux-mêmes victimes de la domination américaine. On l'a particulièrement vu avec l'affaire Nord Stream, l'Allemagne qui a subi un acte de guerre à son encontre de la part des USA n'a même pas réagi. Les USA prennent des ponctions régulières sur le Japon et l'UE. Ils aspirent la richesse humaine et financière de ces régions avec la complicité des élites locales. Ce fut même littéralement explicite au moment des accords de Plaza dans les années 80 qui obligèrent littéralement l'Allemagne et le Japon à financer les déficits extérieurs US. Cependant si les USA sont impitoyables et détruisent toute concurrence potentielle venant d'Europe ou d'Asie de l'Est, ils savent par contre amadouer les élites locales. On parle souvent de la « French american fondation », mais la corruption ce n'est qu'une petite partie du problème. Les USA sont les champions de l'inégalité sociale, ils promeuvent un modèle brutal pour la grande majorité de la population, mais extrêmement agréable pour ses élites. L'adulation que nos propres dirigeants ont pour les USA n'est donc pas le fruit que d'une affaire de corruption. Les USA plaisent vraiment aux élites, c'est un peu leur paradis absolu. Ajoutons à cela que les USA sont un peu le défenseur en dernier ressort des élites européennes. Nos élites ont une peur panique de se retrouver face à leurs responsabilités et aux conséquences de leurs politiques. Le protecteur extérieur est donc pour elles une garantie de sécurité face à leur propre peuple. L'américanophile délirante des élites françaises qu'on voit en particulier depuis l'arrivée de Macron est aussi liée à leur haine et à leur peur concomitantes de leur propre population.

 

L'actuelle israélophilie délirante de nos élites ne vient pas d'une adulation d’Israël, mais des USA. C'est parce que les USA ont fait de l'état hébreu leur coqueluche que nos élites sont à ce point pro-israéliennes. Il en va de même pour la détestation de la Russie d'ailleurs. L'hystérie européenne est donc surtout un suivisme extrémiste des positions US. Il faut plaire au maître pour qu'il ne nous abandonne surtout pas. Et puis au passage on peut peut-être espérer de bons postes ensuite quand on aura changé de carrière. L'hystérisation des positions en Europe est donc à mon avis en grande partie liée à cette situation de suzeraineté US et d'absence d'autonomie. Ce qui n'a d'ailleurs pas échappé aux grandes puissances russes et chinoises qui n'écoutent plus vraiment les positions européennes considérées comme sans intérêt. Mieux vaut négocier directement avec le chef américain.

 

Hystérie collective, média et violence mimétique

 

Mais à ce phénomène d'hystérie, des élites s'additionnent d'autres mécanismes qui favorisent l'extrémisme dans le débat public. Je vois trois facteurs prépondérants à ce phénomène. Le premier est la baisse générale du niveau des personnels politiques et des journalistes. Il suffit de regarder le niveau des hommes politiques des années 60 par exemple pour comprendre à quel point le niveau général s'est effondré. L'absence de recul culturel et intellectuel favorise à lui seul la montée des violences. En effet, l'inculture ne permet pas d'exprimer des idées complexes et de décrire le monde avec des nuances. L’appauvrissement du langage entraîne quant à lui une incapacité à penser correctement tout en empêchant d'exprimer aussi ses idées avec clarté. Si l’abêtissement de la population et des élites n'est pas l'unique source de toute cette hystérie et cette violence, cela participe clairement à la dégradation du débat public sur tous les sujets. La culture amène naturellement à la pondération, elle donne du recul. C'est particulièrement vrai de la culture historique qui permettrait à nos dirigeants de prendre avec des pincettes les discours extrêmes que l'on peut lire régulièrement dans les grands médias et sur internet.

