Vous vous souvenez qu'il y a quelques mois nous avions parlé de l'exploitation des gaz de schiste dans cet article. J'étais déjà sceptique quant à l'intérêt qu'il y avait à se lancer dans cette aventure. Notamment pour al bonne et simple raison que ces exploitations n'auraient qu'une durée limitée et qu'il faudrait tôt ou tard apprendre faire de l'énergie avec autre chose que des hydrocarbures. D'ailleurs, ces matières nobles et rares ne devraient être utilisées que dans des productions où elles sont indispensables et pour des activités plus nobles que le chauffage ou comme carburant. Et bien, il se trouve que le New York Times vient de donner un coup de matraque supplémentaire à cette technologie. En effet, il s'avère d'après les multiples ingénieurs indépendants qui ont étudié le sujet que le gaz de schiste est présent dans des quantités largement inférieures aux prévisions d'origine aux USA. Pour le NYT le gaz de schiste et son succès financier sont une nouvelle bulle prête à éclater, rien que çà. D'après l'un des spécialistes interrogés, les puits s'épuisent de moitié dès la première année, ce qui veut dire qu'il faut en creuser un autre après seulement un an d'exploitation ce qui change complètement le coût de production.
Ceux qui espéraient faire du gaz de schiste une alternative même momentanée au gaz classique ou au pétrole peuvent donc revoir leur copie. Cet article du NYT est un argument supplémentaire pour la non-exploitation de ces technologies en France. Car le jeu n'en vaut vraiment pas la chandelle comme on dit. Si ce n'est pour tous les petits escrocs qui espéraient pouvoir surfer sur la bulle. Après le nucléaire civil à fukushima, on peut dire que cette année 2011 n'est pas seulement violente pour nos économies, mais aussi pour le secteur de l'énergie. Le marché a d'ailleurs une fois encore prouvé sa capacité à s'autoaveugler. Puisque bon nombre d'investisseurs ont englouti des sommes faramineuses dans un secteur qui risque en grande partie de ne pas être rentable, surtout s'il faut changer les puits tous les ans.
Le marché seul çà ne fonctionne pas
Le fait est que le marché s'est emballé tout seul sur ces techniques ignorant les avertissements de spécialistes qui mettaient en doute la viabilité de la chose, et surtout de sa rentabilité économique. Comme à chaque fois les forces financières laissées à elle même ont perdu leur rationalité qui n'existe que dans la tête des économistes libéraux. Ceux qui faisaient les études devaient certainement avoir intérêt à montrer les données sous un jour avantageux. La privatisation totale de l'expertise scientifique aux USA a dû faire le reste. On a oublié les vertus du secteur public dès qu'il s'agit d'avoir un avis scientifique indépendant. Comme dans le cas de la crise des subprimes les juges étaient aussi les acteurs de sorte qu'un système de corruption croisée poussait chaque acteur à truquer les chiffres ou à créer des mécanismes pour les cacher. Et ce afin que les prix et les investissements montent sans arrêt. Jusqu'au jour où la réalité revient violemment en faisant s'effondrer le marché qui s'est avéré largement surestimé. À chaque fois c'est la même chose, mais personne ne veut revenir sur cette conception des choix d'investissement.
La rentabilité à court terme produite par l'excès d'investissement a produit ici des dégâts très importants à l'écosystème américain. Sans parler du fait que cet argent n'a finalement pas servi à grand-chose puisque ce gaz de schiste n'aura fait que retarder de quelques années la nécessaire sortie de l'énergie hydrocarbonée. Il est temps que les états reprennent la commande des opérations en matière énergétique, car le marché seul ne fera que produire bulle sur bulle dans des secteurs, sans mesurer vraiment si ce qu'il fait est bénéfique pour l'intérêt général. Il n'a jamais été plus urgent qu'aujourd'hui de faire appel à un état stratège visant des retours sur investissement à plus long terme. Je rappelle sur ce sujet de l'énergie que vous pouvez toujours consacrer ce texte sur le pétrole à micro algue ou encore celui-ci consacré à l'énergie de fission au thorium.