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15 mai 2023 1 15 /05 /mai /2023 17:13

 

Notre grand leader charismatique et magnifique vient donc de nous faire entrer dans l'ère de la réindustrialisation. Pour faire oublier sa lamentable « réforme » des retraites, Macron n'a rien trouvé de mieux que de faire une communication sur la réindustrialisation avec l'usine de batterie de Dunkerque. Et le mot communication est très important dans tout ça, car avec les hurluberlus qui nous dirigent depuis 50 ans, c'est bien la communication qui compte et non le résultat. On le voit régulièrement dans tout un tas de domaines où la communication dans les médias forme la seule colonne vertébrale de l'action politique en France . Et il y a fort à parier que ce sera la même chose pour la réindustrialisation malheureusement. Il est déjà extrêmement curieux qu'un homme qui a passé toute sa carrière à vendre des bijoux industriels français à des puissances étrangères devienne subitement un défenseur acharné de la souveraineté industrielle du pays. Rappelons ensuite que pour Macron lorsqu'il parle de souveraineté celle-ci est européenne dans sa tête pas française, il l'a même dit et répété plusieurs fois. On ne saurait donc lui faire confiance aveuglément lorsqu'il parle de réindustrialiser le pays.

 

 

Et surtout sa politique industrielle n'a strictement aucune cohérence ni aucun sens des priorités pour l'instant. Car avant de parler de réindustrialiser le pays, il faudrait déjà commencer par arrêter l’hémorragie provoquée par les absurdités plus ou moins récentes de l'économie française les faisant fermer à tour de bras. Par exemple, l'industrie automobile française est passée entre 2005 et 2022 de 3,5 millions de véhicules produits par an à seulement 1,3. Il s'agit là d'un désastre parce que ce n'est pas uniquement l'automobile qui est touchée, mais aussi toutes les petites entreprises industrielles qui vivaient en partie des commandes de l'industrie automobile. Il s'agit là d'un cas typique de destruction du biotope industriel. Or comme je l'ai déjà souvent dit sur le blog, l'euro a été le vrai moteur de cette destruction, on voit clairement l'effet de l'euro sur la dégradation de notre capacité de production. La France qui produisait des véhicules moyens et non du haut de gamme a été plombée par le fait de partager la même monnaie que l'Allemagne et de ne plus pouvoir dévaluer. Rajoutons au passage les effets des lois Hartz en Allemagne qui arrivent entre 2003-2005 et qui vont faire baisser les salaires en Allemagne de façon importante. Ce choc de monnaie surévaluée plus une déflation salariale en Allemagne vont être fatals à l'industrie française particulièrement à l'industrie automobile.

 

Macron a surtout creusé les déficit commerciaux du pays.

 

Évidemment dernièrement la question du prix de l'énergie s'est rajoutée au désastre de l'eurolibéralisme puisque la France qui avait un petit avantage comparatif grâce au prix de l'électricité l'a perdu. Grâce à l'absurdité du marché européen de l'énergie, les Français se retrouvent avec le prix électrique le plus élevé d'Europe. Et évidemment, l'industrie qui est fortement consommatrice d'électricité se retrouve en difficulté, on se souvient tous de la mise en chômage technique du célèbre fabricant de verre Duralex en fin d'année dernière. Si le prix de l'électricité est un désastre pour la population, pour l'industrie et beaucoup d'activités de services, ce fut une calamité qui a fortement participé à l'inflation générale et à la destruction d'activité de production. Mais que fait le gouvernement pour résoudre ce problème de fond ? Absolument rien à part distribuer des chèques payés par l'endettement des Français. Un endettement de plus en plus lourd et qui pourrait pousser le pays à la cessation de paiement dans les années qui viennent. Il y avait pourtant une réponse simple à donner en sortant du marché européen de l'énergie pour commencer. Puis en refaisant d'EDF le fournisseur d'électricité en reconnaissant que l'ouverture du marché de l'électricité à la concurrence était une bêtise. Il s'agit là de la meilleure aide à court terme que l'on pourrait faire à nos industriels. Leur fournir de l'électricité à un prix raisonnable et plus bas qu'en Allemagne et ailleurs en Europe grâce au nucléaire. Et cela ne coûterait pas grand-chose au contribuable en plus. Mais ne comptons pas sur Macron pour chercher la meilleure solution pour le pays. Ce n'est pas son but qui n'est que de faire du marketing et rien d'autre. Et surtout il ne veut en aucun cas rompre avec les dogmes européens pourtant largement catastrophiques pour le pays.