 

Et les médias, j'y viens maintenant, sont bien évidemment l'autre grand facteur d'alimentation de l'hystérie. Par leur nature immédiate, ils empêchent la pensée et se focalisent sur l'émotion, le pathos plutôt que sur le logos. C'est bien évidemment particulièrement vrai pour les médias vidéo et audio, l'écrit favorisant plutôt le recul et la réflexion (je parle ici de l'écrit long, pas des réactions twittées qui s'apparentent souvent à des réactions sans réflexion) . Les médias d'ailleurs ne sont pas totalement étrangers à la baisse du niveau général de la population, mais aussi et surtout de celle des élites. En effet la réussit médiatique conditionne la réussite politique. Dans nos « démocratie », c'est la quantité de fois où vous apparaissez dans les médias, et le nombre de vus qui compte, plus que la qualité de votre discours. La concurrence marchande et à la course à l'audience particulièrement prégnante dans les médias, y compris sur internet, conduits naturellement à la l'élimination des plus pondérés et rationnels. Car ce n'est pas vendeur d'êtres trop sage et rationnel dans les médias. D'où l'explosion de la démagogie en politique, les trois grands groupes politiques dominants notre pays étant tous dominé par des démagogues que ce soit Emmanuel Macron, le démago eurocentriste ultralibéral, Mélenchon le démago d'extrême gauche qui fait du clientélisme électoral et réduisant les immigrés à leur religion, ou madame Le Pen qui raconte vouloir sauver la France tout en restant dans l'UE et dans l'euro. Aucune de ces personnes n'aurait un tel poids dans notre société si les médias favorisaient la raison et le dialogue rationnel. C'est au contraire les coups médiatiques qu'ils favorisent et donc l'hystérie et l'irrationalité.

 

Dernier facteur, et non des moindres, celui de la violence mimétique. Ce célèbre concept qui a été mis en exergue par René Girard explique assez largement pourquoi la violence apparaît aussi facilement dans nos sociétés. Car si la violence est dramatique, et conduit à des désastres et parfois à la guerre, elle a aussi une fonction sociale. La violence n'existe pas par hasard, elle a une fonction d'unification et de liant social. On peut résumer ça à la guerre sépare en rassemblant. Elle sépare les groupes, mais rassemble les individus. Par la séparation des groupes, elle crée en quelque sorte ces groupes. C'est un paradoxe, mais c'est pourtant ce que l'on observe assez facilement dans les groupes humains dès la petite enfance. On observe dans les jeunes classes des formations de groupe par l'opposition parfois violente. C'est de cette idée qu'est née l'idée de bouc émissaire de René Girard. Le bouc émissaire servant d'expulsion de la violence par la désignation d'une victime. Là encore, les soufres-douleur dans les écoles sont souvent les boucs émissaires à petite échelle qui permettent de créer des groupes contre eux. La violence a donc cet usage social fondamental et attristant.

 

Dans le conflit entre Israélien et Palestiniens, on voit bien le rôle jouer par la violence. Du côté israélien la violence du Hamas permet de réunifier un groupe très hétérogène à la base. Car la population israélienne est extrêmement divisée, que ce soit parce qu’elle est d'origine très diverse, sur le plan religieux entre laïc et juifs orthodoxes ou que ce soit sur le plan idéologique. La violence ici est donc un mécanisme qui permet de donner un ennemi commun qui rassemble et fait taire les dissensions. De la même manière, les réactions très violentes d'Israël permettent d'unifier les Palestiniens derrière le Hamas, et de nourrir la chimérique oumma des islamistes en faisant taire les dissensions locales. On le voit ici, ce mimétisme de la violence est malheureusement intéressant pour les deux groupes. On pourrait dire que les deux côtés ont intérêt à la montée de la violence pour ne pas se retrouver fragmentés par une paix trop longue. Sur notre bonne vieille terre de France, le même type de mécanisme existe malheureusement. Les islamistes qui veulent impérativement empêcher la population musulmane de s'assimiler nourrissent cette violence et utilisent les réactions extrêmes de certains pour maintenir l'esprit de l’oumma chez les immigrés les moins croyants. La violence est le fondement de leur existence en quelque sorte et ils ont besoin de la violence de l'extrême droite ou de l'état pour exister. Et inversement, les extrémistes de l'identité françaises ont aussi besoin des islamistes pour exister. On comprend mieux d'ailleurs leur passion pour Israël quand on comprend ce besoin.

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