Je prends le risque de radoter, mais vue la stupidité de nos dirigeants et leur incapacité chronique à comprendre d'où viennent les problèmes on est bien obligé de répéter. La crise économique que nous connaissons depuis 2007 n'est pas un accident ou le fruit de la météo. Elle n'est pas non plus le fruit de malversations en tant que telles, ou le fruit d'une corruption qu'il suffirait de régler pour sortir la tête de l'eau. La crise est une crise de surproduction à l'échelle mondiale et de sous-rémunération du travail. C'est un problème fondamental de solvabilité des consommateurs. Les cris répétés qui visent le protectionnisme comme étant la source du malheur du monde sont donc complètement à coté de la plaque et montre le degrés d'irréalisme auquel sont confrontés les dirigeants de la planète. Car même si les dirigeants reconnaissent des problèmes comme les déséquilibres structurelles de l'économie mondiales, la divergence des intérêts nationaux ne peuvent en aucun cas permettre de résoudre dans la paix, et la fraternité, ces problèmes. On est pas dans une série américaine où tout fini bien et où on trouve un compromis entre tout les partis présents. Le monde réel c'est le rapport de force, la violence et rien d'autre, et le libre-échange à fait exploser le niveau de violence en rendant chaque peuple dépendant des autres. C'est ce qui explique les échecs répétés de ces réunions débiles type G20 ,que l'on devrait plutôt baptiser Grien vue les résultats mirobolants qu'ils obtiennent à chaque fois, et tout çà aux frais des contribuables. Notez que cette fois ci la réunion fut accueillie par des anti-mondialistes coréens nettement plus rationnels, à n'en pas douter, que les chefs d'états invités.
Les chinois veulent que les USA réduisent leurs déficits mais surtout qu'ils ne taxent pas leurs produits. Les américains veulent mettre fin à ces mêmes déficits mais sans avoir à contracter leur consommation intérieure et donc leur PIB. Même chose en Europe avec le géant allemand qui trône au milieu donnant des leçons à tout le monde sans jamais remettre en cause ses propres principes. Bref vouloir trouver, de façon centralisée, une solution permettant de prendre en compte tout les intérêts des participants en même temps relève de la vidange des écuries d'Augias, c'est impossible, humainement parlant. Alors on fait des accords à minima n'exigeant rien, ni contrainte, ni action collective. A l'image de l'UE incapable de prendre la moindre décision concrète sur quoi que ce soit, le résultat est le statut quo, le laissez-faire tant dénoncé par certains. Mais comment pourrait-il en être autrement? Et c'est là que nous voyons toute l'absurdité de la mondialisation, en rendant interdépendante les nations de façon excessive, elle a condamné toute politique nationale à l'impuissance. Et comme dans le cas de l'UE il n'y a pas d'intérêts communs, ni même de solidarités communes aucune action collective n'est envisageable. On baigne donc dans l'impuissance généralisée et ce ne sont pas les grands discours qui y changeront quelque chose.
La quadrature du cercle de la mondialisation
La question des paradis fiscaux par exemple est emblématique des incohérences mondiales. D'un coté on voit des pays condamner sans équivoque ces états pirates, mais de l'autre on ne prend comme simple mesure qu'une volonté d'harmoniser les fiscalités. Or il est impossible, et d'ailleurs anti-démocratique, de vouloir harmoniser les fiscalités, chaque peuple à le droit de faire la fiscalité et qu'il veut, ce n'est pas à la France d'imposer un niveau d'impôt minimal à la Suisse par exemple. Donc vouloir combattre les fameux paradis fiscaux par des opérations de polices internationales, c'est à coup sûr, faire atteinte aux droits des peuples à disposer d'eux mêmes. Et de toute façon les capitaux iront toujours là où la fiscalité est avantageuse, donc à moins de faire une fiscalité unique sur toute la planète on ne peut pas résoudre le problème. On trouvera surement quelques gugus à gauche pour faire ce type de propositions, mais la réalité c'est que vouloir harmoniser la fiscalité que ce soit en Europe ou pire à l'échelle mondiale revient ne rien faire de concret, si ce n'est amuser la galerie et détourner l'opinion de vrais solutions.