 

Une politique industrielle doit être cohérente et profonde.

 

L'effet Macron sur l'industrie est strictement invisible

 

On ne fait pas de politique industrielle uniquement en signant des chèques, et parfois de très gros chèques. L'information reste à confirmer, mais la fameuse usine de batterie qui devrait ouvrir à Dunkerque n'est pas venue s'installer en France parce que c'est bien d'y faire des batteries. L'état et les collectivités auraient déboursé entre 1 et 1.5 milliards d'euros d'aide directe! Ce qui reviendrait à injecter entre 300 000 et 500 000 euros par emploi créé. Est-ce que ce type de dépense est rationnelle ? D'autant que la France ne développe pas par ailleurs toute l'infrastructure technique visant à produire l'entièreté de cette production de batterie. Ce sera simplement une usine d'assemblage de composants pour la plupart importés. Qui sait, cela pourrait même aggraver notre déficit commercial en faisant le bilan final. D'autant que même nos importations passent par des ports marchands situés à l'étranger. Le minimum avant de parler de réindustrialisation serait quand même déjà de rapatrier sur notre sol les activités portuaires nécessaire au pays. Ce ne sont pas les villes portuaires qui manquent pourtant. À l'heure actuelle le premier port français est Anvers... Quant aux usines étrangères subventionnées, on en a déjà eu en France et l'expérience fut plutôt négative. Généralement, les entreprises ferment une fois les subventions touchées pour aller dans les endroits réellement compétitifs pour elles. Mais le plan communication de Macron aura fonctionné, il est le président de la réindustrialisation même si tous les chiffres disent le contraire. La France n'ayant même pas retrouvé son niveau de production d'avant la crise COVID. Pour donner un ordre de grandeur, la France a un niveau de production industrielle qui est aujourd'hui inférieur de 10% à celui de l'an 2000...

 

Il ne faut pas aller plus loin l'explication pour notre balance commerciale super-déficitaire. Nous sortons de vingt ans de stagnation industrielle puis d'un recul net à partir de 2007-2008. Et cela ne risque pas de changer si nous ne nous attaquons pas aux sources de la désindustrialisation. Et les raisons ne sont pas microéconomiques comme a pu le dire, monsieur Loïk Le Floch-Prigent dernièrement. Certes, les réglementations peuvent être contraignantes et l'administration française pourrait certainement s'améliorer sur ce plan. Mais le vrai problème est simplement la rentabilité. Ce n'est simplement pas rentable de produire en France si par ailleurs vous laissez les frontières ouvertes. Il faut réduire les coûts de production en France et renchérir dans le même temps le coût des importations. Sans un effort minimal en ce sens, il n'y a simplement aucune chance pour que le pays se réindustrialise. Et je le répète même si les gens ont envie de créer de l'industrie et des activités de productions même dans l'agriculture, l'ouverture des frontières commerciales plus l'euro rendent ces aventures simplement impossibles. Ce n'est pas par hasard si l'industrie est partie progressivement depuis 1974, c'est la conséquence des politiques macroéconomiques de dérégulation commerciale et financière. Les Français ne sont pas devenus subitement anti-industrie au milieu des années 70. Les hommes politiques ont décidé à l'époque qu'il fallait ouvrir les frontières pour casser les salaires et l'inflation comme le disait la doxa néolibérale. Tout ce que nous subissons aujourd’hui est la conséquence logique de ces choix.

 

Je vois aujourd'hui dans le débat public une absence totale sur la question des politiques macroéconomiques. C'est le signe que l'idéologie libérale a totalement envahi les esprits puisque toutes les solutions imaginées tournent toujours autour de solution microéconomique comme le discours de monsieur Loïk Le Floch-Prigent dans son interview. Mais c'est avant tout du point de vue macroéconomique qu'il faut agir. La France doit retrouver sa monnaie et dévaluer par rapport à l'Allemagne et a ses satellites. Il nous faut renchérir le coût des importations. Par ailleurs, nous devons mettre en place un nouveau tarif extérieur national puisque l'Europe est engoncée dans le libre-échange doctrinal. On pourrait par exemple mettre en place immédiatement un tarif de 5% sur tous les produits importés puis faire grimper progressivement le tarif sur plusieurs années à 30%. Le but étant d'envoyer un message clair aux industriels, importer des produits coûtera de plus en plus cher et produire sur place pourrait être avantageux à terme. L'objectif étant de limiter l'effet inflationniste de la hausse de la taxation des importations en laissant le temps aux producteurs de relocaliser les activités. On le voit, il s'agit d'une politique qui s'inscrit dans le temps, on ne peut pas transformer une économie instantanément par la magie de la communication et du carnet de chèques. On doit également imaginer des protections plus immédiates sur les secteurs où nous avons encore des capacités de production, mais où celles-ci déclinent en mettant de forts droits de douane ou en mettant des quotas. L'avantage des quotas étant qu'ils sont insensibles aux variations monétaires. C'est d'ailleurs ce type de protectionnisme que préférait notre ancien prix Nobel d'économie Maurice Allais.

 

Une fois qu'on aura admis qu'un protectionnisme est nécessaire, on pourra parler de subvention et de politique industrielle à proprement parler. Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs. C'est là d'ailleurs qu'il faut remettre une vraie politique de stratégie industrielle. Comme je l'ai dit, il ne faut pas simplement fabriquer les batteries, mais être capable de produire tous les composants qui rentrent dans leurs fabrications. La France fortement désindustrialisée devrait peut-être commencer par des industries moins tape-à-l’œil, mais plus accessibles comme le textile et l'industrie de la sidérurgie. Il n'y a pas que dans l'industrie de point qu'on croule sous les déficits commerciaux. Il faudra de toute manière plusieurs décennies pour réindustrialiser, c'est le boulot d'une génération. Et il faut bien comprendre que nous ne serons plus jamais le top au niveau technique, scientifique et industriel. Le centre du monde est désormais l'Asie. Mais nous devons avons avant tout chercher à pourvoir à nos propres besoins dans les limites du raisonnable de façon à maintenir un certain niveau de vie. Faisons une réindustrialisation modeste et rationnelle et non une course à l’hybris pour laquelle nous perdrons inévitablement. Et surtout arrêtons de parler et de faire de la com pour les médias et agissons réellement.

 

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commentaires

D
La situation de l'industrie est telle qu'on pourrait même envisager un plan façon Urss dans certains cas qui engagent la securité de la population et ou le protectionnisme seul demandrait trop de temps. Par exemple l'industrie du medicament.<br /> Pour le reste, il faudrait bien definir le marché interieur que l'on veut pour appliquer du protectionnisme.<br /> Trop de protectionnisme appauvrit l'offre, car sans conccurence etrangère nul besoin d'ameliorer les produits ou faire baisser leur prix. La Russie toute juste sortie de l'Urss ne pouvait pas conccurrencer les industries étrangeres tant elle a été fermée à la conccurence internationale. Peut être aurait elle pu sauver ses industries diversifiées en ouvrant très progressivement ses barrieres douanieres ? <br /> On pourrait ajuster le protectionnisme sur un principe de marché le plus varié possible tant qu'elle laisse une chance de survie à l'industrie locale.<br /> Si le principe est assez clair les taxes qui en reulteront seront plus facilement accepté par le public et plus difficile à denigrer par les mondialistes irresponsables.
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Y
L'important pour l'instant c'est surtout d'arriver à rééquilibrer la balance commerciale, ça devient urgent. On peut s'occuper des détails ensuite. Du reste le protectionnisme ne ferme pas totalement les frontières. La régulation des capitaux non plus. On peut très bien avoir des entreprises étrangères qui rentrent en concurrence avec les producteurs français sur notre sol. Si demain on met des taxes sur les importations de voiture Toyota sera moins embêté que Renault car elle a une usine à Valencienne alors que Renault a beaucoup délocalisé.