Le monde est au prise avec un problème qui a trop de variables et d'interactions pour être résolu de façon rationnelle. Il est physiquement impossible de trouver une harmonie mondiale parce que les interactions entre les nations rendent chaotique au sens mathématique le système monde. Comme je l'avais expliqué sur la question monétaire, lorsque l'on multiplie les interactions, les liens entre différents systèmes nationaux, on introduit du chaos. Bien loin d'apporter la prospérité, la mondialisation rend impossible le progrès réel et forme des effets de plus en plus imprévisibles qui s'étendent sur toute la planète. Un pays qui dévaluera sa monnaie parce qu'il a un déficit avec un certain pays, produira comme effet secondaire des problèmes avec un pays tiers, et ce faisant, poussera ce dernier à lui même dévaluer et ainsi de suite. Le régime des changes flottants est chroniquement instable et ce n'est que la présence d'un acheteur en dernier ressort les USA qui permettait à toute cette absurdité de fonctionner. Il ne faut pas oublier non plus les multiples interactions provoquées par les acteurs privés qui, grâce à la libéralisation financière, ont pu compliquer encore plus la gestion des monnaies. Chaque pays dépendant du voisin n'a plus guère de possibilités d'action concrète. L'interdépendance nationale conduit donc à l'inaction politique et au chaos généralisé.
La frontière met de l'ordre, sa suppression met le chaos
Régis Debray a récemment fait une éloge de la frontière, il a même dit "La première frontière c’est la peau" et c'est essentiel. Les propos de Regis Debray étaient très intéressants en cela qu'il ramenait sur le tapis la nécessité des frontières pour l'être humain et pour son bon fonctionnement individuel. Mais dans le domaine économique on peut dire que la frontière c'est l'ordre, c'est ce qui met de l'ordre dans le chaos. Ce qui permet l'action collective et ce qui permet de rendre possible l'intelligibilité du monde. Sans les frontières le monde devient flou, incontrôlable, il n'y a plus alors de pilote dans l'avion. C'est ce qui donne ces réunions grotesques où l'on multiplie les grandiloquences mais d'où rien ne sort de concret. Revenons à notre problème de paradis fiscale, si insoluble dans le cadre de la libre-circulation des capitaux, il devient pourtant étonnamment simple si l'on met des frontières à ces mêmes capitaux. Les frontières rendent possible la simultanéité de différentes fiscalités à travers la planète, chaque nation formant un champ fiscal relativement clôt, la souveraineté peut alors tout entière s'exercer. La fiscalité des uns ne nuisant plus à celle des autres. C'est la libéralisation des capitaux qui produit le problème des paradis fiscaux et non la diversité fiscale qui a en réalité toujours existé. Même chose pour la pauvre Amérique, en mettant des frontières aux marchandises, la hausse de sa demande intérieure nourrit, soit par la dette publique, soit par la hausse salariale, retrouvera son efficacité et relancera avant tout les industries américaines. Fini la croissance qui part en Asie à travers les importations. A l'inverse le retour des frontières ferait en sorte que l'Allemagne ou la Chine n'aurait plus à attendre que les USA ou d'autres relancent leur demande pour voir leur croissance repartir. Ils leur suffiraient de relancer leur propre demande, ces pays ne réalisent pas combien leurs exportations nuisent gravement à leur indépendance. Qu'une nation comme l'Allemagne ait des exportations représentant 50% du PIB c'est extrêmement dangereux que se passerait-il si la demande extérieure s'effondrait? Ou si les clients préféraient le Made in China? Ce que l'on présente comme un avantage face aux déficits américains n'est rien d'autre qu'une autre forme d'aliénation de sa propre souveraineté, c 'est mettre le futur bien être allemand entre les mains de la demande de puissances étrangères.
En réalité les frontières sont en fait une solution élégante à tout nos problèmes, bien loin de mener à la guerre elles apportent la paix sauf peut-être si elles sont mal tracées, comme le dit si bien Régis Debray. Mais dans le domaine économique les frontières sont plus simple à réaliser que dans le cadre des rapports géostratégiques. Il reste que ces solutions élégantes sont également celles qui sont les plus critiquées. Et l'on pouvait entendre quelques crétins nous dire à quel point le protectionnisme potentiel américain est une horreur, alors même que c'est la situation des salariés américains qui est une horreur. Mais cela fait bien longtemps que le sort des employés n'est plus une priorité des "économistes". Ce faisant nos dirigeants continuent à chérir les causes de tous nos problèmes, on ne s'étonnera donc pas que la crise continue. Chaque nation essayant tant bien que mal d'exporter les conséquences de la baisse de la demande mondiale chez sa voisine. Je me vois donc contraint d'inverser le discours habituel, et contrairement à ce qu'affirmait le pauvre Dominique De Villepin dans son discours de juin dernier en vérité "Le protectionnisme c'est la paix" "le Libre-échange c'est la guerre" et non l'inverse.